Séance du mercredi 8 avril 2015

NOUVEAUTÉS EN CHIRURGIE THORACIQUE
14h30-17h00, Les Cordeliers
Modérateur : Dominique GRUNENWALD (Paris)

 

 

Introduction de la séance

 

Réhabilitation en chirurgie thoracique
Rehabilitation After Thoracic Surgery

BONNET F, YNINEB Y, SZYMKIEWICZ O Service d’Anesthésie – Réanimation - Pôle thorax voies aériennes - Hôpital Tenon - Groupe des Hôpitaux de l’Est Parisien - Assistance Publique Hôpitaux de Paris - Université Pierre & Marie Curie - Paris VI
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2015, vol. 14 (4), 011-013

Résumé
La chirurgie thoracique carcinologique est grevée d’une morbidité et d’une mortalité périopératoire non négligeables. Une procédure de prise en charge pré, per et postopératoire bien codifiée est susceptible de réduire la morbi-mortalité. Les mesures préopératoires incluent l’arrêt du tabac, des suppléments nutritionnels, la kinésithérapie et l’entrainement physique et éventuellement la ventilation non invasive. En peropératoire la réduction du volume courant et des apports hydro-sodés réduit l’incidence des complications postopératoire. En postopératoire, les patients doivent bénéficier d’une prise en charge proche de celle mise en œuvre en chirurgie abdominale incluant une analgésie efficace, une déambulation et une réalimentation orale précoce. L’impact de l’ensemble de ces mesures doit être évalué régulièrement dans chaque équipe.

Commentateur : Arlette COLCHEN-PERSONNE

Abstract
Thoracic surgery is associated with high morbidity and mortality rates. Postoperative morbidity and mortality are reduced by pre per and postoperative protocols of care. Preoperative habilitation to surgery includes cessation of smoking, nutritional support, physiotherapy and physical training, and occasionally non- invasive ventilation. Peroperatively Protective ventilation and goal-directed fluid management decrease the incidence of postoperative complications. Postoperative rehabilitation includes adequate pain control, deambulation, and early oral feeding. Supportive care protocols need to be evaluated regularly.

 

Segmentectomies pulmonaires mini-invasives chez des enfants de moins de un an
Minimal Invasive Lung Sparing Resections in Children below One Year of Age

REINBERG O (Lausanne)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2015, vol. 14 (2), 112-118

Résumé
Les malformations congénitales du poumon exposent l'enfant aux infections, aux pneumothorax et plus tardivement, aux tumeurs malignes. Elles incluent un ensemble hétérogène de malformations dont les plus fréquentes sont les malformations adénomatoïdes kystiques (MAKP), les séquestrations pulmonaires (SP) et les kystes bronchogéniques (KB). Pour cela, la plupart des auteurs recommandent la résection durant la 1ère année de vie, le poumon pédiatrique ayant encore un potentiel de croissance à cet âge. Le traitement conventionnel consistait en des lobectomies autrefois effectuées par thoracotomie, puis plus récemment par thoracoscopie. Ces lésions étant le plus souvent uni- ou bisegmentaires, des segmentectomies permettent d'épargner le tissu pulmonaire sain adjacent. Depuis 2007, nous les faisons par des techniques mini-invasives chez des petits enfants de moins de un an, avec des suites opératoires simples.
Nous présentons notre expérience de 18 enfants de quatre à 12 mois (moyenne sept mois) entre 2007 et 2014, ce qui constitue déjà une importante série par cette approche pour ces pathologies rares. Ils ont bénéficié de segmentectomies (simples ou bi-segmentectomies) par thoracoscopie avec cinq mini-thoracotomies d'extraction réalisées pour des malformations adénomatoïdes kystiques, des séquestrations intralobaires (extralobaires exclues) et des kystes bronchogéniques. Aucune conversion n'a été faite pour saignement. La durée moyenne de drainage thoracique est de 2,1 jours. Les complications étaient un emphysème sous-cutané sans conséquence et un pneumothorax asymptomatique après retrait du drain, qui s’est spontanément résolu.
Dans tous les cas, la malformation pulmonaire a été confirmée par la pathologie, mais dans quatre cas sa nature était différente de celle suspectée radiologiquement. Le suivi moyen est de 35 mois. Tous les patients restent asymptomatiques, avec un aspect symétrique des deux poumons.
Les malformations congénitales du poumon sont de plus en plus fréquemment détectées avant la naissance en raison des améliorations de l’imagerie prénatale. Nous sommes donc confrontés à plus de cas asymptomatiques. Une segmentectomie mini-invasive réalisée au cours de la 1ère année est une solution réaliste et sécuritaire pour ôter le risque de complication inhérente à la malformation et d'éviter les irradiations récurrentes liées à la surveillance radiologique.

