L. 57.  >
À Claude II Belin,
le 15 mai 1641

Monsieur, [a][1]

Comme je ne reçus pas de vos lettres avec celles de M. de Blampignon, [2] je crus bien que vous vouliez être purement désintéressé en cette affaire sur laquelle on me demandait mon avis. Ce qui me fit croire encore plus aisément ce qui en était, fut votre sein ; [1] à cause de quoi je ne voulus rien vous écrire pour lors. Je me contentai, sans témoigner aucune passion particulière, de leur en dire mon avis, lequel j’ai écrit sans aucune prétention que du droit et de beaucoup de conformité avec les règlements de notre École. Probetur an improbetur ab illis mihi proinde est ; [2] ce que j’en ai fait n’a été que pour ce que vous m’avez tous témoigné le désirer ainsi. C’est pourquoi je vous supplie en particulier de ne me savoir mauvais gré en aucune façon pour cette affaire, ne l’ayant fait qu’à bonne intention, vu que, ut sit lex omnibus æqua[3] vous pouvez tous être et revenir syndic par l’élection que vous en faites tous les deux ans. Pour l’antimoine, [3] je ne sais pas ce que notre Faculté en ordonnera. Il eût toujours bien mieux valu que Saint-Jacques [4] ne l’eût fourré dans l’antidotaire [5][6] comme il a fait, nobis insciis et invitis, imo et inconsulta Facultate[4] et ne pas toucher cette corde quæ habet aliquid odiosum[5] M. Moreau [7] a répondu au factum du Gazetier [8] avec beaucoup de doctrine et toute sorte de modestie. [6] Ce bourreau d’adresse, [9][10] merus agyrta, convitiator et sycophanta deterrimus[7] y a fait une réponse pleine d’injures de harangères, où il élude et se moque des raisons de M. Moreau sans répondre à 40 chefs qui lui étaient objectés. De celui de M. Moreau, je vous en promets un ; de celui du Gazetier, je tâcherai d’en recouvrer un et vous les enverrai tous deux. [8] Si ce Gazetier n’était soutenu de l’Éminence, [11] en tant que nebulo hebdomadarius[9] nous lui ferions un procès criminel, au bout duquel il y aurait un tombereau, un bourreau et tout au moins, une amende honorable ; [10][12] mais il faut obéir au temps. Par provision, M. Moreau fait une réponse à ce second libelle, qui est une pure satire. Je pense que le Gazetier y sera horriblement traité, et comme il le mérite, en attendant que le bourreau vienne à son rang tomber sur ce maraud. Ce n’est pas que son livre mérite réponse, mais comme il est méchant et impudent, il se vanterait qu’on n’aurait pu lui répondre. C’est pourquoi stulto iuxta stultitiam suam respondebitur[11][13][14] M. Riolan, [15] qui est ici maintenant, lui fait aussi une réponse, laquelle sera achevée d’imprimer dans peu de jours ; je tâcherai de vous envoyer le tout ensemble. M. Ranchin, [16] chancelier de Montpellier, [17] est mort. M. de Belleval [18] et un autre professeur sont ici, qui en demandent au roi la nomination. Je ne sais qui des deux l’aura. [12] Notre armée est devers Bapaume, [13][19] mais on ne dit pas encore où elle s’attachera. Les Catalans ont eu du bon sur les Espagnols. Il nous vient un jubilé de Rome pro pace[14] Ce jubilé, [20] si fréquent, n’est autre chose dorénavant que modus habendi monachorum ; [15] ce sont des fanfreluches romaines. Le roi, [21] la reine, [22] Son Éminence et toute la cour furent jeudi dernier aux Jésuites, [23] où il y eut grande frairie pour la consécration de leur belle église, rue Saint-Antoine. [16][24] Je ne savais pas que M. Cousinot [25] fût à Troyes. [26] S’il y est encore, quæso salutes eum meo nomine[17] comme aussi M. Camusat, Messieurs vos frères, Mme Belin ; et je continuerai toute ma vie d’être, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

Patin.

Ce 15e de mai 1641.


a.

Ms BnF no 9358, fo 61 ; Triaire no lix (pages 196‑199) ; Reveillé-Parise, no xlvii (tome i, pages 77‑78).

1.

Pour dire que l’affaire de statuts syndicaux traitée dans la précédente lettre n’était pas, croyait Guy Patin, une intime préoccupation de Claude ii Belin, qui lui reprocha sans doute de ne pas l’avoir tenu au courant, ou même de s’être imprudemment mêlé à Paris de ce qui ne le regardait pas à Troyes. Quoi qu’il en soit, le sens du mot sein est obscur dans cette phrase et ne s’éclaircit qu’à peine si on s’autorise à le corriger en seing (pour signature, peut-être approbation) : la suite de la lettre suggère en effet que les six docteurs du Collège de Troyes avaient pu cosigner la requête adressée par Blampignon à Patin.

2.

« Il m’est égal qu’ils m’approuvent ou me désapprouvent ».

3.

« afin que la loi soit égale pour tous ». Guy Patin allait ici contredire sa précédente conclusion : qu’il faudrait six ans d’ancienneté dans le Collège pour pouvoir en être élu syndic.

4.

« à notre insu et contre notre gré, et pire, sans avoir consulté la Faculté ». V. notes [8], lettre 44, pour l’antidotaire que toute la Faculté était censée avoir approuvé en 1638, et [15], lettre 54, pour Philippe ii Hardouin de Saint-Jacques.

