Lettre sur la racine de Chine
9

je peux promettre que je me dévouerai à l’étude de la médecine avec une très grande ardeur et que je veillerai par tous les moyens possibles à ce qu'on ne s'aperçoive jamais que Vésale a été appelé loin de ses études à la cour, lorsque j'essaierai de le remplacer quelquefois dans la pratique des dissections, et, que j'entreprendrai, par égard pour lui, de montrer aux autres les choses très vraies qu'il expose dans cet ouvrage, et que j'effacerai ainsi facilement et rapidement les traits de plume acérés dont Sylvius le menace (comme s'il fallait détourner mon frère de cette si belle entreprise et de la vérité même). Car puisque mon frère a peu de temps en ce moment pour réfuter les vétilles de ceux qui chercheront en vain à défendre Galien dans une chose absolument évidente et qui tombe sous les sens, il sera du plus haut intérêt pour mes études de remplir la tâche de mon frère, et d'exposer de manière très détaillée les faits qui vont provoquer chez ces gens un excès de bile[21] (puisqu'ils n'accordent aucun crédit à la raison et à leurs yeux). Je voudrais cependant demander de manière pressante à Votre Altesse illustrissime de me pardonner mon audace parce que je souhaite avec une telle franchise et un front sans vergogne[22] qu'Elle défende tant de paradoxes et de doctrines encore absolument étrangères à l’enseignement médical ordinaire, et parce que je nous compte très respectueusement, mon frère et moi-même, au nombre de ses serviteurs les plus dévoués.

À Ferrare, le 3e jour des ides d’août de l’année 1566[23] de la naissance du Christ.

×Littéralement « retourner l'estomac ».
×Expression latine relativement banale pour désigner un front « lissé », sans trace de honte ou de pudeur (le front était considéré dans l'antiquité comme un des sièges de la pudeur ou de la honte). Souvenir possible de Pline dédiant son ouvrage à l'empereur en des termes semblables (erfricui faciem), Naturalis Historia I, 1, 4. La phrase comme l'ensemble du texte latin comporte des lourdeurs et des solécismes, que l'on ne peut lisser en un français standardisé, sans dénaturer l'original.
×Erreur typographique pour 1546.