Séance du mercredi 10 mai 2017

CHIRURGIE RÉGÉNÉRATRICE : SÉANCE COMMUNE AVEC LA FONDATION DE L’AVENIR
14h30-17h00, Les Cordeliers
Co-Présidence : Dominique FRANCO (ANC), Dominique LETOURNEAU (FDA) Modérateurs : Philippe MÉNASCHÉ (ANC et FDA), Guy MAGALON (ANC et FDA) et Catherine LE VISAGE (FDA)

 

 

Introduction générale de la séance

FRANCO D, MARRE P, LE FLOC PRIGENT P, JOHANET H

 

Introduction thématique de la séance

MENASCHE P, MAGALON G, LE VISAGE C

 

Médicaments de Thérapie Innovante : aspects réglementaires et fabrication

LARGHERO J (Paris)

Résumé
Les biotechnologies cellulaires (thérapies cellulaires, géniques, tissulaires) constituent un outil prometteur pour l'élaboration de solutions thérapeutiques personnalisées. Les besoins médicaux sont importants, qu'il s’agisse de maladies chroniques d’origine héréditaires ou acquises : maladies cardiovasculaires, musculaires, neurologiques, métaboliques et endocriniennes, cancers réfractaires aux thérapies conventionnelles, maladies dégénératives (œil, cartilage, peau), maladies inflammatoires et systémiques graves. Il est raisonnable de penser que dans un futur proche la médecine dite « régénérative » ou « réparatrice » représentera une nouvelle approche thérapeutique, aux côtés des traitements plus classiques.

Le schéma d’organisation des « unités de thérapies cellulaire et géniques », responsables de la préparation, du contrôle et de la distribution des greffons à usage thérapeutiques, qui a prévalu ces dernières décennies, a été récemment bouleversé par la mise en application d’une directive européenne identifiant désormais quatre grandes catégories de médicaments dits de thérapie innovante (MTI) : médicaments de "thérapie génique", médicaments de "thérapie cellulaire somatique", médicaments "issus de l’ingénierie cellulaire ou tissulaire" et médicaments "combinés de thérapie innovante". Leur dénominateur commun est l’obligation réglementaire qu’ils soient produits dans des structures appliquant les Bonnes Pratiques de Fabrication, et ce dès les phases I des essais cliniques. C’est donc dans un cadre réglementaire plus exigeant qu’il ne l’était déjà que ces médicaments doivent être produits. Dans le même temps, nous devons nous approprier les nouvelles technologies qui révolutionnent aujourd’hui la bioconstruction de tissus et d’organes : bio-impression, décellularisation, microfluidique, fabrication d’organoïdes, etc.
C’est à ce double enjeu que nous devons être capables de répondre pour assurer notre compétitivité dans ces domaines innovants.

 

Bio ingénierie en Chirurgie Maxillo-Faciale et Odontologie

LE VISAGE C, (RMeS - INSERM U1229 Nantes, Président du conseil scientifique de la Fondation de l'Avenir)

Résumé
Les substituts osseux, qui constituent une alternative à l’autogreffe osseuse, apportent un support mecanique et une eventuelle cicatrisation osseuse. Le vieillissement des populations avec l’objectif de «vivre bien», le plus longtemps possible, tend à vouloir substituer le concept de réparation grâce à un dispositif médical par la régénération ad intégrum du tissu lésé.
Ainsi, la médecine régénératrice est une thématique relativement récente du point de vue de sa structuration et de sa visibilité. Le développement récent de formes injectables de biomatériaux, combinés à des facteurs de croissance et des cellules autologues ou allogéniques, présentant des propriétés ostéogéniques, permet d'envisager une véritable régénération du tissu osseux, en particulier pour les atteintes au niveau maxillo-facial et parodontal.
Les principales pistes de développement concernent (i) la mise en œuvre de technologies additives (prototypage rapide, lithographie ou impression 3D) afin d'obtenir des matériaux présentant une architecture contrôlée, et (ii) le choix des cellules appropriées : cellules souches mésenchymateuses issues de la moelle osseuse ou du tissu adipeux, cellules souches de la pulpe dentaire et du ligament alvéo-dentaire, ou encore cellules souches pluripotentes . Le bioprinting, qui assemble couche par couche une " encre" contenant des cellules vivantes et conduit à la fabrication de tissus biologiques, ouvre ainsi la voie à une médecine personnalisée.

 

Applications de la chirurgie régénératrice en urologie

HAAB F (Paris)

Résumé
Le traitement de l’incontinence urinaire et de la dysfonction érectile sont les deux principaux domaines thérapeutiques de la médecine régénérative par injections de cellules autologues en urologie.
Le traitement de l’insuffisance sphinctérienne urétrale par injection de cellules musculaires autologues a été la première cible thérapeutique. Les premières expériences in vivo chez l’animal remontent à la fin des années 2000. A ce jour plusieurs essais cliniques ont été conduits pour le traitement de l’incontinence urinaire chez l’homme et chez la femme. Le développement de cette technique prometteuse a été cependant entaché de plusieurs difficultés : probable fraude scientifique avec retrait du premier essai clinique produit par une équipé autrichienne, difficulté à mettre au point un modèle expérimental chez l’animal permettant de reproduire aisément l’insuffisance sphinctérienne observée chez l’homme après chirurgie du cancer de la prostate ou chez la femme avec les lésions obstétricales.
Concernant le traitement de la dysfonction érectile par injection de cellules autologues, plusieurs essais cliniques ont été publiés, effectués avec de la moelle osseuse, des cellules adipocytaires, des cellules placentaires, ou encore du sang de cordon. Deux de ces essais ont portés sur des patients opérés de cancer de prostate, un a été conduit chez des patients diabétiques. Au total ce sont moins de 50 patients qui ont été inclus avec des résultats au global assez décevants.
En conclusion la médecine régénérative est certainement un traitement d’avenir en urologie fonctionnelle, néanmoins de nombreux travaux seront encore nécessaire avant sa plus large diffusion