5.

« qui a quelque chose d’odieux. » « Il ne faut pas toucher cette corde-là, pour dire : ne parlez point de cette affaire, de cette circonstance, de peur de choquer quelqu’un qui renverserait tous vos desseins » (Furetière).

6.

Le Gazetier était alors Théophraste Renaudot (Loudun 1586-Paris 25 octobre 1653), la plus célèbre des nombreuses bêtes noires de Guy Patin. Au travers de la Gazette de France qu’il avait créée en 1631, le nom de Renaudot est resté attaché à l’invention du journalisme en France.

De religion protestante, Renaudot était venu en 1602 à Paris. Il y avait étudié la chirurgie au Collège de Saint-Côme et contracté, paraît-il, une infection (tuberculose, lèpre ou syphilis) qui lui avait attaqué le visage et laissé le nez camus que Patin et bien d’autres ont cruellement raillé. Son portrait, dessiné en 1644, à l’âge de 58 ans, le fait bien paraître. Il est accompagné de sa noble devise :

Invenisse juvat ; magis exequi ; At ultima laus est
Postremam inventis apposuisse manum
.

[Il est utile d’avoir fait des découvertes ; plus utile encore de les avoir développées ; mais l’ultime gloire vient de les avoir menées au bout].

Sa religion lui fermant les portes de la Faculté de médecine de Paris, Renaudot s’était rendu à Poitiers pendant un an, puis à Montpellier où il s’était fait recevoir docteur en 1606 après six mois d’inscription ; ce qui n’avait alors rien de rare, mais qui mena plus tard ses détracteurs à le qualifier de « docteur à la petite mode » (v. note [52] de L’ultime procès de Théophraste Renaudot…).

Après avoir voyagé en Angleterre, puis probablement en Italie et en Allemagne, Renaudot était revenu dans sa ville natale pour s’y marier (en 1608 avec une Loudunaise nommée Marthe Dumoustier, v. note [2], lettre 284) et s’y installer médecin. Il y avait lié connaissance avec le P. Joseph (la future Éminence grise, v. note [8], lettre 19) qui l’introduisit auprès de Richelieu, alors évêque de Luçon : une trentaine de kilomètres séparent Loudun de l’abbaye de Lencloître où résidait le capucin ; le château de Coussay, où aimait venir se reposer le prélat, se situait à mi-chemin entre les deux. Grâce à cette influence encore modeste, Renaudot avait été convoqué au Louvre en 1612, où on le nomma médecin ordinaire du roi (titre honorifique, mais qui lui permettait en principe d’exercer la médecine à Paris quand il servait effectivement auprès de la personne royale) avec l’autorisation, qu’il sollicitait, de tenir « bureaux et registres d’adresse en tous lieux du royaume ».

Une longue chicane s’était alors engagée pour empêcher un projet qui intriguait beaucoup de monde, et dont l’auteur dut ronger son frein en restant à Loudun. Pour faire patienter Renaudot, on l’avait nommé en 1618 commissaire général des pauvres du royaume. Richelieu, devenu cardinal, était entré au Conseil royal en 1624, et Renaudot, désormais certain de sa bonne fortune, était arrivé l’année suivante à Paris, avec femme et enfants, pour fréquenter la cour et se consacrer entièrement à l’aboutissement de son projet.

En 1628, il s’était converti avec tous les siens au catholicisme et, tous les obstacles étant levés, il s’était installé rue de la Calandre (aujourd’hui disparue, dans le périmètre occupé par la Préfecture de police sur l’île de la Cité) pour y fonder « de par le roi », sous l’enseigne du Grand Coq, un Bureau d’adresse et de rencontre, c’est-à-dire une agence de petites annonces, de renseignements et de placement (excluant les femmes, pour ne pas être taxé de proxénétisme) ; pour Furetière :

« On appelle, Bureau d’adresse, {a} un bureau établi à Paris par Théophraste Renaudot, fameux médecin, où on trouve les avis de plusieurs choses dont on a besoin. C’est aussi le bureau où se fait la Gazette ; d’où vient qu’on appelle figurément un bureau d’adresse les maisons où on apprend beaucoup de nouvelles. Montaigne dans ses Essais a donné le premier avis de ce bureau d’adresse. » {b}


  1. V. note [26] du Faux Patiniana II‑1 pour le système des adresses parisiennes qui, au xviie s., était encore fondé sur le nom de la rue et sur l’enseigne du marchand (ou l’édifice) le plus proche.

  2. Essais (1580), livre premier, chapitre 35 :

    « Feu mon père, homme, pour n’être aidé que de l’expérience et du naturel, d’un jugement bien net, m’a dit autrefois qu’aux commandements qui lui étaient tombés en mains, il avait désiré de mettre en train qu’il y eût certain lieu désigné, auquel ceux qui eussent besoin de quelque chose se pussent rendre et faire enregistrer leur affaire à un officier établi pour cet effet, comme : tel cherche compagnie pour aller à Paris ; tel cherche un serviteur de telle qualité ; tel cherche un maître ; tel demande un ouvrier ; qui ceci, qui cela, chacun selon son besoin. Et semble que ce moyen de nous entre-avertir apporterait non légère commodité au commerce public. Car, à tous les coups, il y a des conditions qui s’entrecherchent et, pour ne pouvoir se rencontrer, laissent les hommes en extrême nécessité. »

