L. 154.  >
À Hugues I de Salins,
le 6 avril 1648

Monsieur, [a][1]

Il y a longtemps que je vous dois réponse. Un méchant rhume [2][3] qui m’a incommodé tout le mois de février et la quantité d’affaires quibus obruor [1] m’ont empêché de m’acquitter plus tôt de ce devoir, combien que j’y eusse beaucoup d’inclination afin d’avoir l’honneur de vous remercier de celle qu’il vous a plu m’écrire, pleine de faveur et de courtoisie. Monsieur votre fils [4] est en bon chemin, Dieu merci, il ne manque pas de venir aux actes de notre École et à mes conférences, [5] où j’ai soin de le faire parler afin qu’il soit exercé ; et je reconnais par ses difficultés qu’il me propose, qu’il est dans le chemin légitime et tel que je souhaite à mon propre fils. [2] Il faut qu’il continue, vous savez bien que Vita brevis, ars longa[3][6] Qu’il ne se lasse point dans le bon chemin, donnez-lui courage et le fortifiez afin qu’il persévère. Je vous promets que je ferai de mon côté pour lui tout ce qu’il me sera possible afin que, quand il retournera vers vous, il vous fasse connaître qu’il n’a pas tout à fait perdu son temps. M. Guillemeau a ici présidé une belle thèse, [7][8] dont je vous envoie un exemplaire. [4] Je vous prie de l’avoir agréable et de nous faire part quelque jour du sentiment que vous aurez eu d’icelle en la lisant. Et en attendant, je vous conjure de m’aimer toujours et de croire que je serai toute ma vie, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

Patin.

De Paris, ce 6e d’avril 1648.


a.

Ms BnF no 9357, fo 33, « À Monsieur, Monsieur de Salins, Docteur en Médecine, à Beaune » ; Triaire no clvii (pages 586‑587). C’est la première des lettres conservées de Guy Patin aux de Salins.

1.

« qui m’écrasent ». V. note [1], lettre 151, pour le méchant rhume de Guy Patin.

2.

Jean-Baptiste, fils aîné de Hugues i de Salins, suivait alors une année de cours à la Faculté de médecine de Paris sous l’œil bienveillant de Guy Patin.

3.

« la vie est courte, la science longue à acquérir », début du premier et plus célèbre aphorisme d’Hippocrate (Littré Hip, volume 4, page 459) :

« La vie est courte, l’art est long, l’occasion fugitive, l’expérience trompeuse, le jugement difficile. Il faut non seulement faire soi-même ce qui convient, mais encore faire que le malade, les assistants et les choses extérieures y concourent. »

Tout docteur régent (enseignant) de la Faculté de médecine de Paris avait pour devoir régulier d’assister aux actes (thèses des bacheliers, actes des licenciés pour le doctorat) et de prodiguer des conférences aux écoliers (même en dehors des périodes d’un ou deux ans où il était élu professeur).

4.

V. note [2], lettre 158, pour la thèse de Charles Guillemeau sur la Méthode d’Hippocrate, disputée le 2 avril 1648.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Hugues I de Salins, le 6 avril 1648

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(Consulté le 20/04/2024)

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