e-Mémoires de l'Académie Nationale de Chirurgie (ISSN 1634-0647)
Sommaire du numéro 2005, vol. 4 (1)
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Durant la dernière décade, des études ont été menées en vue de mieux comprendre le retentissement sur la qualité de vie du vieillissement de l’appareil uro-génital et de l’apparition d’une hypertrophie bénigne de la prostate. Une meilleure connaissance des désordres engendrés par ces deux évènements quasi inéluctables était devenue nécessaire pour deux raisons : d’une part le vieillissement rapidement progressif de la moyenne d’âge de la population, et d’autre part la mise sur le marché de traitements au long cours visant à traiter un nombre croissant de patients. Le développement d’une hypertrophie de prostate est induit par des modifications hormonales qui surviennent chez les quinquagénaires. Cette promotion hormonale induit en cascades des phénomènes touchant le stroma et le tissu glandulaire. 50% des hommes de 50 ans ont un début d’hypertrophie de prostate, pourcentage qui atteint 80% des hommes de 80 ans. L’étiopathogénie des troubles mictionnels et génitaux qui apparaissent dans cette tranche d’âge n’est jamais simple à comprendre, car parallèlement à l’hyperplasie bénigne de la prostate, se produit un vieillissement de l’appareil urinaire portant notamment sur le réservoir vésical. Le clinicien doit s’efforcer, afin de mieux cibler le choix thérapeutique, d’identifier la part respective des modifications uro-génitales dans la responsabilité des troubles urinaires qui motivent la consultation.
Ageing of the urogenital system and natural history of benign
prostatic hyperplasia.
During the last decade, studies were led to better understand the impact of the ageing of the urogenital system and of the occurrence of a benign prostatic hyperplasia on the quality of life. A better knowledge of the disorders engendered by these two almost inevitable events had become necessary for two reasons: on one hand the quick progression of the average age of the population, and on the other hand the launch on market of long course treatments aiming at treating an increasing number of patients. The development of benign prostatic hyperplasia is the result of hormonal modifications occurring in men in their fifties. These hormonal changes lead to a series of phenomena affecting the stroma and the glandular tissue. Fifty per cent of 50-year-old men start developing benign prostatic hyperplasia, increasing to 80% of 80-year-old men. The etiopathogeny of mictional and genital symptoms which appear in this age bracket is never simple to understand because the occurrence of benign prostatic hyperplasia is accompanied by an ageing of the urinary tract which affects the vesical reservoir in particular. In order to better target the therapeutic choice, the clinician has to identify as clearly as possible the role of urogenital modifications in causing the urinary symptoms which motivate the consultation.
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La prise en charge médicale de l’HBP est l’objet de profonds changements actuellement. Classiquement le traitement médical, représenté par trois familles, les extraits de plantes, les alphabloquants et les inhibiteurs de la 5 alpharéductase, était considéré comme uniquement symptomatique, comportant des risques d’altérations de la vie sexuelle et ne se concevait qu’en monothérapie. De nombreuses études cliniques récentes viennent modifier ces certitudes : le traitement médical loin d’être simplement symptomatique peut modifier l’histoire naturelle de la maladie, en réduisant notamment le risque de rétention aiguë, le traitement médical peut améliorer la vie sexuelle et enfin combiner deux traitements semble être supérieur à une monothérapie. Parallèlement la place des techniques instrumentales initialement proposées en alternatives au traitement chirurgical classique tend à être mieux définie. Les résultats avec un long recul de deux de ces techniques, la thermothérapie par micro-ondes ou par radiofréquences ont permis de confirmer leur efficacité mais les placent plutôt en alternative au traitement médical.
Medical treatment of benign prostatic hyperplasia and instrumental
alternatives
Clinical symptoms related to benign prostatic hyperplasia (BPH) combine obstructive and irritative symptoms. Obstructive symptoms, associating at different levels hesitancy, straining, weak flow and interrupted voiding, are related to the outflow obstruction due to the prostate itself through its mass and its tonus, while irritative symptoms, mainly diurnal and nocturnal frequency and urgency, are mostly due to detrusor abnormality, and to some extent to central nervous system disturbance. Prostatic outflow obstruction may be treated by alphablockers which reduce prostatic and bladder neck muscle tone, or by 5 alphareductase inhibitors which reduce glandular volume. Irritative symptoms may be treated by anti-muscarinic agents and at a lower degree by alphablockers. Plant extracts, which mechanism of action remains unclear, namely serenoa repens and pygeum africanum, are widely used in France. The place of instrumental alternatives remains to be determined but these instrumental treatments can now be regarded as possible alternatives to long life medical treatment rather than alternatives to a standard surgical treatment.