    La Vie de Théophraste Renaudot (Paris, 1929, v. infra) a benoîtement commenté cet emprunt (page 84) :

    « Sans enlever à Théophraste Renaudot le mérite d’avoir conçu une belle idée et d’avoir employé sa vie entière à la faire entrer dans la pratique, on ne peut nier que Montaigne l’ait exprimée là, tout entière. Le grand sceptique enfermé dans sa “ librairie ” en avait bien d’autres qu’il semait avec une nonchalante simplicité en “ dictant ses songes ” au troisième étage de sa tour. Lui-même les empruntait souvent aux Anciens en feuilletant Plutarque ou les Commentaires de César. Bienfaisante action des Humanités où chaque esprit solide trouve une nourriture substantielle et l’occasion de créer. »

Dès l’ouverture du Bureau, un décret avait interdit de faire payer plus de trois sols un enregistrement dans ses livres ou un extrait de registre, mais c’était largement de quoi faire vivre Renaudot et sa famille, car le succès fut immédiat et immense.

Lassé des pamphlets et libelles qui l’attaquaient, Richelieu conçut l’idée d’y répondre par une publication régulière et en fit confier la réalisation à Renaudot. L’affaire s’était sans doute éventée car deux libraires parisiens, Jean Martin et Louis Vendôme, avaient pris tout le monde de vitesse en publiant le 16 janvier 1631 le premier numéro d’un journal (quatre pages in‑4o) portant le titre de Nouvelles ordinaires de divers endroits. Le premier numéro de la Gazette de Renaudot (sans nom ni adresse d’imprimeur), qui ressemblait fort à un plagiat hâtif des Nouvelles, ne parut que le 30 mai suivant. Imprimée chaque vendredi et vendue deux liards à la criée, elle tirait son nom de l’italien gazzetta, la pièce de monnaie qui était le prix ordinaire du cahier des nouvelles courantes (fogli avvisi) vendu à Venise dès le xvie s. Ayant mis son nom au bas de sa Gazette du 4 juillet 1631, Renaudot, imprimeur sans licence, avait eu à affronter les attaques de Martin et Vendôme, et de l’Université ; mais le roi était intervenu en personne pour interdire les Nouvelles (qui cessèrent de paraître le 19 décembre) et autoriser la Gazette avec privilège exclusif (lettre patente du 18 novembre 1631). Renaudot avait même eu l’impudence, à dater du 28 novembre, d’ajouter à son journal un supplément intitulé Nouvelles ordinaires de divers endroits.

Imprimée rue de la Calandre, la Gazette contenait les nouvelles de France et surtout du reste du monde, communiquées par les services du cardinal ou recueillies par Pierre d’Hozier (v. note [13], lettre 655) grâce à l’abondante correspondance qu’il entretenait en France et à l’étranger ; Louis Epstein, l’ancien rédacteur des Nouvelles de Martin et Vendôme, était même venu grossir l’équipe. En 1637, Renaudot avait élargi les services de son Bureau d’adresse en y important d’Italie le prêt sur gage, dit « à grâce » (mont-de-piété).

Vers 1638, il y avait adjoint des consultations charitables (gratuites), officiellement approuvées par lettres patentes du 25 septembre 1640 (v. infra note [7]), avec le dessein d’« égaler le traitement des pauvres et plus misérables personnes à celui des grands », mais sans refuser les malades payants, disant, pour s’en justifier, « Que les riches aident aux pauvres ! » Aucun médecin de Paris n’ayant répondu à l’appel, Renaudot en avait fait venir de Montpellier ; alors les malades s’étaient mis à affluer et les consultations hebdomadaires avaient rapidement dû devenir quotidiennes. Enhardi par son succès, Renaudot était allé jusqu’à placarder par les rues de Paris : « Entouré de la faveur royale, [mon établissement] finira tôt ou tard par détrôner la vieille Faculté, déjà en retard par bien des côtés sur les besoins nouveaux du siècle. »

La Faculté de médecine de Paris avait vu là ses prérogatives (exercice exclusif à Paris des médecins qu’elle avait dûment gradués) et son honneur bafoués. Non sans avoir aussi ouvert une consultation charitable dans ses locaux de la rue de la Bûcherie (le samedi de dix heures à midi, v. note [38] de L’ultime procès…), elle avait assigné une première fois Renaudot (23 octobre 1640) devant le Châtelet, qui lui avait interdit d’exercer la médecine à Paris (sentence du 6 novembre suivant) ; mais le roi avait ordonné de surseoir aux poursuites (Delavault et Gilles de la Tourette).

On en était alors là de cette querelle qui devait encore beaucoup s’envenimer. Les lettres de Patin en ont partialement décrit les méandres, que détaillent aussi deux annexes de notre édition, intitulées Un manuscrit inédit de Patin contre les consultations charitables de Renaudot et L’ultime procès de Renaudot contre la Faculté de médecine de Paris, perdu le 1er mars 1644. Elles ont aussi parlé des trois fils de Théophraste Renaudot : Isaac (né en 1610), docteur régent de la Faculté de médecine de Paris, Théophraste ii (1611), conseiller de la Cour des monnaies, et surtout Eusèbe (1613), lui aussi docteur régent (v. note [16], lettre 104). La mère de ses enfants, Marthe Dumoustier, mourut en 1639, er Renaudot se remaria 1651 avec Louise de Mâcon.

