[Ms BIU Santé no 2007, fo 59 vo | LAT | IMG]
Au très distingué M. Johannes Antonides Vander Linden, à Leyde.
Très distingué Monsieur, [a][1]
Pour répondre à vos deux lettres, je vous dirai d’abord que j’ai été transporté d’une immense joie en apprenant la très heureuse annonce de notre paix conclue avec les Hollandais : Dieu fasse qu’elle arrive à son terme et ne recèle aucun piège. Je me réjouis aussi que l’ambassade de M. de Thou ait débuté sous de si bons auspices ; c’est un homme très éminent que je vénère et admire. [1][2] Notre Mentel a été frappé de stupeur et comme plongé dans le regret quand je lui ai appris qu’un Celse paraîtrait dans un ou deux mois, enrichi par votre critique et savante main, et arriverait chez nous. [3][4][5] [Ms BIU Santé no 2007, fo 60 ro | LAT | IMG] Il a toujours dit avoir bien des éclairages à apporter sur cet écrivain, mais n’en présente pourtant rien ; il ressemble fort à ce Sertorius dont Martial a dit :
Rem peragit nullam Sertorius inchoat omnem,
hunc quoq. etc. [2]
À l’exception de Mentel et de Rhodius, tous les amateurs de Celse loueront votre empressement et votre diligence. [3][6][7]
Quant à Lazare Rivière, professeur de Montpellier, ce ne fut rien d’autre qu’un pur et insigne vaurien. [8] Voilà dix ans, il a vécu ici pendant quelques mois pour servir son École en raison d’un procès en suspens devant le Conseil privé du roi, concernant les gages des professeurs. [9][10] Tandis que les arcanes de ce procès étaient en débat (ce qui, par toute la France, est toujours une affaire qui procède lentement), il a aussi eu soin de faire imprimer ses Observationes (ouvrage vraiment léger comme fétu de paille), dont j’ai conjecturé à quel point cet auteur, ou plutôt ce copiste, est un homme qui ne vaudrait pas quatre sous. Comme elles m’ont appris qu’il vivait à Paris, [4] et que je pouvais voir à son insu un homme qui promettait impudemment à nos concitoyens la guérison de toutes les maladies, même incurables, et mettre au jour sa mauvaise foi, je l’ai rencontré en me déclarant être jurisconsulte et quartanaire. [5][11][12] Je lui ai demandé si je pourrais lui acheter au prix fort les secrets qu’il détenait contre cette fièvre que, depuis deux ans et plus, les médecins de Paris n’avaient jusqu’alors pu repousser et juguler, ni par leur méthode ni par leurs divers remèdes. À ces mots, l’ignorant cyclope [6][13] s’exclama : « Votre ville de Paris abonde en tout ce qu’il y a de meilleur, mais je m’étonne fort qu’elle manque d’excellents médecins ; ils usent librement, disait-il, de la saignée en presque toutes les maladies, ils ont recours à peu de remèdes, ils font retentir Hippocrate et Galien, mais ne détiennent pas les secrets dont je suis parfaitement instruit contre tout genre de maladies. » [14][15][16] Alors, continuant ma feinte, je lui ai demandé si son art ne pouvait pas me libérer de la quarte dans le mois ; pourvu que je veuille lui donner dix pistoles espagnoles (qui font cent livres tournois), il me promit aussitôt qu’il dissiperait cette quarte en 15 jours à l’aide d’un remède spécifique (entendez-vous ce propos de charlatan ?) ; [17] à savoir de pilules préparées avec le cœur d’un jeune loup tué une nuit de pleine lune de printemps, de l’ambre gris, de la soie, de l’or et quelque poudre chimique. [7][18][19][20][21][22][23] Si je n’avais craint de dévoiler ma tromperie, j’aurais frémi à ces paroles, ou du moins je ne me serais pas empêché de rire. Ayant donc promis le tiers de la somme demandée et dit que je ne reviendrais pas avant quelques jours, j’ai salué ce charlatan et m’en suis allé. Trois jours plus tard, je lui ai envoyé une lettre ou je l’avisais d’être plus sage à l’avenir et, comme il convient à un honnête homme, de s’abstenir de tant