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Le traitement chirurgical est « l’étalon or » du traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate (HPB), de loin le plus efficace mais aussi le plus invasif. Il est indiqué en cas de complications (rétention, calcul de vessie, dilatation du haut appareil, infection ou hématurie répétée) ou de symptômes gênants résistant au traitement médical. Longtemps opposées, l’intervention sanglante par taille hypogastrique et la résection endoscopique ne sont en fait que deux variantes d’une même intervention. Le choix entre résection endoscopique et chirurgie ouverte est fonction du poids de la glande. Quelle que soit la technique, les résultats sont identiques (90% de score symptomatique et 80% de débit normaux à 2 ans) mais sont réputés plus durables après chirurgie ouverte (5% de réintervention à 20 ans pour la chirurgie ouverte contre 40% pour la résection) au prix d’une morbidité acceptable (2% de sténose de l’urètre, 1% d’incontinence urinaire) en dehors de l’éjaculation rétrograde quasi constante (80% à 2 ans) dont le patient doit être informé. En France, en sachant que les hommes de plus de 60 ans sont 6 millions et que la prévalence de l’HPB symptomatique est de 20%, 1 200 000 hommes présentent une HPB symptomatique. Seuls 58% d’entre eux reçoivent un traitement médical ou chirurgical. La place de la chirurgie a considérablement diminué depuis le début des années 1990 avec l’apparition de nouveaux traitements médicaux : en France, comme dans la plupart des pays européens, la diminution de la chirurgie est de 35% (100 000 /an en 1990 et 66 000 /an en 1997) ; aux Etats-Unis, la diminution est de 50% (300 000 /an en 1990 et 150 000 /an en 1995). La proportion de patients traités par chirurgie est de 9%. Le pourcentage de résection endoscopique est de 81%. Ce pourcentage de résection varie selon les pays : 97% aux Etats- Unis et 70% seulement au Japon. Avec le vieillissement de la population, qui devrait entraîner un doublement du nombre des sujets de plus de 60 ans d’ici 5 ans, la place de l’HPB dans les considérations médico-économiques de santé publique va augmenter de façon importante. Avec une prévalence de 20%, le risque pour un homme de 50 ans d’avoir un jour une intervention pour une HPB symptomatique pourrait atteindre 40%. Le traitement médical, moins cher au début, a un coût équivalent à celui de la chirurgie à partir de la 8ème année. Les économistes considèrent que retarder le plus possible l’intervention, qui coûte le plus cher, aboutit à minimiser les coûts. On voit ainsi les limites du rapprochement entre raisonnement économique et médical : ni la survenue de complications, ni l’inconfort prolongé par le retard de l’intervention ne sont pris en compte.
The present role of traditional surgery in the treatment of Benign
Prostatic Hyperplasia (BPH)
Surgical treatment is the “gold standard” for the treatment of BPH, it is by far the most effective but also the most invasive. This treatment is necessary when there are complications such as urinary retention, bladder stones, renal dilatation, infection or repeating hematuria or aggravated symptoms resistant to medical treatment. Although open surgery and the transurethral resection were for a long time mistakenly opposed, they are in fact two variants of the same intervention. The decision on which treatment the surgeon chooses depends on the weight of the gland. Whatever the method chosen, the results are identical (90% of symptom score and 80% of urinary flow are normal after two years) but open surgery has proven to be more effective in the long term, as only 5% of the patients who received it needed post-operation treatment, whereas 40% of those who had a resection did. The complications which result from these treatments are relatively minor: 2% experience urethral stenosis, 1% experience urinary incontinence, but 80% experience retrograde ejaculation, and this is something of which they must be informed. Of the 6 million men in France over the age of 60 approximately 1.2 million are known to have BPH symptoms, yet of this group only 58% of them have received medical or surgical treatment. When new medical treatments were introduced in 1990, the need for surgery dropped considerably, and here France’s figures are representative of Europe’s: surgical intervention is necessary only 35% of the time (100 000 / year in 1990 and 66 000 / year in 1997); in America, there has been a 50% drop (300 000 / year in 1990 as opposed to 150 000 / year in 1995). Only 9% of the patients received surgical treatment. Whereas 81% of the patients received transurethral resection; in America the figure is 97%, in Japan 70%. Demographics, however, are not on are side. In just 5 years there should be twice as many men over the age of 60 as there are today, which mean that the importance of BPH in medico-economic considerations is going to increase in a very dramatic fashion. With a 20% prevalence, for a 50-year-old man there is 40% chance that in the near future, he will need an operation for BPH. Medical treatment, at least less expensive in the beginning, has in fact the same cost as surgery by the 8th year. Economists therefore erroneously believe that opting for non-surgical treatment will necessarily minimize the costs. We see here the futility of weighing economic factors against medical necessity, as economists omit from their calculations not just the all-important question of the health risks that often arise from delaying surgery, but also the greater long term costs of the non-surgical treatment of BPH. In conclusion, it is my firm belief that surgery is not only in the best interests of the patient, but is also the more cost-effective method overall.