Depuis la publication de sa Vie par Georges Gilles de la Tourette en 1884 et l’érection de sa statue au cœur de l’Île de la Cité en 1893 (v. note [21] de Paul Triaire, éditeur des Lettres en 1907), Renaudot est loué comme l’inventeur du journalisme et des œuvres charitables laïques en France, soit le précurseur des grandes vertus républicaines. Le prix littéraire qui porte son nom lui assure une célébrité saisonnière depuis 1926, année de sa création « pour occuper les loisirs que l’Académie Goncourt laisse chaque année aux informateurs littéraires pendant qu’elle délibère sur l’attribution de son prix », comme ont écrit les dix journalistes fondateurs du Prix Renaudot dans l’Avant-propos de leur Vie de Théophraste Renaudot (Paris, Gallimard, NRF, 1929). Ce livre m’a aussi fait découvrir (pages 109‑110) une baroque gravure intitulée « La Gazette » (Gallica) (dessinée en 1630-1632) et je lui emprunte en partie la description qui suit, à laquelle j’ai ajouté les sept quatrains, à la gloire du Gazetier, qui commentent l’image.

La Gazette y figure sous les traits d’« une forte belle aux fermes appats », vêtue d’« une robe flottante brodée de langues et d’oreilles ». {a} Elle trône sur une estrade et, à sa gauche, les diverses nations (dont un cavalier français, « un Castillan à la longue rapière, aux moustaches retroussées, et un Indien coiffé de plumes », etc.), à la queue leu leu, lui tendent des lettres porteuses de nouvelles. {b} Debout à la droite de la Gazette, le mensonge ôte son masque et « lui lance des regards chargés de haine ». Assise à ses pieds, la vérité, toute nue, les bras croisés, semble admirer la Gazette avec confiance. {c} Au bas de la tribune dont les marches sont jonchées de dépêches refusées, le greffier de la Gazette, Renaudot, assis derrière son écritoire, rédige son journal. {d} Sans dissimuler son nez ici particulièrement hideux, il détourne hautainement la tête des cadets de la faveur qui essaient de le soudoyer en lui offrant de l’argent ; {e} tandis que le crieur de gazette s’apprête à partir vendre les feuilles qui emplissent son panier. {f}


  1. « La Gazette

    Mille peuples divers parlent de mon mérite,
    Je cours dans tous les lieux de ce vaste univers,
    Mon sceptre fait régner la prose et les vers,
    Et pour mon trône seul, la terre est trop petite. »

  2. « Les diverses nations

    Sa cour du monde entier occupe les provinces,
    Elle voit librement les pauvres et les rois,
    Les Mores, les chrétiens, les Turcs et les Français
    Entrant aux cabarets comme aux palais des princes. »

  3. « La Vérité

    Je suis cette vertu des seuls sages connue.
    Belle, j’enfante un monstre abhorré des mortels.
    La Gazette me souffre enfin dans ses autels
    Et se plaît aujourd’hui de me voir toute nue. »

  4. « Le greffier de la Gazette

    De mes divers écrits la Fortune est la base,
    Ses divers mouvements, des miens le piédestal ;
    Elle me porte plus haut que Pégase
    Et sa roue est pour moi d’un précieux métal. » {i}

    1. L’écritoire de Renaudot porte en façade une effigie ailée de la Fortune (ou plus exactement, me semble-t-il, du dieu Favor, la Faveur, v. note [9], lettre 138), debout sur sa roue.

  5. « Les cadets de la faveur

    Plus que de triompher, nous brûlons de paraître
    Ennemis des combats et serfs d’un faux honneur.
    Vous aurez de notre or en nous faisant faveur :
    Dites que nos grands coups font des Mars disparaître. »

    « Le greffier de la Gazette

    Je suis universel peintre, poète, orateur.
    Je crie ce que l’on fait ou qu’en veillant on songe.
    Les faux avis souvent me font nommer menteur.
    Malgré moi secrétaire et non serf du mensonge. »

  6. « Le crieur de gazette

    Monsieur l’historien, donne-moi des emplâtres
    Pour nourrir les cancers des cerveaux curieux,
    Ces beaux contes fardés des nouveaux demi-dieux
    Dont, pour notre profit, les fous sont idolâtres. »

7.

« pur charlatan, calomniateur, et le pire sycophante ».

Agyrta, charlatan, est un hellénisme (αγυρτης). Sycophante est le « nom qu’on donnait dans Athènes aux dénonciateurs qui livraient aux passions de la foule les citoyens éminents et surtout ceux dont elle redoutait le plus la raison ou la vertu. Aujourd’hui, fourbe, menteur, fripon, délateur, coquin. En grec, c’était le nom donné aux dénonciateurs des voleurs de figues dans les bois sacrés de l’Attique ou, selon Plutarque, de ceux qui en exportaient, et de là délateur ; du grec figue [sukon] et découvrir [phainein] » (Littré DLF). Bourreau pour Bureau d’adresse est un jeu de mot dont Guy Patin a plusieurs fois voulu divertir ses correspondants.

On ne peut mieux représenter l’animosité de la Faculté de médecine de Paris contre Renaudot qu’en reproduisant les Lettres patentes du roi, en faveur des pauvres, et particulièrement des malades.