de sornettes qu’il avait proposées contre la quarte, qui étaient de pures fraudes et impostures, tout à fait indignes d’un professeur royal de médecine de Montpellier. J’ai voulu aussi l’aviser que je n’étais ni jurisconsulte ni quartanaire, et qu’il attendrait donc en vain mes pièces d’or ; que j’étais Guy Patin, médecin de Paris, qui étais allé le visiter sans nulle autre intention que de voir et connaître un homme bayant par tous les moyens, bons comme mauvais, après la cassette des malades et exclusivement avide de ramasser l’or par les pires artifices, dont l’allure et le discours m’en avaient appris bien plus encore que je n’avais entendu jusqu’alors. Quand il reçut ma lettre, le malhonnête charlatan comprit la comédie que je lui avais jouée et l’âne a montré ses oreilles au grand jour ; et pour ne pas les perdre, il a aussitôt songé à regagner sa patrie, savoir Montpellier, sans même avoir mené ses affaires à bien, c’est-à-dire sans que le procès fût encore terminé. Tanquam fur nocturnus, [8][24] il est parti en cachette ; non sans d’abord avoir pourtant reçu d’avance l’argent de certains malades trop crédules à qui il avait promis poudre, pilules et opiats pour la guérison de l’hydropisie, de la fièvre quarte et d’autres maladies chroniques. [25][26][27]
[Ms BIU Santé no 2007, fo 60 vo | LAT | IMG] Mais vous, que pensez-vous de cet homme ? Il semble plus approcher du voleur et de l’imposteur que du docteur en médecine, qui doit être homme honnête, sage et de bonnes mœurs. Il a passé le reste de sa vie à Montpellier, où il a enfin misérablement rendu l’âme le 8e d’avril 1655, atteint d’un ulcère malin et lépreux de la gorge qui évoluait depuis quelques années, étant lui-même lépreux, comme toute sa famille et par hérédité. [28] Il a eu très mauvaise réputation dans tout le Languedoc, tenu pour un empirique assoiffé d’argent ; [29] et aujourd’hui encore, on le méprise comme un très misérable écrivain. Il n’a plu qu’aux débutants, pour sa nouveauté qui n’a grand charme que pour les ignorants, mais s’est évaporée ensuite. Voilà ce que j’ai connu du personnage. Venons-en à ses écrits, qui ne méritent guère plus d’estime. Avant cela, il avait écrit de morbis internis et de febribus, qui n’est rien d’autre qu’une suite d’emprunts à l’ouvrage immense et méticuleux de Daniel Sennert : c’est le très misérable résumé d’un excellent livre ; pour sa brièveté, les jeunes médecins y ont eu recours comme à une ancre sacrée, sed pro thesauro carbones. [9][30][31] Ensuite, il a donné ses Observationes, ouvrage misérable, pour ne pas dire merdeux, [10] et tout à fait indigne d’être lu par un honnête homme. Pour prolonger les chapitres de ces deux livres, il a ajouté certains emprunts à Zacutus, et je ne m’en étonne pas : [11][32] l’un et l’autre furent en effet empiriques, chimistes et cupides adeptes de secrets ; et même imposteurs et, comme j’ai entendu dire d’eux, de confession juive, ce que je supporte mal. [33] En effet, ces vauriens, qui sont étrangers à la foi chrétienne et qui ont le Christ en horreur, ne devraient pas être tolérés dans les Écoles des princes chrétiens, eux qui comptent pour palmarium facinus, [12] et s’en attribuent même gloire et avantage, d’avoir trompé des chrétiens par leurs fraudes et leurs impostures. Bien que je sois catégorique là-dessus à leur sujet, sachez pourtant que je ne compare en aucune manière Zacutus à Rivière, médicastre de quatre sous qui toute sa vie n’a rien fait d’autre ou n’a du moins ambitionné que d’amasser des richesses et dépouiller les malades de leur or ; au moins ce Zacutus a-t-il mérité la louange pour son immense travail, même s’il contient çà et là bien des tromperies, bien des fictions et des fables, et des conclusions aussi fausses que