L. latine 205.  >
À Otto Sperling,
le 27 juillet 1662

[Ms BIU Santé no 2007, fo 111 vo | LAT | IMG]

Au très distingué M. Otto Sperling, docteur en médecine à Hambourg.

Très distingué Monsieur, [a][1]

J’ai reçu votre savante lettre. Vous m’y honorez moins que vous ne m’y accablez de copieuses louanges, moi que vous ne connaissez pas et qui ne suis connu de personne ou qui, par quelque mauvais coup du sort, le suis seulement pour ma réputation ordinaire de mentir. [1] Dieu veuille que je sois tel que vous m’y célébrez ; mais quel que je sois, je voudrais que vous croyiez que je vous suis entièrement dévoué, et que tel je veux vivre et mourir. Je suis français et même belge, [2] par la grâce de Dieu, [Ms BIU Santé no 2007, fo 112 ro | LAT | IMG] et mon esprit n’est ni frivole, ni arrogant ; j’aime fort la vraie franchise et la nation allemande, où je puis certes me targuer d’avoir eu jusqu’ici de nombreux amis, dont recenser les noms serait une tâche sans fin. Voici la réponse que vous m’avez demandée, signée par trois médecins et deux chirurgiens très aguerris. [2] La question a été agitée en tous sens, ainsi que méticuleusement discutée ; ce qui fait que je me persuade aisément que notre conclusion ne vous déplaira guère, vous qui êtes un homme de jugement aiguisé et éminent en son métier. Vous avez au Danemark, non loin de chez vous, [3][3][4] Thomas Bartholin, qui est un de mes anciens amis[5] et dans votre ville même, M. Johann Garmers, que je connais fort bien et considère comme un ami. [6] Je voudrais que vous leur transmettiez mon salut, si cela ne vous importune pas, ; et si vous me faites connaître que vous l’avez fait, je vous promets toute sorte de services. Vale, très distingué Monsieur, et aimez-moi.

De Paris, ce jeudi 27e de juillet 1662.

De tout cœur votre Guy Patin, natif de Beauvaisis, docteur en médecine de Paris et professeur royal.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a envoyée à Otto Sperling, ms BIU Santé no 2007, fos 111 vo‑112 ro.

1.

Il est hors de doute que Guy Patin a ici employé le verbe latin mentiri qui a le sens de mentir, de dissimuler ou déguiser la vérité. Cet aveu (ou cette feinte) de Guy Patin est troublant et impossible à interpréter sans avoir lu la lettre qu’Otto Sperling lui avait écrite.

2.

V. note [4], lettre latine 194, pour cette référence à l’ancienne géographie de l’Empire romain.

3.

Par la voie terrestre, en traversant le détroit du Grand Belt, la distance entre Hambourg (duché de Holstein) et Copenhague (île de Seeland) approche tout de même les 470 kilomètres.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 111 vo.

Cl. viro D. Othoni Sperlingio, Medicinæ Doctori, Hamburgum.

Honestissimam Eruditam tuam Epistolam accepi, Vir Cl. in qua me Tibi ignotum, et
fato quodam, vel potius fama dumtaxat mentiri solita, quodam nec notum, me
multis laudibus non tam ornas quàm oneras ; et utinam talis essem qualem
in ea me prædicas : sed qualiscumque sim, credas, mihi velim, me planè Tuum
esse, meq. talem velle vel et vivere et mori. Gallus sum, isq. Belga, cum Deo,

t.

Ms BIU Santé no 2007, fo 112 ro.

nec futilis, nec superbi ingenij : germani candoris, et Germanicæ nationis aman-
tissimus, in qua quidem gente profiteri possum me hactenus multos habuisse
amicos, quorum nomina recensere infiniti esset laboris, atque supervacaneum.
Quod à me postulasti responsum, ecce Tibi mitto, à trib. Medicis et duobus peritissimis
Chirurgicis subsignatum : res utrinque fuit agitata, necnon accuratè discussa ; unde fit ut
mihi facilè in animum inducam, conclusionem nostram Tibi, limati judicij viro, et egregio
artifici, minimè displicituram. Habetis in Dania vobis proxima, Th. Bartholinum,
veterem amicum meum ; et in Civitate vestra, D. Io. Garmers, mihi apprime notum, ac ut
puto, amicum : quib. nisi grave fuerit, salutem impertias velim : hoc enim si facias
ut intelligam, officiorum omne genus Tibi polliceor. Vale, Vir Cl. et me ama. Parisijs,
die Iovis, 27. Iulij, 1662. Tuus ex animo Guido Patin, Bell. Doctor M. P. et Pr. Regius.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Otto Sperling, le 27 juillet 1662

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(Consulté le 19/03/2024)

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