Séance du mercredi 2 décembre 2015

CHIRURGIE CARDIO-THORACIQUE INTERVENTIONNELLE : TRAITEMENTS MINI-INVASIFS EN PATHOLOGIES NON CANCÉREUSES
14h30-17h00, Les Cordeliers
Modérateurs : Iradj GANDBAKHCH et Bertrand DORÉ (Paris)

 

 

Introduction générale de la séance

MANTION G, MARRE P

 

Introduction thématique

GANDJBAKHCH I, DORE B

 

Implantation de prothèses valvulaires mitrales par voie percutanée

VAHANIAN A, HIMBERT D, BROCHET E, NATAF P (Bichat, Paris)

Résumé
Le succès de l’implantation de valves aortiques par voie percutanée a conduit à envisager l’implantation de valves mitrales par cathétérisme.
Aujourd’hui l’expérience clinique est beaucoup plus limitée pour la mitrale que pour l’aorte et est essentiellement composée d’implantations valvulaires pour dégénérescence de bio-prothèse ou d’annuloplastie. Le registre mondial fait état de 400 cas. Ces implantations sont réalisées le plus souvent par voie trans-apicale mais aussi par voie trans-septale. Cette expérience préliminaire, effectuée chez des patients à très haut risque pour la chirurgie ou inopérables, suggère que la technique est faisable. La sécurité paraît acceptable. L’efficacité est bonne en dehors de l’implantation de valves de petit calibre. Enfin le suivi est encore trop limité pour qu’il soit possible de parler de résultats à long terme.
En dehors de cela, quelques implantations (environ 50) ont été effectuées sur des valvulopathies mitrales natives. La mortalité des premiers cas a été très élevée, plus en raison de l’état clinique précaire des patients que la technologie elle-même. Ces résultats très préliminaires suggèrent que les défis pour le futur seront : le positionnement, la fixation de ces prothèses, leur sécurité en terme de fuite para-valvulaire, de risque d’obstruction de la chambre de chasse ventriculaire, les thromboses, et enfin bien sûr la durabilité.
Finalement une quarantaine de cas d’implantation de prothèses, habituellement utilisées pour l’implantation aortique, ont été faites chez des patients présentant des calcifications massives de l’anneau mitral. Là aussi les résultats sont très préliminaires et font état de difficultés techniques importantes et d’une mortalité très élevée (40%) probablement due à la sévérité de l’état clinique des patients et à une mauvaise sélection.
En conclusion, l’expérience actuelle de l’implantation de prothèses mitrales par voie percutanée suggère qu’après échec des techniques chirurgicales la voie percutanée est faisable et donne des résultats prometteurs mais encore à évaluer. L’implantation de prothèses sur valves natives est à ses balbutiements mais constituera sans doute un appoint intéressant aux techniques de réparation valvulaire mitrale percutanée.

 

La technique d’ablation dans le traitement de la Fibrillation Atriale

HIDDEN LUCET F (Pitié, Paris)

Résumé
La Fibrillation Atriale (FA) est l’arythmie actuellement la plus répandue. Les traitements antiarythmiques ne sont que palliatifs et d’efficacité limitée, épuisant le plus souvent leur effet après quelques mois à quelques années. Leur efficacité n’a jusque là jamais été démontrée en terme de survie, et leur effet délétère parfois rapporté, en particulier chez le patients à FE VG abaissée ou avec insuffisance cardiaque.
Les mécanismes d’initiation et d’entretien de la FA sont variés : extrasystoles initiatrices le plus souvent originaires du pied des veines pulmonaires, rotors, micro réentrées. L’évolution de la FA paroxystique sur cœur sain dont l’ablation est maintenant bien codifiée et efficace, à la FA permanente qui s’accompagne d’une fibrose de l’oreillette peu à peu irréversible qui rend l’ablation plus risquée et incertaine est variable dans le temps d’un individu à l’autre. Plus l’intervention est réalisée précocement dans le cours de la maladie, meilleur est le taux de succès.
Les techniques d’ablation font appel à la destruction par radiofréquence ou cryoablation des zones impliquées dans la genèse ou l’entretien de la FA : isolation des veines pulmonaires, ablation de potentiels fragmentés, localisation et destruction des rotors. La technique d’ablation de la FA paroxystique sur cœur sain, bien codifiée, a nettement démontré son efficacité par rapport aux antiarythmiques. Ces bons résultats la font proposer en première alternative à un traitement médicamenteux chez les patients symptomatiques dans les recommandations internationales. Les techniques d’ablation de la FA persistante, en particulier de longue durée, sont plus discutées et de moins bon résultats à long terme, et peuvent faire appel à des abords endo et épicardiques réalisés en équipe mixte médico-chirurgicale pour les cas les plus difficiles.

