L. 128.  >
À Charles Spon,
le 16 novembre 1645

Monsieur, [a][1]

Depuis ma dernière, il n’est rien arrivé ici qui soit digne de vous être mandé, si ce n’est que les ambassadeurs de Pologne, l’évêque de Varmie [2] et le palatin de Posnanie, [3] qui viennent quérir la princesse Marie [4] pour être leur reine, [5][6][7] ont fait une superbe et solennelle entrée le dimanche 30e d’octobre, avec une telle pompe qu’on n’a jamais rien vu de pareil. [1] Ils sont entrés par la porte Saint-Antoine [8][9] et sont allés loger au bout du faubourg Saint-Honoré [10] dans l’hôtel de Vendôme, si bien qu’ils ont passé au travers de Paris de bout en bout. [2] Aussi ont-ils été vus d’une infinité de peuple qui courut dès le matin retenir sa place sur les chemins par où ils devaient passer. Tout ce jour-là j’eus fort à faire pour des gens qui n’avaient pas la force de quitter leur lit, mais je vous assure que dans les autres rues où ils ne passaient pas il y avait une si grande solitude que je me représentais une ville désertée par la famine ou la pestilence, dont je prie Dieu qu’il nous préserve vous et moi. J’aurais pu m’avancer hors de la porte Saint-Antoine où j’eusse pu voir le tout aisément, mais je n’en voulus pas prendre la peine. Ces spectacles publics ne me touchent guère, ils me rendent mélancolique, [11] moi qui suis naturellement joyeux et gai, au lieu qu’ils réjouissent les autres. [12] Quand je vois toute cette mondanité, [3] j’ai pitié de la vanité de ceux qui la font. Il est vrai qu’on ne fait point cette montre pour les philosophes, de l’humeur et de la capacité desquels je voudrais bien être ; mais c’est pour le vulgaire qui est ébloui de cet éclat et en passe le temps plus doucement. Je fus ce jour-là quelque peu de temps davantage qu’à mon ordinaire dans mon étude et m’y employai assez bien. Mes voisins disent que j’ai grand tort de n’avoir point été à cette cérémonie et que c’était la plus belle chose du monde. Ils me reprochent que je suis trop peu curieux et trop mélancolique, et moi je dis qu’ils sont trop peu ménagers de leur temps. Je m’en rapporte à vous. Si vous me condamnez, je vous promets que la première fois que le pape viendra à Paris, j’irai exprès jusqu’à la rue Saint-Jacques [13] au-devant de lui, où je l’attendrai chez un libraire en lisant quelque livre, et ce ne serait encore que pour vous complaire car, à vous dire la vérité, si le roi Salomon [14] avec la reine de Saba [15] faisaient ici leur entrée avec toute leur gloire, je ne sais si j’en quitterais mes livres. [4] Mon étude me plaît tout autrement et je m’y tiens plus volontiers que dans les plus beaux palais de Paris. [5][16]

Pour ce que vous souhaitez d’être informé du sieur de Mayerne Turquet, [17] médecin du roi d’Angleterre, [18] il est, à ce que j’apprends, natif de Genève, fils d’un homme qui a fait l’Histoire d’Espagne qui est aujourd’hui imprimée en deux volumes in‑fo. Ce père [19] a aussi fait un livre intitulé La Monarchie aristodémocratique[6] qui fut contredit par Louis Dorléans [20] (c’est celui qui a fait des commentaires sur Tacite) [21] dans sa Plante humaine imprimée à Lyon et Paris. Turquet fit une réponse à Louis Dorléans en 1617. [7] Il demeurait à Genève [22] ou près de là, dans la religion du pays, et Louis Dorléans est un vieux ligueur, [23] bateleur et méchant homme. Il avait écrit rudement et satiriquement contre Henri iv [24] et néanmoins, ce bon roi lui pardonna. J’ai connu le personnage : il a vécu 87 ans ; il mourut d’une pleurésie [25] en cette ville l’an 1629 ; je l’ai quelquefois entretenu, il ne parlait que de Carolus Scribanius, [8][26] jésuite d’Anvers, [27] où il avait été réfugié pendant son exil, de Juste Lipse, [28] qui était un autre animal bigot et superstitieux, et du P. Cotton, [29] qui avait été son intercesseur envers Henri iv[9] Cet homme a laissé deux enfants, dont l’un était aveugle ; l’autre était aux galères [30] à Marseille, [31] où il a été envoyé pour un homicide qu’il avait fait en colère. Mais revenons à M. de Mayerne, qui est encore aujourd’hui en Angleterre. Je crois qu’il est médecin de Montpellier. [32] Il vint à Paris en l’an 1602 et comme il se piquait d’être grand chimiste, [10][33] il eut querelle avec quelques-uns des nôtres, d’où vint qu’on fit un décret de ne jamais consulter avec lui. [34] Il eut pourtant quelques amis de notre Ordre qui voyaient des malades avec lui. De cette querelle provint une Apologie du dit Théodore Mayerne Turquet, de laquelle il n’est non plus l’auteur que vous ni moi. Deux docteurs de notre Compagnie y travaillèrent : [11] Seguin, [35] notre ancien [36] qui a toujours porté les charlatans, [37] et son beau-frère Akakia, [38][39][40] qui mourut l’an 1605 de la vérole, [12][41] qu’il avait rapportée d’Italie où il était allé avec M. de Béthune, [42] ambassadeur à Rome ; [13] ce qu’ils avaient fait en dépit de quelques-uns de nos anciens qui étaient d’honnêtes gens et qui tâchaient avec fort bon dessein d’empêcher que les chimistes et les charlatans ne se missent ici en crédit pour vendre leur fumée aux badauds de Paris. Ce Mayerne est encore aujourd’hui en Angleterre, fort vieux, presque en enfance. On dit qu’il a quitté le parti du roi [43] et qu’il s’est rangé du côté du Parlement[44] J’ai vu un de ses enfants en cette ville, étudiant en médecine, qui, depuis est mort en Angleterre. On dit qu’il est fort rude à ses enfants, tant il est avaricieux, et qu’il les laisse mourir de faim. [14] Il est grand chimiste, fort riche, et sait le moyen de se faire donner force jacobus d’une consulte de cinq ou six pages[15][45] Il est, entre autres, baron d’Aubonne, belle terre dans le Pays de Vaud, proche de Genève, de laquelle était seigneur en l’an 1560 un certain évêque de Nevers, [46][47] nommé Spifame, [48] qui quitta son évêché et 40 000 livres de rente en bénéfices pour embrasser à Genève, où il s’en alla, le parti de la sainte Réformation huguenote ; [49][50] où, après avoir servi puissamment ce parti et avoir fait en Allemagne quelque légation pour Louis de Bourbon, prince de Condé, [51][52][53][54] et pour tous les huguenots de France, [16][55][56][57] il eut la tête coupée, environ l’an 1566, sous ombre qu’il était adultère et qu’il tenait en sa maison une femme qu’il n’avait pas épousée ; mais ce ne fut que le prétexte, la vraie cause de sa mort, et le premier mobile, fut le pape [58] qui employa l’autorité de Catherine de Médicis [59] pour gagner les syndics de Genève à perdre ce pauvre homme. [17] Si le prince de Condé eût encore eu assez de crédit, il l’eût volontiers empêché, mais il ne le put. [18] Cet ami qui vous demande des nouvelles de l’Apologie de M. de Mayerne, n’est-ce point M. Courtaud [60] de Montpellier qui prétendait en faire bouclier contre l’arrêt [61] que nous avons obtenu contre le Gazetier Renaudot ? [19][62] Peut-être que non, mais il n’importe, tout ce que je vous ai dit est vrai. [20] Il faut même que vous sachiez que cette Apologie de Mayerne ne manqua pas de réponse. M. Riolan, [63] le père, y répondit par un livret exprès, élégant et savant à son accoutumée, dont je vous enverrai un exemplaire. [21]