Abstract
Congenital Lung Malformations (CLM) antenatally detected bear a risk of developing infections or pneumothorax during infancy and possible late malignancies. For these reasons most authors recommend resection during the 1st year of life. Lung-sparing segmentectomies have raised interest to avoid resecting normal pulmonary tissue when performing lobectomies. We review our experience with Minimal Invasive Lung-Sparing Resection (MILSR) below one year of age.
All patients <1y with antenatally diagnosed CLM, confirmed postnatally by 1 or 2 CT-scans, who underwent MILSR from 2007 to 2014 were reviewed. 18 patients ranging 4 to 12 mo (mean 7 mo) including 15 segmentectomies and 3 bisegmentectomies for 12 cystic congenital adenomatoid malformations (CCAM) or 4 intralobar sequestrations (ILSP) and 2 bronchial atresia.
8 segmentectomies were completed strictly thoracoscopically, 7 were done by thoracoscopy with a mini thoracotomy to end the dissection and extract large specimens. No conversion was done for bleeding. Chest drain was left in place for a mean duration of 2.1 d. Complications were one subcutaneous emphysema without consequence and one persistent asymptomatic pneumothorax after drain removal that resolved spontaneously. In 12/18 cases the malformation was confirmed at pathology, but its nature or grade was different of what was suspected in 6 cases: all 4 ILSP were correctly diagnosed; in 3 cases of CCAM the grade was different; 2 cases preoperatively described as bronchial atresia were CCAM, one of them including a bronchogenist cyst; one presumed CCAM was a bronchogenist cyst. Mean follow-up was 39 mo (9 to 72 mo). All patients remain asymptomatic, with symmetrical appearance of the 2 lungs. None of the imaging performed at a mean delay of 11 mo has shown a remaining lesion.
As CLM are more frequently detected due to antenatal imaging improvements, we are facing more asymptomatic cases. MILSR performed during the 1st year of life is a good and safe option to relieve the risk they bear and avoid recurrent irradiations related to radiologic observation.

 

La transplantation trachéale sans immunosuppression. Etude expérimentale sur modèle lagomorphe
Tracheal transplantation without immunosuppressive therapy in a rabbit model

WURTZ A, HYSI I, KIPNIS E, FAYOUX P, COPIN MC, ZAWADZKI C, JASHARI R, HUBERT T, UNG A, RAMON P - Clinique de chirurgie cardiaque et thoracique - CHU de Lille (1 et 2) - Université de Lille Nord de France – UDSL - IFR 114 - EA 2693 - Faculté de Médecine – Lille (1, 2, 6, 8 et 9) - Service de réanimation chirurgicale - CHU de Lille (3) - Pôle enfant - service de chirurgie ORL - CHU de Lille (4) - Institut de pathologie - CHU de Lille (5) - Institut d’hématologie-transfusion - CHU de Lille (6) - European Homograft Bank – Brussels – Belgium (7) - Département de pneumologie - CHU de Lille (10)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2015, vol. 14 (2), 119-128

