L. latine 457.  >
À Gerardus Leonardus Blasius,
le 9 octobre 1668

[Ms BIU Santé no 2007, fo 225 ro | LAT | IMG]

Au très distingué M. Gerardus Blasius, à Amsterdam.

Très distingué Monsieur, [a][1]

Celui que vous appelez votre Géant, [1][2] qui est devenu le mien (car il me sera désormais parfaitement recommandé, tant pour son propre mérite que pour le vôtre), m’a remis ces dix thèses médicales que vous m’avez destinées. [3] Je vous en remercie aussi fort qu’il m’est possible et vous promets solennellement, ainsi qu’à leur porteur, toute sorte de services. Si vous trouvez quelqu’un de chez vous venant à Paris, je vous prie de m’écrire par son intermédiaire et m’assurer de votre bonne santé, que je désire et vous souhaite durablement solide et fidèle. Je soigne ici l’ambassadeur de Danemark, M. von Gabel, [2][4][5] avec qui je m’entretiens parfois de Thomas Bartholin. [6] Il le loue comme un personnage éminent et très habile anatomiste ; je l’ai moi aussi loué, comme honnête homme et mon ancien ami, doué d’une grande expérience dans les arts opératoires, avec le souhait que les dieux le conservent pendant de nombreuses années. Mais dites-moi, s’il vous plaît, si un autre de mes amis, M. Plempius, professeur à Louvain, [7] est en vie et se porte bien, car je n’ai pu avoir aucune nouvelle de lui depuis deux ans, en raison des furieux égarements de la guerre en Flandre. [8] J’ai ici un livre à vous envoyer, qui a enfin été publié par mes soins à Lyon, c’est l’Apologia pro Galeno de Caspar Hofmann ; [3][9][10] il s’y trouve quantité d’excellentes choses à prendre, examinées avec soin et en profondeur, surtout en pathologie. Je ne sais pas encore par qui il m’appartiendra de vous le faire parvenir, mais je l’enverrai, pourvu que se présente un porteur idoine. Nous n’avons ici rien de nouveau qui soit digne d’être rapporté, nos libraires qui, pour leur particulière paresse, sont de misérables vauriens et presque mendiants, n’osant prendre aucun risque ni entreprendre quoi que ce soit. [11] Vale, très distingué Monsieur, et continuez de m’aimer comme vous faites, sans le mériter.

De Paris, le 9e d’octobre 1668.

Vôtre et sien, [4] G.P.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Gerardus Leonardus Blasius, ms BIU Santé no 2007, fo 225 ro.

1.

Je n’ai pas interprété Gigans comme le nom du Hollandais qui apportait à Guy Patin les thèses d’Amsterdam que Gerardus Leonardus Blasius lui adressait, mais comme le témoin de son allure, qui devait sortir de l’ordinaire.

Dans la mythologie, les Géants étaient les « enfants du Ciel et de la Terre qui firent la guerre aux dieux. D’une taille monstrueuse et d’une force proportionnée, ils avaient le regard farouche et effrayant, de longs cheveux, une grande barbe, des jambes et des pieds de serpent, et quelques-uns cent bras et cinquante têtes » (Fr. Noël).

2.

À Saint-Germain, le 15 avril 1668, Louis xiv avait accordé sa première audience à Frederik Gabel ou Friedrich von Gabel (Brême 1645-Copenhague 1708), chambellan du roi Frédéric iii de Danemark et son envoyé extraordinaire. Il prit congé du roi le 4 octobre 1670 (Levantal).

3.

V. note [1], lettre 929, pour les Apologiæ pro Galeno libri tres… [Trois livres d’Apologie pour Galien…] ou Chrestomathies de Caspar Hofmann (Lyon, 1668), édités par Guy Patin.

4.

Ce « sien », suus, devait être à l’intention de Vopiscus Fortunatus Plempius.

La lettre que Guy Patin lui avait écrite le 28 mars 1667 a été la dernière de leur correspondance à figurer dans notre édition.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 225 ro.

Clarisimo viro D. Gerardo Blasio, Amstelodamum.

Per Gigantem tuum, imò et meum, Vir Cl. (erit enim mihi et tuo et proprio nomine in posterum
commendatissimus) accepi Theses illas Medicas decem quas mihi destinasti : pro quib.
singulis gratias ago Tibi quam possum maximas : earum latori et Tibi omne genus offi-
ciorum sancte polliceor. Si quem offendas ex tuis qui veniat Parisios, rogo Te ut ad me per eum scribas, méq. certum facias de tua valetudine, quam Tibi firmam et
constantem voveo et ac opto diuturnam. Hîc facio medicinam Legato Danico, D. Gabeo,
qui aliquando mecum egit de Th. Bartolino, quem laudat ut virum eximium, et in Anatomicis peritissimum : ego quoq.
laudavi ut virum bonum, et veterem amicum, ac in Artis operibus exercitatissimum : quem utinam Dij servent in multos
annos. Sed dic quæso, de altero amico, D. Plempio, Lovanij Professore, an vivat
et valeat : de eo enim ante biennium nihil audire potui, propter insanos bellumi Flandricumi furores.
Hîc habeo librum ad Te mittendum, curis meis tandem editum, Lugduni Celtarum,
nempe Casp. Hofmanni Apologiam pro Galeno : in quo multa deprehendes optima,
accuratè et ad unguem examinata, præsertim in Pathologicis : per quem sim eum
ad Te missurus nondum scio, sed mittam, modò mihi ocurrat vector idoneus. Nihil
hîc habemus novi effatu dignum, nec quidquam audent tentare aut vel aggredi nostri librarij,
qui propria ignavia sunt miseri nebulones, ac prope mendici. Vale, Vir Cl. et me
quod facis amare perge, quamvis immerentem. Parisijs, 9. Oct. 1668. Tuus et suus G.P.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Gerardus Leonardus Blasius, le 9 octobre 1668

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(Consulté le 29/03/2024)

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