Petit Livre sur les dents
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ou une parfaite synarthrose. Car bien que la gomphose soit comprise par Galien parmi les variétés de synarthrose, sa forme propre n’est pas décrite comme une suture parfaitement soudée. Le mot epamphoterizein utilisé par Galien signifie simplement qu’elle a une nature intermédiaire et ambiguë et que, même si elle n’appartient à aucune des deux extrêmes, il ne peut y avoir de doute qu’elle tende vers l’une ou l’autre. Par ailleurs, le fait que les dents n’adhèrent pas totalement à leurs alvéoles(13, 8) se perçoit avec certitude, quand elles sont arrachées ou quand elles tombent spontanément. Dès qu’elles sont devenues plus ténues par manque d’aliment, (13, 10)leur assemblage étant désormais relâché, elles sont libérées et branlent obligatoirement. Les vieillards souffrent de cette affection tôt ou tard, plus ou moins, mais à coup sûr. Il arrive même à certaines personnes que leurs dents branlent, non seulement parce que leurs dents sont desséchées à cause de leur âge avancé(13, 14), mais aussi parce que le nerf sous les racines est noyé dans une humeur trop abondante et par là se retire, plus lâche.

Je m’étonne beaucoup qu’on accuse Galien(13, 18), concernant la connexion des os, de s’être inspiré dans ses livres Des administrations anatomiquesde toute la seconde partie du traité d’Aristote(13, 20), Les Parties des animaux. Il faut cependant considérer, quoique le discours des deux hommes semble concordant en de nombreux points, que leur avis est très différent. Car, d'après Aristote, la gomphose est faite de la cavité de deux os et d’un osselet médian semblable à une cheville qui les tient serrés, pour qu’ils puissent se fléchir ou s’étendre. Mais Galien(13, 27) ne pense pas que la gomphose soit faite ainsi, mais qu’il y a gomphose gegomphônta, lorsque les os, par la force de la nature, sont fixés l’un dans l’autre comme des coins ou des clous et que, s’ils ont été fixés parfaitement, ils ne peuvent absolument pas bouger(13, 30). Je n’ose pas décider à la légère si la gomphose est ce seul assemblage de deux os dans lequel l’un est semblable à un clou, ou si ce nom convient à un assemblage

×(13, 8) « Les dents touchent les os, mais ne sont pas maintenues par eux ». Aristote, De generatione animalium, Livre II, chap. 4.
- « Les dents montrent clairement qu’elles ne naissent en aucune façon de leurs alvéoles, quand on les arrache ou qu’elles tombent spontanément », Galien, De ossibus, dans le préambule.
- « Les dents prennent racine dans leurs crèches », Meletius, De natura hominis
×(13, 10) « Le manque d’aliments rend les dents plus sèches et plus maigres et, ne recueillant pas d’aliments, elles deviennent plus fragiles, etc. » Voir plus bas, chap. XXX, annotation (94, 2.) Galien, De compositione medicamentorum secundum locos, Livre V, chap. 8, De dentium affectionibus.
×(13, 14) « J’ai déjà relaté auparavant qu’à cause du grand âge, certaines dents desséchées deviennent branlantes », voir plus bas : chap. XXX, annotation (94, 2) ; Galien, même livre, chap. 9, De mobilis dentibus & prominentibus.
×(13, 18) Le système d’emboîtement et d’assemblage des êtres vivants est semblable à l’assemblage des objets externes. Voir plusieurs passages de Galien, De anatomicis administrationibus, Livre II, chap. 11.
×(13, 20) Voir Aristote, De partibus animalium, Livre II, chap. 9, près du début.
×(13, 27) Voir Galien, passage cité plus haut et De ossibus, préambule.
×(13, 30) Galien, De ossibus, même endroit.