On dit ici que nouvelles sont venues de Catalogne, [64] que M. le comte d’Harcourt [65] est enfin maître de Balaguer ; [66] et voilà que je viens d’apprendre que les Hollandais ont pris Hulst [67] sur l’Espagnol après un mois de siège. [22] Jamais la faiblesse du roi d’Espagne [68] n’a tant paru, quoique peu d’années auparavant il semblât qu’il voulût dévorer la domination de toute la terre habitable. Nous avons ici perdu, le 10e de ce mois, un honnête homme qui méritait beaucoup. C’est un président au mortier nommé M. de Novion, [69][70] frère de l’évêque de Beauvais. [23][71] C’était le plus habile et le plus hardi pour les affaires, et qui parlait pour le bien du public tout autrement que les autres. Le Parlement a perdu depuis quatre mois trois hommes qui valaient leur pesant d’or, savoir M. Briquet, [72] avocat général, M. le président Barillon, [73] qui est mort à Pignerol, [74] et M. le président Gayant, [75] qui est mort ici ; mais M. de Novion valait à lui seul autant que les trois autres. [24] Je vous baise les mains et suis, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur,

Patin.

De Paris, ce 16e de novembre 1645.


a.

Du Four (édition princeps, 1683), no viii (pages 29‑37) ; Bulderen, no viii (tome i, pages 23‑28) ; Triaire no cxxxi (pages 479‑485) ; Reveillé-Parise, no clxxxix (tome i, pages 365‑368).

1.

Posnanie (Poznan) est une ville de Pologne occidentale, sur la Warta, capitale d’un palatinat qui portait son nom, et qui était borné par celui de Kalisch, par la Silésie, et par le Brandebourg.

Varmie ou Warmie (Ermeland en allemand) était un évêché de Prusse Orientale (dont les précédents ont altéré le nom en Varsovie).

Le 31 octobre, au Palais-Royal, le roi et la reine avaient reçu le palatin de Posnanie, Krzysztof Opalinski, et l’évêque de Varmie, Wenceslas Leszczinski (Levantal).

2.

La princesse Marie, Louise-Marie de Gonzague-Mantoue (1611-Varsovie 10 mai 1667), allait devenir reine de Pologne. Fille de Charles ier de Gonzague (v. note [11], lettre 18), duc de Nevers, et sœur d’Anne de Gonzague de Clèves, la princesse Palatine (v. note [10], lettre 533), elle était d’une grande beauté. Gaston d’Orléans était tombé amoureux d’elle en 1627 ; mais Marie de Médicis s’opposa à ce mariage et interdit à son fils toute relation avec la princesse. Gaston avait projeté d’enlever Louise-Marie au cours d’un voyage qu’elle devait faire en Italie pour rendre visite à son père. La reine mère, prévenue, la fit aussitôt enfermer à Vincennes (1629). Louis xiii, qui revenait d’Italie où il était allé en personne soutenir Charles de Gonzague contre le duc de Savoie qui convoitait Mantoue, s’empressa de faire relâcher Louise-Marie. D’ailleurs, entre-temps, Gaston était parti pour la Lorraine où il l’avait oubliée lorsqu’il fit la connaissance de la sœur du duc, Marguerite. Louise-Marie avait alors pensé épouser Ladislas iv, roi de Pologne, mais il lui préféra Cécile-Renée, archiduchesse d’Autriche. Le duc de Nevers étant mort, Louise-Marie et sa sœur Anne s’étaient partagé le gouvernement du Nivernais. Louise-Marie avait cependant préféré vivre à Paris où elle fit la connaissance de Cinq-Mars, dont elle tomba éperdument amoureuse. L’exécution du jeune conspirateur en 1641 lui avait porté un coup terrible.

En 1644, après la mort de la reine Cécile, le roi Ladislas iv Vasa (1595-1648, couronné en 1632) réalisa le rêve de la princesse Marie en lui demandant sa main. Ce prince envoya en France une ambassade solennelle pour conclure le mariage et ramener dans ses États la nouvelle reine. Guy Patin relatait ici l’entrée à Paris, le 30 octobre 1645, d’une mission dont la Gazette (La magnifique entrée des ambassadeurs polonais dans la ville de Paris. Avec la première audience qu’ils ont eue de Leurs Majestés…, extraordinaire du 3 novembre 1645, no 141, pages 1001‑1016) a vanté la pompeuse magnificence. L’hôtel de Vendôme où logea l’ambassade était situé sur l’emplacement de l’actuelle place Vendôme. Le mariage fut célébré à la chapelle du Palais-Royal le 5 novembre suivant, en présence d’Anne d’Autriche. Ladislas allait mourir le 6 novembre 1648, et son demi-frère Jean ii Casimir lui succéder doublement, en montant sur le trône de Pologne et en épousant sa belle-sœur. La reine, ainsi reconduite aux côtés d’un souverain médiocre, montra beaucoup d’aptitudes dans le domaine politique ; mais elle ne laissa pas d’héritiers. Elle mourut d’une attaque d’apoplexie (R. et S. Pillorget, Triaire et G.D.U. xixe s.).

Olivier Le Fèvre d’Ormesson (Journal, tome i, pages 329‑330) :

« Le dimanche 5 novembre, je fus chez M. le Chancelier, où vint M. Galand. Nous suivîmes M. le Chancelier, qui allait dans la rue Saint-Honoré pour voir passer les Polonais qui allaient au Palais-Royal pour le mariage. Nous eûmes une fenêtre chez M. de Fleury vis-à-vis M. le Chancelier. Les Polonais passèrent à cheval fort magnifiques avec les mêmes habits de l’entrée. J’y eus plus de plaisir en les voyant en plein midi. La cérémonie ne se faisait pas à Notre-Dame, parce que Monsieur prétendait avoir un prie-Dieu. M. le Prince le voulait aussi, enfin il demandait les mêmes honneurs que Monsieur, ne lui cédant que le pas. Mme la Princesse faisait la même chose à l’égard de Mademoiselle ; de sorte que, pour éviter ces contestations, la reine résolut que le mariage se célébrerait au Palais-Royal ; et de fait, tous les échafauds faits à Notre-Dame avaient été rompus. Le chambellan de Guise accompagnait le palatin de Posnanie à cheval, l’évêque de Warmie étant passé devant en carrosse pour se préparer à la célébration, en ayant eu permission du grand aumônier. M. le Chancelier était avec Mme de Laval et Monsieur son mari, qu’il caressait extraordinairement.
Le lundi 6 novembre, je sus, l’après-dînée, que le mariage de la reine de Pologne s’était célébré dans la chapelle du Palais-Royal par l’évêque de Warmie en présence des Polonais, du roi, de la reine, du duc d’Anjou et du duc d’Orléans ; qu’ensuite les ambassadeurs avaient dîné avec le roi, où étaient le roi, la reine de Pologne, la reine, le petit Monsieur, {a} M. le duc d’Orléans, le palatin de Posnanie et l’évêque de Warmie. Le service fut très magnifique, mais on ne donna pas un verre d’eau à tous les autres seigneurs polonais ; qu’ensuite la reine avait tenu le cercle, où elle avait donné, comme partout, le dessus à la reine de Pologne. Ensuite le roi avait mené la reine de Pologne à l’hôtel de Nevers dans son carrosse, l’ayant auprès de lui à la portière, la couronne sur la tête, la reine au fond avec le duc d’Anjou, le duc d’Orléans à la portière et les ambassadeurs dans l’autre carrosse avec toute leur suite. »


  1. Philippe, duc d’Anjou, frère cadet du roi.

3.

