e-Mémoires de l'Académie Nationale de Chirurgie (ISSN 1634-0647)
Sommaire du numéro 2011, vol. 10 (4)
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Le lymphœdème est dû à une accumulation de liquide extracellulaire chargé de macromolécules qui sont filtrées par l’endothélium lymphatique. Si les collecteurs lymphatiques sont obstrués en amont, ou sont en nombre insuffisant, ou que les pompes que sont les ganglions manquent, le liquide stagne et se surinfecte. Le cercle vicieux s’installe, conduisant à des déformations majeures des membres. En 1790, Mascagni injecte du mercure dans les lymphatiques profonds : c’est le début de leur étude anatomique. En 1937 s’ouvre l’ère de la lymphographie. En 1932, Rouvière décrit l’ensemble du système lymphatique. Quant à la chirurgie lymphatique, elle débute avec Hansley en 1908. En 1945, Servel identifie les collecteurs lymphatiques. En 1969, Yamoma réalise les premières anastomoses lymphoveineuses en cas de lymphœdème. En 1981, Baumeister propose de ponter l’obstacle lymphatique par apposition d’un greffon lymphatique. En 1986, Becker réalise des lambeaux libres inguinaux revascularisés par microchirurgie, et contenant des ganglions lymphatiques. Ces lambeaux peuvent être utilisés en indication dans les traitements de lymphœdèmes congénitaux des membres (2004), grâce à la néo genèse lymphatique de la graisse péri ganglionnaire et à l’action immunitaire des ganglions. La kinésithérapie conforte la logique du traitement. Cette chirurgie lymphatique retrouve un énorme intérêt, et connaît un immense avènement grâce aux nouveaux développements technologiques.
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Nos travaux ont débuté par une étude bibliographique portant sur le rôle des HDAC dans la carcinogenèse et l’utilisation des inhibiteurs en thérapeutique. L’implication des histones désacétylases (HDAC) dans le cancer du pancréas n’avait pas encore été explorée. Le but de la première partie du travail a été d’évaluer le niveau d’expression des histones désacétylases dans 4 lignées cellulaires de cancer du pancréas et de déterminer leur niveau de sensibilité à différents inhibiteurs d’histones désacétylases (HDIs).Les niveaux d’expression des gènes HDACs et le niveau de synthèse des protéines HDACs semble être comparable. Les inhibiteurs des HDACs exercent une activité antiproliférative en induisant une mort cellulaire par apoptose. Nos résultats suggèrent que la sensibilité des cellules aux inhibiteurs n’est pas en relation avec le niveau d’expression des HDACs. La deuxième partie du travail a porté sur l’évaluation du niveau d’expression des gènes codant pour des membres de différentes classes de HDAC dans les tissus pancréatiques prélevés sur des pièces opératoires. L’extraction d’ARN a été réalisée sur 11 adénocarcinomes du pancréas (AP) de différents stade et un pancréas normal obtenu lors d’un prélèvement d’organe. L’analyse par Western blot de la réactivité montre une forte immunoréactivité des anticorps anti-HDAC7 dans près de 81% des adénocarcinomes comparativement aux tumeurs bénignes (CS, TIPMP, PC) et pancréas normal. Cette forte synthèse d’HDAC7 est corroborée par les résultats de la PCR quantitative. L’étude immunohistochimique sur coupe d’adénocarcinome pancréatique confirme ce résultat. Conclusion: Ces observations sont en faveur de l’expression différentielle du gène HDAC7 dans le cancer du pancréas et suggèrent que HDAC7 pourrait constituer un marqueur potentiel.
