L. 544.  >
À Hugues II de Salins,
le 29 octobre 1658

Monsieur, [a][1]

Pour votre dernière, que votre cher cousin M. de Condaut [2] a pris la peine de m’apporter, je vous dirai que le vin émétique [3] est encore plus décrié que jamais à Paris. M. de Grandmont, [1][4] conseiller de la Cour, en mourut il n’y a que 15 jours ; [5] et mardi dernier, M. le procureur général et surintendant des finances, [6] en perdit son fils aîné ; [7] c’est Guénault [8] qui lui en fit prendre deux fois ; il n’y a que deux ans qu’il en perdit encore un autre plus âgé. [2] Ce même Guénault en a fait prendre au président Le Coigneux, [9] qui est un président au mortier, qui se portait mieux avant que d’en prendre. Il est fort malade, en a un grand mal d’estomac et un méchant flux de ventre. [10] Metuendum est ne degenereat istud alvi profluvium in κακωσιν, ea quin gangrænosim aut ατονιαν hepatis[3]

Le sirop de noirprun, [11] de spina nigra, spina cervina, de rhamno solutivus[4] est un fort méchant sirop, fort âcre, fort amer et fort désagréable. Habet aliquid horribile : [5] il ne purge [12] que par sa grande acrimonie, non purgat elective[6] il purge en fondant, par colliquation, [7][13] et ne vide que des eaux en desséchant le foie et affaiblissant extrêmement la chaleur naturelle ; [14] d’où s’ensuit l’hydropisie, [15] que ce sirop ni aucun autre remède ne peut guérir. Talis enim hydrops fit per exsiccationem et tabem viscerum a depopulatione humidi primigenii, quod a Lud. Dureto dicitur nectar vivificum ; apud quem lege quæ scripsit vir nunquam satis laudatus, de hydrope[8][16][17][18] Si Bauderon [19] l’a loué, ne vous en étonnez point, tous les médicaments sont très loués dans les antidotaires ; [20] aussi est-ce l’endroit où sont pris les dupes et c’est ce qui a fait tant d’empiriques. [21] Je vous assure que les médecins ne s’en servent ici que fort peu, et les bons, point du tout. Je n’en ai jamais vu ordonner qu’une fois : ce fut feu M. Riolan [22] qui le proposa chez un hydropique, en présence de feu M. Moreau [23] qui n’en était guère d’avis ; le malade s’en trouva plus mal et s’en plaignit, et mourut huit jours après. Acria medicamenta sunt ignea et κακεργα, non supsectæ, sed certæ malignitatis plenissima[9] Bauderon même était un chétif praticien. Je ne doute point que les pharmaciens n’en disent du bien, ut vento novitatis, quæ miseris ac ignaris ægris est gratissima, possunt aliquem inescare ac decipere ut faciant rem, si non rem, quocumque modo rem[10][24] Quelques médecins l’appellent syrupus domesticus, vel de spina infectoria[11] Moquez-vous-en hardiment, ne vous en servez jamais et ne vous y fiez point, non plus qu’à ceux qui le louent tant.

Pour les topinambours, [25][26] c’est une plante qui vient de l’Amérique, [27] de laquelle il n’y a nul usage à Paris ni ailleurs, que j’aie ouï dire. [12] Autrefois les jardiniers en vendaient ici la racine, qui est bulbeuse et tuberculeuse, mais on n’en a pas tenu compte. Erant isti bulbi aquei saporis, vel potius insipidi[13] Il y fallait beaucoup de sel, de poivre et de beurre, [28] qui sont trois méchantes choses, irritamenta gulæ : [14] le sel dessèche, le poivre échauffe trop, le beurre ne fait que de la bile. [29] Omnia aromatica visceribus nostris sunt inimica : adeo verum illud amici nostri Casp. Hofmanni, Aromata nos perdunt[15][30][31] Feu M. Moreau appelait cette plante tubera Canadensia[16] Les capucins [32] et autres moines, qui avaient voyagé et qui autrefois les ont cultivés, les appelaient artichauts du Canada. Feu M. Piètre [33] s’en moquait et disait que cela ne valait rien. Caspar Bauhin, [34] in Pinace suo, l’appelle Chrysanthemum maius folio profundius laciniato, flore magno[17] Il est appelé Chrysanthemum luteum par l’auteur qui a décrit Hortum Eystettensem[18][35] Pour ce qu’on vous a dit qu’elle fait rendre l’eau des hydropiques, cela est faux car elle n’approche en rien de cette vertu. Multa fabulosa vulgo circumferruntur de admirandis herbarum virtutibus, a pharmacopæis, ut incautos decipiant[19][36]

