Petit Livre sur les dents
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Chapitre XXVI
Comment la substance des dents participe de la faculté de sentir, et si elle est affectée de façon égale par toutes les qualités de contacts ?

S’il est vrai que les dents sentent, soit à cause de la seule adhérence d’un nerf à leurs racines(80, 10), comme Galien semble l’affirmer, soit grâce à leurs membranes, on ne peut pas facilement expliquer comment leur substance dure et lisse peut être dotée de sens. Le même auteur, qui, sans en avoir une connaissance parfaite, n’ignore pas totalement la concavité des dents, et qui pense que les nerfs et les vaisseaux sont liés aux dents sur leur face externe, ne dit pas un mot sur le sujet. Moi, bien que je n’en aie pas la démonstration assurée, je suis amené néanmoins, par conjecture, à soupçonner que le nerf pénètre au début de la génération des dents dans leur concavité, déployé en minuscules ramifications, se mêlant au cœur de la substance de celles-ci, qui est mucilagineuse. Car, à l’instar de certaines racines de plantes qui se pétrifient, cette substance, en grande partie, s’ossifie et fait que les dents éprouvent une sensation, en accord avec leurs nerfs et, pour cette raison, finissent par être capables de sentir. Certains assurent que la matière des dents tend plus vers la nature de la chair que de l’os, mais ils rendraient leur assertion plus plausible, s’ils refusaient d’employer des arguments douteux. Arétée [1er siècle](80, 29) pense que les dents et les os, bien qu’ils soient lisses et durs, vivent et sentent grâce à une chaleur innée. Nous, nous ajoutons que les dents recèlent en elles l’esprit animal, bien mieux que les autres os, parce que,

×(80, 10) « Par les mêmes ouvertures (qui sont dans la partie antérieure de la mâchoire inférieure) se glissent le reste des nerfs qui adhèrent aux sièges des dents. Par eux les gencives, les dents elles-mêmes et les membranes qui les entourent reçoivent la faculté de sentir », Galien, De anatomicis administrationibus, livre IV, chap. 3.
- Voir ci-dessus chap. XXIV, annotation (73, 23).
Plusieurs passages tirés de Galien, De usu partium, livre XI, chap. 7 et 8; Galien, De compositione medicamentorum secundum locos, livre V, chap. 8 et 9; Meletius, De natura hominis et Actuarius, [De methodo medendi], livre II, chap. 10, et livre VI, chap. 7.
×(80, 29) Que les dents et les os vivent et sentent grâce à une chaleur innée, voir ci-dessous annotation (82, 25) d'après Arétée, De signis et curatione. diuturnorum morborum, livre II, chap. 12, De arthritide.