Séance du mercredi 16 mars 2016

NOUVEAUTÉS EN CHIRURGIE ENDOCRINIENNE : SÉANCE COMMUNE AVEC L’AFCE
14h30-17h00, Les Cordeliers
Modérateur : Fabrice MENEGAUX (Paris)

 

 

Introduction générale de la séance

JUDET H, MARRE P, MASSIN P

 

Introduction thématique de la séance

MENEGAUX F

 

Le score ARS (Aldosteronoma Resolution Score) est-il valable dans une population française ? Résultat d’une étude multicentrique. Eric MIRALLIÉ, Christophe Trésallet, Florian Fanget, Claire Nominé, Vincent Arnault, Jean-Baptiste Finel, Antoine Hamy, Loïc de Calan, Laurent Brunaud, Jean-Christophe Lifante, Fabrice Menegaux, Jean-Benoit Hardouin, Ludwig Pasquier, Claire Blanchard (Nantes, Paris-La Pitié Salpêtrière, Lyon-Sud, Nancy, Tours, Angers).

MIRAILLE E (Nantes)

Résumé
L’hyperaldostéronisme primaire est responsable d’une hypertension artérielle (HTA) habituellement curable. Une étude américaine, portant sur une série de patients de San Francisco et de la Mayo Clinic, a mis au point un score prédictif de guérison de l’HTA après surrénalectomie pour adénome de Conn (ARS pour Aldosteronoma Resolution Score). Le but de notre étude était de valider ce score sur une population française.
Matériel et Méthode. Les données concernant les patients pris en charge, pour adénome de Conn, entre 2002 et 2015, dans 6 centres Hospitalo-Universitaires français ont été collectées. Le diagnostic a toujours été confirmé par la biologie et un nodule visible sur le scanner surrénalien. Un cathétérisme veineux surrénalien a été effectué lorsque le scanner ne permettait pas de latéraliser de façon formelle. Le score ARS est basé sur 4 variables : sexe féminin, IMC ≤25kg/m2, une durée d’HTA ≤6 ans, un nombre de médicaments anti-HTA ≤2. Un point est attribué à chacun des 3 premiers critères et 2 points au dernier. Les patients étaient considérés guéris si leur tension artérielle était normalisée sans traitement à 6 mois. Les patients dont l’anatomo-pathologie retrouvait a postériori une hyperplasie surrénalienne ont été exclus.
Résultats. Cette étude rétrospective a initialement inclus 296 patients. Un suivi adéquat avec calcul du score ARS a été obtenu chez 272 patients (54,4% de femmes). L’âge moyen était de 50,1±10,7 ans, la durée moyenne d’HTA était de 6,4 ±6,6 ans, l’IMC moyen était de 26,5 ±4,8 kg/m2 et le nombre moyen de médications anti-HTA était de 2,26 ±1,16. Quarante patients ont eu un cathétérisme veineux. Une surrénalectomie laparoscopique a été effectuée chez 97,3% des patients avec une mortalité de 0,3% et une morbidité de 3%. Cent dix-sept patients ont été guéris (42,3%), la kaliémie a été normalisée chez 97,7%. En analyse multivariée, les risques relatifs pour les critères sexe féminin, IMC ≤25kg/m2, durée d’HTA ≤6 ans, nombre de médicaments anti-HTA ≤2 étaient respectivement : 1,60 (p=0,09), 1,77 (p=0,04), 1,28 (p=0,4) et 3,41 (p<0,01). Les pourcentages de patients guéris étaient de 22,2% pour les scores ARS de 0-1, 41,4% pour un score de 2-3, 74,0% pour un score 4-5. L’IMC et le nombre de médications anti-HTA étaient les deux facteurs significatifs avec une sensibilité et une spécificité égales.
Conclusion. Dans une population française, le score ARS n’est pas aussi performant que dans une population américaine. Les différences de résultats peuvent être dues à des facteurs métaboliques ou génétiques.