 

Fermeture percutanée de l’auricule gauche

MONTALESCOT G (Pitié, Paris)

Résumé
La fibrillation atriale (FA) est aujourd’hui l’arythmie la plus fréquente, fortement liée au vieillissement de la population. Elle multiplie le risque d’accident vasculaire cérébral (AVC) par cinq. L’auricule gauche est issue d’une rémanence de l’oreillette gauche embryonnaire primitive qui se développe durant la 3e semaine de gestation. L’auricule gauche est le siège de thrombose chez les patients en FA à l’origine de 9 accidents emboliques sur 10. La fermeture percutanée de l’auricule gauche consiste à implanter une prothèse à l’entrée de cette cavité cardiaque afin de prévenir les embolies à partir de cette auricule et d’éviter ainsi le risque d’AVC. Fermer l’auricule gauche c’est tarir la source d’embolies et c’est aussi s’affranchir d’un traitement anticoagulant a vie. Le geste se fait par ponction de la veine fémorale pour monter la gaine et l’aiguille qui permettent la ponction transseptale, puis la montée de gaine pour amener la prothèse à l’entrée de l’auricule. La totalité de l’ostium de l’auricule doit être obturée. La stabilité du dispositif implanté, est facilitée par une taille de prothèse supérieure à la taille de l’auricule et par des crochets situés tout autour de la prothèse. Les contre-indications à la fermeture de l’auricule gauche sont essentiellement la présence de thrombus dans l’oreillette ou l’auricule gauche et des diamètres de l’ostium de l’auricule inappropriés (< 10 mm ou > 30 mm). L’indication principale de la fermeture de l’auricule gauche est la contre-indication aux anticoagulants chez un patient en FA à haut risque emboligène.

 

Le traitement percutané des cardiopathies congénitales en pédiatrie

BONNET D (Necker, Paris)

Résumé
Le cathétérisme cardiaque interventionnel dans les cardiopathies congénitales a été un des premiers pas vers la prise en charge des cardiopathies congénitales précédemment létales du nouveau-né. En effet, c’est par l’atrioseptotomie percutanée que la survie des nouveau-nés ayant une transposition des gros vaisseaux a été rendue possible sans intervention chirurgicale à la naissance et que ce sont développés successivement les réparations par switch atrial puis artériel. Suivant les développements de l’angioplastie coronaire, les techniques de dilatation valvulaire et vasculaires ont pris leur essor permettant le traitement percutané parfois définitif de cardiopathies obstructives du cœur droit et du coeur gauche. L’innovation réelle est venue des techniques de fermeture percutanée des shunts gauche droite qui est maintenant la technique de choix pour les communications interauriculaires, le canal artériel et quelques communications interventriculaires. La volonté de faire de moins en moins invasif s’est étendue au remplacement valvulaire pulmonaire percutané pour pallier les insuffisances valvulaires pulmonaires des tétralogies de Fallot vieillies. Le vieillissement de la population des congénitaux opérés fait de ces techniques une alternative élégante et efficace à des interventions chirurgicales itératives. Les perspectives de progrès se situent aujourd’hui dans le cathétérisme interventionnel fœtal qui a comme philosophie d’améliorer le pronostic postnatal des cardiopathies obstructives droites et gauches en favorisant la croissance des ventricules. Enfin, l’interaction entre cathétériseurs et chirurgiens est certainement la voie à suivre avec le développement des techniques hybrides synchrones ou successives des malformations les plus complexes.

 

Les prothèses endo-bronchiques : une aide à la cicatrisation des bronches greffées ?