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Quand un patient atteint d’une maladie grave et évolutive prend conscience qu’il ne guérira pas, et quand il est capable d’en parler, il nous dit le plus souvent : « Ce que je redoute le plus n’est pas de mourir, mais de souffrir. Je ne veux pas souffrir. » Aujourd’hui, la prise en charge de la douleur de fin de vie pose rarement un problème technique. Peut-on dire pour autant que nos patients meurent sans douleur ? Il existe deux grands freins à ce soulagement. Entendre la douleur du patient demande à un médecin qu’il soit à l’écoute de la détresse de l’homme et pas seulement guidé par l’évolution de la pathologie. Mais plus difficile encore est la compréhension du désir du patient d’être soulagé. Maitriser sa douleur au risque d’être parfois submergé, contrôler son traitement antalgique, permet peut-être d’identifier un ennemi et de mener un combat dont l’issue ne serait plus, alors, forcément connue d’avance…
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Les méningiomes, représentant environ 20% des tumeurs intracrâniennes, sont de nature histologique bénigne ; se développant en dehors du tissu cérébral, ils permettent généralement une exérèse totale, assurant alors une guérison définitive. Certes des complications post-opératoires peuvent parfois être notées (hématomes intra cavitaires, infarctus cérébral d’origine veineuse) responsables de déficit neurologique plus ou moins durable. La mortalité moyenne globale post chirurgicale est de l’ordre de 5 %, mais varie notablement en fonction du terrain et surtout de la localisation. Il est des tumeurs où l’ablation totale peut être envisagée sans poser de problèmes majeurs : c’est le cas des méningiomes de la convexité, de ceux insérés sur la faux ou les parois du sinus longitudinal supérieur dans sa partie antérieure et de certaines localisations basales (olfacto-jugales, arête sphénoidale moyenne et externe. Un deuxième groupe est représenté par des lésions où l’exérèse complète est difficile : ce sont celles situées au niveau de la partie médiane de la base, en rapport avec l’hexagone de Willis et de ses branches de division (axe carotido-sylvien, bifurcation du tronc basilaire). L’englobement des axes artériels, parfois sans plan arachnoïdien de séparation, peut amener à laisser en place une mince pellicule tumorale, nécessitant une surveillance régulière ultérieure. Il est enfin des cas où une attitude chirurgicale peut ne pas s’imposer d’emblée : c’est d’abord celui des méningiomes asymptomatiques ou de certaines localisations parfaitement encloses (sinus caverneux). Chez le sujet âgé (plus de 70 ans), l’indication doit être réservée aux tumeurs s’accompagnant d’une symptomatologie clinique franche ou d’un important effet de masse visible radiologiquement. La place de la radiothérapie ne doit pas être sous estimée soit dans le cadre d’une reprise évolutive non opérable ou d’une rare transformation anaplasique.
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Pendant la désastreuse période des « Khmers Rouges » (1975 – 1979), le système de santé a subi les mêmes ravages que les autres institutions du pays. En 1993, un protocole d’accord a été signé avec le Gouvernement de la République Française. Le projet consistait en la création d’un complexe hospitalo-universitaire visant à : - Réorganiser les filières de formation Santé, - Réhabiliter l’Hôpital Calmette, - Reconstruire l’institut Pasteur. Une convention d’objectif entre l’Université des Sciences de la Santé de Phnom Penh et l’Université Claude Bernard Lyon I a été signée en juin 1997. Celle-ci est régulièrement renouvelée depuis. Le Ministère des Affaires Etrangères, puis à partir de 2002, en partenariat, la Région Rhône-Alpes (fonds MIRA), ont assuré le financement de cette opération. L’enseignement de la Chirurgie correspond au 3ème cycle des études médicales. Il est actuellement étalé sur 4 ans. Des missions d’enseignement sont organisées (au rythme de 4 à 5 par an) assurées essentiellement par des Professeurs des Universités de la Région Rhône-Alpes, en association avec des enseignants cambodgiens. L’enseignement est fait en français. Pendant cette période, les futurs chirurgiens effectuent des stages dans les hôpitaux agréés de la capitale. A l’issue de cette formation, les étudiants sélectionnés (niveau de connaissances et de pratique, contrôle continu, niveau de Français B2) peuvent effectuer un stage hospitalier (FFI) dans un CHU français. A Lyon, les Hospices Civils se sont fortement investis dans ce programme. La plupart des étudiants soutiennent, à leur retour au Cambodge, une thèse rédigée en français et reçoivent à la suite leur Diplôme de Chirurgie. Ils sont ensuite affectés dans les différents services de chirurgie de la Capitale ou des Provinces. Actuellement, a commencé le cursus de la 12ème promotion. Près de 80 chirurgiens ont été diplômés et tous sont retournés dans leur pays natal. Cet enseignement « à la Française » reposant sur des échanges permanents et incessants avec les membres de la communauté des chirurgiens francophones, a permis de combler « le trou humain » et de promouvoir dans ce lointain pays de l’Asie du Sud-Est, très attaché à la France, les techniques et la technologie françaises. La dernière étape sera franchie lorsqu’un corps de professeurs cambodgiens, issu de cet enseignement, aura pris ses fonctions; ce qui ne saurait tarder. L’objectif n’était pas de « se substituer » aux responsables cambodgiens, mais « de former les formateurs » qui assureront la pérennité de la Coopération Chirurgicale Franco-Cambodgienne, dans un esprit d’amitié qui ne s’est jamais éteint, malgré les multiples turbulences traversées par le Cambodge.
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Résultats à long terme du remplacement trachéal par allogreffe aortique pour carcinome localement avancé.
