Petit Livre sur les dents
55

un assemblage étroit entre les deux substances de la dent : celle qui, comme l’écorce du gland ou l’anneau de fer placé à l’extrémité de la lance pour la protéger, couvre la dent à l’extérieur, blanche, nette et dense, comme du marbre [l’émail] ; l’autre, qui se cache dans la partie intérieure et qui est contenue par la première, un peu sombre, rugueuse et moins compacte [dentine]. S’il te plaît de voir cet admirable savoir-faire de la nature, je te donnerai le conseil de casser des molaires de bœufs et de béliers avant celles d’un homme et de pratiquer la dissection chez les nouveau-nés, avant de le faire chez les adultes.

La molaire, chez le veau et l’agneau, a une triple concavité, c’est-à-dire une devant une derrière et une au milieu. Celle du milieu est traversée par un canal incurvé comme la lettre C qui atteint l’extrémité de la dent qui sortira des gencives. Quand la dent est achevée, cette partie médiane apparaît plus sombre, arrosée qu’elle est par le liquide nourricier comme par une suie noire. Mais les deux autres, qui l’enserrent des deux côtés, ont été privées d’un canal de ce genre et en elles la matière muqueuse, dont j’ai dit qu’une grande partie devenait un os quand la dent était achevée, fendue en deux parties, non loin de son origine, est contenue à l’intérieur comme par un double fourreau. Mais puisque chez ces animaux on trouve fusionnées deux molaires, la plupart du temps, ou même trois et parfois quatre, la nature sagace, pour que toutes ces dents trouvent un mutuel et commun arrangement, a troué l’os interstitiel par un canal transverse, par lequel une sorte de rejeton d’une matière visqueuse passe d’une concavité à la suivante.

Quand tu auras fait cela, passe alors aux dents humaines, les définitives, comme les récemment formées. Quand tu les auras observées de près, je suis sûr que tu regarderas avec étonnement ceux qui ont inventé ces appendices imaginaires et les autres qui les ont repoussés avec horreur, reconnaissant clairement combien joliment ceux-là ont imité l’art de la nature