Mondanité : « vanité mondaine. Il faut imiter la Magdelaine dans sa pénitence, après l’avoir suivie dans sa mondanité » (Furetière).

4.

Salomon (vers 970-931 av. J.‑C.), fils de David et de Bethsabée, fut le troisième roi des Hébreux ; il édifia le premier Temple de Jérusalem. Saba, reine légendaire d’Arabie, vint lui rendre visite.

5.

V. note [37] du Faux Patiniana II‑1 pour une reprise et un prolongement de ce paragraphe dans L’Esprit de Guy Patin.

6.

Louis Turquet de Mayerne (Lyon vers 1550-Paris 1618), père de Théodore (v. note [22], lettre 79), était issu d’une famille protestante originaire de Quiers, en Piémont. Dans une émeute populaire qui eut lieu à Lyon en 1572, Louis vit ses deux maisons ravagées et se sauva à Genève, dont il devint citoyen. Par la suite, il retourna à Lyon et finit par se fixer à Paris (Triaire et G.D.U. xixe s.). L’ouvrage cité par Guy Patin s’intitulait :

La Monarchie aristodémocratique, ou le Gouvernement composé et mêlé des trois formes de légitimes Républiques. Aux États généraux des Provinces Confédérées des Pays-Bas. {a}


  1. Paris, Jean Berjon et Jean le Bouc, 1611, in‑4o de 562 pages.

Turquet y proposait, sous la régence de Marie de Médicis, d’exclure du pouvoir les femmes et les enfants ; le livre fut confisqué et interdit aussitôt après sa publication. Son auteur dut d’échapper à des peines plus sévères à la bienveillance que lui portait la reine mère. Il publia ensuite une Apologie contre les détracteurs de livres de la monarchie aristodémocratique. D. L. De Mayerne T. (sans lieu ni nom, 1616, in‑8o de 477 pages).

Précédemment, il avait écrit une :

Histoire générale d’Espagne, comprise en xxvii. livres, auxquels se voient les origines et antiquités espagnoles, les entreprises de diverses nations en celle région, dès le commencement : les guerres des Romains, tant contre les Carthaginois et naturels espagnols, que celles qui se sont démenées entre eux en Espagne durant leurs dissensions civiles ; le rège des Wisigoths ; invasion des Arabes et Sarrasins ; ressource des chrétiens, et naissance et progrès des royaumes d’Oviedo et Léon, Navarre, Castille, Aragon, Portugal, Grenade, et autres principautés ; avec tous les succès et événements, tant en paix qu’en guerre, depuis le commencement de cette histoire jusqu’au décès de Philippe ii, roi d’Espagne, et principalement la conquête du royaume de Portugal. En fin du livre sont les généalogies des princes qui ont dominé en Espagne. {a}


  1. Première édition à Lyon, J. de Tournes, 1587, in‑fo ; rééditions en 1608 et Paris, Samuel Thiboust, 1635, in‑fo de 954 pages pou le premier de deux tomes, contenant les 20 premiers livres.

7.

Louis Dorléans (Paris 1542-1629), poète, jurisconsulte et polémiste, fut avocat général au Parlement de Paris en 1587 et prit une part importante aux troubles de la Ligue. Il attaqua violemment Henri iv dans une série d’actes et de pamphlets qui menèrent à sa proscription en 1594, quand le roi entra à Paris. Après un exil de neuf années, il obtint son pardon et reprit ses activités littéraires.

Son attaque contre Turquet de Mayerne est intitulée :

La Plante humaine sur le trépas du roi Henri le Grand. Où il se traite du rapport des hommes avec les plantes qui vivent et meurent de même façon, et où se réfute ce qu’a écrit Turquet contre la régence de la reine et le Parlement en son livre de la Monarchie aristodémocratique. À la reine mère du roi Louis xiii. {a}


  1. Paris, François Huby, 1612, in‑8o de 792 pages.

C’est une apologie de Henri iv, que Dorléans avait précédemment attaqué, où il répondait à la Monarchie aristodémocratique de Louis Turquet de Mayerne (1611, v. supra note [6]). Guy Patin faisait aussi allusion aux :

Novæ cogitationes in libros Annalium C. Cornelii Taciti qui extant. Ad Christianiss. Regem Francorum et Navarrorum Ludovicum xiii… Quibus addita sunt reliqua eiusdem Taciti Opera. Cum indicibus copiosissimis.

[Nouvelles cogitations sur tous les livres des Annales de Tacite qui existent. Dédiées à Louis xiii, roi très-chrétien de France et de Navarre… Y ont été ajoutés le reste des œuvres du dit Tacite. Avec de très copieux index]. {a}


  1. Paris, Thomas Blaise, 1622, in‑fo de 1 022 pages.

8.

Charles Scribani (Carolus Scribanius, Bruxelles 1561-Anvers 1629) étudia la philosophie à Trèves (v. note [30] du Grotiana 2), entra chez les jésuites de cette ville et fut l’un des douze religieux envoyés en Flandre pour fonder des succursales de l’Ordre de Saint-Ignace. Il professa à Anvers et à Douai, fut investi de plusieurs charges importantes et nommé deux fois provincial. Dans les deux voyages qu’il fit à Rome, Scribani conquit la sympathie du pape. Avec un tel appui, il travailla avec plus d’ardeur que jamais à l’extension de sa Société qui lui dut la maison professe et l’église d’Anvers, le noviciat de Lyre, le collège de Malines et plusieurs autres établissements. Fixé en 1625 à Anvers, il reçut les marques les plus flatteuses d’estime des princes d’Europe. Il a laissé des écrits théologiques principalement consacrés à lutter contre les ennemis du catholicisme (G.D.U. xixe s.).

V. infra note [16] pour le roi de France Henri iv.

9.

Pierre Cotton (ou Coton, Néronde, Loire 1564-Paris 1626), membre de la noble famille des seigneurs de Chenevoux, entra dans la Compagnie de Jésus, prêcha avec éclat en Provence et dans le Dauphiné, convertit Mme de Créqui, fille maréchal François de Lesdiguières (v. note [26] du Naudæana 1), qui le recommanda à Henri iv et devint par la suite le confesseur du roi. Le P. Cotton obtint sur son pénitent un crédit qu’il dut à son mérite, mais sans doute aussi à son indulgence pour ses faiblesses. Tout entier aux intérêts de son Ordre, il refusa l’archevêché d’Arles et le chapeau de cardinal, et obtint le rappel des jésuites, le rétablissement de leurs maisons et le droit de prédication.

Lors du meurtre de Henri iv, il manifesta la plus grande douleur et publia sa Lettre déclaratoire de la doctrine des pères jésuites conforme aux décrets du concile de Constance, adressée à la reine mère du roi, régente de France… (Paris, Claude Chappelet, 1610, in‑4o de 29 pages), où il essayait de défendre la Compagnie contre les accusations dont elle était l’objet.

