Séance du mercredi 20 décembre 2017

CHIRURGIE HUMANITAIRE : 20 ANS DE FORMATION CHIRURGICALE SUR PLACE
14h30-17h00, Les Cordeliers
Modérateurs : Claude HUGUET, Xavier POULIQUEN, Jean-Luc MOULY (Paris)

 

 

Résultat des traitements chirurgicaux dans l’incontinence urinaire féminine avec insuffisance sphinctérienne

REZVANI B, CHARTIER KASTLER E, CONORT P, BITKER MO, CHATELAIN C

Résumé
L’existence d’une insuffisance sphinctérienne avec pression de clôture uréthrale inférieure à 30 cm d’eau est un facteur défavorable pour le résultat des interventions chirurgicales classiques utilisées dans le traitement de l’incontinence urinaire féminine. En se basant sur l’expérience du service d’urologie et de transplantation rénale du CHU Pitié-Salpétrière, les auteurs présentent les résultats à court, moyen et long terme de trois types d’interventions : Burch, bandelette sous urétrale et sphincter artificiel, dont les taux de continence à 3 ans sont respectivement de 45%, 65% et 85%. Ces résultats, complétés par l’étude de la morbidité inhérente à chaque intervention, permettent de proposer un schéma thérapeutique adapté à chaque malade en fonction de critères cliniques et urodynamiques préopératoires, et de la notion d’incontinence récidivée ou non.

 

Introduction générale de la séance

FRANCO D, MARRE P, JOHANET H, LE FLOC PRIGENT P

 

Introduction thématique de la séance

HUGUET C, POULIQUEN X

 

Mongolie : De la France de St Louis au pays de Gengis Khaan

NEGRE J (Nantes)

Résumé
Mon travail en Mongolie, depuis 1994, est une suite d'occasions fortuites que j'ai saisies quand elles se présentaient. J'avais besoin de transmettre mon expérience de 40 ans de chirurgie tellement valorisée par mon maître Robert Judet.
Une rencontre avec l'Ambassadeur de Mongolie à Paris a tout déclenché. Il fallait remettre à niveau la chirurgie osseuse qui avait près de 100 ans de retard.
Il fallait s'entourer, je l'ai fait surtout avec la Pitié et Robert Debré et beaucoup d'autres. Gérard Saillant et Georges Penneçot ont immédiatement accepté de me suivre.
Il fallait financer, pour à la fois apporter du matériel et organiser des missions d'enseignement. Bien aidé par des entreprises d'ingénierie médicale, successivement Air Liquide Médicale et FSE, j'ai utilisé 3 sources.
Nous avons profité d'un protocole français de 1,5 millions d'€, en 96, puis d'un budget européen, en 2000, enfin d'un prêt bonifié de 5 millions d'€ en 2013. Nous terminerons avant l'été prochain.
De l'absence de chirurgie ouverte, ils sont passés à toutes les prothèses.
Tous ceux qui sont venus et ils me l'ont dit, ont trouvé cette joie immense de transmettre d'autant que nous avons reçu autant que nous avons donné.

 

Aide à la chirurgie cardiaque à Mandalay (Union du Myanmar)

LOISANCE D

Résumé
La chirurgie cardiaque est, comme les autres activités, très peu développée au Myanmar en 2004. Le pays est au ban de la société occidentale, soumis au régime des sanctions. C’est à cette date à laquelle nous avons décidé d’intervenir, dans le cadre de l’AMFA. À cette date, il n’y a que deux centres pratiquant la chirurgie cardiaque, l’un au Yangon General Hospital (50 CEC par an), l’autre à l’hôpital militaire (100 CEC par an) ; deux chirurgiens seniors. Nous avons, à la demande du Ministre de la Santé birman, entrepris la formation à la chirurgie cardiaque dans un service de chirurgie vasculaire et thoracique de Mandalay en 2005. La formation a concerné les infirmières, les anesthésistes et pompistes, les réanimateurs et les chirurgiens par à la fois des stages à Paris et une formation sur site (53 missions).
Après de nombreuses péripéties, en 2017, un service, enfin aux normes internationales effectue 5 à 6 interventions chez l’adulte par semaine avec de très bons résultats. Les difficultés, (financements, statut des personnels, environnement général…), peuvent être surmontées par la patience et la persévérance dans l’action.

