Petit Livre sur les dents
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en résumant ce qu’il écrit ailleurs lui-même et en confirmant ses dires par quelques arguments plus clairs en faveur de sa doctrine. Selon Galien, les nerfs mous(78, 3) du cerveau sont insérés dans les parties qui ont besoin d’une sensibilité parfaite et cette sensibilité se trouve dans celles qui ont le plus de risque d’être blessées, pour que l’être vivant soit poussé par la douleur à se porter secours et à éliminer ce qui le torture, avant que la partie atteinte soit détruite. Mais trop improprement, il compte les dents et le voile du palais(78, 9) parmi les parties dotées d’une sensibilité aiguë, alors qu’en fait, leurs propres nerfs ont une faculté de sentir et ne la partagent nullement avec la substance des dents et le voile du palais. Et si la substance des dents est totalement exempte de douleur, nous pouvons estimer que toute l’industrie de la nature est vaine et qu’elle a réparti, pour rien, des nerfs mous dans les seules dents, même si elles sont exposées nues aux attaques extérieures.

Mais on répliquera que si la substance des dents s’altère et peut être endommagée, le nerf, par sa connexion, subissant un désagrément de ce changement, peut exciter une sensation différente de celle qui provient d’une lésion de la chair que nous avons mentionnée pour l’exemple. Car l’altération de la substance de la dent diffère certainement beaucoup de celle ressentie par la chair.

C’est comme si l’on disait que seul le nerf sentait, mais non la chair ou un autre viscère. Qui ignore que toute petite partie possède une capacité de sentir, grâce à un nerf, et qu’en fonction de la substance spécifique de chacune, il y a différentes variétés de sensations, de sorte que, parmi ces sensations, l'une ne convient qu’à une seule partie, mais qu’aucune autre sensations ne se met en commun avec elle.

Par exemple, le nerf de la sixième paire de ceux qui sortent du cerveau offre des rejetons à l’orifice de l’estomac et en distribue aux autres viscères, mais le désagrément de la faim et de la soif n’est éprouvé que par ce seul viscère, ce qui ne pourrait se produire en aucune façon, sauf si,

×(78, 3) « Aux parties qui avaient besoin d'une faculté de sentir plus précise, la nature a attribué des nerfs mous » et, plus bas « La nature a attribué une sensibilité plus précise à ces parties sans cesse agressées qui luttent violemment, afin que l'être vivant, averti par la douleur qu'il doit se porter secours, repousse l’objet nuisible, avant que cette partie soit lésée », Galien, De usu partium, Livre XVI, chap. 2.
×(78, 9) « Les dents manquent d'une sensibilité plus précise », Galien, même Livre, chap. 3.
- Sur la sensibilité du voile du palais, voir plus bas, chap. XXVII, annotation (87, 32) d'après Galien, De usu partium, Livre XVI, chap. 2.