dangereuses, qu’on ne peut approuver dans les opérations du métier. Ajoutez à cela que c’est un auteur dont la lecture est périlleuse autant que pernicieuse pour les débutants en médecine, encore jeunes et insuffisamment avancés dans l’étude de l’art ; mais plus une autre fois sur cet excellent Zacutus, si cela ne vous a pas satisfait. Pour conclure, je dirai de Rivière que je n’ai aucunement sollicité le jugement et la critique de M. Hermann Conring à son sujet, telle qu’on la lit dans son Introductio ad universam Medecinam, page 147 ; tout en pensant que Conring a voulu y ménager Rivière, car il aurait pu le juger bien plus durement et sévèrement. [13][34] On a récemment imprimé ses Institutiones à Lyon sur la Saône ; je les ai ici, un ami me les a envoyées. Si vous m’en priez, voici ce que j’en pense : je n’y ai vu aucune raison de changer le jugement que je viens de porter ; elles sont du même aloi que les Observationes, et valent moins que rien ; dans leur préface, l’imprimeur promet une novam centuriam observationum encore inédite ; puissent-elles être meilleures que les autres, et plus propres à instruire les philiatres. [14] Vous avez mon jugement sur les écrits de Rivière ; s’il vous a plu, je m’en réjouirai ; sinon, qu’il s’impute à lui-même le fait que je vous paraisse trop vif et trop injuste à son égard ; scapham enim scapham nuncupo, [15] nec ulli cuiquam palpum obtrudo. [16][35] Vous concéderez cela à la liberté philosophique et à la passion que j’ai pour vous, mais contre Rivière qui a voulu si impudemment jeter de la poudre aux yeux d’un siècle savant. J’en dirai peu sur les deux médicaments qu’il a mentionnés si souvent et si mal à propos. Le calomel de Turquet, qui a été un grand imposteur et très cupide écumeur de bourses (mais Rivière le loue comme illustre médecin, ut sit dignum patella operculum, habeantque similes labra lactucas) ; [17][36][37] c’est du mercure dulcifié, que Turquet a transmis à un gentilhomme français nommé de Bellebrune, à l’égal d’un grand secret qu’il ne faut jamais révéler, comme vous diriez pulchrum et subnigrum. [18][38][39] L’antimoine dépouillé de sa force énétique est aussi un remède fébrifuge, qui ne purge ni par en haut ni par en bas, mais seulement par les urines ou la sueur, comme dans la poudre de Cornacchini. [19][40][41] Les infâmes chimistes entreprennent de gagner de l’argent avec leurs secrets pour duper les gens crédules en extravaguant ; les gens honnêtes et savants ont recours aux médicaments éprouvés et en petit nombre, à l’aide desquels ils s’acquittent de leur charge selon une méthode conforme aux règles. [Ms BIU Santé no 2007, fo 61 ro | LAT | IMG] Enfin, en avril 1655, à Montpellier, Rivière s’en est allé dans l’au-delà, étouffé par un ulcère malin de la gorge, virulent et lépreux, dont, avant de finir, je vous raconterai la circonstance risible : dans son testament, il avait ordonné qu’on l’inhumât dans l’église des dominicains (ce sont des moines de chez nous, vêtus de noir et de blanc) [42] et qu’on l’y portât alors en grande pompe, le visage découvert et nettoyé, les yeux ouverts, portant l’épée au côté et des éperons dorés, comme on le devait à un très noble guerrier qui jadis Illustres multorum animas demisit ad Orcum ; [20][43][44][45] la puanteur du cadavre fut si forte qu’elle coupa presque le souffle aux porteurs ; tant et si bien qu’il tomba dans l’égout le plus proche, d’où on n’a pu le retirer que fort difficilement et à grand-peine, tout boueux et fort souillé d’excréments. De cette infortune ou fâcheux accident, ses collègues ont dit non sans à-propos : Eum qui tota vita famelicus et mimicus fuerat medicaster, post obitum factum fuisse lutulentum ; [21] mais en voilà assez et plus qu’assez d’un si insigne vaurien.