Si sapis, ignotum noli præponere notis,
Cognita iudicio constant, incognita casu
[20]

Pour mon âge, je vous dirai que je suis né l’an 1601, un vendredi, dernier jour d’août, et fus baptisé le lendemain, 1er de septembre ; si bien que j’ai 57 ans et trois mois. [21] L’an prochain, je pourrai bien avoir mon portrait [37] en taille-douce car j’ai ici un de mes bons amis, riche et puissant, qui veut faire la dépense de me faire graver.

In morbis renum non est secanda saphena ; [22][38][39] pour les bras, il ne les faut point épargner, et ne faut qu’à peine venir au pied lorsque les grands vaisseaux sont fort désemplis.

Pour les poumons, il faut y saigner hardiment quand l’inflammation [40] y est, mais principalement du côté de ladite inflammation. En ce cas-là, Hippocrate [41][42] dit qu’il faut y saigner donec æger exsanguis factus sit ; [23] et faut saigner des deux côtés.

Si le médicament un peu trop fort a échauffé le malade, il est permis de le saigner ne intemperies adaugetur ; [24] mais du bras voire des deux, et jamais des pieds nam saphenæ sectio est remedium particulare quod maiora vasa non exhaurit[25]

Numquam licet febrem excitare, nec accendere, nec si licet [facere] facile istud esset. Nugantur qui confectionem anacardinam in id obtinendum commemorant[26][43]

In quibusdam morbis chronicis, præsertim in statu convalescentiæ, quibusdam medicis, ut pharmacopolis gratificarentur, placuit tres syrupos catharticos semel commiscere : v. gramma syr. de rosis solut. de floribus malis persicæ, et de cichorio compos. cum rheo ; ter illi syrupi simul commisti æquis partibus, reciduntur in phiala vitrea, et servantur ad usum. Et hoc est quod vocatur syrupus magistralis[27][44][45] On leur conseille d’en prendre deux grandes cuillerées à jeun, de quatre en quatre ou de six en six jours. Cette invention n’est pas un grand secret, est dumtaxat immutata denominatio medicamenti purgantis, ut ægri facilius decipiantur[28]

Ad firmam valetudinem tuendam cæna debet semper esse parcior, et prandium largius. Ut sis nocte lenis, sit cibi cæna brevis. Vide librum v Instit. Hofmanni, qui totus est diæteticus, et omnigenæ doctrinæ plenissimus[29]

Le nœud d’aiguillette [46] n’est qu’une badinerie, cela est faux. Super istis nugis insaniebat Fernelius, more Platonicorum : nil enim aliud est magia, quam humani ingenii ludibrium, ut dixit Quintus Curtius, et artium nugacissima, mendacissima, fraudulentissima, ut ait Plinius, in Hist. naturali[30][47][48][49][50][51] M. de Montaigne [52] s’est fort bien moqué de ces noueurs d’aiguillettes ; [31] c’est un fort bon livre qu’il faut lire tout entier. Ne lisez point Delrio, [53] delirat iste sociennus[32] et tout ce livre de disquisitions magiques n’est tissu que de contes de vieilles qu’il a ramassés de toutes parts, ad componendum suum centonem Loyoliticum[33]