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WURTZ A, PORTE H, CONTI M, HYSI I, DUSSON C, DESBORDES J, LEROY B, COPIN MC, RAMON P (Lille) Présenté par J.P. VILLEMOT
Séance du mercredi 25 mai 2011
(SECTION INTERVENTIONNELLE)
Publié dans le numéro 2011, vol. 10 (4), 021-027
| DOI:10.14607/emem.2011.4.021 |
Résumé/Abstract
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Objectif. Evaluer les résultats anatomiques et oncologiques du remplacement trachéal (RT) par allogreffe aortique (AA) pour carcinome localement avancé. Méthodes. De Mars 2005 à Octobre 2007, 6 patients âgés de 17 à 52 ans présentant un carcinome muco-epidermoïde (n=1) ou adenoïde kystique (n=5) trachéal étendu, ont été opérés, sans immunosuppresseur, d’un RT extensif par AA étayée par une endoprothèse en silicone, avec enveloppement par un lambeau de grand pectoral, et un lambeau additionnel thymo-péricardique, chez les 2 derniers patients. Résultats. Les greffons se sont transformés en un conduit vascularisé, bordé d’un épithélium de type respiratoire. Cependant, les 4 premiers patients ont présenté une fistule œsophagienne silencieuse (n=3) ou médiastinale (n=1), nécessitant une réintervention (n=3) à 6, 12 et 24 mois. Les 2 derniers, avec lambeau additionnel, ont eu des suites simples. A long terme, les AAs étaient le siège d’une rétraction évolutive, sans évidence d’anneaux cartilagineux, comme observés chez certains modèles animaux. De ce fait, aucun patient n’était sevré définitivement d’endoprothèse. Néanmoins, le RT assurait chez tous les patients un contrôle local de la maladie et, avec un suivi moyen de 48 mois, 4 patients étaient en vie, dont 3 en rémission complète et exerçant une activité professionnelle à temps complet. Conclusion. A notre connaissance, aucun autre substitut que l’AA n’a autorisé la réalisation de tels RT extensifs pour tumeur, sans mortalité postopératoire. Afin d’éviter les contraintes d’un stenting prolongé, nous étudions chez l’animal, un modèle construit à partir d’anneaux trachéaux allogéniques et d’une AA revascularisés par enveloppement fascial, au profil biomécanique qui devrait être proche d’une trachée normale.
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Introduction : L’Hôpital Médico-Chirurgical (HMC), construit sur le Kabul International Airport (KAIA) par l’OTAN, a été mis en service en Juillet 2009. Le leadership de cet HMC a été confié à la France dans le cadre d’une force multi-nationale avec pour mission prioritaire le soutien médical aux forces de la coalition (International Security Assistance Force = ISAF) et aux forces militaires afghanes (Afghan National Army = ANA, Afghan National Police = ANP). Les spécialités chirurgicales dispensées à l’HMC sont la chirurgie viscérale, l’orthopédie, la neurochirurgie et l’ophtalmologie. Objectifs du travail : Evaluer qualitativement et quantitativement l’activité des chirurgiens viscéralistes militaires en mission à l’HMC de KAIA depuis l’ouverture de l’hôpital. Matériels et Méthodes : Sur une période de 18 mois (Juillet 2009 à Décembre 2010), nous avons analysé de façon rétrospective l’activité réalisée par les chirurgiens viscéralistes au sein de l’activité chirurgicale globale réalisée sur l’HMC. Les patients pris en charge étaient soit des militaires de l’ISAF (Français et autres nationalités), soit des militaires Afghans (ANA et ANP), soit des civils non Afghans (ambassades, ONG) ou soit des civils Afghans (Aide Médicale aux Populations = AMP). L’activité chirurgicale des chirurgiens viscéralistes a été subdivisée en « blessés de guerre », « urgences traumatiques non de guerre », « urgences non traumatiques » et « chirurgie réglée ». Résultats : Sur les 18 premiers mois d’activité de l’HMC, parmi un total de 971 patients opérés réalisant 1510 procédures, 261 patients ont été opérés par les chirurgiens viscéralistes (26,9%) réalisant 438 procédures (29%). Parmi les 261 patients pris en charge, il y avait 30,7% de militaires ISAF (n=80) parmi lesquels 58,8% de militaires français (n=47), 8,4% de militaires afghans (n=22), 53,6% de civils afghans (n=140) et 7,3% de civils d’autres nationalités (n=19). Les hommes représentaient 78,2% des patients pris en charge (n=204), les femmes 12,3% (n=32) et les enfants 9,6% (n=25). Les circonstances de prise en charge étaient dans 33,3% des cas des blessés de guerre (n=87), dans 7,7% des cas des urgences traumatiques non de guerre (n=20), dans 30,7% des cas des urgences non traumatiques (n=80) et dans 28,4% des cas de la chirurgie réglée (n=74). Les blessés de guerre étaient des militaires de l’ISAF dans 33,3% des cas (n=29), des militaires afghans dans 19,5% des cas (n=17) et des civils afghans dans 44,8% des cas (n=39). La nature des agents vulnérants était des éclats dans 50% des cas (n=43) et des balles dans 43,7% des cas (n=38). Les lésions rencontrées étaient abdominales dans 48,3% des cas (n=42), thoraciques dans 18,4% des cas (n=16), vasculaires dans 11,5% des cas (n=10), des parties molles dans 19,5% des cas (n=17) et urologiques dans 2,3% des cas (n=2). Dans 56,3% des cas de