Commentateur : Muriel MATHONNET (Limoges)

 

Chirurgie personnalisée pour les tumeurs chromaffines (phéochromocytomes, paragangliomes)

GUERIN C, SEBAG F (Marseille)

Résumé
La prise en charge chirurgicale des tumeurs à cellules chromaffines repose sur le contrôle tumoral (local, risque de malignité et/ou de récidive à distance) et le contrôle sécrétoire. Les paragangliomes de la tête et du cou sont le plus souvent non secrétant et leur pronostic dépend de l’envahissement local tumoral bien qu’ils soient le plus souvent bénins. Le pronostic des paragangliomes thoraciques/abdominaux et des phéochromocytomes va quant à lui dépendre des accidents dont ils peuvent être responsables mais aussi de leur potentiel de malignité. Un paragangliome ou phéochromocytome malin est défini par la présence de métastases c'est-à-dire du tissu chromaffine dans un site où il ne devrait pas y en avoir. La présence d’une mutation génétique chez un patient et son type sont des atouts majeurs pour proposer une prise en charge prophylactique ou thérapeutique adaptée. En effet, celle-ci peut conditionner la présentation clinique, le profil sécrétoire mais aussi la sensibilité de l’imagerie. Ainsi la connaissance du statut sporadique ou familial peut modifier le bilan clinique, biologique mais surtout l’imagerie préopératoire. Celle-ci guidera au mieux la chirurgie. A titre d’exemple, les mutations SDHB et SDHD entrainent des phéochromocytomes le plus souvent unilatéraux mais avec un risque de malignité pouvant aller jusqu’à 40%. A contrario, les phéochromocytomes des patients porteurs d’un syndrome NEM2 ou VHL sont le plus souvent bilatéraux mais avec un risque de malignité de moins de 5%. Une surrénalectomie totale uni ou bilatérale n’est donc plus la règle chez les patients porteurs d’une mutation génétique et des surrénalectomies d’épargne peuvent leur être proposé avec un taux de récidive comparable aux surrénalectomies totales et une fonction corticosurénalienne normale dans plus de 50% des cas.
Ainsi, la connaissance de la localisation tumorale et du caractère sporadique ou génétique (avec le type de mutation) d’un patient porteur d’un paragangliome et/ou d’un phéochromocytome va permettre de proposer une prise en charge et un suivi personnalisé à chaque patient.
Guerin C, Paladino NC, Castinetti F, Archier A, Henry JF, Taieb D, Sebag F (Marseille)

Commentateur : Christophe TRESALLET (Paris)

 

Tumeur endocrines de l’appendice : trop de colectomies droites !

MATHONNET M (Limoges)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2017, vol. 16 (2), 001-004

Résumé
Muriel MATHONNET (Limoges) : Tumeur endocrines de l’appendice : trop de colectomies droites !
Les tumeurs neuroendocrines (TNE) de l’appendice représentent 30 à 80% des tumeurs appendiculaires. Elles sont découvertes de manière fortuite dans 0,1 à 2,3% des pièces opératoires. Soixante à 80% sont infracentimétriques et situées à la pointe appendiculaire. La survie globale à 5 ans est excellente, proche de 95%.
L’ENETS a édité en 2012 des recommandations1 de prise en charge préconisant une colectomie droite avec curage ganglionnaire pour les tumeurs dépassant 2 cm, et les tumeurs dont la taille est comprise entre 1 et 2 cm, si existaient des critères péjoratifs (tumeur localisée à la base appendiculaire, présence de métastase ganglionnaire, envahissement du méso-appendiculaire, présence d’embols veineux ou lymphatiques, ou TNE G2). Ces recommandations ont été mises à jour en 20162, en précisant la notion d’envahissement du méso-appendiculaire.
En analysant de manière rétrospective le Cancer Data Base, Nussbaum3 a retrouvé qu’en moyenne, 40% des patients ayant une TNE infra-centimétrique avait eu une colectomie droite, que ce chiffre s’élevait à 60% si la taille des TNE était comprise entre 1 et 2 cm, et atteignait 80% au-delà.
Compte tenu, d’une part du pronostic à long terme des TNE appendiculaires, et de leurs caractéristiques, et d’autre part de la morbidité induite par une appendicectomie comparée à celle attendue après colectomie droite, l’indication d’un geste complémentaire après découverte fortuite d’une TNE sur pièce d’appendicectomie doit reposer sur des critères précis et être discuter en comité pluridisciplinaire.

