L. latine 270.  >
À Johann Wepfer,
le 6 décembre 1663

[Ms BIU Santé no 2007, fo 150 vo | LAT | IMG]

Au très distingué M. Johann Wepfer, docteur en médecine à Schaffhouse. [1]

Très distingué Monsieur, [a][2]

C’est un gentilhomme helvète qui m’a remis votre lettre et je vous en remercie tout particulièrement car le bon souvenir que vous gardez de moi m’a été très agréable et fait grand plaisir. Je me souviens fort bien de vous, et vous ai dans les yeux et dans l’esprit comme si vous étiez tout à fait présent. J’accepte la très grande affection que vous avez pour moi et ne refuserai aucune peine ni aucun effort pour me la conserver. Votre lettre me fait en effet connaître un cœur bien fidèle à notre attachement mutuel. Honorez donc de tout cœur et continuez d’aimer celui qui vous le rend bien. Nous avons reçu et vu ici l’ambassade de Suisse, [3] mais nous n’avons pas vu monsieur votre frère, que j’attendais pourtant ; [4] M. Glaser, le pharmacien, [5] dont le frère exerce la médecine à Bâle, [6] m’avait en effet laissé espérer que je le verrais. [1] J’avais préparé quantité de questions à lui poser, en particulier sur son livre de Apoplexia[2][7] dont il m’a jadis fait cadeau ; j’espérais en être instruit par une conversation privée, si j’avais eu le bonheur de le rencontrer pour pouvoir ici le serrer entre mes bras ; mais louange à Dieu, à qui il n’a pas plu que cela se fît. J’ai promis toute sorte de services au noble personnage qui m’a remis vos lettres, et rien ne lui manquera s’il a besoin de mon aide en quelque façon que ce soit ; je voudrais que vous teniez cela pour assuré, et le rapportiez à son père. Le printemps et l’été derniers j’ai publiquement enseigné au Collège royal devant un très grand nombre d’auditeurs, dont la plus grande partie étaient des médecins. Le prince de Danemark, [8] fils du roi, [9] et M. son très illustre ambassadeur [10] y sont aussi venus avec quantité d’autres nobles ; [11] à tel point que mon auditoire a presque atteint les 400 personnes ; Dieu en soit béni. Je salue le plus obligeamment qu’il m’est possible M. votre très savant frère, en souhaitant qu’il vive et se porte bien durant de nombreuses années, pour l’accroissement du savoir médical. S’il se trouve en cette ville quelque chose que vous désireriez et que je puisse envoyer, demandez-le et vous le recevrez. Je salue aussi M. Grimm, médecin natif de Soleure, [12][13] savant homme qui est mon ami, et les autres de même qualité qui vivent à Bâle. [3] Mais vous, très distingué Monsieur, vive, vale et aimez-moi.

De Paris, le 6e de décembre 1663.

De tout cœur votre Guy Patin, médecin de Paris et professeur royal.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johann Wepfer, ms BIU Santé no 2007, fo 150 vo.

1.

V. notes [1], lettre 1029, pour Christophe Glaser, apothicaire à Paris, et [40], lettre 925, pour son frère Johann Heinrich, médecin à Bâle.

V. note [2], lettre 760, pour la venue des 35 ambassadeurs des cantons suisses à Paris, ce qui donnait à Guy Patin une occasion de renouer les relations avec ses amis de là-bas.

2.

« sur l’Apoplexie » : v. note [3], lettre 616, pour les remarquables Observationes anatomicæ ex cadaveribus eorum quos sustulit apoplexia, cum exercitatione de eius loco affecto [Observations anatomiques tirées des cadavres de ceux que l’apoplexie a emportés, avec un essai sur le lieu qu’elle affecte] de Johann Jakob Wepfer (Schaffhouse, 1658).

Guy Patin manifestait ici de nouveau l’intérêt qu’il portait à cet ouvrage novateur que Wepfer lui avait envoyé en 1660, et qui avait dû ébranler nombre de ses préjugés, mais il n’en admirait pas moins l’auteur.

3.

V. note [1], lettre latine 158, pour Moritz Grimm, médecin natif de Soleure (v. note [1], lettre 1020), et pour sa thèse sur la syphilis (Bâle, 1660) où il disait grand bien de Guy Patin.

Il est surprenant que Patin n’ait nommé ici ni Johann Caspar i ni Hieronymus Bauhin parmi ses amis de Bâle.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 150 vo.

Clariss. viro D. Io. Vepfero, Medicinæ Doctori, Schaphusiam.

Epistolam tuam per nobilem Helvetium accepi, Vir Cl. pro qua singu-
lares ago Tibi gratias : fuit enim Tui de me recordatio gratissima atque
jucundissima : optimè Tui memini, habeo Te in oculis et in mente, et quasi
præsentissimum. Summum illum tuum in me amorem accipio, et sanè nihil
est laboris aut damni quod recusem, ut illum mihi perennes : ^ tuam enim per Epistolam,/ agnosco mutuis bene/ fidum pectus amoribus :/ [mact]e animo, et amare perge/ [seri]ò redamantem. Legationem
Helveticam
hîc habuimus et vidimus : sed Dominum Fratrem tuum non vidimus,
quem tamen expectabam, ejus enim videndi spem mihi fecebat D. Glaser, Pharma-
copolus, cujus frater Basilæ Medicinam facit : multa habebam parata quæ illi
proposuissem, præsertim ex ejus libro de Apoplexia, quo me olim donasti : et de
quib. edoceri sperabam privato colloquio, si tam feliciter mecum actum fuisset,
ut eum hîc ambabus ulnis amplecti potuissem : sed laus sit Deo, cui sic esse
non placuit. Omne genus Helveticofficiorum pollicitus sum Nobili viro qui tuas mihi
reddidit : nec illi deero si quoquomodo opera mea indigeat ; hoc habeas pro certo
velim, quod referes si placuerit ejus Parenti. Superiori vere ac æstate publicè
docui in Gymnasio regio, frequentissimo Auditorio, cujus partem potiorem
cum multis Medicis, etiam fecerunt ipse Princeps Daniæ, Regis filius, ut
et D. Legatus, Vir illustrissimus, et alij Nobiles quamplurimi ; adeo ut
fere 400. fuerit auditorum numerus : de quo sit benedictus Dominus. Eruditiss.
virum Dominum Fratrem tuum saluto quam. officiosissime, qui utinam vivat
et valeat in multos annos, in rei Medicæ incrementum. Si quid in hac Urbe
prostet quod cupiatis, et possim mittere, petite et accipietis : saluto quoque
virum eruditum et amicum, Dominum Grim, Medicum Solodurensem, et alios
amicos qui Basilæ vivunt. Tu v. Vir Cl. vive, vale, et me ama. Parisijs,
6. Dec. 1663.

Tuus ex animo Guido Patin, Med. Paris. et Prof. regius.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johann Wepfer, le 6 décembre 1663

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(Consulté le 24/04/2024)

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