Cette apologie rencontra des contradicteurs et les soupçons, fondés ou non, du public éclatèrent dans le pamphlet sanglant intitulé :

Anticotton ou Réfutation de la Lettre déclaratoire du Père Cotton. Livre où il est prouvé que les jésuites sont coupables et auteurs du parricide exécrable commis en la personne du roi très-chrétien Henri iiii, d’heureuse mémoire. Dernière impression revue et augmentée. {a}


  1. sans lieu ni nom, 1610, in‑8o de 74 pages, qui se termine sur ce Quatrain à la reine :

    « Si vous voulez que votre État soit ferme,
    Chassez bien loin ces tigres inhumains,
    Qui de leur roi accourcissant les terme
    Se sont payés de son cœur par leurs mains. »

    L’abbé Jean Du Bois-Olivier en était auteur, et en fut sévèrement châtié (v. notes [10] du Naudæana 2 et [46], notule {e}, du Naudæana 3). Bayle a fourni d’abondants détails sur cette querelle entre Cotton et Du Bois-Olivier dans la note Q de son article sur Ignace de Loyola.


Le P. Cotton n’en fut pas moins nommé par Marie de Médicis confesseur du jeune Louis xiii. L’influence du duc de Luynes l’éloigna plus tard de la cour. Il parcourut le Midi en missionnaire et en prédicateur, alla en Italie pour accomplir divers vœux du roi et revint terminer ses jours à Paris (G.D.U. xixe s.).

V. note [25] du Patiniana I‑3, pour la mésaventure du P. Cotton, en 1604, dans une ridicule affaire de diablerie.

10.

Théodore Turquet de Mayerne était docteur en médecine de l’Université de Montpellier. Ce n’était pas un chimiste de petite envergure : il a découvert la couleur pourpre employée pour les carnations dans la peinture en émail ; en refaisant une expérience que Paracelse avait décrite, il a observé qu’un « air inflammable » se dégage quand on verse de l’huile de vitriol diluée sur du fer ; ce gaz reçut le nom d’hydrogène (Lavoisier,1783) un siècle après que Robert Boyle l’eut redécouvert et en eut décrit les principales propriétés.

11.

Theodori Mayerni Turqueti in Celeberrima Monspeliensi Academia Doct. Medici, et Medici Regii. Apologia. In qua videre est inviolatis Hippocratis et Galeni legibus, remedia Chymice præparata tuto usurpari posse. Ad cuiusdam Anonymi calumnias Responsio.

[Apologie de Théodore Turquet de Mayerne, docteur en médecine de la très célèbre Université de Montpellier et médecin du roi. Où est donné à voir, sans violer les lois d’Hippocrate et de Galien, que les remèdes préparés chimiquement peuvent être employés sans danger. Réponse aux calomnies d’un certain anonyme]. {a}


  1. La Rochelle, sans nom, 1603, in‑8o de 117 pages ; dédiée à Achille i de Harlay, premier président du Parlement de Paris (v. note [19], lettre 469).

Guy Patin dénonçait la supercherie en donnant le nom des véritables auteurs de ce livre, Pierre i Seguin et Martin iii Akakia (v. infra note [12]), mais il inversait l’ordre des choses : ce fut la fausse apologie de Turquet qui provoqua l’anathème que la Faculté lança contre lui. Par son commerce de médicaments chimiques, dont l’antimoine, et par ce faux il contrevenait à la sentence qu’elle avait prononcée en 1566 contre ce remède (v. note [8], lettre 122) ; en outre, il exerçait à Paris avec un doctorat de Montpellier. La Faculté le condamna sans appel (Comment. F.M.P., tome ix, fos 448‑449, traduit du latin) :

« Le Collège des médecins régulièrement réuni en l’Université de Paris, ayant écouté la déclaration des rapporteurs, {a} à qui avait été confiée la mission d’examiner l’Apologie publiée sous le nom de Turquet de Mayerne, {b} la condamne d’un accord unanime, en tant qu’opuscule diffamatoire, rempli d’invectives mensongères et de calomnies impudentes, sauf à avoir pu être proférées par un homme ignorant, effronté, aviné et forcené. Elle juge le même Turquet indigne à jamais de pratiquer la médecine à cause de son irréflexion, de son impudence et de son ignorance de la véritable médecine. Elle exhorte tous ceux qui sont véritablement médecins, qui exercent où que ce soit, à tenir éloigné d’eux et de leur cercle ce même Turquet et semblables monstres d’hommes et d’opinions, {c} et à demeurer fidèles à la doctrine d’Hippocrate et de Galien. Aussi a-t-elle interdit à tout membre du Collège des médecins de Paris de consulter avec Turquet, ni avec ceux qui lui sont semblables. Celui qui y aura contrevenu sera privé des distinctions de la Faculté et des privilèges de l’Université, et rayé du nombre des régents. Fait en l’Université de Paris, le 5 décembre de l’an de grâce 1603. »


  1. Jean i Riolan et Jean Duret.

  2. sub nomine Mayerni Turqueti editam.

  3. similiaque hominum et opinionum portenta.

12.

Les Akakia formaient alors l’une des grandes dynasties médicales de Paris. Son fondateur, mort en 1551, avait été Martin i Sans Malice, natif de Châlons en Champagne ; docteur régent de la Faculté de médecine de Paris en 1526, puis professeur de chirurgie au Collège royal et premier médecin de François ier, il fut député par l’Université au concile de Trente (v. note [4], lettre 430), en 1545. Pour se conformer à l’usage répandu parmi les savants de son temps, et sans doute aussi pour moins se prêter aux bons mots faciles, Sans Malice traduisit son nom de famille en grec, prenant celui d’Akakia (a privatif, et kakia malice), que ses descendants ont tous retenu.

Martin ii, fils de Martin i, fut docteur de la Faculté de médecine de Paris en 1572, professeur de chirurgie au Collège royal en 1574, second médecin de Henri iii en 1578. Sa fille Anne avait épousé Pierre i Seguin (v. note [12], lettre 5), et Martin ii démissionna de sa chaire royale en 1588 au bénéfice de son gendre.

Guy Patin parlait ici de Martin iii, fils de Martin ii, docteur régent de la Faculté de médecine de Paris en 1598, qui devint professeur au Collège royal en 1599 par la démission de son beau-frère, Pierre i Seguin ; il mourut en 1605 sans postérité, passant le flambeau à son frère cadet Jean (v. note [32], lettre 428).

13.

Philippe de Béthune (1561-1649), comte de Selles et de Charost, était le sixième fils du baron de Rosny et le frère puîné de Maximilien i de Béthune, duc de Sully, le ministre de Henri iv. Après avoir servi avec distinction les rois Henri iii et Henri iv dans toutes les guerres de la Ligue, il fut successivement lieutenant général, gouverneur de Rennes, premier gentilhomme de la chambre et gouverneur de Gaston d’Orléans. Surtout, il assura plusieurs ambassades en Europe au service de Henri iv puis de Louis xiii. Il tint notamment celle de Rome, de 1601 à 1619, où il joua un rôle essentiel de médiateur entre le roi d’Espagne et les ducs de Savoie et de Mantoue, permettant d’aboutir au traité de Pavie (1619). Après être intervenu dans la réconciliation entre Marie de Médicis, retirée à Angoulême, et son fils Louis xiii, il repartit en ambassade à Rome. Le comte de Béthune termina sa longue existence dans son château de Selles en Berry (Michaud).

