Séance du mercredi 5 mai 2004

CANCEROLOGIE GYNECOLOGIQUE
15h00-17h00 - Les Cordeliers
Modérateur : Jean-Pierre LEFRANC

 

 

La chirurgie de réduction tumorale du cancer avancé de l'ovaire est une chirurgie gynécologique mais aussi viscérale et cancérologique majeure.

DAUPLAT J (Clermont-Ferrand)

Résumé
Le cancer épithélial des ovaires est diagnostiqué dans deux tiers des cas à un stade avancé (III et IV) avec carcinose péritonéale, c'est-à-dire avec un volume tumoral majeur.
Le concept de chirurgie de réduction maximale est né à la fin des années 1970 et son bénéfice est régulièrement constaté depuis dans toutes les séries de la littérature. Le volume tumoral résiduel laissé en place par le chirurgien est ainsi un des facteurs pronostiques principaux : seules les malades dont l'exérèse est complète ou quasi-complète, ont des chances de survie qui atteignent 50% à 5 ans alors que le pronostic global de ces formes est de 20 à 25% à 5 ans.
Les gestes nécessaires pour aboutir à une exérèse optimale sont intimement liés au volume et au mode d'extension de la maladie dans le péritoine. On distingue la chirurgie standard (hystérectomie, annexectomie, omentectomie, lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique), la chirurgie radicale qui comporte en plus une pelvectomie postérieure en cas d'envahissement extrinsèque du rectum et la chirurgie ultra-radicale si l'extension abdominale nécessite d'autres exérèses digestives et/ou une splénectomie.
L'étude de la littérature montre que des exérèses digestives sont réalisées près d'une fois sur deux par ces équipes expérimentées qui parviennent à une exérèse optimale dans 75 à 90 % des cas. Les équipes non spécialisées ont un taux de résection très inférieur, ce qui se traduit par un pronostic altéré et donc une perte de chances. Une méta-analyse récente conclut que la meilleure façon actuelle d'améliorer le pronostic de ces femmes est de les confier à une équipe expérimentée !
La contrepartie de l'agressivité chirurgicale est une augmentation de la morbidité qui peut être délétère en retardant la chimiothérapie complémentaire. Dans les cas les plus évolués, l'alternative d'une chimiothérapie première et d'une chirurgie d'intervalle après 3 ou 4 cures faciliterait celle-ci et augmenterait les chances de résection optimale.
La réduction tumorale maximale du cancer de l'ovaire est un objectif justifié qui nécessite une chirurgie gynécologique et viscérale agressive.

 

Chirurgie initiale ou d'intervalle dans les cancers de l'ovaire de stade avancé. Comment sélectionner les patients et pour quels résultats ?
Interval debulking surgery for advanced stage ovarian cancer: State of the art.

MORICE P, THOURY A, CAMATTE S, PAUTIER P, LHOMME C, POMEL C, DUVILLARD P, CASTAIGNE D, DUBERNARD G, BALLEYGUIER C (Villejuif)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2004, vol. 3 (2), 35-42

Résumé
La prise en charge des carcinoses péritonéales diffuses d’origine
ovarienne a beaucoup évolué ces dernières années. L’introduction
de la chimiothérapie néo-adjuvante avant une chirurgie d’exérèse a
permis de réduire la morbidité de la chirurgie d’exérèse tumorale
chez les patientes présentant une tumeur diffuse et donc d’en améliorer
la qualité de vie. Néanmoins il faut attendre les résultats d’études
multicentriques pour valider définitivement la place et les
résultats de cette prise en charge. En 2004, le traitement de référence
des cancers de l’ovaire reste la chirurgie d’exérèse initiale
suivie d’une chimiothérapie adjuvante. Néanmoins, la chirurgie
d'intervalle, en cas de carcinose très avancée, semble s’imposer
comme une option, si ce n’est un standard. Il n’en reste pas moins
que la chirurgie des tumeurs ovariennes est une chirurgie opérateurdépendante
(et donc expérience dépendante) et que les critères de
résécabilité peuvent varier selon l’expérience du chirurgien et/ou
des équipes prenant en charge les patientes.