M. Lyonnet, [54] médecin du Puy-en-Velay, [55] est fort habile homme. Il a été ici il n’y a que deux ans, il m’est venu voir deux fois, je l’ai trouvé fort savant en humanités et en philosophie, il est aussi bon praticien. De libro de peste, nihil habeo quod dicam, nec enim eum legi[34] Nos pestes [56] sont synochi putres malignæ [35] qu’il faut traiter comme une fièvre continue [57] qui va un peu vite, ad cuius naturam intelligendam lege Hipp. lib. 3 Epid. cum commentariis Galeni et Phrygii[36][58] Ce dernier a utilement commenté les Épidémies d’Hippocrate, [59] c’est un in‑4o qui se vend à Lyon chez M. Huguetan. Le livre de M. Lyonnet de morbis hereditariis est fort bon. [37] Je ne vous puis dire quand sera imprimé le commentaire sur les Aphorismes [60] de M. Ferrant [61] car son libraire Pocquet [62] est mort d’un ulcère de poumon. [63] Je pense qu’il espère de le faire imprimer à Bourges. [38][64]

Nous avons ici un nouveau doyen nommé M. Blondel, [65] qui hait l’antimoine [66] et le diable également, et qui est un des premiers des plus savants de notre Faculté. Toute la troupe stibiale eût bien voulu l’empêcher, mais ils n’ont pu ; ils ne savent plus à quel saint se vouer. [39]

Notre nombre est diminué de deux depuis deux mois, dont l’un est M. Bouvard [67] et l’autre M. Régnier. [68] M. Bouvard avait 83 ans. On dit aussi que M. Mandat [69] est mort, mais il n’est point à Paris, il est en une sienne maison des champs in agro Turonensi[40]

On dit ici que le roi [70] est à Lyon plutôt pour ses affaires d’Italie que pour autre chose. On tient ici le roi de Suède [71] fort mal en ses affaires : il avait assiégé Copenhague, [72] la capitale du Danemark ; l’électeur de Brandebourg [73] est venu par terre pour ce roi assiégé, et les Hollandais par mer, qui ont rudement repoussé et maltraité le roi de Suède, et cuius salute etiam dubitatur [41] car on n’en sait pas encore le dernier fin.

On commence à Lyon l’impression du Cardan [74] en huit tomes in‑fo. On s’en va y faire aussi le Baronius [75] en douze volumes et le Ciaconius de Vitis pontif. Romanorum elogiis omnium cardinalium[42][76] augmenté jusqu’à présent, en quatre tomes.

Les jésuites [77] sont ici fort embarrassés pour leur Apologie des casuistes qui a été censurée en Sorbonne, [78] et depuis l’a encore été par grand nombre d’évêques. On fera un recueil de toutes ces censures, à laquelle on mettra celles de Sorbonne et de Messieurs les grands vicaires, et autres qui viendront, avec de fortes et amples réflexions faites par les curés de Paris. [43] Les 18 Lettres provinciales [79][80] contre ces mêmes bons pères, qui avaient ici été imprimées en français in‑4o, l’ont été en Hollande in‑12, et traduites en latin in‑8o avec de belles notes ; on dit que la traduction en est admirable, elles sont encore rares ici. [44] Messieurs les jansénistes du Port-Royal [81] ont fait une insigne perte par la mort de M. Le Maistre, [82] âgé de 53 ans. C’est ce grand avocat qui s’était retiré chez eux pour y faire pénitence et qui est auteur de ces beaux Plaidoyers qui se débitent tant ici, in‑fo et in‑4o[45] Je vous baise les mains, à madame votre femme, à monsieur votre père, à monsieur votre frère et à tous nos bons amis de delà, et suis, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

Guy Patin.

De Paris, ce 29e d’octobre 1658.

On ne sait pas encore ici l’arrivée du roi à Lyon et nous n’avons rien de certain des affaires du roi de Suède, hormis que les Hollandais lui en ont fait lever le siège de Copenhague et qu’il y a eu trois vaisseaux de perdus en ce rencontre : voilà ce qu’en disent les dernières nouvelles de Hollande. On dit que le roi n’aura guère d’argent de la Bourgogne et que les députés des états [83] ont fort bien parlé au cardinal Mazarin. [84] On croit que le mariage du roi ne se fera pas avec la sœur du duc de Savoie [85][86] et que tout ce voyage n’est que pour avoir de l’argent. On croit que le roi ira jusqu’à Marseille à cause de la désobéissance des Provençaux. [87] Pour [46] des thèses [88] de l’an dernier, au moins en voilà 40 que je vous envoie.


a.

Ms BnF no 9357, fos 318‑319 ; Chéreau no xix (33‑35).