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Les patients de plus de 50 ans, qui consultent pour des troubles mictionnels, ont pour plus de la moitié d’entre eux une hypertrophie bénigne de la prostate. Or, pour 30% d’entre eux, l’hypertrophie de la prostate n’est pas la principale ou l’unique responsable de ces troubles. L’enrichissement de l’arsenal thérapeutique, qu’il soit médical, physique ou chirurgical, devrait théoriquement apporter des réponses ciblées. Actuellement, cela n’est pas le cas et ceci pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il n’est jamais facile d’établir, sauf en présence d’un tableau d’obstruction évidente aiguë ou chronique accompagnée éventuellement de complications, un rôle exact à chacune des modifications fréquemment rencontrées à cet âge, sur le bas appareil urinaire, voire sur le système nerveux central pour les patients plus âgés. Si bien que l’établissement d’un protocole thérapeutique passe souvent par des étapes allant du traitement le moins invasif (médical) au plus invasif (chirurgie classique), en passant éventuellement par des alternatives utilisant des moyens physiques (US, micro-ondes, laser, etc…). En conclusion, la stratégie de prise en charge d’une hyperplasie bénigne de la prostate ne peut se concevoir qu’avec le consentement éclairé du patient.
Strategy in the management of benign prostatic hyperplasia.
More than half of the patients over 50 years of age consulting for mictional symptoms have a benign prostatic hyperplasia. For 30% of them, benign prostatic hyperplasia is not the main or unique cause of these symptoms. The development of therapeutic means, whether medical, physical or surgical, should, in theory, bring precise answers. At present, it is not the case, due to several reasons. First of all, it is never easy to establish, except in the presence of an acute or a chronic evident obstruction possibly accompanied by complications, an exact role to each of the modifications on the low urinary tract frequently met at this age, even on the central nervous system for the older patients. Therefore the establishment of a therapeutic protocol often passes through stages, from the least invasive medical treatment to the most invasive classic surgery, and possibly through alternatives using physical means (US, microwaves, laser, etc.). In conclusion, management strategy of benign prostatic hyperplasia can be considered only with the patient’s informed consent.
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En France en 2002, l’activité de transplantation rénale à partir de donneur vivant représente 4,8 % des transplantations rénales : cette proportion est stable depuis 1975 malgré la pénurie d’organes prélevés chez des patients en mort encéphalique et l’augmentation régulière de l’âge de ces donneurs. Seules 50 % des 36 équipes de transplantation rénale pratiquent ce type d’activité et cinq groupes totalisent à eux seuls 55 % des 108 transplantations rénales réalisées à partir de donneurs vivants en 2002. Pourtant l’avantage pour les receveurs est actuellement bien reconnu, la durée de demi-vie des greffons étant de 12 ans pour les organes prélevés chez des patients en mort encéphalique, de 20 ans lorsque le donneur apparenté est HLA semi-identique et de 36 ans lorsqu’il est HLA identique. Dans notre pays, la limitation du recours au donneur vivant est essentiellement liée à un cadre législatif restreignant le prélèvement au couple donneur-receveur parents au premier degré et à la crainte de voir se développer chez le donneur des pathologies médicales ou chirurgicales obérant son avenir. Pourtant l’ensemble de la littérature médicale des quinze dernières années démontre de manière indiscutable, en dehors du risque péri opératoire chiffré à 0, 03 %, l’absence d’effet délétère à moyen et long terme du don d’un rein. Les discussions concernant la greffe rénale à partir de donneur vivant sont actuellement centrées sur le plan chirurgical, au débat comparant les avantages et inconvénients respectifs des prélèvements par voie incisionnelle ou coelioscopique et, sur le plan éthique, par les propositions d’élargissement du pool des donneurs actuellement soumises aux législateurs. Enfin, la revue de la littérature concernant l’avenir des donneurs met en évidence l’insuffisance du suivi : en effet, seuls 50 % des donneurs consultent régulièrement pour le suivi de leur rein unique.