« Louis par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre. À tous ceux qui ces présentes lettres verront, Salut. Notre très cher et bien amé Théophraste Renaudot, docteur en médecine, l’un de nos conseillers et médecins ordinaires, maître et intendant général des Bureaux d’adresse de France, s’étant de longue main employé à la recherche des plusieurs inventions et moyens pour l’emploi des pauvres valides et traitement des invalides ; et généralement à tout ce qui est utile et convenable au règlement desdits pauvres, pour lequel nous l’aurions mandé exprès dès le mois d’octobre de l’an 1612, et à icelui permis et accordé par notre brevet dudit jour de mettre en pratique et établir toutes sesdites inventions ; avec défenses à tous autres qu’à ceux qui auront pouvoir exprès de les imiter, altérer ou contrefaire ; même icelui pourvu de la charge de Commissaire général des pauvres de notre royaume, par arrêt de notre Conseil d’État du 3e février 1618 ; ledit Renaudot n’aurait pas seulement vaqué à la perquisition {a} des secrets et choses les plus cachées en l’art de médecine, dont il fait profession depuis trente-cinq ans ; mais encore, depuis l’établissement de sesdits Bureaux d’adresse, reçu en iceux toutes les personnes curieuses qui y font expériences de plusieurs inventions utiles au public ; et particulièrement auxdits pauvres, lesquels y reçoivent gratuitement conseil et assistance en leurs maladies et incommodités par la charité des médecins, chirurgiens et apothicaires qui s’y assemblent à cette fin ; et d’autant qu’une partie des expériences qui s’y font sont des remèdes tirés des plantes, animaux et minéraux, pour la préparation desquels il est obligé de tenir toutes sortes de fourneaux, alambics, matras, {b} récipients et autres vaisseaux et instruments de chimie ou spagirie, pour extraire par les opérations dudit art toutes sortes d’eaux, huiles, sels, magistères, extraits, quintessences, chaux, teintures, régules, précipités, et généralement tous les autres effets dudit art de chimie, lesquels se trouvent fort utiles à la guérison des maladies lorsqu’ils sont méthodiquement administrés selon les préceptes de la médecine ; désirant favoriser cette louable institution et donner sujet à tous ceux qui auront quelque invention utile au public de ne l’en pas vouloir frustrer, mais plutôt lui en faire voir l’expérience ; Nous avons par ces présentes, signées de notre main, permis et accordé, permettons et accordons à tous ceux qui auront quelque invention ou moyen servant au bien et soulagement desdits pauvres tant valides que malades et invalides, mêmement quelque remède tiré des végétaux, animaux et minéraux par le régime du feu ou autrement, le pouvoir faire en la maison dudit Renaudot et en sa présence, et non ailleurs. Et pour cet effet avons permis audit Renaudot de tenir chez lui lesdits fourneaux et y faire toutes sortes d’opérations chimiques servant à la médecine seulement.

Si donnons en mandement, à nos amés et féaux les gens tenant notre Cour des monnaies, que ces présentes ils fassent enregistrer et du contenu en icelles jouir ledit sieur Renaudot, nonobstant toutes oppositions, appellations et empêchements quelconques. Et voulons qu’au vidimus {c} d’icelles, dûment collationnées par l’un de nos amés et féaux conseillers et secrétaires, foi soit ajoutée comme au présent original, car tel est notre bon plaisir. En témoin de quoi nous avons fait mettre notre sceau à cesdites présentes. Donné à Chantilly, le second jour de septembre, l’an de grâce 1640, et de notre règne trente-unième. Signé, Louis ; et plus bas, Par le roi, Philippeaux, et scellé du grand sceau de cire jaune. Registré en ladite Cour des monnaies ; ouï sur ce le procureur général du roi, le 25 septembre 1640. Signé de Laitre. »


  1. Recherche.

  2. Cornues.

  3. À la copie conforme.

8.

Les médecins de la Faculté de Paris étaient alors en grand émoi contre Théophraste Renaudot : muni d’une solide immunité royale, non seulement ce docteur de Montpellier exerçait sans leur autorisation la médecine dans leur propre territoire d’exclusivité en employant des remèdes chimiques qu’ils réprouvaient ; mais aussi il s’autorisait à leur donner des leçons de charité et de désintéressement.

Le ton de la dispute s’aigrissait sérieusement. Aux Consultations charitables pour les malades. Dédiées à Monseigneur de Noyers, secrétaire d’État (Paris, Bureau d’adresse, 1640, in‑4o de 12 pages ; avec à la fin, pages 11‑12, les lettres patentes du roi transcrites dans la note [7] supra) de Théophraste Renaudot, alors au faîte de sa gloire, avait répondu la Défense de la Faculté de médecine de Paris, contre son calomniateur, dédiée à Monseigneur l’Éminentissime cardinal-duc de Richelieu (Paris, sans nom, 1641, in‑4o de 60 pages), signée par « les très humbles, très affectionnés et très obéissants serviteurs, les doyen et docteurs régents de la Faculté de médecine de Paris », et rédigée (selon Guy Patin) par René Moreau. Une citation biblique se trouve en exergue du titre, Responde stulto iuxta stultitiam suam, ne sibi sapiens esse videatur (Proverb. 26) [Réponds à l’insensé selon sa folie, de peur qu’il ne se figure être sage (Proverbes, 26:4)], que Patin a reprise quelques phrases plus loin (vinfra note [11]).