1.

Dans sa lettre du 2 janvier 1641, Guy Patin avait dit à Claude ii Belin que François Vedeau, seigneur de Grandmont, était son voisin et ami (v. sa note [13]).

2.

V. note [35], lettre 500, pour la mort de François Fouquet, fils aîné de Nicolas Fouquet et de sa seconde épouse, Marie Madeleine de Castille (v. note [1], lettre 588). Son frère puîné, devenu aîné, s’en allait à son tour. Né en 1655, il serait mort le 12 novembre 1658 (Petitfils c, page 117). Son prénom nous est inconnu, mais ne pouvait être François, le même que son aîné mort en 1656. Outre Marie de Béthune, née du premier lit (v. note [33], lettre 539), il restait au couple une fille, prénommée Marie-Madeleine, deux fils plus jeunes, prénommés Louis-Nicolas, futur comte de Vaux, et Charles-Armand, futur père de l’Oratoire. Un dernier fils allait naître en 1661, Louis, futur marquis de Belle-Île, qui assura la descendance de la lignée.

3.

« Il faut craindre que cette débâcle de matière ne dégénère en corruption et de là, pourquoi pas, en gangrène ou atonie du foie. »

4.

« laxatif extrait du bouc-épine noir, du bourgue-épine ».

Il existe deux sortes principales de noirprun, ou nerprun : le nerprun purgatif, rhamnus catharticus, est un arbrisseau (bouc-épine ou bourgue-épine, en latin spina cervina, ou infectoria [épine de cerf ou de teinturier]) qui croît dans les bois et dans les haies, et donne en automne des fruits noirs ressemblant à des prunes (d’où vient le nom de noirprun, prune noire) ; le nerprun, bourgène ou bourdaine, ou aune noir, rhamnus frangula, est très commun dans les bois. « Les fruits du nerprun sont un purgatif énergique et souvent employé. S’il en faut même croire Homberg, il communique cette propriété aux grives, dont la chair devient purgative quand elles se sont nourries de ses baies qu’elles recherchent avec avidité. Le nerprun et ses diverses préparations ont l’inconvénient d’occasionner, au moins dans les individus susceptibles, une sécheresse brûlante de la bouche et du gosier, de causer des coliques. On prévient de ces effets en faisant boire, après l’avoir pris, une certaine quantité d’un liquide doux et mucilagineux. L’énergie drastique de ce médicament le rend surtout propre à purger les hommes robustes, tels que les habitants de la campagne. Par la même raison, il convient particulièrement dans les cas où l’on veut exercer sur le tube intestinal une action irritante et dérivatrice, comme dans les hydropisies, les scrofules, les maladies cutanées. » Les nerpruns sont encore utiles par les matières tinctoriales qu’on en extrait (Panckoucke).

5.

« Il a autre chose d’horrible ».

6.

« il ne purge pas sélectivement ».

7.

V. note [15], lettre 468, pour la colliquation.

8.

« Une telle hydropisie se fait en effet par le dessèchement et la déliquescence des viscères menant à la dévastation de l’humide radical, que Louis Duret a appelé le nectar vivifiant ; lisez-y ce qu’a écrit sur l’hydropisie un homme qu’on a jamais assez loué ».

On appelait humide radical l’« humeur lymphatique [aqueuse], douce, onctueuse, balsamique, subtile, qui abreuve toutes les fibres du corps, et qui les entretient dans un état de souplesse et d’élasticité propre à leur faire exécuter, pendant le cours de la vie, leurs oscillations sur leurs liquides ; d’où résultent la principale cause des fonctions et leur durée » (Trévoux, 1752). Cela correspond à ce qu’on appelle aujourd’hui le liquide interstitiel, qui donne naissance à la lymphe.

9.

« Les médicaments âcres sont enflammés et malfaisants [κακεργα pour κακεργατα], tout emplis d’une malignité qui n’est pas supposée, mais certaine. » V. note [15], lettre 15, pour la Pharmacopée de Brice Bauderon (Lyon, 1588, pour la première de nombreuses éditions).

10.