COLCHEN PERSONNE A, GONIN F, NTO MT, CHAPELIER A (Groupe de transplantation pulmonaire Hôpital Foch Suresnes)

Résumé
En dépit de l’amélioration des techniques chirurgicales, de la stratégie de l’immunosupression, de la préparation des patients la cicatrisation des bronches greffées reste une des difficultés de la transplantation pulmonaire. En effet la cicatrisation de l’anastomose bronchique et de la bronche greffée se fait parfois, en raison de l’ischémie de la muqueuse, vers une banale desquamation mais parfois aussi vers une sténose granulomateuse ou fibreuse ou vers une malacie. Garder une lumière bronchique ouverte est une nécessité absolue qui permettra de garder fonctionnel le parenchyme pulmonaire, d’éviter la surinfection des bronches d’aval et, selon certaines publications, le développement d’une bronchiolite oblitérante.
Pour se faire plusieurs techniques sont utilisées : dilatation au ballon ou mécanique, cryothérapie, laser, brachythérapie et mise en place d’un tuteurage permettant de conserver la lumière bronchique ouverte. Tous les types de prothèse sont proposés : en silicone droite ou bifurquée, en T (comme les tubes de Montgomery) ou plus adaptée à l’anatomie de la bronche droite (Oki) ou bien les prothèses auto expansibles en Nitinol plus ou moins couvertes. Les unes et les autres ont leurs avantages et leurs inconvénients : migration, formation de granulomes, récidive de la sténose.
Nous rapportons notre expérience sur dix années de 2006 à 2014. Nous avons exclu les patients n’ayant pas survécu plus d’un an pour pouvoir apprécier la tolérance et l’efficacité à long terme de ces tuteurages. Nous avons ainsi étudié les dossiers de 353 patients ce qui correspond à 682 « bronches à risques ». 9,8%de ces bronches ont été traitées par tuteurage. Cela représente 54 patients traités pour mucoviscidose 26 fois, emphysème 18 fois, fibrose 8 fois DDB 1 fois, lymphangiomyomatose 1 fois. Pour 34 la ou les prothèses ont pu être retirées définitivement sans récidive de la sténose avec un gain fonctionnel respiratoire se maintenant. Pour les 20 autres patients au moins une prothèse a dû être conservée avec une excellente tolérance.
Par la cicatrisation bronchique à la taille de la prothèse mise en place on peut donc dire que celle-ci apporte effectivement une aide à la cicatrisation des si fragiles bronches greffées.


Commentaire : Alain CHAPELIER (Foch, Suresnes)
Contrairement à la transplantation cœur-poumon où la vascularisation de l’anastomose trachéale du bloc cœur-poumon est assurée par le réseau artériel collatéral coranaro-bronchique, la transplantation pulmonaire expose au risque d’ischémie de l’arbre aérien transplanté en rapport avec l’interruption de la vascularisation bronchique systémique.
D’un point de vue chirurgical, plusieurs approches ont visé à pallier cette réalité anatomique. Au début des années 1990, à Bordeaux, Louis COURAUD et Eugène BAUDET avaient mis au point la technique de transplantation des deux poumons en monobloc avec anastomose trachéale et revascularisation des artères bronchiques conservées dans une collerette aortique prélevée sur le donneur et revascularisée par un greffon saphène. Cette technique pouvait offrir une vascularisation parfaite de l’anastomose trachéale dans les meilleurs cas. Cependant, en raison de nombreuses variations anatomiques de naissance des artères bronchiques et de la difficulté à standardiser cette technique, celle-ci a été abandonnée. La transplantation bi-pulmonaire séquentielle ou double transplantation mono pulmonaire développée à Foch est ainsi devenue la technique standard pour toutes les équipes. Afin de réduire la longueur de l’arbre aérien transplanté, l’anastomose est faite de chaque côté sur l’anneau cartilagineux en amont du carrefour lobaire supérieur.
L’ischémie siège au niveau de l’anastomose et en aval de celle-ci, plus ou moins loin sur l’arbre aérien transplanté. Elle peut être responsable de désunion ou de sténose. Le taux de complication bronchique en transplantation pulmonaire rapporté dans la littérature varie entre 2 et 20 %, l’incidence de ces complications ayant diminué dans la période récente. Plusieurs facteurs étiologiques sont retrouvés, tels que la durée d’ischémie du greffon, l’importance du support inotrope péri opératoire et la durée de ventilation chez les patients transplantés dont l’état respiratoire nécessite la poursuite de la ventilation artificielle.
Arlette COLCHEN, dont l’expérience est grande, a montré aujourd’hui les aspects lésionnels rencontrés et décrit les différents gestes d’endoscopie bronchique interventionnelle qui peuvent être associés et surtout répétés dans le temps, soulignant l’importance de cette activité d’expertise dans un service de chirurgie thoracique et de transplantation pulmonaire. Elle a montré que dans deux tiers des cas environ, les prothèses endobronchiques ont pu être retirées, après avoir permis d’obtenir une cicatrisation de deuxième intention de l’arbre aérien.