Séance du mercredi 1 avril 2015

CHIRURGIE ONCOLOGIQUE INTERVENTIONNELLE
14h30-17h00, Les Cordeliers
Modérateurs : Iradj GANDJBAKHCH, Bertrand DORE, Jacques CHIRAS (Paris)

 

 

Introduction de la séance

 

Interstitial Photodynamic Therapy and Glioblastoma: Light Fractionation Study on a Preclinical Model
Thérapie photodynamique interstitielle et glioblastome : étude préclinique du fractionnement

LEROY HA, VERMANDE M, TETARD MC, LEROUX B, MAURAGE CA, DUHAMEL A, LEJEUNE JP, MORDON S, REYNS N Univ. Lille - Inserm, CHU Lille - U1189 - ONCO-THAI - Image Assisted Laser Therapy for Oncology - F-59000 Lille (1, 2 4, 7, 8 et 9) CHU Lille - Department of Neurosurgery - 59000 Lille (1,3, 7 et 9) CHU Lille - Department of Neuropathology - 59000 Lille (5) Univ. Lille - CHU Lille - EA2694 - Department of Biostatistics - 59000 Lille (6)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2016, vol. 15 (1), 011-017

Résumé
Background: Glioblastoma is a high-grade cerebral tumor with local recurrence and poor outcome. Photodynamic therapy (PDT) is a local treatment based on the light activation of a photosensitizer (PS) in the presence of oxygen to form cytotoxic species. Fractionation of light delivery may enhance treatment efficiency by restoring tissue oxygenation.
Objectives: To evaluate the efficiency of two light fractionation schemes, using immunohistological data.
Materials and Methods: Thirty-nine “Nude” rats were grafted with human U87 cells into the right putamen. After PS precursor intake (5-ALA), an optic fiber was introduced into the tumor. The rats were randomized in three groups: without light, with 2 fractions and 5 fractions. Treatment effects were assessed from brain immunohistology.
Results: Histology confirmed more extensive necrosis and apoptosis associated with a rarified angiogenic network in the treatment area, after multifractionated PDT. However, we observed more surrounding edema and neovascularization in the peripheral ring after 5-fractionned PDT.
Conclusion: Interstitial PDT with fractionated scheme induced specific tumoral lesions. The 5 fractions scheme was more efficient, inducing greater tumoral necrosis and apoptosis, but also significant peripheral edema and neovascularization.

Abstract
Introduction : Le glioblastome est une tumeur cérébrale de haut grade, récidivant localement. La thérapie photodynamique (PDT) est un traitement local reposant sur l’activation par la lumière d’un photosensibilisant en présence d’oxygène, formant des réactifs cytotoxiques. Le fractionnement de l’illumination peut améliorer son efficacité en permettant une réoxygénation tissulaire.
Objectifs : Évaluer l’efficacité du fractionnement de l’illumination et rechercher une corrélation radio-histologique en utilisant les séquences IRM de diffusion / perfusion.
Matériels et méthodes : Nous avons greffé des cellules U87 dans le putamen droit de 39 rats immunodéprimés. Après absorption du précurseur photosensibilisant (5-ALA), une fibre optique était introduite dans la tumeur. Les rats ont été randomisés dans 3 groupes : sans illumination, illumination « 2 fractions » et illumination « 5 fractions ». Les effets du traitement ont été évalués par IRM postopératoire à 72h. Les spécimens furent finalement sacrifiés pour étude immunohistologique du cerveau.
Résultats : Nous avons observé une augmentation de la diffusion au niveau du centre tumoral parmi les rats traités, particulièrement dans le groupe « 5 fractions ». La perfusion était diminuée au sein de la zone traitée, d’autant plus dans le groupe « 5 fractions ». L’histologie a confirmé les données de l’IRM, avec une nécrose et une apoptose plus importantes associées à une raréfaction angiogénique dans l’aire de traitement après multifractionnement « 5 fractions ». Cependant, nous avons observé un œdème périlésionnel majoré et des signes de néoangiogénèse périphérique après PDT « 5 fractions ».
Conclusion : Le traitement interstitiel multifractionné « 5 fractions » induit une nécrose et une apoptose plus importantes au sein du tissu tumoral mais est également à l’origine d’un œdème majoré et d’une néoangiogénèse périphérique. La diffusion et perfusion en IRM ont permis de prédire les lésions histologiques.

