L. 516.  >
À Charles Spon,
le 26 février 1658

Monsieur, mon bon et cher ami, [a][1]

Je vous envoyai ma dernière le mardi 5e de février. Depuis ce temps-là, j’apprends que M. Gontier, conseiller de la Grand’Chambre[2] est mort. Il était cousin germain de feu M. l’évêque de Belley, [3] et aussi fantasque que son cousin l’évêque était bon et honnête homme. [1] On dit que cette année, M. le duc d’Anjou [4] commandera notre armée en Flandres, [5] tandis que M. le maréchal de Turenne [6] commandera une grande armée en Allemagne. Le pape [7] et le Mazarin [8] s’entre-demandent et s’entre-refusent plusieurs choses, à cause desquelles ils pourront bien à la fin rompre ensemble.

Ce 6e de février. Je viens de consultation [9][10] avec un des nôtres, lequel a vu aujourd’hui Guénault [11] sur les onze heures en sa maison. Guénault se plaint du peu de santé qu’il a de reste, qu’il a ce matin été à la messe (vous voyez comment les méchants y vont aussi bien que ceux qui pensent être bons, Domitius Calderinus [12] prié et invité d’aller à la messe, où plusieurs autres ont coutume d’aller, répondit Eamus ad communem errorem), [2][13][14][15][16] mais qu’il en est revenu très morfondu ; qu’il n’a point présentement de grande douleur à la vessie, mais plutôt qu’il y sent un grand froid. Les conséquences de tout cela ne valent rien, Mali corvi malum ovum[3]

Voilà M. Dinckel [17] qui vient de sortir de céans, qui est en peine de votre santé et si vous avez reçu celle qu’il vous a écrite. Il vient quelquefois me voir les matins et je le mène chez quelques malades afin de lui apprendre quelque chose de la bonne méthode, en quoi je le trouve extrêmement neuf et apprenti. M. Perreau [18] le bonhomme a montré les opérations de chirurgie publiquement dans nos Écoles, in cadavre virili[4] il y a assisté et en est fort content. Il dit qu’il y a ici bien des choses à apprendre dans nos Écoles, [19] tant auxdites opérations qu’aux dissections, aux disputes et aux leçons publiques. [20][21] Dans deux mois il verra tailler [22] de la pierre autant qu’il voudra, ce lui sera un surcroît de matière pour aimer Paris. On lui a parlé d’une condition [5] pour demeurer en Poitou avec un gentilhomme qui se veut entretenir d’allemand et d’italien ; il a écrit à Strasbourg à son beau-père et en attend réponse dans huit jours. Je l’ai averti de ne se fier à qui que ce soit et de ne jamais partir de Paris pour aller si loin qu’on ne lui paie tout au moins son voyage par avance. [6]

Ce 12e de février. Le poignardeur de la reine de Suède [23] s’appelle Santinelli. [24] Le pape lui a mandé qu’il ait à l’aller trouver à Rome pour lui rendre compte de cet attentat ; dont il se gardera bien : il a quitté la reine de Suède, mais on ne sait pas encore ce qu’il est devenu. Ce serait un beau miracle si le pape ressuscitait ce pauvre poignardé Monaldeschi [25] et qu’il ne parût aucune cicatrice de coups de poignard à sa gorge. [7]

Les jésuites [26] ont fait une réponse aux 18 lettres du Port-Royal, [27][28][29] dans laquelle ils défendent leur morale prétendue. Les curés de Paris se sont assemblés et en ont demandé justice et à la Sorbonne [30] et au Parlement. Comme l’affaire s’avançait, le roi, [31] qui est tout bon et qui veut que la paix soit partout, a envoyé quérir ces curés et leur a fait défendre de poursuivre ; et par là, vous jugerez quel crédit ont ces bons pères ; nonobstant quoi, les curés ne laissent point de gronder et poursuivent encore au Parlement. La reine de Suède est toujours à Fontainebleau [32] où elle passe fort mal son temps. On dit qu’elle voudrait bien venir ici pour y voir les bals et ballets, [8][33] et la foire de Saint-Germain. [34] Le Mazarin a envoyé quérir les curés et leur a permis de poursuivre la censure du livre des jésuites in foro Ecclesiastico[9] mais non pas au Parlement, ce qu’ils lui ont promis ; en vertu de quoi, ils en pressent et poursuivent maintenant la censure en Sorbonne ; et pour ce qu’ils lui ont promis de ne rien poursuivre au Parlement, il leur a accordé une petite grâce pour M. Duhamel, [35] curé de Saint-Médéric, [36] que l’on voulait envoyer à Quimper-Corentin, [37] en Basse-Bretagne : [10] qu’il ne bougera de chez son père, en Gâtinais, qu’il ne se fera point tant suivre par les pauvres gens, qu’il ne fera plus d’aumônes, etc. ; on lui défend d’être homme de bien, o mores, o tempora ! [11]