« étant donné que, par le vent de la nouveauté, qui plaît tant aux malades misérables et ignorants, ils peuvent leurrer et abuser quiconque pour faire fortune, honnêtement, ou sinon par quelque moyen que ce soit [Horace, v. note [20], lettre 181]. »

11.

« sirop domestique, ou d’épine de teinturier [v. supra note [4]]. »

12.

Littré DLF a cité ce passage de Guy Patin pour établir le commencement de l’usage du topinambour (v. note [42] du Traité de la Conservation de santé, chapitre ii).

13.

« Ces bulbes étaient d’un goût aqueux, ou plutôt insipide ».

14.

« qui irritent le gosier ».

15.

« Tous les aromates {a} sont ennemis de nos viscères ; d’où vient le vrai de ce propos de notre ami Caspar Hofmann, “ Les aromates causent notre ruine ”. » {b}


  1. Aromates ou aromats (Travoux) :

    « ce mot se dit d’une drogue, d’une plante, ou d’une composition odoriférante, qui a une odeur forte, pénétrante et agréable. On aromatise une composition lorsqu’on anime les drogues qui y sont entrées par quelques ingrédiens aromatiques, qui augmentent ou relèvent l’odeur des premières drogues qui ne se fais’ient presque point sentir, ou dont l’odeur ne plaisait pas. […] Ce mot n’est reçu que parmi les médecins, et dans l’usage ordinaire il ne faut pas l’employer. Les vrais aromates sont des épiceries qui viennent d’Orient, comme le poivre, la muscade, l’aloès, le baume, l’encens, etc. »

    Épices en était synonyme, mais s’étendait aux drogues médicinales venues d’Orient, comme séné, casse,etc. (Furetière). C’est ce qui valait aux apothicaires l’autre nom d’épiciers.

  2. Chapitre xiii, De Aromatis, seu Condimentis [Aromates et condiments], livre v (§ 1, page 680) des Institutionum medicarum [Institutions médicales] (Lyon, 1645, v. note [12], lettre 92) :

    Et hoc est, quod Medicorum sapientissimi inclamant, Usum acrium nos perdere.

    [Voilà pourquoi les plus sages des médecins proclament que l’emploi des âcres est ce qui cause notre ruine].


16.

« truffe canadienne. »

17.

« grand chrysanthème à feuille très segmentée et à grande fleur. »

Guy Patin se référait au :

Πιναξ theatri botanici Caspari Bauhini Basileens. Archiatri et Professoris Ordin. sive Index in Theophrasti Dioscoridis Plinii et Botanicorum qui a Seculo scripserunt Opera : Plantarum circiter sex millium ab ipsis exhibitarum nomina, cum earumdem Synonymiis et differentiis methodice secundum earum et genera et species proponens. Opus xl. annorum hactenus non editum summopere expetitum et ad auctores intelligendos plurimum faciens.

[Catalogue {a} de l’Amphithéâtre botanique de Caspar Bauhin, {b} archiatre et professeur ordinaire de Bâle, ou Index sur les œuvres de Théophraste, Dioscoride, Pline et des botanistes qui ont écrit au cours du siècle dernier, proposant méthodiquement les noms des quelque six mille plantes qu’ils ont décrites, avec leurs synonymes et leurs différences, selon leurs genres et espèces. Travail de quarante années, inédit jusqu’à ce jour, désiré avec la plus grande ardeur et faisant énormément pour comprendre les auteurs]. {c}


  1. Pinax : recueil de planches (synonyme d’atlas).

  2. V. note [11], lettre 234, pour le Theatrum botanicum de Caspar Bauhin (Bâle, 1658).

  3. Bâle, Ludovicus Regius, 1623, in‑4o ; première édition en 1596 (Phytopinax, v. note [35], lettre 318), réédité en 1671.

    Les termes employés par Patin renvoient à la iiie sorte de chrysanthème décrite dans le livre iv, section i, page 134.


18.

