L. latine 433.  >
À Johann Daniel Horst,
le 29 juillet 1667

[Ms BIU Santé no 2007, fo 216 vo | LAT | IMG]

Au très distingué M. Johann Daniel Horst, docteur en médecine, à Francfort.

Très distingué Monsieur, [a][1]

J’ai reçu votre dernière de la propre main de M. Glaser, pharmacien natif de Bâle, [2] savant chimiste et excellent homme, ce qui est bien rare chez ce genre de personnage. [3][4] Je n’ai pas rencontré et n’ai pas même vu ce jeune et savant médecin à qui vous aviez confié vos lettres à me remettre : il a dû s’en aller aussitôt avec son Mentor, j’aurais pourtant bien aimé les voir tous deux. [1][5] Votre médecin aurait facilement vu ce qu’il désirait en cette ville, notamment la taille de la vessie pour extraire le calcul, [6] car François Colot [7] est fort mon ami et a souvent recours à moi. Il aurait visité les hôpitaux et aisément pu assister à nos consultations quotidiennes. [8] Gayan se porte excellemment et poursuit avec bonheur sa carrière de chirurgien. [9] Je n’ai encore rien reçu de Schönwetter [10] et n’ai eu aucune nouvelle de ses Quæstiones medico-legales de Zacchias ; [2][11] je vous demande encore et encore que vous le saluiez de ma part. L’auteur de notre Journal s’égare très souvent et se fait beaucoup d’ennemis ; [12][13][14] il juge même souvent à la légère et s’arroge sans raison le droit de censurer, même sans l’approbation des quirites, ni le suffrage du peuple. [3] J’apprends que la peste diminue dans votre pays et m’en réjouis. [15] Je salue votre fils. [16] Vale.

De Paris, ce vendredi 29e de juillet 1667.

Votre Guy Patin de tout cœur.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johann Daniel Horst, ms BIU Santé no 2007, fo 216 vo.

1.

Nul indice dans la Correspondance ne permet d’en savoir plus sur ce médecin, sans doute allemand, qui était brièvement passé à Paris durant son voyage en compagnie de son Mentor. Ce mot m’a semblé mieux adapté que héros (traduction littérale du substantif latin heros employé par Guy Patin) ; sous la bienveillante égide du grand Homère et du duc de Saint-Simon, qui l’aurait utilisé pour la première fois en français dans ses Mémoires (selon le Grand Robert), je me suis permis une exception à ma règle de traduction, car il ne figure ni ailleurs dans notre édition ni dans les dictionnaires du temps (Ménage, Furetière, Richelet).

Mentor « était un des plus fidèles amis d’Ulysse et celui à qui, en s’embarquant pour Troye, il avait confié le soin de sa maison, pour la conduire sous les ordres du généreux Laërte [v. note [4] du Traité de la Conservation de santé, chapitre iv] ; ce Mentor était un des amis d’Homère, qui le plaça dans son poème par reconnaissance, parce qu’étant abordé à Ithaque à son retour d’Espagne, et se trouvant fort incommodé d’une fluxion sur les yeux qui l’empêcha de continuer son voyage, il fut reçu chez ce Mentor, qui eut de lui tous les soins imaginables » (Trévoux, 1752). Ulysse avait remis l’éducation de son fils Télémaque aux bons soins de Mentor ; son « nom propre est devenu appellatif, et se dit de celui qui sert de conseil, de guide, et comme de gouverneur à quelqu’un » (Académie, 1762).

2.

V. notes :

3.

V. note [19], lettre 222, pour les quirites (citoyens, bourgeois).

V. note [6], lettre 814, pour le Journal des Sçavans, son fondateur et premier directeur, Denis de Sallo, et sa vive attaque contre l’Introduction à l’Histoire de la science des médailles de Charles Patin (Paris, 1665). La parution du Journal avait été interrompue en mars 1665. Dirigée par l’abbé Jean Gallois (1632-1707), sous la signature du « Sr G.P. » (Gallois, prêtre), sa publication hebdomadaire avait repris depuis janvier 1666 et ses acerbes critiques continuaient à faire grincer les dents à bien des gens.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 216 vo.

Cl. viro D. Io. Dan. Horstio, Med. Doctori, Francof.

Ultimam tuam accepi, Vir Cl. propria manu D. Glaseri, Basil.
Pharmacopœi, Chymistæ eruditi, et quod in ipso hominum genere rarissim[um]
est, viri optimi. Doctus ille juvenis Medicus cui tuas mihi reddendas
tradideras, mihi non adfuit, nec eum vidi : statim enim illi abeundum
fuit, cum suo heroe ; sed utinam utrumque vidissem. Quæ deside-
rabat Medicus videre in hac Urbe, facilè vidisset : præsertim
vesicæ sectionem ad eruendum calculum : est enim Franciscus Colot
mihi amicissimus, et opera mea sæpe indiget : Nosocomia fre-
quentasset, et quotidianis nostris Consultationibus interesse
facilè potuisset. Gayanus optimè valet, et in Anatomicis qu
quotidie pergit feliciter. A Schonwetter nihil adhuc accepi :
nec quidquam audivi de Zacchiæ quæst. Medicolegalibus :
eum tamen ut salutes meo nomine, etiam atque etiam rogo. Diarij nostri
scriptor sæpius hallucinatur, et multos sibi facit inimicos :
etiam sæpe temere judicat, et censuram sibi frustra arrogat, etiam
absque consensu Quiritium, et suffragio populi. Pestilentiam apud vos
imminutam audio, et gaudeo. Filium tuum saluto. Vale. Parisijs, die
Ven. 29. Iulij, 1667.

Tuus ex animo Guido Patin.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johann Daniel Horst, le 29 juillet 1667

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(Consulté le 19/04/2024)

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