Vous savez bien que nous avons ici la foire de Saint-Germain où il y a plusieurs boutiques de libraires fort bien garnies et entre autres, celle du sieur Du Buisson [38] qui est venu de Montpellier aussi glorieux que jamais : c’est peut-être l’air du pays d’où il vient. On dit qu’il n’y retournera plus, qu’il veut demeurer à Paris et y trafiquer de vieux livres, où il espère de devenir riche ; à cause de quoi il fera des voyages par toute la France, et ira même en Italie et en Espagne pour en apporter ici. Ce petit homme a beaucoup de vanité et parle de Montpellier avec beaucoup de mépris, et des docteurs qui y restent. Il est un de ceux que je ne puis souffrir, je n’ai rien acheté de lui, mais d’un d’ici nommé Clousier, [39] Guil. Fabricii Hildani Opera omnia in‑fo 1646[40] qui est bien plus ample que l’in‑4o de Lyon, [12] avec un in‑4o imprimé à Bologne [41] l’an 1656 intitulé Noctes geniales, auctore Io. Nardio Florentino[42] c’est le même qui a travaillé sur Lucrèce. [13] J’ai pareillement recouvré un Bravus Petrafitanus de medicamentorum Delectu[43] qui n’est pas mauvais, c’est celui qui a travaillé sur les Pronostics d’Hippocrate. [14][44] J’y ai vu un Hippocrate de Martianus [45] de la nouvelle édition de Venise in‑fo, mais je me suis contenté du mien, de l’an 1626. On ne parle plus du Paracelse de Genève, [46] est-il demeuré là ? [15] Demandez-en, s’il vous plaît, quelques nouvelles à M. Devenet.

N’avez-vous jamais vu un livre in‑4o imprimé à Augsbourg, [47] l’an 1569, de Lucas Stengelius, [48] intitulé Apologia adversus stibii spongiam, etc. [16] Ce livre est bon et fort contre l’antimoine, [49] il mériterait d’être imprimé, il pourrait servir au public. Il y avait des bonnes gens dès ce temps-là, et des méchants aussi. Si Guénault avait vu ce livre, il serait bien empêché d’y répondre. Il faut que je tâche de le faire imprimer à quelqu’un de nos libraires, ut faciam medicinam nostris insipientibus[17]

Ce 17e de février. Voilà votre M. Robert [50] qui me vient de dire adieu. Il dit qu’il espère de partir d’ici pour Lyon après-demain, qui sera mardi 19e, et qu’il espère de s’en aller en poste avec le prévôt des maréchaux [51] de votre ville. [18] Cela est cause que je ne lui ai rien baillé à vous porter, j’entends un livre de Balzac [52] avec quelques thèses, [53] dont le nombre s’accroîtra dans la fin du carême. Les grandes gelées qui durent ici depuis longtemps ont empêché les imprimeurs [54] de travailler et cela est cause que le livre de M. Riolan [55] n’est pas achevé ; néanmoins, il n’y a plus qu’une feuille en tout. [19] M. Robert n’a pas encore son arrêt, mais il espère de l’avoir bientôt. Nous verrons ci-après ce que fera votre M. Basset [56] et comment il se comportera avec votre Collège [57] pour regagner les bonnes grâces de tous vos Messieurs.