Saint-Simon (Mémoires, tome iv, page 908) l’a dit « si connu par sa capacité et ses grandes ambassades à Rome et ailleurs, et par ce grand nombre de manuscrits qu’il ramassa, que son fils [Hippolyte] augmenta, et qu’il donna au roi. »

14.

Le Royal College of Physicians conserve les consultations manuscrites (1607-1651) de sir Theodore Tuquet de Mayerne, parmi lesquelles celle d’Oliver Cromwell à Londres le 19 septembre 1628, six mois après sa première élection au Parlement. Le médecin avait jugé son patient valde melancholicus [extrêmement mélancolique] (Fraser, pages 44‑45).

Mayerne sut donc se ménager habilement la faveur des parlementaires, mais en restant suffisamment fidèle à Charles ier pour être, après l’exécution du souverain déchu (1649), nommé premier médecin en titre de son fils et successeur, Charles ii. « Sa première femme, Marguerite de Boetselaer [morte en 1628], lui donna deux enfants qui moururent jeunes. Sa seconde femme, Élisabeth Joachimi, eut deux fils et trois filles, dont une seule, Élisabeth, lui survécut. Elle épousa en 1652 Pierre de Caumont, marquis de Cugnac » (Adam).

Le jeune Turquet de Mayerne, étudiant en médecine dont parlait ici Guy Patin, dut mourir avant d’avoir obtenu ses diplômes car il n’a pas laissé de trace dans les catalogues des facultés de médecine de Paris (Baron) ou de Montpellier (Dulieu).

15.

Jacobus : « espèce de monnaie d’or d’Angleterre, valant 14 livres 10 shillings » (Furetière).

16.

L’origine de la dynastie royale des Bourbons remonte à 1548, quand Antoine de Bourbon (1518-1562), duc de Vendôme et descendant du roi Louis ix (saint Louis, v. note [2], lettre 856), avait épousé Jeanne d’Albret (1528-1572), fille unique et héritière de Henri ii, roi Navarre (1503-1555). À sa mort, Antoine et Jeanne devinrent roi et reine de ce petit état pyrénéen (v. note [3], lettre 753) et donnèrent naissance à la lignée souveraine des Bourbons en la personne de leur fils aîné, Henri, né en 1553, qui devint roi de Navarre en 1572 sous le nom de Henri iii. La dynastie des Valois étant tombée en quenouille à la mort de Henri iii, roi de France (1589, v. note [2], lettre 48), Henri de Navarre fonda la branche aînée des Bourbons, rois de France et de Navarre, dont il devint le premier souverain, sous le nom de Henri iv, dit le Grand. Après avoir oscillé entre catholicisme et calvinisme, il mit fin aux guerres de Religion en 1598 par l’édit de Nantes (ou édit de tolérance, le 30 avril) et la paix de Vervins (conclue avec l’Espagne, le 2 mai suivant) ; il mourut le 14 mai 1610, poignardé par François Ravaillac (v. note [90], lettre 166).

Louis ier de Bourbon, prince de Condé (Vendôme 1530-Jarnac 1569), était le cinquième et dernier fils de Charles de Bourbon, duc de Vendôme, et le frère d’Antoine, roi de Navarre. Oncle du roi Henri iv et prince fondateur en 1546 de la première des branches cadettes des Bourbons, la Maison de Condé, il prit la tête du parti calviniste en 1562. Blessé à la bataille de Jarnac (v. note [51] des Deux Vies latines de Jean Héroard) et fait prisonnier, il fut lâchement assassiné par Montesquiou, capitaine des gardes du duc d’Anjou, qui lui cassa la tête d’un coup de pistolet, tandis qu’on le pansait au pied d’un arbre (mais l’origine du « coup de Jarnac » est autre, v. note [56] du Faux Patiniana II‑7).

Saint-Simon (Mémoires, tome iii, pages 429‑430) :

« Le prince de Condé, frère du roi de Navarre et oncle paternel de Henri iv, se fit leur chef. {a} Il était le seul du sang royal dans ce parti, qui s’accoutuma, en parlant de lui, à ne le nommer que Monsieur le Prince. Il était comme le leur : aucun du parti n’approchait de lui en naissance ni en autorité ; son nom était leur honneur, leur grandeur et en partie leur force. Cet usage prévalut, et si bien, tant, une fois établis, ils ont de force sur la multitude, qu’après la bataille de Jarnac, où ce prince mourut, 1569, son fils, {b} succédant au nom de prince de Condé, ne fut appelé dans le parti que Monsieur le Prince, quoiqu’il ne pût passer alors pour le chef du parti. […] Arrivé dans cet usage, qui avait si généralement prévalu, d’être appelé tout court Monsieur le Prince, et n’ayant au-dessus de lui que le roi, ce même usage se continua qui a duré toute sa vie, et qui a passé à son fils, {c} et de celui-là à son petit-fils. » {d}


  1. Le chef des huguenots.

  2. Henri ier, 1552-1588 (v. note [18] du Borboniana 4 manuscrit).

  3. Henri ii, 1588-1646, v. note [8], lettre 23.

  4. Louis ii, le Grand Condé (1621-1686, v. note [13], lettre 55) qui, en tant que prince légitime du sang royal, a violemment manifesté sa prétention à la Couronne de France durant la Fronde.

17.

Jacques-Paul ou Jacques Spifame (Paris 1502-Genève 1566) avait été conseiller au Parlement, président aux Enquêtes et conseiller d’État, avant d’entrer dans les ordres et devenir évêque de Nevers en 1546. Entretenant depuis dix ans un commerce illégitime avec une femme dont il avait eu deux enfants, il déclara en 1578 son adhésion à la Religion réformée au beau milieu d’une messe et se retira à Genève en 1559. Le Conseil de la ville lui accorda les droits de bourgeoisie ; Calvin et Bèze l’admirent au ministère évangélique. Revêtu de ces nouvelles fonctions, Spifame rentra en France et devint pasteur de l’Église d’Issoudun.

Lorsque la guerre civile éclata, Condé l’appela à Orléans et le chargea d’une mission auprès de la diète de Francfort. S’en étant acquitté avec succès, il fut à son retour nommé surintendant des affaires de Lyon, ville dont les protestants étaient les maîtres et où Spifame put braver le Parlement qui l’avait condamné, avec d’autres réformés, à être pendu en place de Grève. Il était retourné à Genève après la conclusion de la paix, lorsque la reine de Navarre, Jeanne d’Albret, mère du futur Henri iv, le manda à sa cour. Spifame partit pour Pau où il passa plusieurs mois. Jeanne d’Albret le chargea de conduire à Genève le jeune Henri de Savoie, son parent ; mais à son retour, il tomba rapidement en disgrâce. Il se plaignait tout haut de Jeanne d’Albret qui n’avait pas, disait-il, rempli envers lui ses engagements ; il alla même, dans sa colère croissante, jusqu’à dire que le prince de Béarn (le futur Henri iv) n’était pas le fils d’Antoine de Bourbon, mais celui du ministre Merlin. Jeanne d’Albret, offensée de cet outrage, congédia immédiatement le calomniateur qui retourna à Genève en 1565. Là, un procès en diffamation lui fut intenté par Claude Servin, contrôleur de la Maison de la reine de Navarre, et on l’accusa en outre d’avoir présenté de faux certificats aux pasteurs genevois quand il s’était fait recevoir au ministère. Malgré l’intervention des Bernois en sa faveur, malgré les sollicitations de Coligny, il fut condamné à mort et périt victime de la vengeance de Jeanne d’Albret et de la servile complaisance des magistrats de Genève (G.D.U. xixe s., Popoff, no 2303 et Gallia Christiana).