blessures de guerre, il s’agissait de lésions multiples (n=49). Les urgences traumatiques non de guerre (dans 84,2% des cas au profit des civils afghans) étaient abdominales dans 25% des cas (n=5), thoraciques dans 25% des cas (n=5), vasculaires dans 10% des cas (n=2) et des parties molles dans 35% des cas (n=7). Les urgences non traumatiques (dans 75% des cas au profit des militaires de l’ISAF et des civils non afghans) étaient dominées par les urgences infectieuses : digestives dans 43,8% des cas (n=35), des parties molles dans 31,3% des cas (n=25) et de la marge anale dans 21,3% des cas (n=17). La chirurgie réglée (au profit des civils afghans dans 89,2% des cas) était dominée par la pathologie lithiasique vésiculaire (18,9% des cas), la pathologie herniaire (39,2% des cas) et la pathologie thyroïdienne (9,5% des cas). Conclusion : Sur les 18 premiers mois d’activité à l’HMC de KAIA, l’activité des chirurgiens viscéralistes représente presque un tiers de l’activité chirurgicale globale (29%), répartie en 40% de blessés de guerre et urgences traumatiques, 30% d’urgences non traumatiques et 30% d’AMP. Pour les blessés de guerre et urgences traumatiques, il s’agit dans la moitié des cas de lésions abdominales (43,9%), mais dans près d’un tiers des cas il s’agit de lésions thoraciques ou vasculaires (30,8%). Cette dernière donnée reflète la nécessaire polyvalence, en termes de gestions des urgences, des chirurgiens digestifs envoyés à l’HMC de KAIA.
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La pertinence clinique de ce concept d’organe auto-construit est illustrée par deux chiffres : en France, on dénombre chaque année environ 10.000 nouveaux cas d’insuffisance cardiaque grave, c'est-à-dire réfractaire aux traitements médicamenteux actuels alors que le nombre de transplantations cardiaques oscille aux environ de 350-400 sans espoir réaliste de le voir augmenter. Cette discordance justifie la recherche de nouvelles options thérapeutiques. Le cœur artificiel total reste encore avant tout une solution d’attente avant la transplantation et l’implantation de dispositifs définitifs, sans être une chimère, continue de poser de sérieux problèmes techniques (source d’énergie, matériaux, ergonomie) sans même évoquer les conséquences économiques. La xéno-transplantation ne progresse guère en raison des défis immunologiques non résolus malgré des années de travaux expérimentaux et le poids croissant des contraintes sécuritaires risque de rendre les autorités réglementaires encore plus méfiantes à l’égard du risque d’épizootie. La thérapie génique est encore balbutiante dans ce domaine et la complexité des mécanismes neuro-hormonaux impliqués dans l’insuffisance cardiaque ne se prête pas forcément bien à une approche dont les succès, à ce jour, répondent avant tout à des maladies monogéniques. La transplantation de cellules souches aura sans doute sa place, mais dans des formes intermédiaires, c'est-à-dire chez des patients qui conservent encore un capital suffisant de cellules contractiles. La recherche dans ce domaine a néanmoins eu l’intérêt de mettre en lumière le rôle capital joué par les structures de soutien dans la survie, la prolifération et le différenciation des cellules greffées, ouvrant ainsi la voie à une ingéniérie tissulaire combinant cellules et matrices qui est à la base du concept d’organe auto-construit. Sur le plan technique, ce concept implique deux étapes temporellement distinctes. La première est la décellularisation de l’organe cible, aujourd’hui réalisable efficacement (y compris sur des cœurs de gros mammifères) par la perfusion de détergents chimiques auxquels ont pu été substitués avec succès, du moins dans le cas du foie, un procédé physique fondé sur l’électroporation. L’objectif est d’obtenir la disparition complète de tout matériel cellulaire, pré-requis à l’utilisation potentielle d’organes allo- ou même xénogéniques, tout en maintenant l’intégrité biochimique (contenu en collagène, fibronectine, laminine) et physique (orientation des fibres) de la matrice extra-cellulaire, la perméabilité de l’arbre vasculaire et la compétence des valves. La seconde étape, plus complexe, est celle de la recellularisation. Elle pose, schématiquement, deux problèmes : le choix des cellules et leur mode de transfert. Le cahier des charges imposé aux cellules est en effet contraignant. Il convient d’abord de reconstituer la diversité des populations cellulaires présentes dans le cœur, principalement cardiomyocytes (qui n’en représentent toutefois pas la majorité), myofibroblastes, cellules endothéliales et musculaires lisses. Or si l’obtention de fibroblastes et de cellules vasculaires peut être relativement bien maîtrisée, d’autant qu’elles sont même prélevables chez le futur « receveur » de l’organe reconstitué, tel n’est pas le cas des cellules à visée cardiogénique qui doivent non seulement posséder des propriétés intrinsèquement contractiles, mais aussi être capables de se coupler entre elles et de battre de façon synchrone et à une fréquence modulable par des stimuli neuro-humoraux ou