Petit Livre sur les dents
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on ne peut pas dire, à bon droit, qu’il convient seulement aux incisives et aux canines de renaître et non aux molaires. Car il ne s’ensuit pas que les premières dents peuvent renaître, parce qu’elles sont sorties les premières, ni parce que la pointe de leur racine s’émousse, ou, du moins, parce qu’elles sont fichées dans un os mince.

Bien que les incisives sortent avant les molaires, néanmoins, le laps de temps qui sépare leurs naissances respectives ne pourrait empêcher que les quatre molaires ne soient renouvelées en bon ordre. En outre, il n’est pas évident que, vers la septième année, les incisives et les canines soient plus émoussées que les molaires. Enfin, les os des mâchoires semblent presque partout également solides, ou certes plus solides dans la partie antérieure, puisque, à ce même endroit, ils sont denses et dépourvus de cavité. Si tu doutais du contraire, on a vérifié que les parties des mâchoires ne diffèrent pas en solidité au point de pouvoir produire des choses différentes.

Mais assez sur la nécessité du renouvellement, car mon propos n’est pas de combattre Aristote, mais de m’appliquer, selon mes forces, à ce que les étudiants en anatomie comprennent que ses théories sont plausibles mais non indiscutables et que son but était de nous persuader que la nature ne fait rien au hasard. Or selon la loi et le plan de la nature, toutes les incisives et les canines sont remplacées, et, parmi les molaires, seules quatre, successivement, de cette manière : les incisives chassent leurs précédentes ; les premières, puis les secondes, puis la canine la plus proche d’elles émergent de leurs propres trous. Et s’il arrive qu’elles renaissent avant que les précédentes ne tombent, alors elles font irruption, la plupart du temps, en dehors, à la mâchoire supérieure, et en dedans, à la mâchoire inférieure. L’homme perd aussi les dents canines et le siège des nouvelles est placé plus haut, sous la pointe de la racine des deux canines précédentes et un peu en biais. Cependant, comme on a pu le dire, elles ne montent pas au point d’atteindre le bord inférieur de l’orbite oculaire.