On parle ici fort diversement de la mort de M. de Candale : [58] les uns disent qu’il est mort de la peur qu’il a eue d’être tué par les gens que le comte de Montrevel [59] et le comte de Saint-Martin, [60] son fils, avaient mis sur les chemins pour venger la mort du chevalier de Montrevel, [61] son frère ; [20] les autres disent qu’il a été empoisonné lui huitième, et que les sept autres en sont morts ; [21][62] d’autres disent qu’il est mort tout gangrené et tout pourri d’une vieille chaude-pisse [63] supprimée. Quoi qu’il en soit, personne ne le plaint ni n’en blâme les médecins qui l’ont traité à Lyon de sa fièvre continue, [64] avec laquelle il a passé et pénétré le guichet et s’en est allé au pays où vont les grands seigneurs qui meurent ici sans payer leurs dettes, qu’il laisse fort grandes à ce qu’on dit.

Un courtisan m’a dit aujourd’hui que le roi partira d’ici à la fin du carême pour s’en aller à la guerre et qu’il fera une longue campagne, on croit qu’il ira vers Brisach ; [65] mais il dit que les électeurs derechef ne veulent point nommer ni proclamer d’empereur [66] que les deux couronnes ne soient d’accord et que cette paix générale ne soit en la chrétienté ; que l’Espagnol la voudrait bien, mais que France l’empêche, qui n’y veut entendre.

Pour réponse à l’agréable vôtre datée du 12e de février, pour laquelle je vous remercie très affectueusement, je vous dirai que la gelée a été ici rude au dernier point, jusque-là même que l’encre a gelé sur ma table. Les chartreux [67] ont fait rechercher fort soigneusement leur moine Boquet [68] et ont pensé l’attraper ; même, ils disent qu’ils l’attraperont et le feront pendre ; zest, [22] sont paroles de moines. Je suis bien fâché de la mort du pauvre M. Musnier [69] de Gênes [70] et il y a longtemps que je m’en défiais, vu qu’il y a un an entier que je n’avais reçu de lui aucune lettre. Quiescat in sinu Abrahæ[23][71]

Pour l’endroit des Coaques[72] au bas de la page 170, il n’y a que deux lignes sautées, les voici : curatio ulcerum duce natura suscipitur atque absolvitur. Nihil enim crescit quod suæ accretionis fundamentum et basin non habeat. Ac talia ulcera oppositarum partium erosione nata, vere sunt εμμεστα : qualia leguntur nephritica, etc[24][73] La dernière impression de Meturas [74] vaudra mieux, d’autant qu’elle a été faite sur la première édition qui est de 1588, omnium prima atque optima[25] Je tiens pour très vrai tout ce que vous me mandez de votre député M. Robert et adhuc etiam deteriora suspicor[26] car je pense qu’il est bien ignorant en son métier, et sa fidélité pour votre parti, je n’en dis mot ; neque enim merum esse puto aliena ista sacra attingere[27]

Guénault est ici mal de sa vessie, [75] il ne pisse qu’avec une sonde [76] et n’ose sortir de sa maison. S’il ne guérit bientôt, il enragera de ne plus gagner, et præ nimio dolore contabescet [28] car il est le plus avare homme qui soit sur terre. Touchant Le Gagneur, [77] en êtes-vous encore là ? Il est plus à Guénault que les sergents et les moines ne sont au diable. [29] C’est Guénault qui l’a mis près du prince de Conti, et lui en a de l’obligation vu qu’il ne faisait ici rien du tout et qu’il ne savait à quoi employer son temps ni de quel bois faire flèche. On dit qu’il est devenu fin et rusé à la cour, coluber mala gramina pastus[30][78] Il est ici un des couteaux pendants de Guénault, mais peut-être que Guénault ne régnera plus guère puisque ce mal est si fâcheux et qu’il continue avec tant de rigueur. Je vous remercie, et M. Garnier [79] pareillement, du beau portrait que vous m’avez envoyé du P. Théophile Raynaud. [80] Je tâcherai d’avoir une des thèses du thé [81] pour M. Garnier, il y en a une pour vous dans le paquet. [31]