On a remarqué qu’avril 1655 a chez nous été fatal à beaucoup, car en ce même mois sont partis dans l’au-delà six hommes qui ont bien mérité d’être fort connus, mais à des titres divers. Il y eut d’abord ce Rivière à Montpellier, Turquet de Mayerne à Londres, et un certain Le Fèvre à Troyes. C’est celui qui, en 1642, fit boire un poison narcotique au cardinal de Richelieu, sous ombre de le faire dormir ; dont ce tyran le plus cruel, ce Jupiter mactator français, cet autre Attila et ce fléau du monde chrétien s’en alla aux enfers le 4e de décembre (Dieu eût-il pu faire qu’un poison mortel l’eût englouti 20 ans plus tôt). [22][46][47][48][49][50] Ne vous semble-t-il pas merveilleux qu’en un seul et même mois ces trois charlatans aient péri en divers lieux : Rivière, d’un ulcère lépreux ; Le Fèvre, d’avoir pris de l’antimoine ; [51] Turquet, de vieillesse et tout couvert d’ulcères ? Dans le même mois de la même année trois autres hommes sont encore morts, mais tous très savants et très illustres pour leurs immenses connaissances sur quantité de choses : Daniel Heinsius, dans votre ville ; [52] David Blondel, à Amsterdam, théologien et historien très éminent ; [53] et ici à Paris, mon très grand ami François Guyet, [24][54] qui avait jadis été le très méritant précepteur du cardinal de La Valette, [55] et celui M. Nicolas Bourbon, que je vénère profondément, natif de Bar-sur-Aube [56][57] (à la différence de l’autre Nicolas Bourbon, [58] natif de Vendeuvre, [59] son grand-oncle, qui a vécu il y a cent ans), qui mourut ici en 1644, âgé de 83 ans ; Achate le plus fidèle et le plus lettré de tous les savants, il était du petit nombre des poètes grecs et latins les plus estimés. [24][60] Que pensez-vous de ces trois derniers ? Le moindre de ces trois-là a surpassé en érudition et en vertu trois millions d’empiriques, de charlatans, de stibiaux et de bavards de cette sorte.
Ad quorum exitium non debuit una parari
Simia, nec serpens unus, nec culeus unus. [25][61]
Mais tant d’impertinents vauriens me font honte : puisqu’ils n’ont absolument aucun mérite, ils sont à tenir pour totalement indignes d’accaparer nos moments de loisir. Les laissant donc de côté et ne me souciant plus d’eux, j’en reviens aux livres.
N’avez-vous jamais vu l’Itinerarium de Benjamin de Tudèle, de récente édition in‑4o, avec les notes de quelque savant de chez vous ? [26][62][63] Rivet in Exodum ? le même in Decalogum ? [27][64] Anton Günther Billich in Examine Deliriorum chymicorum Petri Laurembergii ? du même, Exercitium Chymicorum ultimum et supremum ? l’Adsertionum chymicarum Sylloge, etc., in‑4o ? [28][65][66] Si tous ceux-là se vendent chez vous, achetez-les-moi, je vous prie, et je vous en rembourserai le prix. Mais en attendant, voici une liste de trois livres récemment imprimés, que j’ai ici, pour les placer dans votre Nomenclator : [67] Gabrielis Fontani, Iacobi filii, artium et medicinæ Doctoris, Medicorum Massiliensium Collegio aggregati, de Veritate Hippocraticæ medicinæ firmissimis rationum et experimentorum momentis stabilita et demonstrata, seu Medicina antihermetica ; in qua Dogmata Medica, Physiologica, etc., Lyon, 1657, in‑4o ; [29][68][69] [Ms BIU Santé no 2007, fo 61 vo | LAT | IMG] les Institutiones medicæ de Lazare Rivière, réparties en cinq livres, in‑4o, Lyon, 1656 ; les quatre livres de Consilia et responsa medicinalia de Benédetto Silvatico, in‑fo, Padoue, 1656. [30][70]
Ce mois prochain, nous attendons le Varanda qu’on achèvera ces jours-ci à Lyon. [31][71] Gardez-vous, s’il vous plaît, de l’acheter car je vous en destine un exemplaire à vous envoyer en cadeau, avec d’autres que j’ai ici mis de côté pour vous.