Y répliquait alors la Réponse de Théophraste Renaudot au libelle fait contre les consultations charitables pour les pauvres malades (Paris, Bureau d’adresse, 1641, in‑fo de 91 pages), qui commence par ces mots amers et railleurs (page 3) :

« Que les esprits à qui j’ai à faire sont malaisés à contenter ! Tandis que je fais servir de relâche {a} à mon emploi dans la médecine quelques autres exercices utiles au public, ils me blâment de ne m’adonner pas entièrement à cet art ; et lorsque je le veux exercer, même pour les pauvres, ils s’y opposent. Mon zèle me les rend ennemis. Ils ne me permettent pas de donner mon bien, mon temps et mon industrie sans procès. Ma charité, en un mot, leur est criminelle. Voyant ces mauvais effets d’une si bonne cause, si je me veux accorder à tout ce qui sera trouvé honnête aux deux parties, ils ne le veulent pas. Si je me défends et rends raison de mon droit à mes juges, un de ces esprits malades de la démangeaison d’écrire vomit sa bile sur du papier, en gardant néanmoins encore assez sur son visage olivâtre pour le faire appeler picrochole. {b} Mais pource qu’il cèle son autre nom dans la foule de ses compagnons, j’ai trouvé à propos de ne le nommer pas en la consultation que je vais faire pour le guérir. »


  1. Distraction.

  2. V. note [10], lettre 435.

Pour la citation biblique, Renaudot y rétorque vertement (page 11) :

« Dès la première page de son livre, il m’appelle sot, faisant montre de ce passage des Proverbes, Responde stulto iuxta stutitiam suam ne sibi sapiens esse videatur ; auquel passage il me permettra de satisfaire par de plus sages et meilleures réponses que ses objections, en exécutant le verset précédent du même chapitre 26 des Proverbes : Ne respondeas stulto iuxta stutitiam suam, ne et tu quoque par ei fias. {a} Car, puisqu’il m’attaque d’armes si communes qu’est ce passage-là, je ne lui en veux pas pour l’heure opposer d’autres pour me défendre. »


  1. « Ne réponds pas à l’insensé selon sa folie, de peur de lui devenir semblable, toi aussi » (26:4).

Sur les consultations charitables, Renaudot se fait gentiment menaçant (pages 14‑15) :

« Voire s’il s’agissait de quelque autre chose que de la charité qui ne se veut point être bornée, et que je tinsse de l’humeur litigieuse de mes parties, je serais bien fondé à leur faire payer l’amende de six mille livres à laquelle sont condamnés tous ceux qui imiteront mes inventions comme ils ont fait : puisqu’il se justifie qu’il n’y a que deux ans qu’ils commencent de consulter pour les pauvres, et il y en a plus de dix que je le pratique chez moi, comme je leur fais voir par mes livres lors publiés, outre lesquels plus de dix mille personnes peuvent déposer qu’on n’a jamais renvoyé de chez moi aucun pauvre malade sans assistance gratuite, et nommément que dès l’an 1634 et 35 il s’assemblait en ma maison grande quantité de médecins qui exerçaient la même charité qui s’y fait à présent ; là où les médecins du Collège de Paris ne sauraient justifier la charité de leur École, sinon depuis deux ans ; encore n’était-ce qu’une pure formalité sans effet, ne s’y trouvant aucun malade. Aussi n’avaient-ils été mes imitateurs qu’à demi ; mais aujourd’hui qu’ils ont fait publier et afficher qu’ils ne donneraient pas seulement leurs conseils aux pauvres malades, mais aussi, à notre exemple, de quoi les exécuter, comme il faut espérer qu’ils auront plus de malades, aussi doivent-ils ingénument reconnaître qu’ils sont mal fondés à impugner {a} par écrit notre charité, puisqu’ils l’imitent en effet. »


  1. Attaquer.

Parlant de René Moreau, natif de Montreuil-Bellay en Anjou (v. notule {d}, note [53] du Borboniana 7 manuscrit), Renaudot dit, page 60 :

« N’a-t-il pas bonne grâce après cela d’appeler Étrangers de meilleurs Français que lui ? entre lesquels plusieurs sont originaires de cette ville, ce qu’il n’est pas, mais du pays dont les clercs boivent mieux qu’ils n’écrivent. »

La fin (pages 89‑91) parle du Samaritain (v. note [18], lettre 488) :

