L. latine 429.  >
À Johann Georg Volckamer,
le 27 mai 1667

[Ms BIU Santé no 2007, fo 215 vo | LAT | IMG]

Au très distingué M. Johann Georg Volckamer, docteur en médecine à Nuremberg. [a][1]

J’ai reçu par un marchand de Bâle le livre de Johann Theodor Schenck que vous m’avez fait envoyer, savoir le Catalogum Plantarum horti Medici Ienensis, in‑12[1][2][3] Voilà certes un plaisant opuscule et je vous en remercie, mais ce n’est pas ce que j’avais demandé ; c’était un autre petit livre, dont j’ai seulement vu quelques feuilles in‑4o, un recueil de certaines disputations sur les racines ou les plantes, qu’on m’a dit être de ce M. Schenck. [2] Il ne tient pas à moi que vous n’ayez pas encore l’Aristote de Guillaume Du Val : [3][4][5] M. Nicolas Picques [6] attend le porteur compétent, idoine et sûr qu’il emploie pour livrer des marchandises à Strasbourg, et qui mettra votre Aristote dans ses balles. J’en attends l’occasion, qui se présentera sans doute à nous après que nos troupes françaises seront parties et auront pénétré dans les Pays-Bas espagnols ; [7] elles suivront notre roi armé pour la guerre ; [8] elles vont fermer et interdire non seulement les routes, mais encore les frontières de tout le royaume pendant quelque temps. Dites-moi néanmoins, je vous prie, n’avez-vous pas reçu par M. Picques ces instruments chirurgicaux, deux rasoirs et trois lancettes, que je lui ai confiés voilà quatre mois, pour qu’il vous les fît parvenir ? [4][9] Notre roi manœuvre autour de Cambrai, [10] mais on ne sait encore si elle sera assiégée. Puisse une bienfaisante paix régner sur le monde entier ! Je ne puis véritablement retenir mes larmes pour toutes les calamités que la guerre engendre et qui punissent injustement tant de peuples. Dii meliora ! [5] Vale, très distingué Monsieur, et aimez celui qui vous le rend avec ardeur.

De Paris, ce vendredi 27e de mai 1667.

Vôtre de tout cœur, Guy Patin.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johann Georg Volckamer, ms BIU Santé no 2007, fo 215 vo.

1.

V. note [5], lettre latine 374, pour le « Catalogue des plantes du jardin médical d’Iéna » de Johann Theodor Schenck (Iéna, 1659). Fondé en 1586 et toujours cultivé, ce jardin est le deuxième plus ancien d’Allemagne, après celui de Leipzig (1580, v. note [1], lettre latine 283). Dans son Catalogue, Schenck y répertoriait plus de 1 300 espèces.

2.

Sans doute l’Historia plantarum generalis [Histoire générale des plantes] de Johann Theodor Schenck (Iéna, 1656, v. note [4], lettre latine 295), qui se présente sous la forme d’une thèse unique et que Guy Patin attendait alors depuis plus de deux ans.

3.

Aristotelis Opera omnia quæ extant, Græce et Latine, veterum ac recentiorum interpretum, ut Adriani Turnebi, Isaaci Casauboni, Iulij Pacij studio emendatissima. Cum Kyriaci Strozæ Patritii Florentini libris duobus Graecolatinis de Republica in supplementum Politicorum Aristotelis. Sed novissimæ huic Editioni omnium quæ hactenus prodierunt, ornatissimæ accessit brevis ac perpetuus in omnes Aristotelis libros Commentarius, sive Synopsis Analytica Doctrinæ Peripateticæ, non antehac visa ; in qua ut in expeditiore tabella, Aristotleis Philosophia omnis, prout ea suo ordine descripta est, perspicue breviterque indicatur, et pro rerum dignitate exponitur. Authore Guillelmo Du Val Pontesiano, Philosophiæ Græcæ et Latinæ in Parisiensi Academia Regio Professore, et Doctore Medico : qui et præter operosam illam Synopsin, adiecit Anthologiam Anatomicam ex scitis Hippocratis et Galeni, ad libros Aristotelis de historia, generatione et partibus animalium ; et præterea libros quatuordecim divinioris Philosophiæ seu Metaphysicorum, notis et argumentis auxit ac illustravit, quatuórque eorum postremos hactenus male collocatos, in legitimum ordinem restituit. Indices tres operum molem claudunt ac veluti obsignant. Primus, quasi Catalogus, nomina recenset Authorum etiam iuniorum, qui Philosophiam Aristotelis suis scriptis illustrarunt. Secundus, curas et commentarios singulorum distinguit. Tertius est Thesaurus rerum uberrimus.