 

La chirurgie humanitaire à l’aube du 21ème siècle : constats, enjeux et perspectives

PASCAL G (Paris)

Résumé
Dans un monde multipolaire et hyper-médiatisé l’action humanitaire dans les Pays en Développement (PED) a été bouleversée depuis ces 20 dernières années. Pour des raisons principalement sécuritaires, l’espace humanitaire s’est contracté, notamment pour les équipes chirurgicales souvent « en première ligne » dans les crises, ce qui questionne sur les capacités des Organisations Non Gouvernementales (ONGs) occidentales quant à leur capacité à agir dans tous ces contextes.
En termes opérationnels : mettre en place un programme chirurgical en milieu précaire représente un challenge, notamment dans les urgences au cours desquelles sont concernées à la fois les victimes directes et les victimes collatérales et où il faut se positionner d’emblée dans la post-urgence et dans la reconstruction. Sur le long-terme, pour faire face à la pénurie de personnels soignants, il faut faire du transfert de compétences du nord vers le sud qui deviendra sud-sud après formation de formateurs.
Au plan éthique, trouver un équilibre entre la qualité des soins et un standard minimum pour diminuer la mortalité est difficile.
Toutes ces contraintes ne peuvent trouver leur résolution qu’à l’aide de partenariats équilibrés et harmonieux avec d’autres acteurs et les sociétés civiles du sud.

 

Formation des médecins généralistes à la chirurgie essentielle : L'expérience du Nord-Kivu

LECHAUX JP, BARS I, DELOCHE A (Paris)

Résumé
La commission du Lancet en 2015 : « Global Surgery 2030 » a mis en évidence la carence chirurgicale dans les pays en développement responsable d'une mortalité élevée par insuffisance ou absence de chirurgie et d'une aggravation de la paupérisation. En République Démocratique du Congo, la province meurtrie du Nord Kivu est un désert chirurgical. Pour y remédier, la Chaîne de l'Espoir a élaboré un programme de formation à la chirurgie essentielle des médecins des hôpitaux de district. L'objectif est d'obtenir une chirurgie accessible, abordable, de qualité, en temps utile : la chirurgie pour tous.

 

Formation chirurgicale au Congo Brazzaville

GARIN B (Sarcelles)

Résumé
Deuxième mission au Congo Brazzaville (oct 2016-oct 2017), après une mission d'exploration début 2016 à l'hôpital de NKAYI (province de la BOUENZA), drainant environ 400 000 habitants (sur une population de 4 000 000 000 d'habitants)
cette mission organisée par chirurgie solidaire en collaboration avec l'association France Mayama a permis d'avoir une vision assez réaliste des problèmes de la chirurgie dans ce pays que l'on retrouve souvent sur une grande partie de l'Afrique sub saharienne , à savoir :
-en dehors des césariennes non programmées et des ruptures de GEU, prise en charge financière totale par le patient et/ou sa famille pour toute intervention, ce qui pose bien entendu un 1er barrage à l'accès aux soins
-pauvreté des moyens et difficultés d'exercice pour tout le personnel soignant (parfois bénévole)
- chirurgiens et anesthésistes parfaitement compétents dans les pathologies courantes (hernies, APP, péritonites....) mais aucune progression n'est possible compte tenu de l'environnement malgré une réelle motivation, ce qui exclut toute prise en charge d'un certain nombre de pathologies (cancérologie, urologie, thyroïdes....)
-Aucune collaboration avec les autres hôpitaux des environs (Pointe Noire, Dolisie, Brazzaville) et ce, malgré les nouveaux moyens de communication.
-Mais motivation importante des médecins et du personnel infirmier ; le principe du compagnonnage et non de l'assistanat étant la base de Chirurgie solidaire. Tous ces éléments justifient notre départ le 20 octobre 2017 à Dolosie (3eme ville du pays )pour une mission d'exploration en étroite collaboration avec les autorités sanitaires du pays et nos collègues congolais très motivés par un enseignement sur place de la cœlioscopie et l'organisation d'une meilleure prise en charge de la cancérologie qui dans ce pays devient progressivement endémique
Méditons sur ces chiffres:
- en 2100 ,40% de l'humanité sera africaine avec 4,5 milliards d'habitants
- en 2010
16,9 millions d'habitants dans les pays du sud sont décédés par déficit de soins chirurgicaux (sida 1,46 millions et paludisme 1,17 millions)
70% de la population mondiale n'a pas ou peu d'accès à une chirurgie sûre et financièrement abordable
- en 2012, en Afrique sub saharienne ,80% des cancers (850 000 africains) arrivent 1 à 2 ans après les 1ers signes de la maladie
Ces chiffres sans appel justifient pleinement l'implication de l'Académie Française de chirurgie et de notre association Chirurgie solidaire dans les pays du sud et notamment l'Afrique sub-saharienne.