 

Ablations percutanées des tumeurs hépatiques malignes

SEROR O (Bondy)

Résumé
Les tumeurs hépatiques malignes sont fréquentes. Le foie est en effet l’organe de prédilection des métastases des cancers digestifs notamment colorectaux. Au cours des hépatopathies chroniques, la survenue d’une tumeur maligne primitive, généralement un carcinome hépatocéllulaire (CHC) est aussi très courante.
Pour les formes localisées la chirurgie de résection est le traitement curatif de référence. Malheureusement les contre-indications à l’hépatectomie sont fréquentes notamment en ce qui concerne le CHC développé sur cirrhose où par ailleurs le recours à la greffe ne concerne qu’une minorité de patient très sélectionnés.
C’est ainsi que ce sont considérablement développées depuis maintenant plus de 20 ans les techniques d’ablation percutanées. D’abord chimiques dans les années 80 elles sont devenues physiques dans les années 90 avec l’apparition de la radiofréquence. Aujourd’hui les technologies disponibles se sont considérablement diversifiées tant en ce qui concerne les sources énergétiques utilisées que les stratégies de déposition dans les tissues. Dans le même temps les moyens de guidage par l’imagerie n’ont cessé de progresser.
Les possibilités offertes par ces avancées modifient profondément les perspectives de prises en charge curatrices des cancers du foie. Ceci est particulièrement évident pour le CHC où plusieurs algorithmes pronostiques et thérapeutiques préconisent l’ablation percutanée de première intention en cas de petites tumeurs techniquement opérables.

Commentateur : Henri BISMUTH (Paris)

 

Traitement des tumeurs primitives et secondaires du foie par les ultrasons focalisés de haute intensité : état de l’art et perspectives de recherche en thérapie génique

TRILLAUD H (Bordeaux)

Résumé
Les traitements par thermothérapie se sont développés ces dernières années, en cancérologie hépatique, en utilisant différents agents physiques. Les plus utilisés sont la radiofréquence et les micro-ondes. Ils nécessitent une effraction tissulaire pour mettre en place un applicateur composée d’une aiguille qui conduit l’agent physique dans la tumeur. Les ultrasons sont capables de traverser les tissus sans les léser et sans aiguille dans la tumeur, en se focalisant sur une cible à détruire. La thermoablation par US focalisés connaît un fort développement dans de nombreux organes. Sa place est déjà bien définie pour le myome utérin, le cancer de la prostate et les tumeurs osseuses. Le traitement des tumeurs hépatique est encore peu répandu. Les premiers résultats cliniques reposent surtout sur des applications guidées par échographie. Si cette approche est la plus simple à mettre en œuvre, les possibilités de monitorage sont très limitées. L’application d’ultrasons focalisés guidés par IRM avec monitorage de la destruction en temps réel comme pour le traitement du myome utérins est bien plus précise comme l’a montré les premières études animales mais l’utilisation clinique est encore limitée tant que les problèmes de contrôle des mouvements et d’interfaces, liés aux côtes et aux gaz, ne seront pas réglés. A côté des applications par destruction thermique les ultrasons focalisés peuvent agir par la thermo-modulation de l’efficacité d’une drogue ou d’un gène ou par effet mécanique en modifiant la perméabilité des vaisseaux ou des cellules. Les applications biologiques des US focalisés en multipliant les approches ont donc un potentiel indiscutable pour le futur.

Commentateur : Bernard LAUNOIS

 

La Radiochirurgie Gamma-Knife des métastases cérébrales

VALERY CA (Paris)

Résumé
La radiochirurgie des métastases cérébrales a connu ces dernières années un essor important. Cette technique remplace de façon croissante l’irradiation encéphalique qui constituait auparavant, associé ou non à la chirurgie d’exérèse, le traitement standard.
Le principe de la radiochirurgie, élaboré dans les années 60 par un neurochirurgien, le Pr Lars Leksell, est l’irradiation d’un volume lésionnel intra-cranien de taille limitée en une seule séance avec une précision millimétrique. Cette technique requiert la collaboration du neurochirurgien, du radiothérapeute, du neuroradiologue et du physicien médical. Le plus récent modèle de gamma-knife est le Perfexion, dont nous disposons depuis 2010 au sein du groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière.
Le contrôle local, de très bonne qualité, obtenu par ce traitement peut concerner une ou plusieurs lésions traitées simultanément. Cependant, il nécessite des examens réguliers afin de vérifier la durabilité de l’efficacité et/ou l’éventualité de l’apparition de nouvelles lésions.
La prévention de rechutes distales, auparavant assurées par la pratique d’irradiations encéphaliques à visée prophylactique, est main-tenant remplacée par le traitement radiochirurgical « à la demande » de nouvelles lésions détectées lors des contrôles. Cette pratique permet d’éviter ainsi les conséquences cognitives liées à la leucoencéphalopathie post-radique qui sont d’autant plus constatées que la survie des patients augmente. Les progrès dans les traitements systémiques de la maladie cancéreuse générale permettent en d’observer en effet de plus en plus de « survivants long-terme » dont la qualité de vie doit être préservée au mieux.
Cependant, l’impact du contrôle cérébral réalisé par radiochirurgie sur la survie globale n’est pas encore parfaitement clair, et dé-pend, par exemple, autant des paramètres liés à l’histoire de la maladie qu’à la topographie de lésions cérébrales pouvant éventuellement mettre en jeu, à court terme le pronostic vital du patient.
L’association de thérapies systémiques nouvelles, associées à la radiochirurgie « à la demande », permet d’augurer de nouveaux pro-grès dans l’amélioration du pronostic vital de ces patients et de la qualité de cette survie.