Kidney transplantation from living donors : where do we
stand ?
In 2002, in France 4.8% of kidney transplants were harvested from living donors. Despite the penury of organs from brain death donors and the steady growth of the average age of donors, this percentage has remained stable since 1975. Only 50% of the 36 French kidney transplantation teams perform that kind of surgery, considering that 5 teams performed 55% of the 108 kidney transplantations from living donors performed in 2002. However, the benefit of such a surgery is now generally acknowledged for the recipient. Indeed, the estimation of graft half-lifetime is 12 years in case of organs from brain death donors, 20 years in case of organs from a semi-identical HLA relative, and 36 years in case of organs from an HLA identical sibling. In our country, transplantation performed from living donors has been limited mostly because of a very constraining legal procedure limiting transplantations to direct relatives, and because of the fear that donors may later develop medical or surgical pathologies with a risk of threatening their future health. However, all research papers and studies over the past fifteen years have demonstrated that apart from perioperative mortality (0,03%), there is neither mid-term nor long-term negative effect to donate a kidney. As far as kidney transplantation from living donors is concerned, the debates currently focus on the surgical issue of comparing the benefits and drawbacks of both incisional and coelioscopical surgery. The ethical debate focuses on the propositions made to the legal system to extend the pool of potential donors. The review of the research studies examining the future of donors emphasizes the global insufficiency of their follow-up, only 50% of them having a regular check up on their single kidney.
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Les plus récentes informations en provenance de l’Etablissement Français des Greffes (EFG) font apparaître que le problème du consentement au prélèvement d’un organe sur une personne en état de mort encéphalique en vue de sa greffe sur un malade, en bref, le don d’organe, se heurte désespérément dans notre pays à des blocages psychologiques, philosophiques, mais également matériels. Comment expliquer que perdure cette frilosité de nos concitoyens à l’égard de ce geste qui peut sauver une vie ? Le taux d’opposition au prélèvement chez les personnes en état de mort encéphalique demeure autour de 1 sur 3 (32%). En 2003, seulement à peine une personne sur deux en état de mort encéphalique récente a été prélevée. Les listes d’attente demeurent impressionnantes (6597), et le nombre de décès annuels (243) observé chez ces malades en attente de greffe, bien que stable, est inacceptable. Les comportements de plus en plus individualistes observés au sein de notre société, officialisés par la notion « d’autonomie de la personne » expliquent l’indifférence de beaucoup à ce qui devrait être perçu comme un problème prioritaire de santé publique. Mais encore la transplantation d’organe ne ferait-elle pas partie des soins dont l’efficacité est reconnue ? En fait, la question n’a jamais été posée en ces termes, pas plus qu’ont jamais été entreprises les évaluations rigoureuses en termes économique et de qualité de vie que le CCNE (Comité Consultatif National d’Ethique) réclame depuis 1988 dans son rapport intitulé « Aspects éthiques des choix collectifs en matière de santé ». Pourquoi la recherche d’une solution à la pénurie de dons d’organes demeure t-elle de la seule initiative des médecins et des associations de malades, puissamment relayés, il est vrai par l’EFG, mais pas pour autant plus écoutés des responsables politiques et de ceux qui répartissent les moyens ? Si l’on exclut toute idée de commercialisation des greffons, pour nous éthiquement inacceptable, diverses orientations techniques nouvelles tentent de compenser la pénurie de don d’organes prélevés sur des personnes en état de mort encéphalique : prélèvement sur donneur vivant, prélèvement sur « coeur non battant ». Elles soulèvent elles-mêmes de difficiles interrogations éthiques. En fait il n’y a pas de solution valable et durable sans un choix formel de notre société, un choix collectif déterminé, et la volonté correspondante des politiques de la faire accepter, voire de l’imposer. Une réforme de la Sécurité sociale incluant la notion du « panier de soins et services » eut été une bonne occasion d’y placer les transplantations d’organes, d’autant qu’il ne s’agissait pas d’un problème de coût mais seulement du choix préférentiel d’une thérapeutique validée basée sur la solidarité. Hélas, cette réforme espérée et trop longtemps attendue ne semble plus à l’ordre du jour.