Abstract
Management of patients with advanced stage ovarian cancer was
deeply modified during the last years. The standard management
remains the initial cytoreductive surgery (in order to achieve the
most complete resection of peritoneal disease) followed by adjuvant
chemotherapy. But morbidity of this management is high, particularly
in the subgroup of patients with massive peritoneal spread.
Development of interval debulking surgery (after induction chemotherapy)
in these patients, changes the morbidity and quality of life.
Nevertheless results of randomized studies, actually ongoing, are
awaited in order to assess precisely the results of such management.
Results of interval surgery, and criteria used to select patients between
initial and interval debulking surgery, are reviewed.

 

La coeliochirurgie dans les cancers invasifs du col utérin.

POMEL C, DAUPLAT J, LE BOUEDEC G, HAIE MEDER C, MORICE P, CASTAIGNE D (Villejuif)

Résumé
L'introduction de la laparoscopie dans le traitement du cancer du col utérin date de plus de 15 ans. Elle est proposée en staging préthérapeutique (curages pelviens et /ou lombo-aortique) pour définir au mieux le niveau des champs d'irradiation. Dans les années 90, l'hystérectomie élargie laparoscopique fait son apparition et permet de traiter les patientes atteintes de cancer invasif de moins de 4 cm avec ou sans radiothérapie. Depuis la fin des années 90, le traitement des tumeurs de plus de 4 cm associe la radio-chimiothérapie concomitante. A ce stade, la place de la chirurgie de clôture est encore mal définie mais on admet habituellement que l'hystérectomie extra-fasciale associée au curage lombo-aortique reste une option. Cette intervention est réalisable par laparoscopie. La chirurgie des récidives était réservée à la laparotomie. Nous avons réalisé 3 types d'exentération laparoscopique: exentération antérieure, exentération postérieure et exentération pelvienne totale (rectum, utérus, vagin, vessie). La reconstruction vésicale coelio-assistée a été assurée par une dérivation de type Bricker chez 3 patientes et de type vessie continente (Miami Pouch) chez 1 patiente. En conclusion, on peut dire que la laparoscopie prend une importante place à la chirurgie ouverte dans le traitement des cancers du col utérin. Peut-on alors prétendre qu'il n'existe plus de limite technique au traitement laparoscopique des cancers du col utérin dits opérables ? Les limites sont volumétriques, ergonomiques et carcinologiques.

 

Chirurgie des Cancers avancés et récidivés du col : quand ? comment ? pour quels résultats ?
Surgical resection of locally advanced and recurrent cervix cancer. When? How? Which expected results?

HOUVENAEGHEL G (Marseille)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2004, vol. 3 (2), 30-34

Résumé
Malgré le dépistage du cancer du col utérin, le diagnostic de tumeurs
avancées du col utérin n’est pas exceptionnel et le risque de
récidive est observé avec des fréquences de 6 à 50% selon les séries,
le stade et la taille de la tumeur. Dans ces situations une chirurgie
d’exérèse large peut se discuter, en l’absence de localisation
métastatique : soit une colpo hystérectomie, le plus souvent élargie,
soit dans la majorité des cas une exentération pelvienne. Les conséquences
fonctionnelles et psychologiques de ces exérèses larges
sont majeures. Des procédés techniques ont donc été proposés pour
réduire cet impact majeur et pour diminuer le taux de complications
postopératoires. Les temps de reconstruction peuvent associer des
techniques de restauration digestive, urinaire, vaginale, vasculaire et
des procédés de comblement de la cavité pelvienne.
Les progrès des techniques chirurgicales et de réanimation ont permis
de diminuer les taux de mortalité opératoire à moins de 8 %
dans les dernières années, avec des taux de morbidité qui restent
très élevés après exentération pelvienne (38 à 65 %).
Dans notre expérience, après résection d’un cancer avancé réalisée
à la suite d’une radio chimiothérapie, les taux de survie ont été de
72 % à 5 ans pour l’ensemble des cas traités à visée curative, sans
différence entre les stades I, II (tumeur > 4 cm) et III, IVA. Le
contrôle loco régional a été de 91 % (suivi moyen : 50 mois). Après
résection d’une récidive à visée curative, les survies globales ont été
de 35 % à 5 ans. Une exérèse à visée curative a pu être réalisée plus
fréquemment en cas de récidive centro pelvienne en comparaison
avec les récidives latéro et pan pelviennes. La résection de récidives
latéro ou pan pelviennes reste donc discutée et ne fait pas l’objet
d’un consensus. Cependant la résection chirurgicale reste dans la
majorité des cas la seule option thérapeutique susceptible d’apporter
un bénéfice de survie et de qualité de vie, en proposant dans ces cas
des résections élargies aux structures latéro pelviennes et/ou un
complément.

