L. latine 451.  >
À Sebastian Scheffer,
le 7 juin 1668

[Ms BIU Santé no 2007, fo 222 vo | LAT | IMG]

Au même. [a]

Très distingué Monsieur, [1]

Je suis inquiet de vous, de votre santé et de l’état de vos affaires, car je n’ai depuis longtemps reçu aucune lettre de vous. Vous ayant précédemment écrit les 3e et 16e de novembre, le 14e de décembre et le 24e de février, je doute légitimement que vous ayez reçu toutes les miennes. [1] Écrivez-moi donc pour que je le sache et entende comment vous vous portez, ainsi que M. Lotich, [2] les deux Horst [3][4] et vos excellents imprimeurs, MM. Beyer, [5] Schönwetter [6] et Götze, [7] que je salue tous de tout cœur et fort obligeamment. On dit que la négociation de paix avec les Espagnols est enfin conclue, sans connaître encore à quelles conditions. [8] Dieu fasse que tout cela réussisse pour le bien public, je ne dis pas de toute l’Europe, mais au moins de votre Allemagne et de notre France, qui a si grand besoin de cette tranquillité afin de reprendre son souffle pendant quelque temps, se refaire et se rétablir après tant d’agitations et de souffrances. À Lyon, les duo tractatus, physiologicus et pathologicus, de Caspar Hofmann [9] sont récemment sortis de l’officine de M. Anisson, [10] et ils ne sont en rien indignes d’un si grand écrivain. Comme je vous l’ai précédemment écrit, je vous enverrai quand vous voudrez les manuscrits de cet éminent auteur in Gal. libros Methodi et de sanitate tuenda[11] à l’absolue condition qu’ils soient imprimés dans votre pays. Écrivez-moi aussi, je vous prie, ce que pensent vos imprimeurs de procurer pour la première fois une édition des œuvres complètes de votre ancien compatriote, le très remarquable Thomas Éraste. [2][12] Je fais très grand cas de lui parmi tous les médecins modernes, avec notre Fernel ; [13] jamais aucune misère ni usure des temps, aucune calomnie des malveillants ni jouissance à contredire, ne détruiront leur gloire et ne leur porteront ombrage.

[Ms BIU Santé no 2007, fo 223 ro | LAT | IMG] Je vous ai déjà instamment averti de ne plus m’expédier de livres depuis votre pays, en raison de la malhonnêteté et de l’injustice de ceux qui se donnent ici le nom de libraires : [14] ce sont les pires des vauriens et les plus voleurs des rapineurs ; [15] ils jettent leurs mains sur tous les livres qu’on expédie à Paris depuis les contrées voisines. Je sais que certains des ouvrages que vous et M. Schenck [16] m’avez envoyés sont depuis longtemps arrêtés en chemin et ce sont eux qui les retiennent. [3][17] Faites en sorte, s’il vous plaît, de tenir les autres en lieu sûr et qu’ils n’aillent pas se perdre ; je prendrai plus tard soin de me les faire délivrer en toute sûreté, ce que je ferai dès que la paix sera effective ou, du moins, espère faire après que les troupes armées que notre roi [18] semblait avoir destinées à reprendre la guerre de Flandre [19] se seront dispersées. Si, d’où que ce soit, vous sont parvenus d’autres livres à m’envoyer, conservez-les chez vous tant que vous ne m’en aurez pas prévenu et que je ne vous aurai pas répondu à ce sujet. Si des marchands de Francfort, comme M. Öchs [20] ou Sebastian Switzer, [21] viennent ici, vous m’écrirez, si vous voulez bien, par leur intermédiaire. Je salue tous nos amis. Vale, très distingué Monsieur.

De Paris, le 7e de juin 1668.

Vôtre de tout cœur et jusqu’au tombeau, Guy Patin.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Sebastian Scheffer (« au même » que le précédent brouillon, daté du 24 février), ms BIU Santé no 2007, fos 222 vo‑223 ro.