Le mécontentement que j’ai du sieur de La Poterie [82] est pour cette lettre dont il vous a parlé. Il dit qu’il ne la faut point imprimer puisque feu M. Gassendi [83] n’y a pas fait réponse, et moi je désire fort qu’elle soit imprimée, bien assuré que je suis que, parmi tant d’autres, elle passera pour bonne et qu’il en est de pires ; joint qu’il ne peut pas y avoir de réponse, vu qu’en ce même temps M. Gassendi tomba malade de la maladie dont il passa au bout de trois mois en l’autre monde. Damnabit me voto [32] pourvu qu’elle la passe dans l’ordre qu’elle lui a été envoyée, cetera nugæ[33] Ne lui faites semblant de rien de peur de l’irriter, il ne se souvient pas qu’en sa présence même je parlai à M. Gassendi, son maître, de cette difficulté et de cette mienne épître. [84]

Harvæus, [85] auteur et inventeur de la circulation du sang, [86] est mort à Londres l’été passé, il me semble que je vous l’avais mandé. On dit que l’affaire de Nîmes [87] s’accommodera à cause que ceux du pays ont parlé fort hardiment et que l’on croit qu’ils se défendraient bien si ceux de deçà les faisaient attaquer, qui ont bien d’autres affaires : la guerre d’Allemagne nous occupe assez de la peur que l’on nous en fait. [34] Je remets entièrement à vos soins l’affaire et les intérêts de ce pauvre Erastus ; [88] vous savez bien que ce n’est que pour le bien public et contre l’abus des chimistes, [89] tout ce que j’en fais. Si M. Fourmy [90] le veut imprimer, j’en prendrai 50 exemplaires que je lui paierai comptant et nummis præsentibus[35] outre le soin que j’apporterai pour le faire débiter de toutes parts, tant par mes auditeurs que par toutes les connaissances que j’ai en divers endroits du royaume et hors d’icelui. L’évêque d’Oleron est mort, [91][92] voilà frairie pour celui qui tire profit de telles collations[36]

Vendit Alexander missas, altaria, Christum,
Emerat ille prius, vendere jure potest
[37][93][94]

Le prince de Condé [95] a obtenu dans la Flandre les meilleurs quartiers d’hiver pour ses troupes. Le Brabant [96] lui a été accordé, [38] où il a envoyé ses régiments qui y ont tant fait d’insolences qu’enfin le pays et les paysans se sont soulevés contre eux et ont pris les armes ; mais ils n’ont pas été les plus forts, nos gens s’en sont rendus les maîtres et en ont bien tué ; si bien que tout le pays en est désolé, d’autant plus qu’ils y vivent à discrétion et sans discrétion. [39] Jugez si ces gens-là bénissent la guérison du prince de Condé et s’ils enverront des présents à Guénault pour lui avoir rendu quelque service en sa maladie.

Aujourd’hui, 20e de février, tout au milieu de la Vallée de Misère, [40][97] ont été pendus et étranglés [98] trois hommes qui avaient enlevé aux fêtes de la Toussaint dernière, sur le Pont-au-Change, [99] un marchand de Paris nommé M. Sergeant afin de l’obliger de lui faire rendre certaines bagues, joyaux et tapisseries qu’il tient en gage d’une certaine Mme de Pons [100] que l’on disait avoir été maîtresse ou femme de M. le duc de Guise. [41][101] La demoiselle qui les avait mis en besogne a été bannie pour cinq ans. Les archers, exempts de crime et même de soupçon, ont été mis hors de prison et en liberté, ne sachant point qu’il y eût dol ni fraude ; mais ces trois ici ont été pendus, qui savaient et faisaient le mal, et qui contrefaisaient les exempts avec leurs casaques et bâtons. On dit que tous trois avaient fort bonne mine. Demain on rompra à la Grève [102] deux Bohémiens [103] ou Égyptiens, Cingari dicuntur isti nebulones[42] pour plusieurs vols et massacres qu’ils ont commis en divers lieux près de Senlis [104] et de Corbeil. [105] L’un était normand et l’autre bourguignon, et se contrefaisaient égyptiens, ils ont été tous deux rompus tout vifs. [106]