Ce nom de « chrysanthème jaune » vient de Basile Besler (pharmacien et botaniste allemand, 1561-1629) :

Hortus Eystettensis, sive diligens et accurata omnium plantarum, florum, stirpium, ex variis orbis terræ partibus, singulari studio collectarum, quæ in celeberrimis viridariis arcem episcopalem ibidem cingentibus, hoc tempore conspiciuntur delineatio et ad vivum repræsentatio. Opera Basilii Besleri Philiatri et Pharmacopœi

[Le jardin d’Eichstätt, {a} ou dessin exact et précis, et représentation selon nature de toutes les plantes, fleurs, racines, venant des diverses parties du monde terrestre, recueillies pour une étude particulière, qu’on peut voir aujourd’hui dans les parcs très célèbres qui entourent l’archevêché du même endroit. Par Basilius Beslerus, philiatre {b} et pharmacien]. {c}


  1. En Bavière.

  2. Au sens d’adepte de l’art de remédier (et non d’étudiant en médecine).

  3. Nuremberg, sans nom, 1613, atlas botanique rangé par saisons, en deux volumes in‑fo somptueusement illustrés :


19.

« Pour tromper les imprudents, les pharmaciens font circuler dans le public bien des fables sur les vertus admirables des plantes. »

20.

« Si tu as du bon sens, alors refuse de préférer l’inconnu aux choses connues. Le connu se fonde sur le jugement, et l’inconnu sur la conjecture. »

Guy Patin servait de nouveau à Hugues ii de Salins la citation des Distiques de Dionysius Cato faite dans sa lettre du 14 septembre 1657 (v. note [4], lettre 490).

21.

Guy Patin a ajouté ce calcul de son âge exact dans la marge, avec un appel dans le texte. Son portrait gavé en 1658-1659 n’a pas laissé trace que je connaisse.

22.

« Il ne faut pas saigner la saphène dans les maladies des reins ».

La grande saphène est la longue veine superficielle, volontiers variqueuse, qui court de la cheville à l’aine, le long de la face interne du membre inférieur. On la saignait au pied, c’est-à-dire à la cheville, derrière la malléole interne (v. note [4] de la Consultation 17).

Réputée abortive, la saignée de la saphène faisait l’objet de débats aussi curieux qu’intéressants, v. note :

Le projet d’un nouveau portrait gravé de Guy Patin (succédant à celui de 1631-1632, v. note [2], lettre latine 231) n’a pas abouti (avant 1670, v. note [2], lettre latine 466).

23.

« jusqu’à ce que le malade ait été rendu exsangue. » Les médecins ne disposaient pas que de l’antimoine pour tuer les gens…

24.

« pour ne pas augmenter l’intempérie des humeurs ».

25.

« car la saignée de la veine saphène est un remède particulier qui n’évacue pas les grands vaisseaux. » Le grands vaisseaux étaient principalement les grosses veines du tronc (cave, porte et pulmonaires).

26.

« Il n’est jamais permis de faire sortir ni d’embraser la fièvre, et même s’il pourrait être facile de le faire [avec un doute sur le mot effacé]. Ceux qui prétendent que la confection d’anacarde est à employer pour y parvenir disent des balivernes. »

Anacarde :

27.

« Dans certaines maladies chroniques, principalement dans l’état de convalescence, il a plu à certains médecins, pour se rendre agréables aux pharmaciens, de mélanger en une fois trois sirops cathartiques : cinq scrupules de sirop de roses, de fleurs de pêcher et de chicorée avec de la rhubarbe ; ces trois sirops mélangés ensemble en parties égales sont placés dans une fiole de verre et conservés à disposition. Et voilà ce qu’on appelle le sirop magistral. »

28.

« c’est seulement la dénomination embrouillée d’un médicament purgatif, pour que les malades soient plus facilement dupés. »

Sirop magistral (L’Encyclopédie) :

« est composé d’un grand nombre de purgatifs des plus forts, aussi est-il un puissant hydragogue ; mais ce n’est pas la peine d’entasser douze ou quinze drogues pour purger efficacement lorsqu’on peut obtenir le même effet avec une seule. Le sirop de nerprun purge aussi bien et plus sûrement que ce sirop très composé. »

29.

« Pour préserver une santé solide, le souper doit être le plus sobre des repas, et le déjeuner le plus riche. Pour que la nuit soit douce, que le souper soit bref. Voyez le livre v des Institutions d’Hofmann, {a} qui est entièrement consacré à la diététique et débordant de tout genre de doctrine. »


  1. V. supra note [15].

30.