Guy Patin n’a pas été seul à donner d’autres motifs à la condamnation de Spifame par les syndics de Genève. Bayle (note E) cite Jean-Baptiste de Rocolles (Histoire véritable du calvinisme, ou Mémoires historiques touchant la Réformation, opposée à l’Histoire du calvinisme de M. Maimbourg, Amsterdam, sans nom, 1683, in‑12, pages 444‑445) :

« Il a donné des particularités bien curieuses sur le vrai sujet du supplice de cet évêque. “ Spifame […] s’étant retiré à Genève, ne peut se tenir en repos : ayant formé une intrigue auprès des gens du Conseil de la reine mère, Catherine de Médicis, {a} pour rétablir les catholiques dans la ville et pour donner moyen à l’évêque d’y entrer à main armée, sous l’espérance d’être pourvu d’un nouvel évêché autre que le sien de Nevers, sa trahison fut découverte par Grillon, mestre de camp du régiment des gardes, qui en avertit l’agent de Genève qui était à la suite de la cour ; lequel ne manqua pas d’en donner avis auprès de la seigneurie, qui se saisirent de la personne de Spifame et prirent prétexte de lui faire son procès de ce qu’il entretenait une femme mariée ; et non pas, comme dit fort brutalement M. Maimbourg, pour avoir fait un faux contrat ou de faux sceaux ; {b} un tel homme n’étant point coupable d’un tel crime, l’adultère étant punissable de mort selon la loi Julia, de adulteris. Et ce fut le juste prétexte qu’on prit pour lui faire couper la tête au marché du Molard, {c} sans faire mention de sa conspiration, pour ne se point brouiller avec la cour de France. Or, afin qu’elle ne s’intéressât point pour le sauver et qu’elle n’eût pas le temps de leur dépêcher un courrier pour cet effet, le Conseil se hâta de lui faire son procès, qui fut expédié dans le troisième jour après qu’on l’eût arrêté. ” »


  1. V. note [35], lettre 327.

  2. V. infra note [18].

  3. Centre historique et principal port de Genève sur le lac.

Le Borboniana 5 manuscrit est revenu sur la vie tumultueuse de Jacques Spifame : v. ses notes [49],  [50] et  [51].

18.

Louis Maimbourg {a} a donné son explication des liens entre Spifame et Condé : {b}

« Se voyant en danger d’être arrêté, comme il {c} l’allait être infailliblement, s’enfuit bien vite à Genève où Calvin et la seigneurie, qui crurent avoir fait une grande conquête sur les catholiques par la désertion d’un homme de cette importance, le reçurent à bras ouverts, lui donnèrent droit de bourgeoisie et une place honorable dans le Grand Conseil des deux cents. Et comme la guerre civile commença peu de temps après en France, {d} Calvin l’ayant fait évêque ministre, l’envoya à Orléans auprès du prince de Condé qui, connaissant son habileté, s’en servit à autre chose qu’à faire des prêches. Car il fut de sa part à la Diète de Francfort pour y justifier les armes que les protestants avaient prises et pour y demander à l’empereur Ferdinand le secours qu’il n’en obtint pas. Enfin, étant retourné à Genève, il fut soupçonné d’avoir trahi le parti et négocié sous main pour rentrer dans l’Église catholique en obtenant un autre évêché. C’est pourquoi, comme on eût résolu de s’en défaire, on lui suscita d’ailleurs une accusation, vraie ou fausse, d’avoir fait un faux contrat et de faux sceaux ; sur quoi on lui fit son procès et il fut condamné à avoir la tête tranchée. »


  1. V. note [6], lettre 926.

  2. L’Histoire du calvinisme par le sieur Louis Maimbourg ci-devant jésuite (Paris, Sébastien Marbre Cramoisy, 1686, in‑4o de 448 pages, divisé en six livres) : livre ii, pages 95‑96, année 1558.

  3. Jacques Spifame, après sa conversion au calvinisme.

  4. En mars 1562.

19.

Siméon (ou Simon) Courtaud (ou Cortaud, Montpellier 1583-ibid. 30 décembre 1664) était fils de Pierre Courtaud, capitaine de santé à Montpellier, et de Marguerite Héroard, sœur de Jean Héroard (v. note [30], lettre 117), premier médecin de Louis xiii. Courtaud avait été reçu docteur en médecine de l’Université de Montpellier en 1611, puis était monté à Paris pour devenir, par la protection de son oncle, médecin par quartier du roi. La chaire de médecine de Jacques Pradilles vaquant, en 1619 à Montpellier, Courtaud l’obtint en 1620. En 1632, il fut le maître et devint l’ami de Charles Spon, avec qui il échangea par la suite une abondante correspondance. Le ms BIU Santé no 2190 conserve les copies manuscrites de 59 lettres que Courtaud a adressées à Spon, datées du 3 novembre 1636 au 29 octobre 1662. Courtaud était doyen de l’Université de médecine de Montpellier depuis 1637, titre qui, contrairement à celui de la Faculté de Paris, n’était pas électif, mais simplement lié au fait d’être le plus ancien gradué dans l’Assemblée des professeurs. Il mourut dans la religion catholique sans qu’on sache à quelle date il renia le protestantisme. Son frère aîné, Jacques, secrétaire du roi (v. note [11], lettre 360), vivait à Paris ; il s’engagea aux côtés de son cadet dans les polémiques, mais il est difficile d’y attribuer exactement la part qui revient à chacun dans ce qu’en a dit Guy Patin, l’un de leurs ennemis jurés (Monfalcon in Panckoucke, Dulieu, Jestaz et Litaudon).

Siméon Courtaud devait sa célébrité d’alors à son :

Monspeliensis Medicorum Universitas. Oratio pronunciata die vigesima prima mensis Octobris, anni m. dc. xliv. A S. Curtaudo dictæ Universitas Decano et Professore Regio. Pro studiorum renovatione.

[Université de médecine de Montpellier. Discours prononcé le 21 octobre 1644 par S. Courtaud, doyen et professeur royal de ladite Université, pour l’inauguration des études]. {a}


  1. Montpellier, Pierre du Buisson, 1645, in‑4o ; ouvrage dédié Gastoni Aurelianensium Duci, Francorum Chirstianissimi Regis Patruo [au duc Gaston d’Orléans, oncle du roi très-chrétien des Français], avec cette citation en exergue du titre :

    Initium sapientiæ timor Domini. Psalm. v. cx 10. via veritas et vita.

    [La crainte du Seigneur est le début de la sagesse (Psaume 110:10). voie, vérité et vie].


