Petit Livre sur les dents
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ou si peu, (car chez le singe la première molaire du bas ne présente qu’une seule pointe), cependant sur les postérieures, les tables sont entaillées, en longueur, d’une ligne très profonde. Une autre ligne transversale, qui est double dans la cinquième molaire du singe sans queue, coupe la première et se prolonge jusqu’aux gencives, intérieurement et extérieurement. La conséquence est que ces dents, ayant presque toutes quatre éminences aux angles (car la cinquième en a six) et trois dépressions au milieu, s’imbriquent comme deux lames de scie venant l’une en face l’autre. Certainement, Galien, auteur très scrupuleux, alors qu’on lui fait assez souvent des reproches sur d’autres petits points, n’aurait pas du tout omis d’expliquer ce fait, s’il avait décrit les molaires des singes(20, 14). Mais il n’est pas facile d’expliciter ce qu’il veut dire lorsqu’il écrit quelque part que les molaires sont émoussées chez les animaux apprivoisés et craintifs, et rondes, c’est-à-dire courbes, chez les animaux sauvages et féroces. En effet, comme il attribue peu de molaires, mais beaucoup de dents pointues aux deux mâchoires des animaux féroces, on ne perçoit pas clairement selon ses propos, à quelles dents il voudrait que correspondent les canines humaines et à quelles dents les molaires, pour leur forme ronde et courbe.

Pour cette raison, il importe d’exposer de quelle façon se présentent les dents chez les chiens, pour qu’on puisse porter un jugement plus aisé et plus vrai sur ce sujet, après avoir connu l’avis de Galien, expert en l’art anatomique. Les chiens ont, de chaque côté, trois incisives à la mâchoire inférieure, et une canine proéminente. Après celle-ci, quatre autres dents, triangulaires, dont la première est petite et presque ronde, et les trois suivantes sont constituées d’une large base et d’une pointe aiguë. Les deux dernières dents décrivent une ligne, taillée comme une lame de scie, qui regarde l’extrémité supérieure de la mâchoire. La troisième est dépassée en taille par la seconde, autant que la première l’est par la seconde.

×(20, 14) Galien n'assure pas clairement que les chiens, les lions et les autres animaux semblables à eux ont des dents molaires, et cependant dans le onzième livre De usu partium, chap. 8 et 9, il attribue beaucoup de dents pointues et de canines aux animaux féroces ci-dessus mentionnés, mais ne dit pas de quelle forme elles sont. Le fait que ces mêmes animaux aient des dents rondes peut être inféré de la ressemblance qu'il souligne entre les dents et les ongles. Comme lorsqu’il parle de la taille de la bouche et de la forme des dents, pointues ou émoussée, qui se rapprochent de la taille et de la forme des ongles, vers la fin du Livre XI, chap. 9, De usu partium. Puis il écrit ces mots : « Ces parties (les dents) ont été préparées en proportion de leur fonction, de la même façon que pour les ongles [griffes], larges, mous et émoussés chez les animaux apprivoisés et craintifs, et, pointus, grands, solides et incurvés chez les animaux sauvages et féroces ».
Quant à nous, parce qu'il y a des molaires chez les chiens et les lions et que quelques dents sphériques se voient en eux, pour l'honneur de Galien, nous avons voulu attribuer un tel sens à ses mots. Mais nous ne forçons personne d’adhérer à contrecœur à notre interprétation.