L. latine 434.  >
À Sebastian Scheffer,
le 4 août 1667

[Ms BIU Santé no 2007, fo 217 ro | LAT | IMG]

Au très distingué M. Sebastian Scheffer, docteur en médecine, à Francfort.

Très distingué Monsieur, [a][1]

Depuis longtemps déjà, je suis dans l’attente et le désir de recevoir ce que M. Johann Theodor Schenck [2] vous a envoyé pour moi d’Iéna, il y a un an et plus. J’espère, vous l’aurez compris, que Sebastian Switzer [3] me remettra enfin cela. [1] Dieu fasse que mon vœu s’accomplisse ! S’il en est encore temps, faites mettre cette suscription à l’épître du traité de Humoribus de Caspar Hofmann, [4] qui est dédiée à mon fils aîné, Robert Patin : Roberto Patino Doctori Medico Parisiensi et Professore regio[2][5] car il détient le brevet royal qui fait de lui mon successeur dans la chaire et charge de professeur du roi. [3][6][7] L’épouse de Pierre Mocquillon [8] a bien reçu ses lettres. L’entreprise et les desseins de notre roi avancent bien en Flandre ; [9] Dieu fasse qu’ils demeurent sur le même pied jusqu’à la fin de cette guerre. [10] Si les Espagnols ne s’y prennent pas autrement et ne défendent pas plus rudement leurs villes, j’ai excellent espoir que d’ici un an, soit très bientôt, cette Flandre espagnole tout entière deviendra française ; [11] ce qui arrivera sans aucun doute si Dieu tout-puissant protège notre roi très-chrétien, Louis le xive, et son fils, le petit roi du Dauphiné, M. le Dauphin[4][12] contre les complots des ennemis et contre la mort. Je vous ai récemment écrit, le 17e de juin et le 15e de juillet, [5] sans avoir rien reçu de vous ; vous prendrez donc la plume quand vous voudrez pour répondre aux trois miennes. Vale, très distingué Monsieur, et aimez-moi.

De Paris, le 4e d’août 1667.

Votre G.P.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Sebastian Scheffer, ms BIU Santé no 2007, fo 217 ro.

1.

V. note [4], lettre latine 295, pour l’Historia plantarum generalis [Histoire générale des plantes] de Johann Theodor Schenck (Iéna, 1656), que Guy Patin attendait alors depuis plus de deux ans.

2.

« À Robert Patin, docteur en médecine de Paris et professeur royal ».

Guy Patin croyait à tort que Sebastian Scheffer avait inséré le traité « des Humeurs » dans sa toute récente édition des Opuscula medica de Caspar Hofmann (Francfort, 1667, en trois parties, v. note [14], lettre 150), mais il n’a jamais vu le jour. Hofmann l’avait dédié au fils aîné de Guy, Robert Patin, tout comme il avait déjà fait pour son Institutionum suarum medicarum Epitome [Abrégé de ses Institutions médicales] (Paris, 1648, v. note [26], lettre 150).

Patin taisait ici les sérieux ennuis que lui valait alors la singulière manière dont, à son insu (v. note [3], lettre latine 432), Scheffer et son libraire Thomas Matthias Götze lui avaient expédé les Opuscula d’Hofmann : le syndicat des imprimeurs parisiens engageait contre lui une procédure pour trafic illicite de livres. La trace s’en trouve dans les Archives de la Chambre syndicale de la librairie et imprimerie de Paris aux xviie et xviiie siècles (BnF, fonds français 21855, fo 128 vo) :

« Ce jourd’hui, 24e juillet 1667, nous, Denis Thierry et Frédéric Léonard, {a} adjoints de la Communauté des libraires et imprimeurs de Paris, nous sommes transportés au Collège royal pour y visiter un tonneau de livres venant d’Allemagne, marqué G.P.D., parti de la douane ce jourd’hui en vertu du billet signé de nous, Léonard, en date du 26e du courant, au nom du Sr Guy Patin, qui nous a dit ledit tonneau lui appartenir. Avons fait ouverture d’icelui et y ayant trouvé cinquante exemplaires du livre intitulé Hofmanni opuscula medica en trois volumes in‑4o, {b} nous avons saisi et arrêté lesdits livres, et iceux fait porter en la Chambre syndicale de notre Communauté, jusques à ce que par justice en ait été ordonné, attendu que lesdits livres, au nombre de cinquante, ne sont point livres de présent, comme nous l’a dit ledit sieur Patin, mais que c’est pour négocier qu’il les a fait venir, comme il a déjà fait plusieurs fois ci-devant. » {c}


  1. V. notes [17], lettre 411, et [2] des Déboires de Carolus. La première partie de cette annexe explique pourquoi le syndic des libraires parisiens surveillaient attentivement Patin et son fils Charles.

  2. Patin dut tomber de haut car, dans sa lettre du 14 avril précédent (v. sa note [5]), il avait demandé à Scheffer de ne lui envoyer que 2 exemplaires de la première partie (« Médicaments officinaux ») et 12 des traités (deuxième et troisième parties).

  3. Signé « Thierry, adjoint », et « Léonard, adjoint ».

Dans sa lettre du16 février 1669 (v. sa note [6]), Patin a informé Scheffer de l’arrangement qui finit par conclure l’affaire : confiscation, au profit des libraires, de la moitié des 50 exemplaires.

3.

V. note [2], lettre 919, pour la survivance (promesse de succession) dont Robert Patin jouissait pour la chaire royale de son père (qui continuait à en assurer la charge et à en recevoir les émoluments), solennellement proclamée le 11 août 1667.

4.

L’italique est en français dans le manuscrit.

V. note [9], lettre 38, pour ce titre de « roi du Dauphiné » qu’on donnait au premier Fils de France, plus communément dénommé le dauphin, héritier présomptif de la Couronne.

5.

Lettres latines 430 et 432.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 217 ro.

Cl. viro D. Seb. Scheffero, Med. Doctori, Francof.

Iampridem expecto, ac et expeto, Vir Cl. tandem accipere ea quæ pro me Tibi
ante annum et suprà, transmisit Ienâ D. Io. Theod. Schelkius, quæ
videris sperare ut accipiam tandem per Seb. Switzerum : quod ut faciat
faxit Deus. Libro de humoribus Casp. Hofmanni, filio meo Rob. Patin,
majori natu dicato, si adhuc tempus sit, appone in titulo, Rob. P. Doctori
Med. Paris. et Prof. regio
 : habet enim in manibus diploma regium, quo mihi
succedat in cathedra et professione regia. Uxor P. Moquillon suas
accepit. Regis nostri conatus et consilia bellè procedunt in Flandria :
utinam eodem pede pergant usque ad finem bello impositum : sed nisi
Hispani aliter agant, et urbes suas fortiùs defendant, spes optima me
tenet, totum istud Belgium Hispanicum, cis unum alterum annum,
i. brevi futurum Gallicanum : quod haud dubiè continget, si Deus Opt.
Max. Regem nostrum Christianissimum Lud. 14. ejúsq. filium,
Delphinatium regulum, Monsieur le Dauphin, ab hostium insidijs, et à
morte vindicaverit. Antehac ad Te scripsi, nempe 17. Iunij, et xv. Iulij,
pro quib. nullum accepi responsum : pro trib. ideo scribes quum volueris.
Vale, Vir Cl. et me ama. Parisijs, 4. Aug. 1667. Tuus G.P.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Sebastian Scheffer, le 4 août 1667

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(Consulté le 23/04/2024)

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