Rédigée dans un style qui surprend encore de nos jours, l’Oratio est une riposte directe aux arguments que la Faculté parisienne venait d’employer pour emporter sa victoire contre Théophraste Renaudot le 1er mars 1644, devant le Parlement de Paris. Son argumentaire se fonde notamment sur les mémoires établis par le doyen Michel i de La Vigne et par Omer Talon, avocat de la Faculté. Le nom de Guy Patin, sans doute tenu pour un second couteau, n’y apparaît pas. Renaudot n’est nommément cité que deux fois (pages 23 et 49) : ce n’est pas lui que Courtaud défend d’abord, mais l’Université de médecine de Montpellier d’où Renaudot était issu. Parmi les rares docteurs parisiens que Courtaud attaque nommément, le plus maltraité est Jean ii Riolan dans un paragraphe visant à prouver l’immémoriale ancienneté et l’insigne renom de l’École de Montpellier, qui contraignent celle de Paris à s’incliner humblement devant elle, au lieu d’attaquer furieusement ses éminents docteurs (page 14) :

Eram ergo antequam esses, o Parisina Venerabilis, et de sanguine meo creata es : mater ego tua sum, tu sanguis meus. Eram ante te, tuique patres noverunt et senserunt manus meas auxiliares in imbecillitate sua, antequam de vestri generationis voluptate cogitarent. Errabatis per compita civitatis saltitantes sine tecto, dum nostra vigebat, Magnatumque beneficiis profunde quieta, salutis publicæ curam gerebat. Nostrum enim Alcanthoum in struendis muris nostris adiuvit Apollo. Quod si me vel ob annos et rugas haud agnoscas, vel despicias ob humilitatem, non ideo perit cum tua memoria et gratitudine ius meum prioritatis. Qui nomen maternum excutit, matrem percutit ; et negare necareque matrem, proximo charactere differunt. Neque vestram novit Carolus Magnus, quamvis iactet et genus et nomen inutile. Non erant enim Medici quatuor Angli Doctores discipuli Bedæ venerabilis, quorum suasu, iacta sunt Universitatis Parisinæ fundamenta. Facultates Artium et Theologiæ cum Iure Canonico Universitatem constituebant. Et quomodo te nosset, cum nondum esses ? quomodo fuisses, cum Medicos suos hinc assumeret supremus hic imperator ? quomodo non hinc, cum non aliunde liceret ? Quid quod Riolanus vester in schedula supplicationis pro horto regio construendo, non eam ante quadrigentos, aut ad summum quingentos annos, extitisse fatetur ? Gaudeto, nobilis facultas, Medici vestri solertia iuventuti suum restituit Iolaum, et plusquam ducentorum annorum spolium senectutis ademit vestræ societati. Gaudete, sed ne vos nimium pote de fonte iuventæ, cavete : Est enim proxima senili delirio repuerascentia.

[J’existais donc avant toi, ô vénérable Parisienne, et tu es née de mon sang : je suis donc ta mère, et tu viens de mon sang. J’existais avant toi, et tes pères ont connu et senti mes mains venir au secours de leur impuissance, avant qu’ils n’eussent songé à la volupté de t’engendrer. {a} Vous erriez sans toit, dansant avec ardeur par les carrefours de la cité, pendant que la nôtre fleurissait et que, profondément apaisée par les bienfaits des grands, elle prenait soin du salut public. Apollon en effet a aidé notre Alcathoüs à édifier nos murs. {b} Tu peux bien ne pas me reconnaître en raison de mes ans et de mes rides, ou m’ignorer en raison de mon humilité, mais ta mémoire défaillante et ton gratitude ne m’ôtent pas le droit de priorité. Secouer le nom maternel c’est gifler sa mère ; et il n’y a que la différence d’une lettre entre negare sa mère et la necare {c}. Charlemagne n’a pas connu la vôtre, bien qu’elle jette inutilement son génie et son renom à la face du monde. De fait, les quatre docteurs anglais, disciples de Bède le Vénérable, à l’instigation desquels ont été jetées les fondations de l’Université parisienne, n’étaient pas médecins : elle était composée de la Faculté des arts, associée à celles de théologie et de droit canon. {d} Et comment le saurais-tu, puisque tu n’existais pas encore ? Et comment aurais-tu existé, puisque ce tout-puissant empereur créait alors lui-même ses médecins sans permettre qu’il en vînt d’ailleurs ? Comment votre Riolan peut-il proclamer, dans sa requête pour l’établissement d’un Jardin royal des plantes, qu’il n’en a pas été prononcée de telle depuis quarante, ou tout au plus cinquante ans ? {e} Réjouis-toi, noble Faculté, l’habileté de votre médecin a rajeuni son Iolaus, et a enlevé à votre Compagnie la dépouille d’une vieillesse qui dépasse les deux cents années. Réjouissez-vous, mais gardez-vous de trop boire à la fontaine de jouvence, car le retour à l’enfance est tout proche du délire sénile]. {f}


  1. Irrévérence gaillarde touchant l’assistance manuelle que Montpellier, la fringante, aurait dû fournir aux vieux maîtres parisiens pour parvenir à engendrer leur École médicale.

  2. Alcathoüs, fils de Pélops, est le fondateur de Mégare (v. notule {a}, note [5], lettre latine 264), ville de Grèce dont les habitants prétendaient qu’Apollon l’avait construite. v. note [8], lettre 997, pour Apollon.
  3. Entre « renier » et « tuer ».

  4. Le rôle des disciples de Bède le Vénérable (v. notule {b}, note [16], lettre 73) dans la fondation de l’Université de Paris au viiie s. n’est pas des mieux établis. On considère ordinairement qu’elle a été créée au tout début du xiiie s. : v. note [8], lettre 679.

  5. V. notes [7], lettre 51, pour Jean ii Riolan et sa Requête au roi pour l’établissement d’un jardin des plantes (Paris, 1618), et [3] et [4], lettre 60, pour sa contribution à la création du Jardin du roi, avec Guy de La Brosse en 1635. Il avait succédé au Jardin royal des plantes médicinales, dont Jean Héroard avait été nommé intendant en 1625.

  6. Ma traduction respecte strictement la syntaxe latine, mais le propos de Courtaud est incertain.

    Dans le mythe grec, le héros thébain Ioalus (Iolas ou Iolaos), fils d’Iphiclus neveu d’Hercule et compagnon de ses travaux, lui servit de cocher dans le combat contre l’hydre de Lerne [v. notule {a}, note [4], triade 2 du Borboniana manuscrit], et brûlait les têtes de l’hydre à mesure qu’Hercule les coupait. […] Parvenu à une extrême vieillesse, lorsqu’il commandait l’armée des Athéniens contre Eurysthée [roi de Mycènes], deux astres s’arrêtèrent sur son char et l’enveloppèrent d’un nuage épais : c’étaient Hercule et son épouse Hébé. Iolas en sort sous la forme d’un jeune homme plein de vigueur et de feu » (Fr. Noël).

    Iolaus est à prendre, me semble-t-il, pour un quasi-anagramme de Riolanus, Jean iiRiolan, alors âgé de 64 ou 67 ans, que Courtaud (qui en avait 61) tenait pour un grand vieillard, perdu dans l’exactitude des dates et des faits, et proche de la démence.