« Fernel avait déliré sur ces sornettes, à la manière des platoniciens ; {a} la magie n’est rien d’autre qu’une dérision du génie humain, comme a dit Quinte Curce, {b} et le plus inepte, le plus mensonger et le plus frauduleux des arts, comme a dit Pline dans son Histoire naturelle. » {c}


  1. V. notes [48] et [52], lettre 97, pour les deux livres de abditis rerum causis [sur les causes cachées des choses] (Paris, 1548) de Jean Fernel (dont Guy Patin blâmait le contenu), et pour les platoniciens.

  2. V. note [27], lettre 606, pour Quinte-Curce sur la magie.

  3. Pline, Histoire naturelle, début du livre xxx (chapitre i, § 1 ; Littré Pli, volume 2, page 321) :

    Magicas vanitates sæpius quidem antecedente operis parte, ubicumque causæ locusque poscebant, coarguimus, detegemusque etiamnum : in paucis tamen digna res est, de qua plura dicantur, vel eo ipso quod fraudulentissima artium plurimum in toto terrarum orbe, plurimisque seculis valuit. Auctoritatem ei maximam fuisse nemo miretur, quandoquidem sola artium tres alias imperiosissimas humanæ mentis complexa in unam se redegit.

    « Dans les parties antérieures de cet ouvrage, nous avons réfuté plus d’une fois, quand le sujet et le lieu l’exigeaient, les impostures magiques. Nous allons encore en révéler la vanité. La magie est du petit nombre des choses sur lesquelles il importe de s’étendre, ne fût-ce qu’à ce titre qu’étant le plus trompeur des arts, elle a eu, par tout le monde et en tout temps, le plus grand crédit. »

31.

Allusion de Guy Patin au chapitre xx du livre i des Essais, intitulé Sur la Force de l’imagination, où Montaigne prend, entre autres, l’exemple du nouement d’aiguillettes (v. note [24], lettre 99) pour montrer comment :

« Il est vraisemblable, que le principal crédit des visions, des enchantements et de tels effets extraordinaires, vienne de la puissance de l’imagination, agissant principalement contre les âmes du vulgaire, plus molles. On leur a si fort saisi la créance qu’ils pensent voir ce qu’ils ne voient pas. »

32.

« ce loyolite extravague » ; v. note [54], lettre 97, pour les Disquisitionum magicarum libri sex [Six livres de Recherches sur la magie] du jésuite Martin Anton Delrio (Mayence, 1603).

33.

« pour composer son centon loyolitique. »

34.

« Pour son livre sur la peste, je n’ai rien à en dire, et en effet je ne l’ai pas lu » :

Roberti Lyonnet Aniciensis, Consilarii Medici Regii, λοιμογραφια, seu reconditarum Pestis et contagii causarum curiosa Disquisitio, eiusdemque Methodica Curatio.

[Description de la peste, par Robert Lyonnet, {a} natif du Puy, conseiller médecin du roi, ou Recherche curieuse des causes cachées de la peste, de sa contagion et de son traitement méthodique]. {b}


  1. V. note [1], lettre 141.

  2. Lyon, Claudius Prost, 1639, in‑8o de 362 pages : observations sur la peste qui avait sévi à Valence en 1629‑1630.

    Les pièces liminaires contiennent cette épigramme de Charles Spon :

    Quum Pestis rabidi sæviret more Leonis,
    Nec contra auderet tendere turba medens :
    Ecce
    Leunculus hunc unus superare Leonem
    Gestit, congreditur, iam fera victa cadit.
    Macte
    nove ô Salomon ! Mox larga videbis oriri
    Gloriæ ab hoc strato Mella Leone tibi.

    Karolus Sponius Doct. Med.
    Lugd. Aggregatus.

    [Tandis que sévissait la Peste, à la manière d’un Lion enragé, et que la foule des médecins n’osait l’attaquer, voici qu’un Lionceau entreprend seul de surmonter ce Lion : il attaque la bête sauvage, et déjà elle s’écroule. Mets-le à mort, ô nouveau Samson ! De ce Lion abattu, tu verras aussitôt pour toi jaillir en abondance l’eau miellée de la gloire.