 

Chirurgie maxillo/faciale et neurochirurgie au Cambodge : Méningo-encéphalocèles frontaux

ROUX FE (Toulouse)

Résumé
Franck-Emmanuel ROUX 1,2,3, Ngiep OUCHENG 1, Rata SOUM 1,Jim GOLLOGLY 1, Imène DJIDJELI 2,3, Frédéric LAUWERS 1,2,4, (Toulouse) :

m Penh, Cambodia ; Médecins du Monde2, 62 rue Marcadet, F-75018 Paris, France ; Neurochirurgie3, Chirurgie Maxillo-Faciale4, Centre Hospitalo-Universitaires de Toulouse, Université de Toulouse; UPS; F-31059 Toulouse, France

Objectifs : Les méningoencéphalocèles fronto-ethmoidaux affectent surtout les populations pauvres des pays en voie de développement comme le Cambodge. A la demande de certains chirurgiens locaux, nous avons développé sur 12 ans (2004-2016) un programme d’enseignement pour permettre la prise en charge chirurgicale de cette affection par les Khmers eux-mêmes. Dans cette communication, nous évaluons les résultats globaux des patients opérés exclusivement par les Khmers et discutons de différents aspects de l’enseignement chirurgical dans les pays en voie de développement.
Méthodes : Avec l’aide du « Children Surgical Center » à Phnom Penh et de « Médecins du Monde », nous avons formés, dans les premières années de ce programme (2004-2009) lors de missions biannuelles, des chirurgiens Khmers à la prise en charge globale de ces malformations (apprentissage théorique, consultations, opérations et suivis conjoints, gestion des complications). Dans la seconde partie (2010-2016), les chirurgiens Khmers opéraient seuls ces malformations tout au long de l’année et les résultats (chirurgicaux et questionnaires de qualité de vie) étaient évalués lors de nos missions biannuelles.
Résultats : De 2010 à 2016, les chirurgiens Khmers ont opéré seuls 100 patients (âge moyen 12 ans) par une voie coronale et faciale avec un équipement limité. L’organisation du suivi post opératoire chez ces personnes à revenu très limité a été probablement la partie la plus difficile de ce programme d’enseignement. Neuf patients ont été perdus dans ce suivi. Parmi les autres, selon les critères des chirurgiens, 1 a eu un résultat « pire » qu’avant l’intervention, 12 « mauvais », 27 « moyens » et 51 « bons » résultats. En tout 20 patients ont eu des complications post opératoires dont la plus fréquente était la fuite de liquide céphalorachidien. Les patients ont eu tendance à avoir une opinion meilleure que celle des chirurgiens sur les résultats de leur opération. L’évaluation des questionnaires confirme que les méningoencéphalocèles fronto-ethmoidaux ont des retentissements sociaux et scolaires importants qui ne peuvent être que partiellement résolus par une chirurgie correctrice. A la fin de ce programme, les chirurgiens locaux étaient capables d’opérer ces méningoencéphalocèles sans assistance étrangère et le nombre de chirurgies effectuées a augmenté chaque année.
Conclusions : Nous pensons que la réalisation d’un programme humanitaire d’enseignement chirurgical dans des pays en voie de développement repose sur une évaluation initiale des besoins. Nous conseillerons de se focaliser sur une (ou quelques) pathologie précise, sélectionnée, de traitement assez aisée et chez des patients avec une bonne espérance de vie une fois opérés. L’évaluation des résultats est fondamentale comme d’ailleurs l’est la réalisation d’une base de données des patients opérés. Les acteurs d’un tel programme doivent comprendre qu’il nécessitera des efforts prolongés pour être mené à son terme.