 

Applications de la chirurgie régénératrice en chirurgie reconstructrice

MAGALON G (Marseille)

Résumé
La Réinjection de graisse autologue selon la méthode de Sydney Coleman est maintenant bien connue, la technique et les indications sont bien codifiées et les résultats satisfaisants.

Depuis l’idée originale, les évolutions ont été multiples :
- La Micro réinjection, grâce à du matériel de prélèvement et d’injection beaucoup plus petit, permet d’obtenir des micro lobules de 0,5 mm. Le tissu graisseux devient un véritable filler sous dermique.
- La préparation des « nanofat » utilise de nouveaux dispositifs qui éliminent de façon mécanique les cellules graisseuses et gardent les cellules régénératives. On obtient un produit très fluide à usage intra dermique.
- La Fraction Vasculaire Stromale (FVS) du tissu adipeux a été découverte en 2001. Il est possible avec 120 gr de graisse et une préparation enzymatique, d’extraire plusieurs dizaines de millions de cellules contenant entre 3 et 5% de Cellules souches multipotentes. La Fraction Vasculaire Stromale sera préparée dans un laboratoire de Thérapies Cellulaires avec un dispositif médical marqué CE et sera utilisée dans le même temps opératoire.
Ce produit peut être aussi cryocongelé, stocké et utilisé plus tard.

Le Plasma Riche en Plaquettes (PRP)
Il est possible d’isoler les plaquettes sanguines par une simple centrifugation. Les plaquettes, cellules sans noyau, sont un réservoir de facteurs de croissance qui interviennent dans la cicatrisation.

L’avenir immédiat est dans la réalisation de mélanges tels que : Plasma Riche en Plaquettes (PRP) ou Fraction Vasculaire Stromale (FVS) avec Graisse ou Micro graisse, car il a été prouvé scientifiquement que les produits autologues lorsqu’ils sont mélangés, se potentialisent.

En Conclusion, vos cellules utilisées de façon autologues vont permettre de vous soigner. Il sera nécessaire d’avoir une collaboration entre les cliniciens, les scientifiques et les industriels, de réaliser des protocoles multi centriques, si possible randomisés en double aveugle pour valider ces nouvelles thérapeutiques.

 

Applications de la chirurgie régénératrice en orthopédie : : Défis de l’ingénierie tissulaire osseuse en 2017

PETITE H (B2OA, UMR CNRS 7052, UFR de Médecine, Université Paris Diderot, Paris)

Résumé
Au niveau mondial, plus de 1 million de greffes osseuses (greffe osseuse autologue ou utilisation d’os de banque) sont réalisées annuellement pour traiter des insuffisances de la réparation osseuse dans des pathologies ostéoarticulaires. Parce qu’elle est histocompatible et non immunogène, la greffe osseuse autologue prélevée sur des sites donneurs tels que la crête iliaque, est l’option la plus souvent utilisée. En effet, l’autogreffe osseuse est par essence osteoconductrice (elle procure un support sur lequel les cellules peuvent adhérer, proliférer et se différencier), ostéoinductrice (elle induit la prolifération de cellules indifférenciées et leur différentiation en ostéoblastes) et ostéogène (elle est un réservoir de cellules souches ostéocompétentes). Cependant, son utilisation est une source supplémentaire de morbidité augmentant les temps et les coûts opératoires. Pour pallier ces difficultés, des recherches expérimentales visant à développer des méthodes alternatives dont l’efficacité thérapeutique est au moins équivalente à celle de l’autogreffe, sont actuellement développées.
La possibilité d’obtenir à partir d’une biopsie de moelle osseuse un grand nombre de cellules souches mésenchymateuses (CSMs) et celle de les différencier en cellules capables de former du tissu osseux a conduit naturellement à évaluer l’intérêt de ces cellules comme substituts de l’autogreffe osseuse. Le principe est de transplanter, au niveau de la lésion, des CSMs préalablement mises en place dans un matériau support poreux ; l’ensemble étant appelé biohybride osseux. L’intérêt de cette stratégie thérapeutique, dans le comblement de perte de substance osseuse dont le volume est de pertinence clinique, a été démontré par notre groupe chez la brebis en utilisant des CSMs dérivées de la moelle osseuse. Malgré ces études expérimentales encourageantes et la publication de quelques cas cliniques suggérant un intérêt des CSMs dans la réparation osseuse, il n’existe pas d’étude clinique randomisée prospective démontrant un intérêt réel de l’utilisation des CSMs. L’objectif de ma présentation sera d’effectuer une brève revue de la littérature du domaine et de préciser les défis à surmonter afin de transférer dans les conditions optimales à la clinique cette nouvelle stratégie thérapeutique.