    Charles Spon, docteur en médecine agrégé au Collège de Lyon].


35.

« des fièvres synoques putrides [v. note [3], lettre latine 104] malignes ».

36.

« pour comprendre sa nature, lisez le livre iii des Épidémies d’Hippocrate avec les commentaires de Galien et de Phrygius. » V. note [11], lettre 78, pour le commentaire de Phrygius, Pietro Francisco Frigio, sur les Épidémies d’Hippocrate (Lyon, 1643).

37.

V. note [1], lettre 141, pour le livre de Robert Lyonnet « sur les maladies héréditaires » (Paris, 1647).

38.

Louis Ferrant, médecin de Bourges, avait publié en 1657 chez Jean Pocquet à Paris un commentaire sur les Prénotions coaques d’Hippocrate (v. note [26], lettre 469). Son commentaire des Aphorismes semble n’avoir jamais été imprimé.

39.

V. note [1], lettre 546, pour l’élection houleuse de François Blondel, le plus farouche ennemi des antimoniaux.

40.

« en Touraine. » François Mandat, natif de Tours, avait été reçu docteur régent de la Faculté de médecine de Paris en 1620 ; Guy Patin a signalé sa mort véritable au début du mois de juin 1660, à l’âge de 70 ans. V. note [13], lettre 253, pour Pierre Régnier.

41.

« et on doute même du sort qui lui a été réservé ». V. note [22], lettre 539, pour la défaite de Charles x Gustave, roi de Suède, devant Copenhague.

42.

« sur les Vies des pontifes [et] éloges de tous les cardinaux » d’Alfonso Chacon (v. note [2], lettre 304).

V. notes [8], lettre 749, pour les Opera omnia de Jérôme Cardan, et [21], lettre 485, pour la continuation des Annales ecclésiastiques du cardinal Cesare Baronio.

43.

Beaucoup plus tard a paru un :

Recueil des principales censures des archevêques et évêques de France, contre le livre intitulé Apologie pour les casuistes contre les calomnies des jansénistes, {a} publié en 1657. {b}


  1. V. note [9], lettre 527.

  2. Sans lieu ni nom ni date, in‑fo de 50 pages. Les 13 pièces contenues dans cet ouvrage sont datées de 1658 à 1698.

Le feu des ripostes à l’Apologie resta bien alimenté en 1658 et durant les années qui suivirent, ce qui rendait fort prématurée la confection d’un recueil. À titre d’exemple, durant la seule année 1659, Antoine ii Arnauld, Blaise Pascal et Pierre Nicole ont publié huit Écrits des curés de Paris condamnant l’Apologie ; comme n’émanant pas de prélats, elles ne sont pas imprimées dans ce livre.

44.

Ludovici Montaltii Litteræ Provinciales, de morali et politica Jesuitarum disciplina. A Willelmo Wendrockio Salisburgensi Theologo, e Gallica in Latinam linguam translatæ ; et theologicis et notis illustratæ. Quibus tum Jesuitarum adversus Montaltium criminationes repelluntur : tum præcipua Theologiæ Moralis capita a novorum Casuistarum corruptelis vindicantur.

[Lettres provinciales de Louis de Montalte {a} sur l’enseignement moral et politique des jésuites. Traduites du français en latin et illustrées de notes théologiques par Willelmus Wendrockius, {b} théologien de Salzbourg. Où sont à la fois repoussées les accusations des jésuites contre Montalte, et purgés les principaux chapitres de la théologie morale des dépravation des nouveaux casuistes]. {c}


  1. Blaise Pascal, v. note [1], lettre 433.

  2. Pierre Nicole, v. note [6], lettre de Charles Challine, datée du 7 mars 1656.

  3. Cologne, Nicolaus Schouten, 1658, in‑8o de 608 pages, contenant la série complète des 18 lettres. V. note [23], lettre 446, pour la première édition française (ibid. 1657).

45.

V. note [8], lettre 453, pour Antoine Le Maistre.

46.

Remplace « Je vous chercherai et amasserai », barré par Guy Patin.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Hugues II de Salins, le 29 octobre 1658

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(Consulté le 25/04/2024)

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