pharmacologiques. Or on sait aujourd’hui que la plasticité des cellules somatiques adultes est limitée et ne leur permet en tous cas pas de se différencier en cardiomyocytes. Cette propriété est le seul fait des cellules pluripotentes, pré-orientées in vitro vers un phénotype cardiaque qu’elles achèvent en principe d’acquérir in vivo sous l’influence de signaux cardio-inducteurs. Ces cellules pluripotentes peuvent être des cellules souches embryonnaires humaines dont le caractère allogènique pose le problème du rejet (indépendamment de toute discussion éthique) ou des cellules somatiques adultes induites à la pluripotence au prix d’une reprogrammation peu efficiente et encore mal maîtrisée car à l’origine possible d’aberrations génétiques et épigénétique. Ultime paradoxe, le caractère autologue de ces cellules ne les expose pas moins à un risque de rejet lié à l’émergence, du fait de la reprogrammation, d’antigènes possiblement identifiés comme étrangers par le système immunitaire du receveur. Enfin, quelle que soit l’origine de ces cellules pluripotentes, leur sélection, au terme de l’étape de pré-différenciation, reste une étape fondamentale afin de n’utiliser que des progéniteurs cardiogéniques et d’éliminer ainsi toute « contamination » par des cellules qui, ayant échappé à cette pré-orientation, auraient conservé un caractère pluripotent et donc un potentiel de prolifération tumorale après la greffe. Le second problème est celui du transfert des cellules sur la charpente qu’elles sont supposées recoloniser. Si la perfusion des cellules à destinée vasculaire parait logique pour reconstituer l’endothélium, l’injection intra-murale des cellules à visée cardiogénique est moins évidente. On a en effet appris de la thérapie cellulaire, que l’injection même, du fait de la dissociation protéolytique préalable des cellules, les prédispose à la mort par apoptose, qu’elle est peu précise et peu reproductible. Si ces limites représentent déjà une sérieuse limitation lorsqu’il s’agit de recoloniser une zone circonscrite de myocarde comme se propose de le faire la transplantation cellulaire, elles risquent d’être quasiment rédhibitoires quand l’objectif devient celui de la repopulation de l’organe entier. Difficulté supplémentaire, cette repopulation ne vise pas seulement à apporter le contingent numérique de cellules nécessaires à la contraction du futur cœur reconstitué, elle se doit aussi de permettre un alignement de ces cellules, à la fois entre elles et par rapport à leur matrice de soutien, compatible avec l’anisotropie qui caractérise le cœur et conditionne largement l’efficacité de sa fonction contractile. Cette fonction est aussi dépendante de l’innervation dont la reconstitution au sein de l’organe auto-construit et les connexions extrinsèques avec les systèmes sympathique et parasympathique du receveur restent à ce jour des problèmes non résolus. Ainsi, dans le travail séminal de Ott et Taylor (Nature Medicine, 2008 ;14 :213-221), des cœurs de rat décellularisés puis recolonisés par des cellules cardiaques néo-natales et placés dans un bioréacteur ont certes pu démontrer des réponses électriques et mécaniques à la stimulation, apportant ainsi la preuve du concept, mais avec une force contractile équivalent à 2% de celle d’un cœur humain adulte, ce qui illustre clairement le chemin qui reste à parcourir. Le remplacement complet d’un cœur humain par un autre cœur constitué d’une matrice, d’origine humaine ou animale, et ensemencée par des cellules capables de s’organiser, structurellement et fonctionnellement, pour le douer d’une activité mécanique efficace, est une perspective encore incertaine et en tous cas certainement lointaine. En revanche, le développement de cette technologie, même si elle ne parvient pas à atteindre l’objectif final, aura, et d’ailleurs a déjà, des conséquences importantes dans le domaine de l’ingéniérie tissulaire. En effet, le développement des techniques de détersion et d’ensemencement devrait conduire à la mise au point de matrices permettant d’optimiser réhabitation, prolifération, différenciation et organisation spatiale des populations cellulaires d’intérêt. Il devient alors réaliste de considérer que ces biomatériaux cellularisés trouvent des indications dans le remplacement partiel du cœur, qu’il s’agisse de celui d’une valve, d’une voie d’éjection (notamment celle du ventricule droit) ou de portions de myocarde défaillant auquel ce matériau composite pourrait redonner une fonction. Dans ces conditions, le cœur « auto-construit » apparait plus comme une option supplémentaire dans l’arsenal thérapeutique que comme un substitut complet à la transplantation. Intervenant : G. JONDEAU (Paris), Cardiologue, Hôpital Bichat, Service du Pr A. Vahanian