Résumé
Objectifs. La transplantation trachéale soulève deux problèmes : l’absence de pédicule vasculaire individualisé, qui autoriserait une revascularisation immédiate du greffon et le rejet immunologique rendant nécessaire une immunosuppression, contre-indiquée en cancérologie. Pour résoudre ces problèmes, et compte tenu du rôle essentiel joué par l’épithélium respiratoire dans le rejet, nous avons expérimenté l’allogreffe trachéale dénudée d’épithélium et cryopréservée.
Méthodes. Onze lapins New Zealand femelles furent donneurs de trachée laquelle fut dénudée de son épithélium et cryopréservée. Lors de la première phase (transplantation hétérotopique), 13 lapins mâles ont reçu des segments longs de trachée (10/12 anneaux), avec ou sans tuteur interne, enveloppés dans un lambeau de fascia latéro-thoracique. Puis, 14 transplantations orthotopiques ont été effectuées : 3 avec des segments longs, après revascularisation fasciale hétérotopique et 11 en un temps, de segments moyens (6/8 anneaux) ou courts (4/5 anneaux), revascularisés in situ par les muscles sous hyoïdiens. Un suivi bronchoscopique a été effectué. Aucun traitement immunosuppresseur n’a été administré.
Résultats. Après transplantation hétérotopique, les greffons avec tuteur ont gardé une morphologie satisfaisante, jusqu’à J91. Après transplantation orthotopique, quatre animaux ont été sacrifiés de J33 à J220. La survie des autres a varié de zéro à 47 jours (moyenne 19,6 ± 16,7). En dehors des trois animaux décédés de complications lors de la deuxième phase, les greffons avaient une rigidité satisfaisante et étaient revascularisés. Microscopiquement, la néo angiogenèse était présente et l’inflammation variable, mais dépourvue de lymphocytes. Les événements apoptotiques évoquaient un rejet a minima. Les anneaux cartilagineux se calcifiaient progressivement, assurant la rigidité des greffons. Après transplantation orthotopique, des degrés variables de prolifération endoluminale fibroblastique provenant de la lamina propria étaient observés, s’organisant en fibrose collagène après 45 jours. La régénération épithéliale était constante. Finalement, la fibrose de la lamina propria a entraîné une sténose critique, essentiellement chez les animaux ayant reçus des greffons longs et moyens.
Conclusion. Nous avons démontré la revascularisation, la tolérance immunitaire et la conservation des qualités biomécaniques de l’allogreffe trachéale dénudée d’épithélium et cryopréservée en hétérotopie, ainsi que la faisabilité de la transplantation trachéale orthotopique sans immunosuppression avec ce greffon. Des investigations dans une espèce de grande taille sont nécessaires avant d’envisager des applications cliniques.

Abstract
Objectives: Tracheal transplantation raises 2 major issues: the lack of an individualized vascular pedicle, which impedes immediate revascularization of the graft, as in solid organ transplantation, and immune rejection with the need for immunosuppressive therapy, strictly contraindicated in malignancies. Given that respiratory epithelium plays an essential role in the immune response of tracheal allografts, we have investigated the epithelium-denuded-cryopreserved tracheal allograft in a rabbit model.
Methods: Eleven adult female New Zealand rabbits served as donors of tracheas that were denuded of their epithelium and then cryopreserved. During the first phase of the study, 13 males were used as recipients. Following graft wrap using a lateral thoracic fascial flap, long allograft segments (10/12 tracheal rings) were implanted under the skin. During the second phase of the study, tracheal transplantation was performed in 14 male recipients receiving: (i) long allograft segment with prior heterotopic revascularization; (ii) average allograft segment (6-8 tracheal rings) or (iii) short allograft segment (4-5 tracheal rings), with single-stage orthotopic revascularization by graft wrap with the strap muscles. Bronchoscopic follow-up was performed. No immunosuppressive therapy was administered.
Results: After heterotopic transplantation allografts displayed satisfactory tubular morphology up to Day 91 provided that an endoluminal tube was inserted. After orthotopic transplantation, four animals were sacrificed from Day 33 to Day 220. The survival time of other recipients was 0 to 47 days (mean 19.6±16.7.3 days). Aside from 3 animals that died from complications, all allograft segments had satisfactory stiffness, were well vascularized, showed varying levels of neoangiogenesis and inflammatory infiltration devoid of lymphocytes, and showed evidence of only low levels of apoptosis suggestive of minimal rejection. Cartilage rings exhibited calcification deposits increasing over time, ensuring graft stiffness. After orthotopic transplantation, varying degrees of fibroblastic proliferation originating from the lamina propria was observed in the lumen of allografs and evolved over time into collagenized fibrosis in animals surviving over 45 days. Epithelial regeneration was constantly observed. Intense fibroblastic proliferation led to stenosis mainly in animals receiving long and average allograft segments.
Conclusion: We have demonstrated satisfactory neoangiogenesis, immune tolerance and strain abilities of the epithelium-denuded-cryopreserved tracheal allograft in heterotopy despite the absence of immunosuppressive drugs, and then the feasibility of orthotopic transplantation with such allografts. Similar studies need, however, to be conducted in bigger mammals before considering clinical applications.