 

Métastase vertébrale unique : indications chirurgicales actuelles

ASSAKER R (Lille)

Résumé
Le traitement chirurgical d’une métastase vertébrale s’inscrit aujourd’hui dans un projet thérapeutique multimodal dont le but est de protéger les éléments neurologiques, de préserver la stabilité de la colonne vertébrale et de réduire les douleurs rachidiennes. Le geste chirurgical peut être localement « curatif » ou « palliatif » en fonction principalement du pronostic de la maladie cancéreuse primitive. Stratégiquement le traitement chirurgical en cas de métastase « unique » est curatif visant à contrôler localement la maladie.
L’évaluation pronostique est basée sur des classifications validées dont la plus reconnue est la classification de Tokuhashi. Elle permet de définir un « score pronostique » corrélé à la durée de survie en fonction de plusieurs paramètres (nature de la tumeur primitive, la présence de métastases viscérales, le caractère multiples des métastases, l’état fonctionnel du patient..). Le score de Tokuhashi per-met d’adapter la stratégie chirurgicale : curative avec un traitement excisionnel ou palliative avec un traitement de décompression et/ou de stabilisation antalgique.
Afin de déterminer si un traitement local maximaliste peut être discuté, le bilan d’extension de lésions osseuses et extra-osseuse doit être exhaustif et la nature de la métastase confirmée.
Le traitement chirurgical d’une métastase unique d’un cancer de bon pronostic (score de Tokuhashi élevé) doit être excisionnel asso-ciant la résection complète de la métastase et la stabilisation rachidienne. Le traitement dit excisionnel par excellence est la résection « en bloc » (sans effraction marginale) de la vertèbre porteuse de la métastase. Il s’agit d’un geste a morbidité péri-opératoire non négligeable parfaitement justifié dans les tumeurs vertébrales malignes primitives mais controversé dans les tumeurs secondaires. L’alternative à la résection « en bloc » est la résection « par morcellement » de la métastase qui est techniquement plus simple et as-sociée à moindres complications péri-opératoires. Dans les 2 cas et en général le traitement chirurgical est complété par une radiothérapie dont les modalités dépendent de la nature du cancer primitif et du degré de résection de la métastase.
Techniquement la chirurgie du rachis en général et oncologique en particulier s’est enrichie de nouvelles technologies dites « mini-invasives » qui réduisent l’agression chirurgicale apportant un meilleur confort post opératoire et une réduction du séjour à l’hôpital.
Il paraît donc évident que la prise en charge chirurgicale de la métastase vertébrale dépend de l’environnement multidisciplinaire on-cologique évitant de « sous traiter » une métastase unique de bon pronostic ou de « sur traiter » une métastase considérée à tort comme unique et de mauvais pronostic. La place et la pertinence d’autres modalités thérapeutiques doivent être prise en compte par le chirurgien avant de définir son plan de traitement.

Commentateur: Jacques PHILIPPON (Paris)

 

Métastase vertébrale unique : radiothérapie stéréotaxique

TOLEDANO A (Paris)

