À Charles Spon, le 30 janvier 1654

Note [4]

Olaüs (Olof) Rudbeck (1630-1702) Fils de l’évêque d’Arosia {a} et avait eu pour parrain le roi Gustave-Adolphe qui se trouvait dans cette ville au moment de sa naissance. Sous la protection de la reine Christine de Suède, fille de Gustave-Adolphe, Rudbeck avait pu fréquenter les principales universités du Nord (1652-1654). Il revendiquait la découverte des vaisseaux lymphatiques et chylifères abdominaux. {b}{e} Revenu à Uppsala, il y fonda un jardin des plantes en 1657 et occupa une chaire de l’Université jusqu’à sa mort.

Rudbeck est à tort considéré comme un pionnier dans la découverte des voies du chyle : il donnait aux vaisseaux lymphatiques le nom de conduits aqueux hépatiques, supposant (faussement) qu’ils naissaient du foie d’où, selon lui, ils tiraient la liqueur qui les emplit pour la porter en partie dans le pancréas et en partie dans le canal thoracique. De ces faits (erronés) il conclut (justement, mais un peu tard) que le foie n’est pas le véritable organe de la sanguification. Épaulé par son élève Martin Bogdan, {c} Thomas Bartholin contesta à Rudbeck la primeur de cette déduction.

En parlant du livre de Rudbeck « sur le nouveau conduit séreux du foie et les vaisseaux séreux des glandes », Guy Patin déformait le titre du troisième ouvrage imprimé sur l’âpre dispute de priorité qui s’était allumée entre lui et Bartholin :

  1. Nova Exercitatio anatomica, exhibens Ductus hepaticos aquosos, et Vasa glandularum serosa, nunc primum inventa, æneisque figuris delineata, ab Olao Rudbeck Sueco. Cui accessere aliæ ejusdem observationes anatomicæ. Anno m dc liii,

    [Nouvel essai anatomique montrant les Canaux aqueux hépatiques et les vaisseaux séreux des glandes {d} que le Suédois Olaüs Rudbeck a tout récemment découverts, représentés par des gravures. Il y a ajouté ses autres observations anatomiques effectuées en l’an 1653] ; {e}

  2. Insidiæ structæ Cl. V. Thomæ Bartholini Vasis lymphaticis ab Olao Rudbekio Sueco in suis Ductibus hepaticis, et Vasis glandularum serosis Arosiæ editis, detectæ a Martino Bogdano Drisna Marchido,

    [Martin Bogdan, marquis de Drisna, dévoile le Piège que, dans ses Canaux aqueux hépatiques et vaisseaux séreux des glandes, publiés à Arosia, le Suédois Olaüs Rudbeck a tendu aux Vaisseaux lymphatiques du très distingué M. Thomas Bartholin] ; {f}

  3. Insidiæ Structæ Olai Rudbeckii Sueci Ductibus hepaticis aquosis et Vasis glandularum serosis. Arosiæ editis a Th. Bartholino Medico Regio Professore et Anatomico in Academia Hafniensi.

    [Piège que Thomas Bartholin, professeur de médecine et d’anatomie en l’Université de Copenhague, a tendu aux Conduits aqueux hépatiques et aux Vaisseaux séreux des glandes que le Suédois Olaüs Rudbeck à publiés à Arosia]. {g}


    1. Arosia est le nom latin de Västerås capitale du Västmanland, en Suède.

    2. V. note [26], lettre 152, pour la lymphe, le chyle, leurs conduits et les approximations du vocabulaire que les anatomistes utilisaient pour les décrire.

    3. V. notule {c}, note [28], lettre 477.

    4. Noms que Rudbeck donnait respectivement aux vaisseaux chylifères et lymphatiques (dans la nomenclature moderne) ; les « glandes » étaient les nœuds lymphatiques (lymphonœuds ou ganglions).

    5. Arosia, Eucharius Lauringerus, 1653, in‑4o non paginé de six feuilles (48 pages).

      Les « autres observations » de Rudbeck, au nombre de 17, concernent l’anatomie du chien et du chat et sont de maigre importance.

    6. Francfort, Petrus Hauboldus, sans date [1653 ou 1654], in‑4o de 44 pages non numérotées.

    7. Leyde, Adrianus Wingaerden, 1654, in‑8o de 164 pages. C’est l’amère et virulente réponse de Rudbeck, ligne à ligne, au précédent ouvrage.

Fort intéressé par les débats sur le chyle, j’ai lu avec attention quelques pages de sa Nova Exercitatio anatomica.

Outre les deux ouvrages cités ci-dessus et les quelques amers échanges qui les ont encore suivis, Rudbeck a laissé de nombreux traités d’anatomie et de botanique, mais aussi d’astronomie et de poésie (J. in Panckoucke). Poussé par son érudition imaginative et patriotique, il a publié un curieux ouvrage intitulé :

Atlantica sive Manheim Vera Japheti posterorum sedes ac patria, ex qua non tantum Monarchæ et Reges ad totum fere orbem reliquum regendum ac domandum, Stirpesque suas in eo condendas, sed etiam Scythæ, Barbari, Asæ, Gigantes, Gothi, Phryges, Trojani, Amazones, Thraces, Libyes, Mauri, Tusci, Galli, Cimbri, Cimmerii, Saxones, Germani, Suevi, Longobardi, Vandali, Heruli, Gepidæ, Teutones, Angli, Pictones, Dani, Sicambri, aliique virtute clari et celebres populi olim exierunt. Editio secunda multis in locis emendata et aucta.

[L’Atlantide ou Manheim, {a} véritable siège et patrie des descendants de Japhet, {b} d’où sont issus non seulement les monarques et les rois, pour gouverner et dominer presque tout le reste du monde, ainsi que les dynasties qu’ils y ont fondées, mais aussi les Scythes, les Barbaresques, les Ases, {c} les Géants, les Goths, les Phrygiens, les Troyens, les Amzones, {d} les Thraces, les Libyens, les Maures, les Étrusques, les Gaulois, les Cimbres, les Cimmériens, les Saxons, les Germains, les Souabes, les Lombards, les Vandales, les Hérules, les Gépides, {e} les Teutons, les Anglais, les Pictes, {f} les Danois, les Sicambres {g} et les autres peuples qui ont brillé par leur vertu. Seconde édition augmenté et corrigée en maints endroits]. {h}


  1. v. note [49] du Borboniana 1 manuscrit pour l’Atlantide de Platon. Rudbeck donnait à sa Suède natale le nom de Manheim, pour signifier qu’elle était le foyer de l’humanité.

  2. Fils de Noé, v. notue {e}, note [13] du Traité de la Conservation de santé, chapitre iii.

  3. Divinités nordiques.

  4. Guerrières mythiques de Scythie.

  5. Les Hérules peuplaient les pays baltes, et les Gépides, les Carpates.

  6. Écossais.

  7. Néerlandais et riverains du Rhin allemand ; v. note [3], lettre latine 475, pour l’avis de Rudbeck sur les Hyperboréens, qu’il a omis dans sa liste.

  8. Uppsala, Henricus Curius, 1679, in‑4o de 891 pages, suédois et latin juxtalinéaires.

    Une gravure de ce temps représente Rudbeck montrant aux célébrités de L’Antiquité, à la manière d’un anatomiste, sa rêverie géographique qui élevait la Suède au rang de mère et centre de l’Europe et de ses confins.



Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 30 janvier 1654, note 4.

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(Consulté le 20/04/2024)

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