Ethics and organ procurement.
Most recent information from the EFG (Etablissement Français des Greffes, French Transplant Organization) reveals that the issue related to the consent to an organ procurement from a person in a state of encephalic death in order to transplant it on a patient is desperately confronted to psychological, philosophical but also material barriers. How can we explain this persistent reluctance of our fellow citizens to an act which can save lives? Transplants from people in a state of encephalic death are still being opposed at a rate of one out of three (32%). In 2003, removal of an organ was done on barely one out of two people in a state of recent encephalic death. Waiting lists are impressive (6597), and the number of annual deaths (243) of patients waiting for transplants, even though stable, is unacceptable. Our society’s increasingly individualist behaviours, which are supported by the notion of “individual autonomy”, explain this widespread indifference to an issue that should be considered as a major public health priority. Is organ transplantation not yet acknowledged as efficient? In fact, this question has never been truly addressed, and since 1988, in a report named “Aspects éthiques des choix collectifs en matière de santé” (Ethical aspects of collective choices in health matters), the CCNE (National Consultative Bioethics Committee) has been requesting thorough evaluations, from an economic angle as well as in terms of quality of life, which have never been launched. Why are doctors and patients’ associations, although well supported by the EFG, the only ones to take initiative in finding a solution to the shortage of organ donations, and why are they not heard by politicians and by those who distribute means? If one excludes all possibility of commercialization of transplants, ethically unacceptable to us, several new technical orientations try to compensate the shortage of organ donations from people in a state of encephalic death: living donation, non-heart-beating donation. These possibilities themselves raise difficult ethical issues. In fact, without a formal choice of our society, a determined collective choice, and the politicians’ wish to have it accepted or even imposed, there are no valuable and durable solutions. A healthcare reform would have been a good opportunity to include organ transplantations, especially since the issue was not about the cost but rather about a preferential choice for a validated treatment based on solidarity. Unfortunately, this reform, which we have long been hoping for and expecting, does not seem to be the topic of the day anymore.
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Pour être en phase avec les citoyens, le droit devrait pouvoir réguler l’ordre social avec un temps d’avance, du moins en même temps que l’évolution des pratiques. Or, le droit est souvent en retard. Il régularise plutôt qu’il ne devance les moeurs. Les progrès des sciences et des techniques, sur le vivant particulièrement, sont si rapides, mais en même temps si difficilement maîtrisables, qu’il devient malaisé aux représentants de la Nation, de les intégrer pleinement à la loi. Ainsi sommes-nous contraints à des lois expérimentales ? Le cas des greffes à partir de donneurs vivants dans le cadre des lois dites de bioéthiques en est un vibrant exemple. Cette technique habituellement peu développée en France à la différence de certains pays nordiques est placée depuis quelques années sur la sellette. Elle trouve chez nombre de chirurgiens ses défenseurs en raison des meilleurs résultats obtenus sur les greffés en termes de taux de survie (programmation de l’opération, greffon sans ischémie, meilleure compatibilité, même si elle n’est qu’ « affective »,…). Elle apparaît ainsi comme l’alternative aux transplantations cadavériques qui ne permettraient pas de sauver suffisamment de vies au regard du nombre croissant de décès des patients en liste d’attente faute de greffons disponibles. Cependant la route est longue pour inverser la tendance, ne serait-ce que pour la compléter, d’autant que c’est du côté du donneur et non du receveur que se dressent tous les problèmes juridiques. Le droit, conscient des difficultés que fait naître cette procédure chirurgicale, s’interroge. Deux séries de questions se posent aux juristes : d’un côté, celle générale, théorique qui concerne avant tout la technique du prélèvement qu’elle soit pratiquée sur une personne en état de mort encéphalique ou sur une personne vivante. Il s’agit « des droits sur le corps humain » qui constituera notre première partie où nous traiterons les questions suivantes : Qui est propriétaire du corps humain, qui peut en disposer et quelles sont les limites qui autoriseraient à y porter atteinte ? De l’autre côté, celle spéciale, pratique qui porte uniquement sur le prélèvement à partir de donneurs vivants. Il s’agit « des devoirs à l’égard des donneurs » qui constituera notre seconde partie où nous traiterons les questions suivantes : quelle composition du cercle des donneurs potentiels, quelle protection autour du consentement du donneur et de la santé de ce dernier après le prélèvement.