Ce 22e de février. Hier avant midi, on mit prisonnier dans la Conciergerie [107] 13 faux-sauniers[108] que l’on amena d’Amiens [109] liés et garrottés dans un grand chariot tiré à six chevaux. Aujourd’hui à la Croix du Trahoir, [110] deux autres contrefaisant les Égyptiens, impliqués du même crime que ceux d’hier, ont été rompus ; et à la Grève, a été pendu le fils du procureur du roi de La Rochelle [111] qui avait tué à coups de couteau son compagnon avec qui il était ligué, de sang-froid, dans son lit, à cause que le jour d’auparavant il avait gagné son argent ; et ce pauvre garçon qui a été tué était fils d’un conseiller de Bordeaux. Les curés continuent toujours contre les jésuites, [112] et même au Parlement, combien que le procureur général, M. Fouquet [113] idemque summus ærarii Præfectus[43] soit le bon et féal ami des carabins du P. Ignace, [114] et qu’il cache et retienne leur requête. Ces Messieurs les curés font imprimer ici quelque chose touchant ce procès et touchant le livre des jésuites, mais je n’en ai encore rien vu. De l’Encheiridium anat. et pathol. de feu M. Riolan, [19] il n’y en a plus qu’une dernière feuille à tirer ; c’est l’extrême froid qui a duré jusqu’à présent qui les a empêchés d’achever plus tôt. On dit qu’en Hollande le froid a été si grand et si rude qu’il en est mort beaucoup de monde en chemin, dans les prisons et partout ailleurs. Il y a ici grosse querelle entre les libraires et maîtres imprimeurs [115] contre les compagnons [116] qui ont tous mis bas et qui veulent encore gagner davantage ; en sorte qu’aujourd’hui l’on n’imprime rien à Paris, si ce n’est le maître ayant quelque apprenti ; je ne sais où cela aboutira.

Ce 24e de février. Il y a ici grand désordre pour les eaux : la rivière [117] est tellement grossie que tout le monde a peur d’être submergé ; elle est aussi grande que jamais, mais elle est vingt fois plus rapide qu’elle ne fut en l’an 1651 en ce même mois de février. On ne voit passer sur la rivière que bois, paille, paillasses et lits, qui sont des marques qu’elle a puissamment fait des ravages par où elle a passé en venant à Paris. Il n’est pas jusqu’à la petite rivière de Bièvre, [118] Bibara, vulgo [44] rivière de Gentilly ou des Gobelins, qui n’ait fait rage dans le faubourg Saint-Marceau, [119] où elle a bien noyé du monde et abattu des maisons. La Grève est si pleine d’eau que l’on n’en approche que par bateau, toutes les rues prochaines en regorgent. Guénault se porte mieux, il commence à sortir. Il se vante qu’on lui a fait des injections dans la vessie d’un secret qu’il n’y a que lui qui sait, dont ses douleurs sont apaisées. Tout cela n’est qu’afin de se donner de la réputation et que ceux qui auront des difficultés d’urine l’envoient quérir comme un homme de grands secrets. [120] Voyez la fourberie et l’imposture de ce tyran. On dit que M. de Mesmes [121] s’en va être premier président et que cela a été résolu dans le Conseil de la reine. Si cela est, ne doutez pas que les pères de la Société n’y aient bien contribué car il est tout à fait à eux, âme moutonnière et pecus plane loyoliticum[45] Je viens de recevoir une lettre de M. Io. Daniel Horstius, [122] qui est fort belle, mais je ne sais par qui lui faire réponse ; si vous lui écrivez pendant Pâques, obligez-moi de lui faire mes recommandations.

Ce 25e de février. La reine de Suède devait hier arriver à Paris, mais les grandes eaux l’en ont empêchée. La rivière de Seine est toujours également grande, mais elle me semble aujourd’hui moins rapide, ce qui fait espérer qu’elle diminuera bientôt.

Ce 26e de février. La reine de Suède est arrivée, elle est logée au palais Mazarin. Elle a vu le ballet et la comédie à l’hôtel de Bourgogne, [123] où elle doit retourner demain avec la reine, [124] Mademoiselle, [125] etc. [46] On dit qu’elle sortira de Paris avant qu’il soit huit jours. Nous avons ici les eaux si grosses que les marques du débordement passent celles de l’an 1651. Je me recommande à vos bonnes grâces de toute mon affection, et à cette vôtre très sage, très bonne et incomparable femme que j’honore de tout mon cœur, et suis, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur,

Guy Patin.

De Paris, ce mardi 26e de février 1658.



Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 26 février 1658

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0516

(Consulté le 18/04/2024)

Licence Creative Commons "Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron." est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale 4.0 International.