1.

La dernière de Sebastian Scheffer dont Guy Patin avait accusé réception datait du 18 août 1667 ; Patin lui avait répondu par sa lettre latine 443, puis de nouveau écrit ses billets 444 et 445, et sa lettre 449.

2.

V. notes :

3.

V. notes [2], lettre latine 461, pour le procès entre Guy Patin et le syndicat des imprimeurs parisiens, et [1], lettre latine 444, pour son tonneau rempli de livres retenu à la douane.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 222 vo.

Eidem. De Te, Vir Cl. tuáq.a valetudine, rerúmq. tuarum statù anxius sum,
quia jampridem nihil literarum à Te accepi : antehac ad Te scripsi, nempe 3. Nov. 16.
Nov. 14. Dec. et 24. Febr. an eas omnes acceperis jure dubito : scribe igitur ut hoc sciam,
et intelligam quî valeas, ut et D. Lotichius, uterq. Horstius, et optimi viri Typographi
vestri, Beyerus, Schonwetter et Gotzius, quos omnes ex animo et officiosè saluto. Tandem
dicitur negotium Pacis confectum cum Hispanis, sed quib. conditionibus nondum constat :
utinam totum hoc succedat in publicum bonum, non dico totius Europæ, sed saltem
vestræ Germaniæ nostræq. Galliæ, quæ potissimum ista quiete indiget, ut aliquan-
tisper respiret, reficiatur atque refocilletur post tot motiones atque labores.
Lugduni Celtarum nuper prodierunt ex officina D. Anisson, duo Tractatus, nempe
Physiol et Pathol. C. Hofmanni, tanto scriptore neutiquam indigni ; quæ mihi
supersunt tanti viri MS. in Gal. libros Methodi, et de sanitate tuenda, mittam
quum volueris, ut antehac ad Te scripsi, ea potissimum lege ut apud vos typis man-
dentur. Sed scribe etiam, quæso, quid sentiant vestri Typographi de nova Editione
omnium Operum præstantissimi viri, popularis vestri, Thomæ Erasti, quem inter Medicos
omnes recentiores magnifacio, cum Fernelio nostro, cujus quorum gloriam nulla temporum invidia, nulla ætas,
nulla malevolorum calumnia aut contradicendi libido numquam delebit, numquam obscævabit.

t.

Ms BIU Santé no 2007, fo 223 ro.

Antehac ex professo Te monui, ne quid ad me mitteretur librorum è vestra regi-
one, propter iniquitatem et improbitatem nostrorum hominum qui se librarios
appellant ; sunt isti nebulones pessimi, et rapacissimi prædones, qui
manus inijciunt in omnes libros qui ex vicinis provincijs Parisios devehuntur.
Scio quosdam mihi destinatos et à Te et à D. Schenkio, jampridem hærere
per viam, et illic detineri : fac sodes ut in tuto loco servetur, nec pereant,
dabo posthac operam ut ad nos tutò devenhantur : quod faciam nunc confecta
pace, aut saltem me effecturum spero, postquam abierunt turmæ militares,
quas bello Flandrico Rex noster videbatur desigtinasse. Si qui alij
libri intervenerint ad me mittendi, ex quovis loco, eos si placet apud Te servabis,
quousque de ijs à Te monitus fuerim, et pro responso ad Te scripserim. ^ Amicos nostros
omnes saluto ; vale, Vir Cl. et me ama. Parisijs, 7. Iunij, 1668. Tuus ex animo,
et usque ad aras Guido Patin. Si qui ex Urbe vestra mercatores veniant ad
nos, ut D. Ochs vel Seb. Switzer, ad me per eos scribes si volueris ; quod ut facias
Te iterum atque iterum rogo. ^ Amicos etc.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Sebastian Scheffer, le 7 juin 1668

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=1483

(Consulté le 25/04/2024)

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