Legal problems related to living donor transplantations
In order to be accepted by citizens, law should plan social order in advance, at least at the time when customs are changing. Nevertheless law is often behind the times. It is able to regulate habits rather than to anticipate them. Scientific and technical progress, especially when it is biological, is so fast, but so difficult to control, that it becomes uneasy for the legislator to fully integrate it into the law. So we are restricted to experimental laws! This is the case as far as living donor transplantations are concerned by bioethical laws. This technique, which is rarely developed in southern Europe, in contrast with some northern countries, is now being discussed. Many surgeons promote this technique for the excellent results in terms of the survival rate (the schedule of surgeries, transplants without ischemia, better compatibility - even if it is only “emotional”- and so on). Living transplantations appear as the alternative to cadaveric ones. These are not sufficient to save enough patients registered on the waiting lists from death due to the lack of available transplants. However the road will be long to reverse the common practise, even to complete it, especially because legal problems come from the donor’s side. Aware of the difficulties inherent to this new surgical process, legal authorities wonder what to do. Lawyers have to answer two types of questions: on the one hand, the general question concerns essentially whether to take the organs from dead bodies or from living ones theoretically. This is about “the rights on the human body”. Who is the owner of the human body whether alive or dead? Who is able to dispose of it and what are the limits of such authorisations? On the other hand, the specific and practical question concerns only the removal from living bodies. It is about “the duties which concern the donors”. Who belongs to the potential donors’ community? What kind of protection is there for the donor after organ removal?
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Le remplacement trachéal reste un problème non résolu et l’un des plus grands défis en chirurgie thoracique. En effet, plus de cinquante années de recherche n’ont pas permis de trouver un substitut idéal, synthétique ou biologique, à la trachée. Nous avons proposé une solution originale : l’utilisation d’un greffon aortique. Matériel et Méthodes : Cinquante et une brebis ont été opérées dans trois études successives : remplacement du segment antérieur de 2 anneaux trachéaux par un patch artériel autologue (n=10), remplacement segmentaire de la trachée par une autogreffe aortique (n=21) et par une allogreffe aortique fraîche (n=20). Une endoprothèse a été placée dans les remplacements étendus (n=41). L’évaluation post-opératoire a été clinique, fibroscopique et anatomopathologique après sacrifice des animaux avec une durée de suivi maximale allant jusqu’à 3 ans. Dans l’étude portant sur les allogreffes, un tissu aortique de bélier a été utilisé pour le remplacement d’un segment trachéal de brebis (n=6). La technique de PCR (détection du gène SRY du chromosome Y) a permis d’étudier l’origine des modifications tissulaires observées. Résultats : L’évolution post-opératoire a été simple dans 46 cas. Il n’y a pas eu de sténose en dehors de la première étude, de lâchage anastomotique ni de rupture du greffon. L’ablation de l’endoprothèse a été possible après 6 mois. L’étude anatomo-pathologique a montré une transformation progressive du greffon aortique en un tissu proche de celui de la trachée comportant un épithélium malpighien puis mucociliaire ou mixte et une néoformation de cartilage immature puis organisée en anneaux. La recherche du chromosome Y dans le cartilage néoformé a été négative. Discussion : Ce travail a montré une régénération trachéale à partir d’un greffon aortique. Les possibilités bien connues de réparation épithéliale à partir de la trachée native ont été confirmées. La régénération cartilagineuse, phénomène n’ayant jamais été rapporté avec les autres substituts, a été possible à partir de cellules du receveur issues de la trachée native ou de la circulation. Ces résultats ouvrent d’importantes perspectives dans la compréhension des mécanismes de régénération tissulaire et dans le domaine du remplacement trachéal chez l’homme.
Tracheal replacement using an aortic graft.