« Mais notre Seigneur Jésus-Christ vide la question dans saint Luc au chap. 10, où parlant du voyageur qui avait été laissé presque mort par les voleurs, il dit que le prêtre et le lévite passant là sans se détourner de leur chemin pour l’assister, un Samaritain aussi passant fut ému de compassion de sa misère, et ayant mis pied à terre, s’approcha de lui, banda ses plaies, après y avoir versé du vin et de l’huile, le mit sur son cheval, le mena à l’hôtellerie où il le fit panser, et s’en allant le matin, laissa de l’argent à l’hôte pour en avoir soin, s’obligeant à lui payer le reste à son retour. Sur quoi Notre Sauveur ayant demandé lequel des trois est le prochain de ce pauvre blessé, on lui répond, et il l’approuve, que c’est le Samaritain, et non pas le prêtre ni le lévite. Sans doute que Messieurs les docteurs de Paris eussent mis en procès le Samaritain, comme ils y tiennent aujourd’hui les médecins qu’ils appellent externes, pour avoir été si hardi que de venir prendre le soin d’un malade de leur ressort ; et je m’assure qu’ils trouveront quelque chose à reprendre aux médecins juifs de ce temps-là, possible en ce prêtre et en ce lévite, d’avoir souffert cette infraction de leurs privilèges. Mais s’ils s’en fussent voulu tenir au jugement de Notre Seigneur, le Samaritain eût payé les épices, {a} puisque cette seule action de charité qu’il exerce le fait déclarer prochain, plutôt que les autres qui se vantaient d’être de la nation sainte et de la sacrificature royale. Et il semble véritablement que cette histoire soit un tableau de l’affaire dont il s’agit à présent : que le prêtre et le lévite soient Messieurs nos maîtres de l’École de Paris qui étaient prêtres et religieux il n’y a pas longtemps ; que le Samaritain, plus charitable qu’eux, représente les docteurs en médecine des autres Facultés, qui entreprennent non seulement le soin du pauvre malade abandonné, mais le visitent, pansent et bandent ses plaies ; qui plus est, mettent la main à la bourse pour lui fournir ses nécessités. Il ne reste plus que de prononcer, comme Dieu fit dès ce temps-là, et comme il fait encore à présent par la voix du peuple, qui est la sienne, au profit de leur charité. »


  1. Les honoraires des juges.

Le Manuscrit inédit de Guy Patin contre les consultations charitables de Théophraste Renaudot procure de nombreux développements complémentaires sur le contenu de la Défense de Moreau et sur la Réponse qu’y opposa Renaudot.

9.

« vaurien semainier » ; la Gazette était un hebdomadaire, dont les ordinaires paraissaient le samedi.

10.

« On appelle amende honorable une peine afflictive qui emporte note d’infamie, quand on est condamné d’aller nu en chemise, la torche au poing et la corde au cou, devant une église, ou dans un auditoire, demander pardon à Dieu, au roi et à la justice, de quelque méchante action » (Furetière).

11.

« on répondra à l’insensé selon sa folie » (Psaumes, v. supra note [8]).

La réponse (anonyme) de Jean ii Riolan (selon Guy Patin) ou de Guy Patin lui-même (selon Théophraste Renaudot, v. ci-dessous) s’intitulait Avertissement à Théophraste Renaudot contenant les mémoires pour justifier les anciens droits et privilèges de la Faculté de médecine de Paris (Paris, sans nom, 1641, in‑4o de 60 pages). L’épître dédicatoire en est adressée à « Monsieur, Monsieur Bouvard, conseiller d’État et premier médecin du roi », sans indication d’auteur ni de date. L’auteur y sollicite le soutien de l’éminent Charles Bouvard pour obtenir un arrêt contre « les charlatans et imposteurs pratiquant la médecine illicitement par toute la France » :

« Cette action donnera au roi et à Son Éminence, restaurateur de la médecine, mille bénédictions pour avoir eu soin du peuple et conservé plus de cinq à six mille personnes que cette canaille meurtrière tue tous les ans par toute la France ; et à vous Monsieur, vous acquerra une gloire immortelle parmi les médecins pour avoir été médiateur d’une si belle entreprise. »

Un extrait (page 57, à propos des consultations charitables de Renaudot) donne une idée du contenu et du ton :

« J’avoue que les actions vertueuses sont à louer, même en la personne de nos ennemis. Le Samaritain {a} qui était ennemi de la nation sainte des juifs fit une action à la campagne, qui fut approuvée et louée par Notre Seigneur. Si Renaudot faisait sa charité secrètement et à la campagne comme ce voyageur, sans vanité et ostentation, et qui baillât de son propre bien comme il se vante faussement, nous aurions sujet de le louer. Mais acceptant la comparaison qu’il fait de sa personne et de sa séquelle avec les médecins de Paris, qu’il veut faire passer pour des personnes sans charité, qu’il est le Samaritain, et nous autres médecins, qui étaient prêtres et religieux n’y a pas longtemps, il ne dit plus moines par dérision, nous lui pouvons dire Samaritanus es et dæmonium habes. {b} Par conséquent nous ne pouvons consulter avec vous et vos frères ignorants de la charité. D’autant que le prêtre et le lévite qui étaient de la nation juive n’ont point de commerce avec les Samaritains, non coutuntur Iudæi Samaritanis, {c} qui étaient anathémisés et réprouvés pour leur apostasie et religion contraire, comme vous apprendrez par l’Histoire de Josèphe, historien juif. » {d}


  1. V. supra note [8].

  2. « Tu es un Samaritain, et un démon te possède » (Jean, 8:48).

  3. « les Juifs n’ont pas de relations avec les Samaritains » (Jean, 4:9).