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Le rein est un des organes les plus difficiles à reconstruire à cause de la complexité de sa structure et de l'hétérogénéité morphologique et fonctionnelle des cellules qui le constituent. Comme pour les autres organes, les recherches se sont focalisées sur : - les matrices servant de support à la recellularisation : synthétiques, biodégradables ou biologiques. Les matrices extracellulaires sont les plus prometteuses. Des reins de souris, rats porcs ou encore de primates ont pu être décellularisés permettant d'obtenir une structure extracellulaire « vascularisée » servant de support à la recellularisation. - la source de cellules à utiliser pour reconstituer le parenchyme : cellules souches embryonnaires, cellules souches progénitrices, cellules souches adultes issues de la moelle osseuse ou du parenchyme rénal lui même. Le néphron se développe à partir des effets d'induction réciproques du bourgeon urétéral et du blastème métanéphrogène qu'il est possible de reproduire in vitro. Ces travaux laissent espérer la possibilité de « fabriquer » un rein à partir de cellules autologues en vue de la transplantation tout en répondant à la pénurie d’organes et à la toxicité des agents immunosuppresseurs. En attendant, d’autres recherches sur le rein « bioartificiel » associent au système conventionnel de filtration du rein artificiel, un bioréacteur contenant des cellules rénales épithéliales dérivées de tubules rénaux humains. Elles conservent leur fonction de réabsorption, métabolique et endocrinologique. Les reins bioartificiels font l’objet d’essais cliniques. Intervenant : E. RONDEAU (Paris), Néphrologue, Chef de service à l’Hôpital Tenon
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La transplantation pulmonaire est toujours le seul traitement curatif de l’insuffisance respiratoire chronique au stade terminal. Ses résultats restent néanmoins médiocres en raison du nombre insuffisant de donneurs, du rejet chronique et des complications liées aux immunosuppresseurs. La mise au point d’un poumon bio-artificiel régénéré à partir de cellules autologues pourrait apporter une solution majeure à ces problèmes non résolus. Nous avons démontré qu’il était possible d’obtenir une régénération in vivo épithéliale et cartilagineuse au niveau trachéo-bronchique en utilisant une matrice de tissu aortique. D’autres études ont permis une régénération trachéo-bronchique in vitro par ingénierie tissulaire ou in vivo après implantation hétérotopique d’une allogreffe. La problématique est encore plus complexe au niveau pulmonaire puisqu’il faut trouver une matrice élastique capable d’induire une régénération des différents éléments bronchiques, alvéolaires et vasculaires du poumon sur de plus une large surface permettant ainsi une ventilation, une perfusion et des échanges gazeux. Des études récentes ont démontré la possibilité de régénération des différents constituants du poumon in vivo et in vitro à partir de cellules autologues, en particulier de cellules souches. La recherche en ce domaine, qui en est à ses débuts, s’oriente aujourd’hui vers l’utilisation préférentielle d’une matrice pulmonaire décellularisée dont la recolonisation épithéliale et endothéliale in vitro est obtenue par utilisation de cellules autologues. L’implantation in vivo chez l’animal semble permettre l’obtention d’un poumon bio-artificiel fonctionnel. Ces premiers travaux laissent entrevoir une application chez l’homme dans 10 à 20 ans d’après les prévisions les plus optimistes. Intervenant : M. AUBIER (Paris), Pneumologue, Chef de Service à l’Hôpital Bichat
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Le traitement des maladies hépatiques par transplantation d’hépatocytes matures n’a pas encore trouvé d’application thérapeutique bien définie en raison de la difficulté de faire intégrer et se maintenir dans les travées hépatocytaires un nombre suffisant d’hépatocytes fonctionnels. Des travaux récents ont montré qu’il était possible par l’utilisation de détergents doux de décellulariser complètement le squelette vasculaire hépatique tout en maintenant un réseau vasculaire intègre et une matrice extra cellulaire spécifique. L’ensemencement d’hépatocytes et/ou d’autres populations cellulaires permet d’obtenir en quelques semaines un organe fonctionnel et transplantable chez le petit animal. A côté des formidables possibilités d’investigation qu’offrent de tels modèles de foie auto construits par l’association de la bio-ingénierie et de la thérapie cellulaire, la construction de tels foies chez l’homme à partir de squelettes exogènes et de cellules allogéniques ou autologues à partir de cellules pluripotentes i Intervenant : R. POUPON (Paris), Hépatologue, Chef de service à l’Hôpital Saint-Antoine
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La maladie veineuse chronique (MVC) est extrêmement répandue. De nouvelles stratégies dites conservatrices sont apparues récemment qui préservent le tronc de la saphène, mais aussi de nouvelles techniques chirurgicales dites mini-invasives. Ces nouvelles techniques sont liées aux progrès de l’informatique qui a permis une véritable révolution de l’imagerie vasculaire, en particulier veineuse. Celle-ci s’est produite dans deux domaines : l’investigation du système veineux par écho-doppler (Duplex couleur) ; la modélisation 3D de l’anatomie des veines par phlébo-scanner ou IRM.