On dit qu’on imprime à La Haye-le-Comte un nouvel ouvrage de M. Gerardus Johannes Vossius de Philosophia et philosophorum sectis ; [32][72][73] Dieu fasse que soient enfin publiées les lettres que cet éminent personnage (dont je vénère la mémoire et admire le savoir encyclopédique) a écrites à ses amis français et allemands, en particulier à Hugo Grotius, avec celles que Grotius lui a adressées. [33][74] Vos affaires avec notre panurge de Mazarin [75][76] semblent n’être pas encore bien conclues, ni suffisamment affermies. Je m’étonne que, par je ne sais quelle fatalité pour nous, ce politique empourpré ne succombe pas enfin à l’écroulement de notre patrie et ne soit pas enseveli sous la masse de nos affaires publiques. La santé du Jupiter capitolin semble évoluer et décliner de jour en jour : il ne lui reste plus aucune dent ; pour prévenir une ischurie mortelle, on lui a percé la vessie au niveau du périnée ; [34][77][78][79][80][81] à tel point qu’à Rome, beaucoup d’empourprés pensent sérieusement à la papauté prochaine, pour eux-mêmes ou pour leurs alliés, contre le gré et en dépit du Saint-Esprit, qui s’éloigne d’eux tant qu’il peut. Vale, très éminent Monsieur, et aimez celui qui est votre très affectionné et très dévoué
Guy Patin.
De Paris, ce vendredi 31e d’août, qui fut jadis mon jour de naissance, en l’an de grâce 1601.
1. |
V. note [3], lettre 486, pour la paix avec la Hollande (conclue le 21 juin 1657), et [36], lettre 294, pour Jacques-Auguste ii de Thou, fils de l’historien. |
2. |
Martial (Épigrammes, livre iii, vers 79‑80) :
V. note [20], lettre de Charles Spon, datée du 28 août 1657, pour le Celse de Johannes Antonides Vander Linden paru à Leyde en automne 1657. Sans doute découragé, Jacques Mentel abandonna le sien ou, du moins, ne le fit jamais paraître. |
3. | V. note [2], lettre latine 127, pour le Celse de Johannes Rhodius qui est demeuré inachevé, en dépit des efforts de Thomas Bartholin pour le sauver de l’oubli. |
4. |
V. note [6], lettre 132, pour les « Observations » de Lazare Rivière (Paris, 1646, etc.). Sa dédicace Generoso, Illustrique Viro Domino D. Francisco Vautier, olim Mariæ Mediceæ Reginæ Christianissimæ Archiatro, nunc archiatrorum Galliæ Comiti [Au généreux et illustre M. François Vautier, jadis archiatre (premier médecin) de la reine très-chrétienne, Marie de Médicis, maintenant comte des archiatres de France (premier médecin du roi)] est en effet datée de Paris (le 7 avril 1646). V. note [1], lettre 133, pour le motif de la venue de Lazare Rivière à Paris en 1646. |
5. |
Pour respecter les nuances de l’époque, j’ai traduit le mot Jurisconsultus du manuscrit (abrégé en ICtus) par jurisconsulte, « savant en droit, qui en a écrit ou que l’on consulte sur l’interprétation des lois et des coutumes, sur les difficultés d’un procès » (Furetière), plutôt que par juriste (« docteur du droit », ibid.) : « jurisconsulte est celui qui fait profession du droit et de donner conseil ; juriste, auteur qui a écrit sur les matières de droit » (Dictionnaire critique de la langue française de l’abbé Jean-François Féraud, 1761). |
6. |
V. note [10], lettre latine 43, pour cyclope dans le sens de médecin chimique (ouvrier de Vulcain). Les trois centuries d’Observationes de Lazare Rivière (Paris, 1646, v. supra note [4]) étaient suivies d’un Appendix de 3 pages intitulé De Febrifugo nostro [Sur notre fébrifuge], dont il vantait les insignes mérites sans en révéler la composition. |
7. |