Tracheal replacement remains an unsolved problem and one of the main challenges in thoracic surgery. More than 50 years of research did not provide an ideal synthetic or biologic substitute. We proposed an original solution : the use of an aortic graft. Methods : Fifty-one sheep were operated in 3 successive studies : replacement of the anterior segment of two tracheal rings (n=10), tracheal replacement using an aortic autograft (n=21) or allograft (n=20). A tracheal stent was placed for extensive replacements (n=41). Postoperative evaluation included clinical, bronchoscopic and histologic examinations with a 3-year maximal follow-up. In the last study, an aortic allograft from male sheep was used for the tracheal replacement in 6 female sheep. The use of the PCR technique (detection of the SRY gene of the chromosome Y) allowed to analyze the origin of histologic transformations. Results : Postoperative course was uneventful in 46 animals. There was no stenosis except for animals of the first study, no anastomotic leakage, nor graft rupture. Removal of the stent was possible after 6 months. Histologic examinations showed a progressive transformation of the aortic graft into a tracheal tissue with epithelium and newly formed rings of cartilage. Chromosome Y was not found in newly formed cartilage. Comment : This work showed a tracheal regeneration from an aortic graft. The well-known possibilities of epithelial reparation from the native trachea have been confirmed. The regeneration of cartilage which has never been observed with other substitutes, was possible from recipient tracheal or circulating cells. These results offer major perspectives in the comprehension of tissue regenerative processes and in human tracheal replacement.
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Objectif : Evaluer un traitement hybride des anévrismes athéromateux et dissécants de l'aorte thoracique (AAT) qui englobent la crosse aortique (CA) chez des patients à haut risque (PHR), exclus d’une chirurgie conventionnelle. Matériel et Méthodes : Entre mai 1999 et avril 2004, nous avons traité 49 PHR, dont 7 femmes, pour des AAT à l'aide d'endoprothèses industrielles. L'âge moyen était de 69+/- 9 ans. Parmi eux et en raison d'un recrutement particulier, 14 patients (28.6%) ont été admis pour exclusion de la CA. Sept présentaient un anévrisme de l'aorte thoracique et 7 une dissection. Les vaisseaux supra-aortiques ont été transposés dans un premier temps. Nous avons effectué 7 transpositions de tous les vaisseaux supra-aortiques ("transpositions totales" réalisées par sternotomie médiane et pontage extraanatomique implanté sur l'aorte ascendante) et 7 transpositions du couple artériel carotide commune gauche et sous-clavière gauche ("hémi-transpositions" par cervicotomie). Dans un deuxième temps, la CA a été exclue par voie endovasculaire. Nous avons utilisé des endoprothèses Talent® chez 8 patients, Excluder® chez 3 patients et Zenith® sur 3. Résultats : Parmi ces 14 patients, 1 est décédé 2 jours après l'intervention endoluminale d'une défaillance générale succédant à une rupture de l'artère iliaque pendant la procédure. Suite à la transposition des vaisseaux supra-aortiques, 1 patient a présenté un accident vasculaire cérébral (AVC) mineur. L’étape endovasculaire a provoqué l’apparition de 2 AVC, dont l’aggravation de l’AVC mineur sus-cité, portant le taux d’AVC majeur/Décès post-opératoire à 21.4%. Enfin l’occlusion différée d’un pontage de la carotide primitive gauche a entraîné un AVC mineur retardé. Nous avons observé 2 fuites résiduelles péri prothétiques proximales de type 1 (14.3%) postopératoires dont une a évolué favorablement spontanément ; l'autre est surveillée. Sur un suivi moyen de 13.6+/-5.8mois (1-35 mois), 1 patient (7.1%) est décédé d'une pneumonie, dans un contexte d'insuffisance respiratoire chronique oxygéno-dépendante. Le taux d'exclusion des anévrismes était de 100% ; celui de thrombose des faux chenaux thoraciques, de 87,5%. Aucune complication liée à l'endoprothèse n'a été observée, en particulier aucun cas de fistule aorto-oesophagienne. Conclusion : La redistribution première des gros vaisseaux de la CA permet d'exclure cette dernière par voie endoluminale chez des PHR, offrant ainsi les avantages d'un traitement moins lourd. Cette technique a démontré ici sa faisabilité et offre des résultats à moyen terme très satisfaisants, mais une surveillance à long terme est nécessaire. Les centres chirurgicaux spécialisés possédant à la fois une expertise endovasculaire et chirurgicale offrent les conditions optimales de traitement pour ce type de pathologie.