Chronic venous disorder is extremely spread. New strategies appeared recently as conservative strategies that preserve the truncus of saphenous but also new surgical procedures as minimally invasive surgical procedures. These new procedures are related to informatics progress which allowed a true revolution of vascular imagery, in particular for venous system. This revolution appeared in two fields: doppler ultrasonography to investigate venous system and three-dimensional anatomy of the venous system by spiral computed tomography or MRI.
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Les auteurs présentent leur expérience de 14 années dans le traitement local des métastases vertébrales par vertébroplastie. Méthode. Cette série consécutive et rétrospective de 982 vertébroplasties a été réalisée sur 803 patients (dont 518 femmes), âgés de 58 ans en moyenne, ayant des métastases vertébrales. Le cancer initial était d’origine mammaire dans 43,3 % des cas. Les vertébroplasties ont été réalisées pour stabilisation vertébrale et/ou à visée antalgique. Au total 2 168 corps vertébraux ont été traités au cours de ces procédures. Durant la procédure, une à six vertèbres ont été traitées dans le même temps opératoire. Les localisations étaient thoraciques dans 50,4 % des cas, lombaires dans 38,5 %, cervicales dans 10,2 % et sacrées dans 1 %. Les vertèbres ont été traitées, qu’elles soient ostéolytiques, ostéocondensantes ou mixtes et qu’il y ait atteinte ou non du mur postérieur. Les patients avec une compression neurologique médullaire ou radiculaire ont été traités préalablement par radiothérapie et/ou chirurgie. Toutes les procédures ont été réalisées sous guidage scopique. Le ciment utilisé était le polymethylmétacrylate (PMMA). Les patients ont été systématiquement suivis pendant un mois. L’évolution de la douleur a été évaluée sur une échelle visuelle analogique cotée de 0 à 10. Résultats. Un effet antalgique a été observé dans 91,2 % des cas. L’amélioration était complète dans 22,3 % et partielle dans 68,9 % des cas, permettant l’arrêt des opiacés chez 18,9 % des patients qui en prenaient préalablement. Une stabilisation vertébrale définitive a été réalisée par ce geste dans 95 % des cas. Des complications locales ont été observées dans 2,75 % des cas : hématome cervical compressif (0,1 %), radiculalgie (1,6 %), déficit neurologique (0,2 %). Des complications générales ont été observées dans 0,6 % des cas : embolies pulmonaires (sept cas dont trois symptomatiques et l’un fatal), surinfection pulmonaire (un cas), déficit neurologique (deux cas, dont l’un au décours d’une vertébroplastie cervicale qui a conduit au décès du patient). À un mois, la morbimortalité était de 2,2 %. Conclusion. La vertébroplastie est un geste de radiologie interventionnelle très efficace dans la prise en charge des douleurs locales et la stabilisation des vertèbres métastatiques, puisqu’elle permet d’améliorer 91 % des patients, au prix d’une morbimortalité évaluée respectivement à 1,8 % et 0,4 % des cas dès lors qu’elle est réalisée dans une structure de radiologie interventionnelle adaptée. Cette morbimortalité se réduit considérablement avec l’expérience des opérateurs.
Les thérapeutiques interventionnelles percutanées occupent aujourd’hui une place éminente dans la prise en charge de l’ischémie myocardique. L’introduction des endoprothèses coronaires « actives », stents capables de libérer une drogue antimitotique selon une cinétique et une durée programmées, constitue depuis 10 ans un progrès décisif. Grâce au stent « actif », il est devenu possible pour ces thérapeutiques de concurrencer la chirurgie de pontage dans les indications dont elle avait jusqu’ici l’apanage, sténose du tronc commun, sténoses longues des artères coronaires de petit calibre, occlusion chronique, terrain diabétique. Cependant, du fait même de leur mode d’action, ces stents « actifs » ralentissent le processus d’endothélisation de la prothèse. D’où un risque de thrombose tardive du stent, et donc la nécessité d’un traitement anti-agrégant prolongé faisant appel pendant au moins un an à l’association aspirine-clopidogrel. Que surgisse durant cette période une indication opératoire ou la nécessité d’une exploration invasive, et le dilemme entre risque hémorragique et risque thrombotique de l’endoprothèse coronaire ne peut être évité. Il s’agit là d’un véritable problème de Santé publique du fait des 190 000 stents annuels implantés en France au cours des trois dernières années, dont environ 50 % de stents « actifs ».