V. note [24], lettre 386, pour l’ambre gris. Faute d’avoir trouvé la moindre application médicale de la soie (autre que pour les fils chirurgicaux), j’ai traduit sericum par son autre sens latin de jujube (poma serica), petit fruit auquel Avicenne accordait des vertus dans le traitement des maladies des poumons et des reins, contrairement à Galien qui n’y voyait qu’un aliment peu digeste. La prescription était à la fois magique (cœur de loup), astrologique (pleine lune), chimique (poudre probable d’antimoine), arabe (jujube) et lucrative pour le pharmacien (or, ambre) ; soit tout ce qui horripilait Guy Patin. |
8. |
« Comme un voleur la nuit » (Évangile de Luc, v. note [6], lettre 151). |
9. |
« mais ce sont des charbons pour un trésor » (v. note [12], lettre 54). L’ancre sacrée ou maîtresse, autrement nommée ancre de miséricorde ou de salut, était la plus grande et la plus solide du navire, celle qu’on réservait pour les périls imminents de naufrage ; elle figurait alors le dernier recours. Plutarque en a fait une métaphore (Vie de Coriolan, chapitre xxxi) : « Les ambassadeurs ayant rapporté cette réponse, le Sénat, menacé d’une tempête violente qui pouvait submerger le vaisseau de l’État, jeta, comme on dit, l’ancre sacrée. » Sacram anchoram solvere [Jeter l’ancre sacrée] est l’adage no 24 d’Érasme. Guy Patin donnait le titre de livre « sur les maladies internes et les fièvres » à la : Cl. V. Lazari Riverii Consiliarii Regii, et in Monspeliensi Universitate Medicinæ Professoris, Methodus curandarum febrium. |
10. |
Ce mot grossier ne se lit certes pas sous la plume française de Guy Patin, mais je n’ai pas trouvé meilleure façon de traduire et sa pensée, et l’adjectif stercoreus (trouvant « excrémentiel » bien vieilli et trop guindé). V. supra note [4], pour les Observationes de Lazare Rivière, que Patin éclaboussait ainsi de son mépris. |
11. |
Lazare Rivière a beaucoup cité Zacutus Lusitanus (v. note [7], lettre 68) dans ses ouvrages, mais je n’y ai pas trouvé d’observations complètes qu’il ait avoué lui avoir empruntées. |
12. |
« action qui mérite la palme » (fait de gloire) ; palmarium facinus est un adage antique qu’Érasme a commenté (no 3855) : Palmarium facinus pro insigni ac triumpho digno dixit Terentius in Eunuchio :Tum hoc alterum, |
13. |
V. note [26], lettre 484, pour l’Introductio in universam Artem medicam… [Introduction à l’Art médical complet…] d’Hermann Conring, que Sebastian Scheffer a extraite de ses leçons publiques (Helmstedt, 1654), et dont la page 147 contient ce propos sur Lazare Rivière :
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14. |
V. note [5], lettre 429, pour les Institutiones Medicæ [Institutions médicales] de Lazare Rivière (Lyon, 1656). Guy Patin faisait allusion à cette phrase de la courte préface de l’imprimeur (Antoine Cellier) Bibliopola Lectori Humanissimo [au très aimable lecteur] qui annonce une « nouvelle centurie d’observations » :
La quatrième centurie a paru pour la première fois (avec les trois premières) à Lyon, chez Cellier, en 1659, v. note [8], lettre de Charles Spon, datée du 15 mai 1657. elle aussi été publiée séparément à La Haye (Adrianus Vlacq, 1662, in‑8o de 99 pages, incluant 33 observations anonymes sur des maladies rares). |
15. |
« j’appelle en effet une barque une barque [un chat un chat] », v. note [1], lettre 101. |
16. |
« et je ne fais jamais rien avaler à personne par une caresse » (Érasme, adage no 2527) :
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17. |
« pour que le couvercle convienne à la marmite et que les lèvres aient des laitues qui leur ressemblent », v. note [46], lettre 279, et [8], lettre 297, pour ces deux adages érasmiens. |
18. |