Aortic arch exclusion for extended thoracic aortic aneurysms and dissections
Objectives: To evaluate a hybrid treatment of atheromatous and dissecting thoracic aortic aneurysms (TAA) involving the aortic arch in high risk patients (HRP), excluded from conventional aortic arch surgery. Methods: Between May 1999 and April 2004, we treated 49 HRP, of which 7 females, for TAA with industrial endoluminal stentgrafts. Mean age was 69+/-9 years old. Among them, and due to a special recruitment, 14 patients (28.6%) were admitted for endovascular exclusion of the aortic arch. Seven of them presented with thoracic aortic aneurysm, and 7 had a thoracic aortic dissection. Supra-aortic vessels were first transposed surgically. We performed 7 total arch transpositions (transposition of all great vessels, done through median sternotomy and bypass to the ascending aorta), and 7 hemi-arch transpositions (transposition of the left common carotid and sub-clavian arteries by cervicotomy). Secondly, we excluded the diseased aortic arch endovascularly. We used Talent® endografts in 8 patients, Excluder® in 3 and Zenith® in 3. Results: Amongst these 14 patients, 1 died 2 days after endografting from multi-organ failure after iliac rupture during endoluminal access. After hemi or total arch transposition, 1 patient presented a minor stroke. The endovascular step led to 2 strokes, including the worsening of the post-surgical minor stroke, leading to a postoperative stroke/death rate of 21.4%. The delayed occlusion of a left common carotid bypass at its origin caused a minor stroke. We observed 2 types: 1 residual endoleaks (14.3%) of which one thrombosed spontaneously; the other is under surveillance. During a mean follow-up of 13.6+/-5.8 months (1-35 months), 1 patient (7.1%) died from worsened respiratory failure at 3 months. The late aneurysm exclusion rate was 100%, and the late rate of dissections thoracic false channel thrombosis was 87,5%. We observed no complication related to the endografts, especially no case of aorto-esophageal fistula. Conclusions: Preliminary transposition of supra-aortic vessels allows the endovascular exclusion of the aortic arch in HRP, thus offering the advantages of a lighter treatment. Aortic endografting after surgical transposition proved to be feasible and to offer good mid-term results, although long-term surveillance is needed. Specialized surgical centers with both endovascular & surgical expertise offer the best management possibilities for these patients.
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Les auteurs rapportent une observation d'anévrysme artériel sous-clavier opéré et guéri chez une jeune fille atteinte de syndrome de Turner et font une revue générale des atteintes cardio-vasculaires observées au cours de ce syndrome. Des anomalies cardio-vasculaires existent chez 50 % environ des sujets atteints de syndrome de Turner. Il s'agit soit de malformations congénitales (bicuspidie aortique, coarctation de l'aorte, communications intra-cardiaques, atteintes valvulaires) soit d'anomalies acquises (hypertension artérielle, dilatation de l'aorte, dissection aortique). Les anévrysmes artériels périphériques semblent, par contre, exceptionnels puisqu'une seule observation d'anévrysme sous-clavier comparable à la nôtre a été publiée jusqu'à présent. Le risque potentiel de rupture justifie le traitement chirurgical de ce type de lésion. La fréquence des anomalies cardiovasculaires au cours du syndrome de Turner justifie un bilan cardiaque complet et une surveillance prolongée chez ces patientes.
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La discussion à propos de la transplantation rénale à partir de donneurs vivants s’est largement centrée au cours des dernières années autour du devenir des donneurs. Si la réduction néphronique, contrairement aux travaux publiés en 1983, ne semble pas poser à moyen et long terme de problème clinique réel, la survenue d’affections chirurgicales sur un rein restant après néphrectomie pour don d’organe a fait l’objet de peu de publications. Les auteurs rapportent un cas de découverte, trente ans après néphrectomie gauche pour greffe intra-familiale, d’une tumeur rénale du rein droit unique restant. Un traitement chirurgical conservateur par tumorectomie a permis avec six ans de recul d’obtenir un excellent résultat avec le maintien d’une fonction rénale normale. A propos de cette observation semble-t-il unique, la revue de la littérature montre, outre sa nature exceptionnelle, l’absence de caractère délétère de la création d’un rein unique, sous réserve cependant de la surveillance régulière par échographie de celui-ci.
Should the risk of renal tumor be considered in related living
donors? A case of renal oncocytoma thirty years after living
donation.
Discussion about kidney transplantation from living donors has recently focused on the future of donors. It seems now proven that unilateral nephrectomy has no deleterious effect on kidney function even after a very long follow-up. Very few papers are dealing with occurrence of surgical diseases on a solitary kidney after nephrectomy for living donation. The authors report on the case of a kidney tumor on the remaining kidney thirty years after living donation. Nephron sparing surgery with a follow-up of 6 years has given excellent result with a normal renal function. As far as we know there is no similar case reported. This case emphasizes the role of a careful follow-up of patients having had a nephrectomy for living donation and the good results obtained by nephron sparing surgery in this very particular case.
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