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Héritière lointaine des chirurgies exclusivement malabsorptives comme le court-circuit jéjuno-iléal, la dérivation bilio-pancréatique a été développée par Nicola Scopinaro entre 1976 et 1979 puis modifiée dans un sens plus restrictif par Hess et Marceau. Paradoxalement, bien qu’elle soit reconnue comme la plus efficace des chirurgies de l’obésité, tant sur la perte de poids que sur l’amélioration des comorbidités, sa place dans l’arsenal thérapeutique demeure extrèmement limitée. Bien que la litérature n’ai pas démontré de différence significative, la morbidité à court terme semble jusqu’à deux fois plus élevée (16 à 20%) comparativement au bypass gastrique, opération qui lui est la plus proche (en termes de montage et d’efficacité). Les carences nutritionnelles induites par la malabsorption qui nécessitent un contrôle rigoureux à vie ainsi que l’impact sur le transit intestinal constituent d’autres freins à sa diffusion. Aujourd’hui essentiellement limitée aux patients dits « superobèses » (IMC≥50), la dérivation bilio-pancréatique est quasi exclusivement réalisée dans sa variante «switch duodénal » car manifestement plus tolérable sur le long terme. La grande diffusion de la « sleeve gastrectomie » ces 5 dernières années va probablement conduire assez logiquement à davantage d’indications de dérivation bilio-pancréatique avec switch duodénal en deuxième intention. Intervenant : Simon Msika (Paris)
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La cardiologie interventionnelle est aujourd’hui une alternative crédible au pontage coronaire dans le traitement de l’ischémie myocardique. Cette réalité est liée à l’apparition des prothèses endocoronaires ou stents. Le stent a fait disparaître l’occlusion aiguë perprocédure et son corollaire le stand-by chirurgical. Il a réduit à moins de 5 % l’incidence de la resténose, phénomène présent dans la moitié des cas avec angioplastie au ballon, en s’opposant au retour élastique du vaisseau et à la prolifération des cellules musculaires lisses de la média. Les endoprothèses « actives » libèrent un antimitotique localement, selon une cinétique programmée assurant une cicatrisation de l’artère optimale bien que décalée dans le temps. De telles prothèses nécessitent un traitement anti-agrégant mixte par association aspirine-clopidogrel durant un an afin de les protéger du risque d’occlusion aiguë. Si au cours de cette période, surviennent une indication chirurgicale ou la nécessité d’une exploration invasive, les risques ischémiques coronaires et hémorragiques doivent être mis en balance, car l’arrêt du traitement anti-agrégant se trouve être la cause prépondérante d’occlusion du stent. À côté de ce facteur, on retiendra également les lésions ostiales de bifurcation, les sténoses longues sur artères inférieures à 3 millimètres, le contexte de syndrome coronaire aigu et le terrain diabétique ou insuffisant rénal qui favorisent le risque d’occlusion du stent. Quant au risque hémorragique, il est majeur pour la chirurgie vasculaire urologique ou neurochirurgicale, moyen pour la chirurgie thoracique, orthopédique ou abdominale, minime pour la chirurgie superficielle. La décision d’interrompre ou d’alléger le traitement anti-agrégant plaquettaire est affaire de cas particulier. En cas de risque hémorragique majeur, il peut être impossible de ne pas arrêter la thérapeutique bimédicamenteuse. Si le risque est moindre, la chirurgie sera réalisée sous aspirine seule. En cas de risque minime, le geste sera effectué sous l’association anti-plaquettaire. Dans chaque cas particulier, la concertation entre chirurgien et cardiologue est le garant de la meilleure stratégie à adopter.
Interventional cardiology is at the moment a reliable alternative to the coronary bypass in the treatment of myocardial ischemia. Due to the coronary stenting the emergency surgical bypass has disappeared during interventional procedures and the rate of the coronary restenosis is more three times lower than the level observed with balloon angioplasty. Drug eluting stents induces a better healing of the coronary artery. But the use of both Clopidogrel and Aspirin is required one year or at least 6 months. If during that period a surgical intervention or an invasive exploration are indicated, ischemic and bleeding risks are to be compared. The main risk factor of stent acute closure reside in stopping the antiplatelet agents. Bleeding risk is at the utmost in vascular surgery and urology, decreases with thoracic, orthopedic and abdominal surgery, and is minimal for superficial interventions. Stopping or decreasing the antiplatelet agents has to be submitted to discussion in each case. If the bleeding risk turns to be important the treatment should be stopped. In case of a less important risk the intervention should be performed with Aspirin alone. In each particular case discussion between surgeon and cardiologist is required to obtain the best medical strategy
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