Résumé
Classiquement, le traitement de la « maladie métastatique » est la chimiothérapie exclusive. Malheureusement, à part les tumeurs très chimiosensibles comme les tumeurs germinales, la chimiothérapie exclusive n’est que palliative, sans action suffisante sur les lésions macroscopiques. Il y a presque 20 ans, Hellman et Weichselbaum ont été les premiers à définir un stade « oligométastatique » intermédiaire entre un stade localisé et une maladie diffuse, dans lequel le nombre et les sites atteints restent limités (1). Les données récentes de la littérature semblent confirmer l’existence d’un tel état intermédiaire ou parallèle. Les progrès des traitements systémiques et surtout ceux des techniques loco-régionales, comme la chirurgie, la radiologie interventionnelle et la radiothérapie, permettent aujourd’hui d’explorer et de tirer profit de cette présentation clinique particulière ; les métastases vertébrales uniques feront l’objet d’une discussion technique, mais cristalliseront également le débat sur la « curabilité » d’une métastase vertébrale unique.
La radiothérapie « classique » est réputée pour son effet antalgique sur les lésions métastatiques vertébrales, mais aussi pour son effet antitumoral ; il est rare qu’aux doses utilisées, en raison de la proximité de la moelle épinière notamment, la tumeur soit complètement stérilisée par l’irradiation.
La radiothérapie stéréotaxique, ou radiochirurgie, est le traitement non invasif de choix des cancers ; Stéréo signifie en 3 dimensions (3D) et taxique signifie explorer. Nous parlerons lors de ce symposium, de cette nouvelle modalité d’irradiation par le Cyberknife*, un accélérateur de particules miniaturisé, embarqué sur un bras robotisé disposant de 6 degrés de liberté, qui offre une très grande flexibilité de ciblage et d’orientation du faisceau, intégrant une intelligence artificielle guidant son adaptation aux mouvements des patients et des tumeurs.
Cette avancée technologique qu’est le Cyberknife* permet de délivrer des rayonnements ionisants sur un volume cible réduit, par de multiples mini faisceaux, avec une très grande précision géométrique de l’ordre du millimètre sur des cibles mobiles. Un fort gradient décroissant de dose en périphérie épargne les tissus sains.
Ces hautes doses précisément délivrées permettent des résultats souvent spectaculaires en terme de contrôle local, jusqu’à guérir certaines maladies métastatiques autrefois considérées incurables...
Des tumeurs cérébrales, en passant par les poumons, le rachis, la prostate, ou bien d’autres organes, les perspectives promises par le Cyberknife* portent leurs fruits, des milliers de patients en ont bénéficié en France ces dernières années.
Nombre de tumeurs vertébrales que le corps médical croyait inaccessibles ont pu être traitées, sans toxicité, l’ère de l’innovation technologique salvatrice est enfin arrivée.
Nous aurons l’occasion de mettre en évidence en quoi l’irradiation stéréotaxique peut modifier l’histoire naturelle de la maladie cancéreuse ; nous nous appuirons de nombre d’exemples où cette radiochirurgie a même été la seule solution thérapeutique efficace, dans des situations cliniques complexes.
Tout cela a un prix, et le cancer est l’affaire de tous ! Plus que jamais la multidisciplinarité et la collectivité doivent œuvrer pour disposer de ces techniques pour répondre à la demande grandissante.
Comme Théophraste disait « La plus coûteuse des dépenses, c'est la perte de temps », ce qui est d’autant plus approprié en matière de cancérologie.
Il nous tarde donc de voir l’essor de la radiochirurgie et de la radiothérapie stéréotaxique en France, pour le plus grand bénéfice des patients…

Commentateur : Jacques CHIRAS

 

Métastases solitaires. Quelle prise en charge?

CHIRAS J, VIEILLARD MH (Paris)

Résumé
Le concept de métastase solitaire est théorique. En effet, les métastases osseuses sont dues à la diffusion sanguine de cellules circulantes qui vont se nicher dans l'os et peuvent rester quiescentes pendant longtemps. Dès l'apparition d'une métastase qu'elle soit unique ou multiple, on sait que d'autres métastases apparaîtront inexorablement dans un délai que l'on ne peut souvent pas évaluer. Quoiqu'il en soit, une métastase unique requiert un traitement particulier, en espérant, et ceci dépendra essentiellement du type histologique du cancer que les autres métastases apparaîtront dans un délai le plus long possible.
Si actuellement la plupart des auteurs s'accordent sur la nécessité d'un traitement de type carcinologique, dans tous les cas où il est possible devant une métastase de cancer de la thyroïde, dans tous les autres type de cancer, on aura tendance à préférer un traitement mini invasif assurant à la fois la stabilité osseuse et la destruction, si possible complète, de la lésion. Et ce, d'autant plus que l'espérance de vie est longue et que le cancer est réputé peu sensible au traitement oncologiques généraux.
Outre, la nature du cancer, le siège de la lésion rendant différente son accessibilité aux différentes techniques aura une importance capitale. Dans tous les cas, la décision thérapeutique devrait être prise au sein d'une réunion de concertation pluridisciplinaire. L'utilisation des différentes techniques chirurgicales ou mini-invasives va probablement, dans les prochaines années être considérablement modifiée, par le développement de la radiothérapie concentrée par les techniques d'irradiation multiples faisceaux.