 

E-Learning en chirurgie ou la formation des chirurgiens par l’image, exemple de l’Institut Thoracique de Tenon

ASSOUAD J, DEBROSSE D, GOUNANT V, GRUNENWALD D (Paris)

Résumé
Depuis des siècles l’image est au centre de la formation des chirurgiens au travers des schémas d’anatomie, des descriptions de techniques opératoires ou d’instruments. La formation des chirurgiens s’est également toujours réalisée autour d’un maitre que l’on venait observer parfois de très loin. Or la formation chirurgicale actuelle continue à utiliser ces principes ancestraux, mais utilise pour cela les nouveaux moyens technologiques que sont l’internet, la transmission par satellite ou encore les applications téléchargeables sur tablette ou téléphone portable. Ces moyens modernes sont une aide à la formation mais ne remplacent d’aucune manière celle acquise au contact direct des maitres de chirurgie. Nous présenterons l’expérience de l’Institut Thoracique de Tenon, plateforme d’E-Learning, d’échange et de communication multidisciplinaire autour des pathologies du thorax.

Commentateur : Dominique FRANCO (Clamart)

 

Approche mini invasive d’une tumeur pulmonaire complexe avec atteinte vertébrale : Apport de l’imagerie per opératoire et de la robotique

BASTE JM, FOULONGNE E, OULD SLIMANE M, DUJARDIN F, FREGER P, PEILLON C (Rouen)

Résumé
Objectif : L’exérèse de certaines tumeurs pulmonaires avec atteinte vertébrale représente un challenge chirurgical avec une morbi-mortalité péri-opératoire importante.
L’avènement de l’imagerie per-opératoire (Système O-Arm Surgical system) associé à la robotique (Da Vinci Intuitive Surgical) pourrait permettre de réduire cette morbidité importante tout en assurant la qualité d’exérèse.
L’objectif de notre travail est de mettre en évidence les avantages réels et potentiels de l’innovation technologique mais aussi de dis-cuter des séquences opératoires décalées dans le temps.

Cas clinique : Il s’agit d’une femme de 62 ans présentant un carcinome classé T4N0 du LSD sur le bilan d’extension (TDM, Pet scan, IRM). La lésion du lobe supérieure droit envahit le foramen T2, et il existe un doute sur l’envahissement de la face latérale des ver-tèbres T2-T3 et des arcs postérieurs de la deuxième et la troisième côte.
Un traitement d’induction par radio chimiothérapie est alors proposé après avis chirurgical sur la résécabilité potentielle de la lésion.
Le contrôle scanner et IRM post-induction montre une réponse partielle de la lésion avec toujours un doute sur l’envahissement du fo-ramen T2 et de la paroi postérieure.
Après discussion avec l’équipe d’orthopédie, il est proposé à la patiente une exérèse en deux temps sur deux blocs différents:
-Premier temps (J0) Abord postérieure en décubitus ventral : une libération et ligature intracanalaire de la racine de T2 et T3 par voie endocanalaire après laminectomie et arthrectomie T2-T3 sont réalisées, associé à une section de l’arc postérieure de T3-T4 sous assistance scannographique et neuro-navigation per–opératoire (System O-Arm Surgical System / Medtronic). Une fixation postérieure par ostéosynthèse est alors réalisée de principe pour stabilisation du rachis. L’utilisation du scanner per-opératoire permet la section par la voie d’abord médiane des arcs costaux de T3-T4.
-Deuxième temps (J4) : Réalisation de la lobectomie supérieure droite avec curage radicale et libération de la paroi thoracique par voie totalement endoscopique robot assistée.
La patiente est ensuite transférée en soins intensifs puis dans le service avec réhabilitation précoce à J2. La sortie du service est auto-risée à J7 du premier temps opératoire avec transfert dans un centre de rééducation.
Le contrôle clinique et radiologique à un mois est satisfaisant avec une reprise d’activité partielle et une bonne qualité de vie. Le compte rendu montre une résection complète R0 ypT3N0.

Conclusion : L’innovation technologique associée à une stratégie chirurgicale en deux temps pourrait améliorer les résultats péri opératoires de cette chirurgie complexe.

Commentateur : Christian MAZEL (Paris)