[Toutes les œuvres connues d’Aristote, en grec et latin, parfaitement corrigées par les soins des interprètes anciens et modernes, comme Adrien Turnèbe, Isaac Casaubon, Giulio Pace. Avec les deux livres, grecs et latins, de Kyriacus Stroza, {a} patricien de Florence, sur la République en supplément des Politiques d’Aristote. Mais à cette édition, la plus récente et la plus riche de toutes celles qui ont paru, s’ajoute un Commentaire bref et continu sur tous les livres d’Aristote, ou Synopsis analytique de la doctrine péripatéticienne, qu’on n’a jamais vu précédemment ; dans lequel, comme dans un tableau simplifié, toute la philosophie d’Aristote, dans la mesure où elle est décrite suivant son ordre propre, est décrite clairement et brièvement, et exposée dans toute sa magnificence. Par Guillaume Du Val, natif de Pontoise, {b} professeur royal de philosophie grecque et latine en l’Université de Paris et docteur en médecine, qui, outre ce Synopsis soigneux, a ajouté une anthologie anatomique tirée des avis d’Hippocrate et de Galien sur les livres d’Aristote sur l’histoire naturelle, la reproduction et les parties des animaux ; il a en outre enrichi et éclairé de notes et de preuves les quatorze livres de la Philosophie divine ou des Métaphysiques, et a replacé dans leur ordre logique les quatre derniers d’entre eux qui ont jusqu’ici été mal rangés. Trois index ferment et comme scellent la masse des œuvres. Le premier, comme un catalogue, recense les noms des auteurs, même les plus jeunes, qui ont éclairé de leurs écrits la philosophie d’Aristote. Le second distingue les travaux et les commentaires de chacun d’eux. Le troisième est un très riche trésor des matières contenues]. {c}


  1. V. note [14] du Naudæana 3.

  2. V. note [10], lettre 73.

  3. Paris, Imprimerie royale, 1619, 2 volumes in‑fo, grec et latin (édition princeps que Guy Patin expédiait à Johann Georg Volckamer) ; rééditions en 1629, 1639 et 1654.

4.

L’italique est en français dans le manuscrit. Guy Patin avait annoncé l’envoi de ces instruments à Johann Georg Volckamer au début de sa lettre du 4 février 1667.

5.

« Puissent les dieux nous réserver des jours meilleurs ! » (citation abrégée de Virgile, v. note [5], lettre 33).

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 215 vo.

Clariss. viro D. Io. G. Volcamero, Med. Doct. Noribergam.

Accepi per mercatorem Basilensem, libellum à Te transmissum, Io.
Theod. Schenkij, nempe Catalogum Plantarum horti Medici Ienensis,
in 12. placet quidem libellus, et pro eo gratias ago : sed hoc non est quod
quærebam : sed alium quendam libellum, cujus dumtaxat vidi aliquot
folia in 4. quarundam Disput. de Stirpibus aut Plantis, quæ mihi
dicta sunt esse illius D. Schenckij. Quod spectat ad Aristotelem Gul. Du Vallij,
per me non stat quin habeas illum : Dominus Nic. Picques expectat commodum,
idoneum et tutum vectorem, quo utatur ad transmittendas merces
Argentinam, in quib. includetur ipse Aristitoles : sed hactenus expectavi talem
occasionem, quæ haud dubiè nobis continget, postquam in Belgium Hispanicum
transierint atque penetrarint copiæ nostræ Gallicæ, quæ armatum Regem
nostrum insequuntur ad bellum, et quæ non solùm vias, sed etiam regni
totius limites ad aliquod tempus, sepiunt atque obsident. Sed dic quæso,
accepistine per D. Picques, instrumenta illa Chirurgica, deux rasoirs,
et trois lancettes,
ante tres 4. menses illi tradita, ut ad Te pervenirent. Rex
noster movet arma circa Camerarum : sed an sit illud magna obsidione
cincturus, nondum scitur. O utinam toto mundo pax alma vigeret !
propter tot calamitates quas bellum invehit, unde tot gentes immeritò
plectuntur, sanè non possum abstinere à lacrymis. Dij meliora.
Vale, Vir Cl. et me ama Tui redamantissimum. Parisijs, die Ven.
27. Maij, 1667. Tuus ex animo,

Guido Patin.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johann Georg Volckamer, le 27 mai 1667

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(Consulté le 24/04/2024)

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