Object. Fronto-ethmoidal meningoencephaloceles (fMEC), a craniofacial disease affecting mainly poor children in Cambodia was not managed by local surgeons early in the 2000’s. We developed a teaching program to allow some local surgeons to manage by themselves this disease. The topic of this paper was to evaluate the results of the fMEC children operated on by Khmer surgeons alone and discuss many aspects of surgical teaching in a low-income country.
Methods. In the first years (2004-2009) of this teaching program organized in the “Children Surgical Center” in Phnom Penh, Khmer surgeons were taught how to manage this malformation always with a visiting surgical team. In the second part (2010-2016), they worked alone and results (cosmetic and social results through a questionnaire) were evaluated jointly during several visiting missions. During this last period, 100 patients (mean age: 12 years old) with fMEC were operated on exclusively by Khmer surgeons by a combined bicoronal and transfacial approach in most cases with limited surgical materials and equipment.
Results. Organizing the postoperative follow-up of these low-income patients was probably the most challenging part of this teaching program. Nine patients were lost from follow-up. In other cases, cosmetic results were judged by the surgeons as worse in 1 case, poor in 12, average in 27, and good in 51 cases. Patients and parents tended to have an overall better opinion about surgical results than surgeons. Questionnaire results confirmed that fMEC has important social and educational consequences for the affected children; unfortunately, these consequences could only be partially improved by fMEC correction. Postoperative complications arose in 20 patients, the most common postoperative issues being temporary CSF leaks. At the end of this program, the local team was able to operate patients affected with fMEC in their own country without foreign assistance and through years’ greater volumes were achieved.
Conclusions. We believe that better achievements in humanitarian teaching programs require to focus on a (or at least on very few) selected disease in patients with good life-expectancy once the disease treated. Program evaluation is also fundamental and necessitate the building of a database for patient follow up. Finally, both foreign and local surgeons should understand that they would be involved in protracted efforts over years to achieve the initial aims.

 

Chirurgie cardiaque au Laos et en Ukraine. Résultats obtenus après 20 années d’engagement humanitaire associant le CHU de Strasbourg et l’ONG Aide au Développement de La Santé (ADS)

EISENMANN B, SCHNEIDER R, KONYK M, LEVY F, KESSONE P, SIPHAKANLAYA M, CHANTHSIRI T, PETIT EISENMANN H (Strasbourg) Service de Chirurgie Cardiovasculaire, CHU, Strasbourg, France (en retraite) (1, 4 et 8) ADS : Aide au Développement de la Santé, Organisation Non Gouvernementale (ONG) (1, 2, 4 et 8) Pediatric cardiac Surgery, Lviv Regional Hospital, Ukraine (3) Laos-Luxembourg Institute of Cardiology, Mahosot Hospital, Vientiane, Laos (5, 6 et 7)

Résumé
De nombreuses ONG sont actives dans le domaine de la chirurgie cardiovasculaire dans les pays dits « moins favorisés ».
Le service de chirurgie cardiovasculaire du CHU de Strasbourg est engagé dans cette voie humanitaire depuis plus de 20 ans associé à l’ONG Aide au Développement de la Santé, domiciliée au Luxembourg.
2052 malades atteints d’une affection cardiovasculaire curable ont été traités. Si ces patients proviennent de près d’une 20e de pays, 2 projets sont largement prédominants et concernent l’Ukraine (376 patients) et surtout le Laos (1575 patients). Au total 1177 malades ont été traités d’une cardiopathie congénitale, 780 d’une affection valvulaire, seuls 2 patients pour une cardiopathie ischémique, et 93 pour des affections diverses. Si les soins aux patients représentent une partie importante de l’activité, tout aussi essentiels sont la formation, le transfert de compétence, et l’assistance. A la formation s’ajoute une importante composante de soutien financier : équipement, matériels divers, assistance d’ingénierie bio-médicale, et participation à l’édification d’un institut dédié, pour y effectuer cardiologie et chirurgie cardiaque modernes. Ces efforts ont abouti à la constitution d’une équipe autonome lao. Depuis 2009 celle-ci a opéré 349 malades en dehors de toute présence européenne.
Le résultat de cette coopération a porté ses fruits ; le transfert de compétence s’est effectué. Le niveau des connaissances des acteurs Lao est en constante progression. L’ambition des autorités locales est d’étendre la prise en charge des cardiopathies, et d’élargir l’offre de soins aux cardiopathies ischémiques. L’équipement d’une salle de cathétérisme est en cours d’achèvement, illustrant le chemin parcouru depuis 2001.