  4. V. note [18], lettre 95, pour les ouvrages historiques de Flavius Josèphe.

Théophraste Renaudot répliqua de nouveau par les Remarques sur l’Avertissement à Me Théophraste Renaudot, portées à son auteur par Maschurat compagnon imprimeur (Paris, sans nom, 1641, petit in‑fo de 46 pages). Dès l’ouverture, on devine une attaque contre Patin, avec son passé inavoué dans la librairie :

« Monsieur mon camarade, je n’oublie pas, comme vous, mes amis du temps passé. Et puisque de correcteur à imprimeur il n’y a que la main, {a} je vous porte cette santé, {b} espérant, si vous n’avez oublié à boire depuis que nous travaillions ensemble chez le bonhomme Laquehais, maître imprimeur en cette ville, que vous me ferez plus de six raisons avant qu’on en trouve une en votre livre. Je l’appelle ainsi, encore que votre nom n’y soit point, puisque vous l’avez fait imprimer et corriger avec plus de soin que les autres où vous avez appris ce peu que vous savez. »


  1. Pour dire toper : « il leur suffit de toucher dans la main pour faire un marché, sans aucun écrit » (Furetière).

    Telle est une des deux déclarations originales imprimées (que je connaisse, avec l’autre témoignage de Renaudot rapporté dans la note [9], lettre 96) attestant du fait que Patin a été correcteur d’imprimerie, pour gagner son pain quand il étudiait, loin de sa famille et ne froid avec elle. Ce détail de sa biographie est néanmoins remarquable car il établit l’origine probable de ses liens avec Renaudot, mais aussi avec Jean ii Riolan, car il aurait alors corrigé les épreuves de ses ouvrages.

  2. Je fais pour vous ce vœu.

Le « bonhomme Laquehais » (ou Laquehay) se prénommait Jean. Reçu maître imprimeur avant août 1611, il fut inhumé le 10 janvier 1650. Il a exercé en divers endroits : rue Judas (1611), contre le Collège de la Marche (1612-1613), contre le Collège de Lisieux, et enfin près du Collège de Boncourt (1629-1636) (Renouard).

En 1644, dans sa Réponse à l’Examen… (v. note [9], lettre 96), Renaudot a recouru au même procédé, et identifié l’auteur de l’Avertissement… à Patin.

Les Remarques sur l’avertissement… s’achèvent sur ces paroles :

« Voilà mon bon ami ce que l’on a répondu à votre livre. C’est à vous à juger si vous aurez beaucoup de gain à y repartir. {a} Sur quoi je vous dirai qu’étant le 26e de ce mois de mai retourné en la maison dudit sieur Renaudot, pour m’enquérir sous-main de ce qui se passait à votre préjudice, j’y appris une bonne nouvelle pour vous et pour votre École : c’est qu’une personne de grande condition {b} et qui a tout pouvoir sur lui {c}, après avoir lu cette réplique, et remarqué qu’elle avait été faite et imprimée en quatre jours, lui témoigna qu’il désirait qu’on n’écrivît plus sur ce sujet de part ni d’autre. De sorte que chacun connaissant quelle estime ledit sieur Renaudot fait de tout ce qui lui vient de cette part, selon ce que j’ai pu apprendre là-dedans, je vous puis jurer, foi de compagnon, que vous n’aurez plus rien de lui sur cette matière. »


  1. Répondre.

  2. Le cardinal de Richelieu.

  3. Renaudot.

Un arrêté royal daté du 14 juin 1642 allait clore en effet temporairement toute dispute en interdisant à la Faculté de ne faire aucune poursuite contre Renaudot par devant le prévôt et autres juges, et à quiconque de ne plus rien publier sur le sujet (v. note [68] de L’ultime procès de Renaudot contre la Faculté de médecine de Paris, perdu le 1er mars 1644). Tout allait changer pour lui après la mort de ses deux puissants protecteurs : Richelieu en décembre 1642, puis Louis xiii en mai 1643. Il perdit dès lors procès après procès, comme l’expliquent la suite de la correspondance et l’annexe susdite.

12.

François Ranchin (v. note [5], lettre 13) était mort de la peste le 30 avril 1641.

Martin Richer de Belleval (Blois 1599-Montpellier 13 mars 1664) l’emporta pour lui succéder au chancelariat de l’Université (je n’ai pas su identifier l’« autre professeur », son concurrent pour cette charge prestigieuse). Fils de Jean, valet de chambre du roi, Martin Richer de Belleval avait été reçu docteur en médecine de l’Université de Montpellier en 1621. En 1632, il avait été nommé survivancier dans la chaire de son oncle Pierre Richer de Belleval, qui était celle d’anatomie et de botanique, mais sans compétence pour l’enseignement de ces deux matières. Chancelier, il ne cessa d’accumuler les honneurs : premier consul de la ville en 1645, puis conseiller à la Chambre des comptes de Montpellier à partir de 1652. Il mourut sans laisser aucun écrit, pas même l’édition de ceux que son oncle lui avait confiés. Son neveu, Michel Chicoyneau (v. note [15], lettre 584) lui succéda dans ses deux charges universitaires (Dulieu).

13.

Bapaume (Pas-de-Calais), à 22 kilomètres au sud-est d’Arras, était alors une place forte des Flandres espagnoles (Artois).

« Elle doit à sa situation sur la frontière les nombreuses vicissitudes qu’elle a subies : prise et saccagée par Louis xi, elle fut restaurée par Charles Quint, assiégée et prise encore par François ier, et enfin par La Meilleraye, en 1641, sur les Espagnols ; cédée définitivement à la France en 1659 par le traité des Pyrénées » (G.D.U. xixe s.).

14.

« en faveur de la paix ».

15.

« une manière de s’enrichir pour les moines ».

16.

Frairie : « terme populaire, qui signifie, débauche, réjouissance » (Furetière) ; v. note [7], lettre 55, pour l’église des jésuites qu’on inaugurait alors rue Saint-Antoine.

17.

« saluez-le, je vous prie, de ma part ».


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Claude II Belin, le 15 mai 1641

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(Consulté le 28/03/2024)

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