« beau et noir », kalos et melas en grec, étymologie du mot calomel (ou calomélas) donnée par Littré parce qu’il passe du beau noir au blanc quand on le prépare (v. note [11], lettre 435). Une autre origine fait allusion à l’esclave noir que Théodore Turquet de Mayerne (v. note [22], lettre 79) aimait beaucoup et qui l’assistait dans la préparation de ce médicament mélanagogue (qui purge la bile noire, ou atrabile) ; en son souvenir, il avait inventé le nom du calomel, médicament qu’il avait introduit en 1618 dans la Pharmacopœia Londonensis [Pharmacopée de Londres]. Guy Patin avançait ici une troisième explication du mot, mais elle semble un calembour : après la « belle poudre noire » et « le beau Noir », la « belle brune », avec allusion originale à Antoine de Blondel de Joigny, marquis de Bellebrune (v. note [4], lettre 519), ou quelque autre personne de sa famille. Calomelas Turqueti est mercurius dulcis sexies, aut septies sublimatus [Le calomel de Turquet est du mercure doux qu’on a sublimé six ou sept fois] (Lazare Rivière, Observatio lxxxiii, centuria iv, page 51, fin de l’avant-dernier paragraphe, mais il en a aussi parlé dans ses trois premières centuries) ; le calomel ou chlorure mercureux a longtemps été utilisé comme diurétique, sudorifique, sialagogue, antisyphilitique, vermifuge, etc. |
19. |
Marco Cornacchini, professeur de médecine à Pise, mort en 1621, a laissé son nom à une poudre purgative, autrement connue sous la dénomination de pulvus catholicus illustrissimi Comitis de Warvich [poudre universelle de l’illustrissime comte de Warwick, son véritable inventeur]. Cette poudre cornachine est composée de scammonée d’Alep, d’acidule tartreux et d’oxyde d’antimoine blanchi par le nitrate de potasse ; elle est purgative, apéritive, hydragogue dans les obstructions et l’hydropisie. |
20. |
« a envoyé chez Orcus les illustres âmes de quantité de gens » ; Multasque illustres animas demisit ad Orcum est la traduction latine d’un vers de Lucien de Samosate : {a} πολλας δ’ ιφθιμους ψυχας Αιδι προιαψεν. |
21. |
« Voilà devenu après sa mort un médecin fangeux et tout couvert d’ordure celui qui toute sa vie avait été un famélique et burlesque médicastre » (sans source identifiée). |
22. |
Seule mention d’Attila, roi des Huns en 434 (v. note [89] du Faux Patiniana II‑7), dans toute la correspondance de Guy Patin. V. notes [14], lettre 75, pour le laudanum que Le Fèvre, empirique de Troyes, administra à Richelieu sur son lit de mort, et [14], lettre 463, pour Jupiter mactator [Jupiter massacreur]. |
23. |
Curieuse méprise de Guy Patin sur son ami François Guyet (v. note [3], lettre 997) qu’il prénommait ici Henri (erreur que j’ai corrigée). |
24. |
Achate est le fidèle compagnon d’Énée dans l’Énéide (v. note [14], lettre d’Adolf Vorst, datée du 4 septembre 1661). V. note [38] du Borboniana 10 manuscrit pour Nicolas Bourbon dit l’Ancien, Vandperanus, natif de Vendeuvre-sur-Barse, petite ville de Champagne, à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de Bar-sur-Aube (v. note [31], lettre 390), où était né son petit-neveu (et non arrière-petit-neveu), Nicolas dit le Jeune (mort en 1644, v. note [2], lettre 29), celui que Guy Patin, son disciple et ami, couvrait ici de louanges. |
25. |
« Ceux-là ont mérité qu’on préparât pour leur élimination plus d’un singe, plus d’un serpent et plus d’un sac de cuir » (Juvénal, v. note [50], lettre 286). |
26. |
V. note [5], lettre latine 77, pour l’« Itinéraire » de Benjamin de Tudèle édité par Constantinus L’Empereur (Leyde, 1633, sans édition in‑4o plus tardive que j’aie su trouver). |
27. |
Le Décalogue (ou Dix Commandements) forme le chapitre 20 de l’Exode (fuite des Hébreux hors d’Égypte sous la conduite de Moïse), qui est le 2e livre de l’Ancien Testament. Le Poitevin André Rivet, docteur et professeur de théologie à Leyde, {a} y a consacré deux ouvrages :
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28. |