Commentateur : Éric MIRALLIE (Nantes)

 

Nerf récurrent : état de l’Art médico-légal et synthèse des recommandations AFCE sur la neurostimulation.

TRESALLET C (Paris)

Résumé
Le but du neuromonitoring est de diminuer le risque de lésions du nerf laryngé récurrent (NLR) lors de la chirurgie thyroïdienne. Les études cliniques ne démontrent cependant pas une réduction significative du taux de paralysie récurrentielle. Trois fonctions du neuromonitoring semblent se dégager : aide à l’identification du NLR et à sa dissection, prédiction de la fonction du NLR en postopératoire et identification du site de lésion. L’un des principaux objectifs des recommandations AFCE était de se prononcer sur le caractère opposable ou non de cette technique dans le cadre de la chirurgie thyroïdienne et parathyroïdienne, en l’état actuel des connaissances scientifiques et d’évaluer l’état du droit depuis l’apparition de cette technique.


Commentateur : Frédéric SEBAG (Marseille)

 

Quelles indications et quelle étendue pour les curages ganglionnaires dans les cancers différenciés de la thyroïde ? Comment interpréter les nouvelles recommandations américaines ?

DONATINI G (Poitiers)

Résumé
L’atteinte ganglionnaire est présente dans 20 à 50% des cancers thyroïdiens différenciés dans les différentes séries de la littérature. Les micro-métastases ganglionnaires peuvent même approcher les 90%, mais leur impact sur le pronostic est incertain. Par conséquence, l’intérêt du curage ganglionnaire central ou latéral à titre prophylactique est bien aussi très controversé1. De nombreuses sociétés françaises (SFE, GRT, SFMN, AFCE, SFORL) recommandent un curage central et/ou latéral pour carcinome thyroïdien différencié avec atteinte ganglionnaire confirmé en pré ou peropératoire, tandis que la dissection prophylactique est discutée, car le curage prophylactique n’a démontré aucun impact sur la survie. Les critères de mauvais pronostic (âge <15 ou >45 ans, présence d’extension extra thyroïdienne, stade T3-T4, métastases ganglionnaires) peuvent aider à la décision. Les nouvelles recommandations de l’American Thyroid Association (ATA), récemment publiées, proposent le curage thérapeutique du compartiment central pour les patients avec adénopathies métastatiques, tandis que la dissection prophylactique du compartiment peut être envisagée pour les cancers à haut risque: maladie multifocale, l'âge <15 ou> 45 ans, présence d’extension extra-thyroïdienne, tumeurs primitives avancés (T3 / T4) ou métastases ganglionnaires (N1b)2. Concernant l’étendue des curages, la cartographie est du plus grand intérêt afin que tous les auteurs parlent d’une même voix. (Compartment central VI) (Compartment lateral II, III, IV) (Spinal (V).
En pratique, nous croyons raisonnable d’appliquer les recommandations ATA comme suit:
• Cancer T1 / T2 à bas risque: thyroïdectomie totale ± curage prophylactique région VI homolatéral à la tumeur
• Cancer T3 / T4 ou à haut risque cN0 : thyroïdectomie totale, plus curage région VI homolatéral ainsi que une biopsie avec examen extemporanée sur la région III / IV, et extension du curage en fonction du résultat.
• Carcinome TxN1: thyroïdectomie totale plus curage central et latéral du même coté de la tumeur, donc compartiments II, III, IV, VI.
Gianluca Donatini, Federica Scipioni, Marion Castagnet, Jacques Barbier, Jean-Louis KRAIMPS (Poitiers)