Abstract
Locally advanced cervix cancer diagnosis is not rare and recurrence
risk ranged from 6 to 50 % according to series, tumor stage and
size. In non metastatic patients an extended surgical resection can
be performed: colpohysterectomy, extended in most cases, or more
frequently a pelvic exenteration. Functional and psychological consequences
are extremely important and several procedures are routinely
used to improve decrease the complications rate. Reconstructive
procedures include digestive, urinary or gynecological tract
reconstruction and pelvic filling. Recent surgery and intensive care
technique improvement permitted to decrease the rate of postoperative
mortality (less than 8%) but pelvic exenteration morbidity remains
extremely high, ranging from 38 to 65%.
In our experience, the overall 5 year-survival rate after surgical
resection follo wing chemoradiation with curative intent in locally
advanced cancer was 72 %, without difference between Stage I, II
(tumor>40mm) and III, IVa. Local control was 91% (mean follow
up: 50 months). The overall 5 year-survival rate after surgical resection
with curative intent in recurrent cancer was 35 %. Surgical
resection with curative intent was more frequently performed in
centro-pelvic recurrence than in latero- pelvic or bilateral recurrence.
In consequence, surgical resections of such recurrences are
still under debate. However, surgical resection remains in most
cases the only therapy allowing survival and quality of life benefits.

 

Le ganglion sentinelle dans les cancers de la vulve. Etude prospective à propos de 18 cas.

RODIER JF, BRAND F, KJARTANSDOTTIR T, SCHNEEGANS O, OTT G, WILT M, GHNASSIA JP (Strasbourg)

Résumé
L'objectif de cette étude a été d'évaluer la faisabilité de la détection du ganglion sentinelle dans les cancers vulvaires de stades précoces (T1, T2, N0) et d'examiner l'évolution des patientes exemptées de curage inguino-fémoral en l'absence d'atteinte métastatique histologique du ganglion sentinelle.
De Juillet 1998 à Novembre 2003, une détection du ganglion sentinelle a été pratiquée chez 18 patientes, d'âge moyen 68,7 ans (extrêmes 22-87), présentant un cancer malpighien invasif (8 T1, 6 T2) dans 14 cas et un mélanome malin dans 4 cas, toutes N0 inguinal.
Les techniques d'identification du ganglion sentinelle ont comporté l'injection d'un colorant lymphotrope seul (Bleu Patenté) dans 1 cas, d'un colloïde marqué seul (sulfure de Rhenium Tc99 m) dans 4 cas et une combinaison des 2 méthodes dans 13 cas.
Les taux d'identification du ganglion sentinelle inguinal ont été de 71,4 % (10/14) avec le bleu, 88,2 % (15/17) avec le colloïde et de 92,3 % (12/13) avec la combinaison bleu et colloïde, soit un taux global d'identification de 83,3 % (15/18).
Le nombre moyen de ganglions sentinelles prélevés a été de 2,8 (extrêmes 1-6). Le traitement de la tumeur primitive a consisté en une vulvectomie totale (14 cas), partielle (3 cas) et une exérèse locale. 11 malades (61 %) ont bénéficié d'une procédure ganglion sentinelle exclusive (lymphadénectomie sélective). Sept curages inguino-fémoraux ont été réalisés, dans 3 cas pour échec de détection du ganglion sentinelle et dans 4 cas pour envahissement histologique de ce dernier.
A l'issue d'un recul moyen de 41,5 mois (extrêmes 3-66), une patiente (5,5 %) a développé une récidive ganglionnaire inguinale profonde au 6ème mois d'un échec de détection du ganglion sentinelle (avec une injection seule de Bleu Patenté V) complété par un curage inguinal superficiel et une patiente a présenté une récidive vulvaire traitée par exérèse suivie d'irradiation complémentaire.
La morbidité a consisté en 1 lymphocèle (après curage inguino-fémoral), en 4 œdèmes des membres inférieurs (dont un seul après lymphadénectomie sélective) et 4 retards de cicatrisation vulvaire.
Quatre malades sont décédées à J4, au 8ème, 15ème et 29ème mois respectivement de gastroplégie aiguë, de récidive ganglionnaire inguinale profonde, de cancer du sein et de métastases hépatiques avec carcinose péritonéale.
L'adénectomie inguinale sentinelle (lymphadénectomie sélective) s'avère une technique mini-invasive, fiable, faisable et reproductible. Elle constitue une alternative intéressante au curage inguino-fémoral dans les cancers vulvaires invasifs (61 % de curages inguino-fémoraux évités dans cette série) à la double condition d'être réservée aux stades tumoraux précoces sans atteinte ganglionnaire clinique et de recourir à l'usage exclusif ou, mieux encore, combiné de la technique radioisotopique.