D’Anton Günther Billich (1598-1640), médecin chimiste antiparacelsiste allemand :
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29. |
V. note [9], lettre 467, pour la « Vérité de la médecine hippocratique, affermie et démontrée par les plus solides forces des raisonnements et expériences de Gabriel Fontaine, fils de Jacques (v. note [46], lettre 97), docteur ès arts et médecine, agrégé au Collège des médecins de Marseille ; ou la Médecine antihermétique, où les dogmes médicaux physiologiques, etc. ». Ce que Guy Patin appelait le « Nomenclateur » [esclave qui dans l’ancienne Rome était « chargé de nommer les citoyens à son maître à mesure des rencontres et surtout en période électorale » (Gaffiot)] de Johannes Antonides Vander Linden était la deuxième édition de ses deux livres de Scriptis medicis [des Écrits médicaux] (Amsterdam, 1651, v. note [3], lettre latine 26). Dans la troisième (Amsterdam, 1662, v. note [29], lettre 925), il a ajouté le livre de Gabriel Fontaine (page 189), ainsi que les deux autres que Patin citait ensuite (Benedetto Silvatico, page 95, et Lazare Rivière, page 438). |
30. |
V. notes [14] supra pour les « Institutions médicales » de Lazare Rivière, et [7], lettre 406, pour les quatre centuries de « Consultations et réponses médicales » de Benedetto Silvatico (Padoue, 1656). |
31. |
V. note [10], lettre 485, pour les Opera omnia [Œuvres complètes] de Jean Varanda (Lyon, 1658). |
32. |
V. note [29], lettre 490, pour les deux livres de Gerardus Johannes Vossius « sur la Philosophie et les sectes des philosophes » (La Haye, 1658). |
33. |
V. note [13], lettre 212, pour un recueil contenant des lettres échangées par Gerardus Johannes Vossius et Hugo Grotius, mais qui parut au siècle suivant (Amsterdam, 1715). |
34. |
Ce malade apparemment proche de l’agonie était le pape Alexandre vii (Fabio Chigi), élu en 1655 ; mais il ne mourut qu’en 1667. Dans l’ischurie (ou suppression d’urine, v. note [9], lettre 782), une incision périnéale de la vessie (au niveau du périnée, juste au-dessous du pubis) permettait l’écoulement de l’urine malgré une occlusion de l’urètre ; cette intervention de dérivation vésicale salvatrice était l’équivalent de la ponction sus-pubienne de la vessie qui se pratique aujourd’hui couramment quand il est impossible de monter une sonde dans l’urètre jusque dans la vessie (v. note [10], lettre 209). |
a. |
Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johannes Antonides Vander Linden, ms BIU Santé no 2007, fos 59 vo‑60 vo. |
s. |
Ms BIU Santé no 2007, fo 59 vo. Clarissimo viro D.D. Io. Ant. Vander Linden. Leidam. Duobus tuis responsurus, Vir Cl. primò dicam, me summo gaudio |
t. |
Ms BIU Santé no 2007, fo 60 ro. Semper dixit se plurima habere ad illius Scriptoris illustrationem, nec tamen Rem peragit nullam Sertorius inchoat o Festinationis et diligentiæ laudem obtinebis præ Mentello et Rhodio, Quod spectat ad Laz. Riverium, Profess. Monspeliensem, nil |
u. |
Ms BIU Santé no 2007, fo 60 vo. Tu v. quid censes de illo homine ? certè propiùs ad furem et |
v. |
Ms BIU Santé no 2007, fo 61 ro. Tandem Aprili mense Monspelij transijt regionem multorum Riverius, Aprilis ille mensis anni 1655. observatus fuit apud nos multis fuisse fatalis :
Sed pudet me tot ineptorum nebulorum, qui cùm sint immeritissimi, sunt etiam Vidistine unquam Itinerarium Benjamini Tudelensis, |
w. |
Ms BIU Santé no 2007, fo 61 vo. Lazarij Riverij Institutiones Medicæ, in quinque libros distinctæ. 4o Hîc mense proximo expectamus Varandeum, cis paucos dies Dicitur Hagæ Comitis sub prælo currere novum Opus D. Ger. Io. Vossij, Guidonem Patinum. Parisijs, die Veneris, 31. Augusti, natali olim meo, ab anno Christi, 1601. |