Commentateur : Fabrice MENEGAUX (Paris)

 

Le registre « StuDoQ|Pancreas » de l'Association Allemande de Chirurgie Générale et Viscérale (DGAV) - un outil multi-institutionnel de mesure de la qualité et d'investigation des résultats en chirurgie pancréatique. Application à l'exemple des tumeurs neuroendocriniennes non fonctionnelles du pancréas (NF-pNET)
The StuDoQ|Pancreas Registry of the German Association for General and Visceral Surgery - a Multi-Institutional Tool for Quality Assessment and Outcomes Research in Pancreas Surgery. The Example of the Non-Functional Neuroendocrine Pancreatic Tumors (NF-pNET)

BILLMANN F, BAUSCH D, WELLNER U, KECK T (Allemagne) - Département de chirurgie - CHU de Schleswig-Holstein
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2016, vol. 15 (4), 001-007

Résumé
Le nombre des résections pancréatiques, réalisées dans le cadre du traitement des tumeurs neuroendocriniennes (pNETs) du pancréas, a augmenté au cours des dernières décennies. La morbidité reste haute, et de nouvelles indications opératoires comme la chirurgie palliative des pNETs vont de pair avec un risque périopératoire accru. De plus, l'application de techniques mini-invasives est en plein essor dans le cadre de la chirurgie pancréatique. L'évaluation des résultats de cette chirurgie, en dehors des centres spécialisés et en particulier en ce qui concerne les techniques mini-invasives, reste limitée. Dans le but d'établir un instrument national de mesure de la qualité et d'évaluation des résultats en chirurgie pancréatique, l'Association Allemande de Chirurgie Générale et Viscérale (DGAV) a développé le registre « StuDoQ|Pancreas ».
Un ensemble de données de base et de facteurs de risque ont été sélectionnés à partir d'une revue de la littérature actuelle. Le détail des procédures chirurgicales, couvrant tout le spectre de la chirurgie pancréatique et des procédures palliatives, a été pris en compte et collecté. Durant les deux premières années de mise en place, plus de quarante départements allemands de chirurgie ont rejoint le registre. Les analyses initiales ont démontré la validité du registre et la possibilité d'études randomisées fondées sur ce dernier. Nous avons centré notre présentation sur l'utilisation de cet instrument pour l'étude des tumeurs neuroendocriniennes du pancréas. Son potentiel au niveau international semble évident; nous invitons, par conséquent, nos partenaires internationaux à participer à ce registre.

Abstract
The number of pancreatic resections performed for various pathologies, and especially neuroendocrine tumors (pNET), has been increasing over the last decades. Morbidity remains high, and emerging indications like palliative surgery of neuroendocrine pancreas tumors carry an increased operative and perioperative risk. Furthermore, minimal-invasive approaches are increasingly applied in pancreatic surgery. Several analyses have demonstrated a significant volume-outcome relationship in pancreatic surgery. Data regarding pancreatic surgery outside of the specialized center setting and regarding minimal invasive techniques remains limited. With the aim to establish a tool for national quality assessment and outcomes research, the German Association for General and Visceral Surgery (DGAV) established the StuDoQ|Pancreas registry.
An array of baseline and risk factors was selected from review of the current literature. Details of the surgical procedure were included, covering the whole spectrum of pancreatic resection and palliative procedures. During the first 2 years after implementation, more than 40 German surgery departments have joined the registry. Initial analyses demonstrate validity of risk factors and feasibility of outcomes research including minimal invasive procedures, as well as the potential for randomized registry trials. Our aim was to demonstrate the registry as a potent aid to investigate neuroendocrine tumors of the pancreas. It is devoted to become a powerful international tool for quality control and the implementation of large studies; thus, participation of international members is welcomed.