 

Cancer du sein : comment réduire le risque de récidive locale après traitement conservateur ?
How to reduce risk of local recurrence after conservative treatment of breast cancer.

LEFRANC JP, BENSAID C, TOUBOUL E, GENESTIE C, LAURATET B, JANAUD G, FOURNET S (Paris)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2004, vol. 3 (4), 01-07

Résumé
Si après tumorectomie et radiothérapie, les taux de survie globale et
sans métastases à long terme sont identiques à ceux de la mammectomie
totale, que ce soit pour les carcinomes infiltrants ou pour les
lésions strictement intra canalaires localisées, le risque de récidive
locale reste plus important après traitement conservateur (1 % /an).
La réduction de ce risque, tout en obtenant un résultat esthétique
satisfaisant, constitue un challenge majeur de la prise en charge du
cancer du sein. En effet, la majorité des rechutes locales après traitement
conservateur sont actuellement traitées par mammectomie
totale, à laquelle est souvent associé un traitement médical par hormonothérapie
ou chimiothérapie. L’amélioration de la prise en
charge est susceptible de réduire sensiblement le risque de rechute
par une étude stricte de la pièce opératoire, notamment pour ce qui
concerne les marges d’exérèse par une exérèse chirurgicale optimale.
Si le principe d’une résection en zone saine doit être intangible,
les réticences au plan plastique à pratiquer systématiquement
une véritable quandrantectomie, la méconnaissance relative de l’évolution,
malgré la radiothérapie, des foyers résiduels, la variabilité
d’une étude à l’autre de l’influence de la qualité des marges d’exérèse
sur les risques de lésions résiduelles et de rechutes locales,
conduisent cependant à l’absence de consensus. Ainsi peut-on espérer
réduire le taux de « vraie » récidive. Il apparaît très probable que
les « récidives » locales observées dans les années à venir concerneront
de nouvelles localisations néoplasiques, que la radiothérapie
n’aura pas évitées et dont l’éventuelle reconnaissance lors du traitement
initial aurait eu pour corollaire la réalisation d’une mammectomie
totale. L’éventualité de la survenue d’un nouveau cancer justifie
à elle seule une surveillance à vie.

Abstract
If for invasive breast carcinomas or DCIS, global survival is the
same after association of conservative surgical treatment and radiotherapy
or total mammectomy, risk of local recurrence remains
more important after conservative treatment (1%/year).
Reduction of this risk, while obtaining a satisfactory cosmetic result,
constitutes a major challenge to the management of breast cancer.
Indeed, most of the local failures after conservative treatment are
currently treated by total mammectomy, often in association with
medical treatment such as hormonotherapy or chemotherapy. Management
of breast cancer could be improved and risk of local recurrence
could be reduced by giving particular attention to the surgical
margins status. If surgical margins have to be healthy, quadrantectomy
concerning cosmetic results not always recommended, relative
ignorance of the evolution of the residual hearths despite radiotherapy,
the variability of the studies concerning the influence of
the quality of the margins on the risks of residual lesions and local
failures, lead however to the absence of consensus. Thus, the rate of
“true” local recurrence could be reduced.
It appears very probable that local “failures” in the future will in
fact be new neoplasic localisations, that radiotherapy would not
have avoided and whose recognition at the time of the initial tumour
would have necessitated a total mammectomy. The eventuality
of a new cancer justifies lifelong surveillance and the risk of
new neoplasic localisations mustn’t reduce the practice of conservative
treatment.

 

Tirage d'une commission de 5 membres titulaires chargée de l'examen des titres des candidats à l'élection de membres titulaires