  7. Sans répondre à Courtaud sur le Jardin royal, les Curieuses recherches sur les écoles en médecine de Paris et de Montpellier… (Paris, 1651, v. note [13], lettre 177) ont rudement dénigré sa carrière parisienne (page 14) :

    « Si ce Courtaut eût eu de l’esprit et de la conduite dans la médecine, son oncle maternel, le sieur Héroard, premier médecin du roi Louis xiii, eût tâché de l’installer en la cour, pour être son successeur en sa charge ; mais lui faisant honte, a été contraint de le renvoyer à Montpellier, sa ville natale, et le bannir de la cour pour jamais ; lui faisant vendre sa charge de médecin par quartier, qu’il lui avait donnée, afin de lui ôter l’occasion de revenir à Paris ; et pour l’obliger de demeurer à Montpellier avec quelque honneur, lui fit avoir la lecture [professorat] en médecine qu’il possède, bien qu’il en fût indigne et incapable. »

Près de la moitié du livre (pages 52‑93) reproduit les textes de quelques privilèges apostoliques et royaux détenus par l’Université de Montpellier. Maladroit dans la forme comme dans le fond (v. note [3], lettre 131, pour deux autres extraits visant Guy Patin), le virulent ouvrage de Courtaud ne manqua pas sa cible. Un copieux échange d’écrits anonymes s’en ensuivit ; ce furent le Navicula Solis (Guy Patin ou Jean Bérault, sans date, v. note [56], lettre 348), les Curieuses recherches… (Riolan et Patin, v. supra notule {f}), la Seconde Apologie… (Isaac Cattier, 1653, v. note [54], lettre 348), etc. Entremêlée avec celle de l’antimoine qui l’avivait, la venimeuse querelle finit par s’éteindre sur un dernier coup de griffe, le Genius Pantoulidamas… (1654, attribué à Siméon Courtaud et Antoine Madelain, v. note [35], lettre 399).

20.

Siméon Courtaud a appelé Apologie son Oratio de 1644 dans les lettres qu’il avait récemment écrites à son ami Charles Spon (ms BIU Santé no 2190).

21.

Jean i Riolan : Ad famosam Turqueti Apologiam Responsio. Accessit Censura Scholæ Parisiensis [Réponse à l’infamante Apologie de Turquet. Avec la Censure de la Faculté de Paris] (Paris, Plantin, chez Hadrien Périer, 1603, in‑12) ; v. supra note [11] pour l’Apologia de Turquet (1603), qui n’était pas de lui.

22.

Le comte d’Harcourt, qui avait succédé au maréchal de La Mothe-Houdancourt dans sa vice-royauté de la Catalogne, avait inauguré la campagne de l’année 1645 par la prise de Roses ; il la poursuivit en battant les Espagnols à Llorens (23 juin) et en s’emparant de Balaguer (20 octobre), ville forte de Catalogne, sur la Sègre, à 20 kilomètres de Lérida. Hulst est une place alors fortifiée des Pays-Bas (Zélande), sur un bras de l’Escaut (Triaire).

La Gazette a donné les récits de ces deux sièges.

  1. En Catalogne.

    • L’extraordinaire no 140 (31 octobre 1645, pages 998‑1000) a intégralement transcrit les treize Articles de la capitulation accordée par M. le comte d’Harcourt à M. le comte Dom Simen de Mascarenhas, général de l’Artillerie de l’armée de Sa Majesté catholique, et gouverneur de ses armes dans Balaguer.

    • Ordinaire no 143 du 4 novembre 1645 (page 1024) :

      « De Barcelone, le 22 octobre 1645. Le 20 de ce mois, les Espagnols sortirent de Balaguer, où le comte d’Harcourt entra le même jour sur les huit heures du matin, suivant la capitulation que vous en avez vue. »

  2. En Zélande, le prince d’Orange avait entrepris le siège de Hulst le 8 octobre 1645.

    • Ordinaire no 142 du 4 novembre 1645 (page 1019) :

      « D’Amsterdam, le 23 octobre 1645. Depuis que les tranchées ont été ouvertes devant la ville d’Hulst, on a toujours tiré contre la place, d’où les assiégés n’ont pas aussi manqué à faire jouer leur canon à dessein de ruiner nos ouvrages ; mais voyant qu’ils n’en pouvaient venir à bout, le prince d’Orange les ayant mis en tel état qu’il n’y a rien à craindre, ils se sont un peu reposés afin de mieux ménager leurs munitions. Nous n’y avons encore perdu aucune personne de marque qu’un capitaine au régiment français de l’Estrade et un autre Hollandais, mais beaucoup de soldats. »

    • Ordinaire no 143 du 4 novembre 1645 (page 1027) :

      « De Bruxelles, le 28 octobre 1645. On est ici en grande appréhension de l’issue du siège de la ville de Hust, que plusieurs tiennent ici perdue, vu l’ardeur avec laquelle les Hollandais la tiennent assiégée, que la garnison est très faible, et qu’il n’y a pas beaucoup de munitions ; joint qu’il y a peu d’espérance de secours, les Français empêchant les généraux Piccolomini {a} et Lamboy de se pouvoir joindre au général Beck pour aller attaquer les Hollandais par derrière ; et quand même ils se pourraient joindre, le prince d’Orange y a donné si bon ordre qu’il n’appréhende rien de ce côté-là. »


      1. V. note [12], lettre 418.

    • Ordinaire no 148 du 11 novembre 1645 (page 1069‑1070) :

      « D’Anvers, le 3 novembre 1645. Les Hollandais pressent toujours de plus en plus la ville d’Hulst, contre laquelle le 29 du passé ils tirèrent furieusement. Néanmoins, les assiégés se défendent toujours bien, quoiqu’avec peu d’apparence de secours. Mais ce qui nous console est le procédé du prince d’Orange, lequel ayant déjà donné ordre aux siens de ne tirer point contre l’église de ladite ville d’Hulst, nous fait espérer un bon traitement, et surtout une liberté de conscience dans toutes les villes qu’il prendra sur nous. »

    • Ordinaire no 151 du 18 novembre 1645 (pages 1091‑1092) :

      « De Hulst, le 7 novembre 1645. Le 28 du passé le prince d’Orange fit jeter quantité de bombes dans la ville de Hulst, dont le grand effet fut jugé par le cri que firent ensuite la plupart des femmes de la ville. […] Le 31 la galerie du sieur de Brederode ayant été achevée, celle du prince d’Orange le premier de ce mois, et le deuxième toutes les mines étant prêtes, Son Altesse fit sommer le même jour pour la dernière fois le gouverneur, qui ne voulut point encore parler de se rendre ; mais le lendemain troisième, se voyant destitué de toute espérance de secours, et que tout était prêt pour l’assaut, fit assembler le matin son conseil de guerre, de l’avis duquel il fut résolu de parlementer, comme on fit le lendemain, les otages ayant été donnés de part et d’autre, et après plusieurs contestations on demeura d’accord des articles que vous avez vus. » {a}


      1. Renvoi à l’extraordinaire no 149 du 17 novembre 1645 (pages 1073‑1077).

23.

André Potier, seigneur et fondateur de la branche de Novion, était le frère de Nicolas ii Potier, seigneur d’Ocquerre, secrétaire d’État (v. note [7], lettre 686), et des évêques de Beauvais, René (v. note [51] du Borboniana 6 manuscrit) puis Augustin (v. note [6], lettre 83). André avait été reçu président à mortier en 1616, sur la démission de son père, et il était resté dans cette charge jusqu’à sa mort, le 10 novembre 1645 (Popoff, no 139).

24.

Étienne Briquet, originaire de Bordeaux, avait été obligé de se faire recevoir conseiller au Parlement de Paris à cause du nombre de parents qu’il avait au Parlement de Bordeaux. Il avait été reçu à Paris en 1634 en la cinquième Chambre des enquêtes, puis avocat général au même Parlement en 1641 sur la démission de Jérôme i Bignon, son beau-père ; mais étant tombé malade mortellement, il remit sa charge à son beau-père et mourut peu après le 16 septembre 1645 (Popoff, no 769).

V. notes [24], lettre 39, pour Jean-Jacques Barillon, et [6], lettre 127, pour Pierre Gayant.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 16 novembre 1645

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(Consulté le 20/04/2024)

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