L. 191.  >
À André Falconet,
le 6 août 1649

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 6 août 1649

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0191

(Consulté le 29/03/2024)

 

Monsieur, [a][1]

Je n’eus jamais tant d’affaires qu’à présent, mais je serais bien ingrat si je ne les quittais toutes pour vous remercier du beau présent que vous m’avez envoyé, et que j’ai reçu aujourd’hui avant midi des mains de M. Marchais l’aîné [2] qui est mon voisin et quelquefois mon malade, chez qui j’allais même voir son fils aîné. [3] Il a été ravi de voir ma joie et m’a témoigné qu’il eût voulu lui-même y contribuer. Je lui ai fait entendre que je ne pouvais autrement me retenir pour trois raisons : à cause de celui qui me faisait un si beau présent, qui était M. Falconet, excellent médecin de Lyon ; à cause de M. Gassendi [4] qui est un des savants hommes du monde ; et à cause du bon Épicure [5] que Sénèque [6] a jugé digne de la réputation des plus grands personnages qui aient jamais été. M. et Mme Marchais me disaient qu’ils ne voulaient pas que le port de votre ballot me coûtât rien, comme je m’offrais de le payer ; mais j’ai trouvé dans le paquet que vous m’aviez prévenu, [1] dont je vous remercie, comme de tout le reste et de tout le bien que vous me voulez. Je tâcherai de ne laisser passer aucune occasion de vous témoigner ma reconnaissance. Je vous envoie une lettre toute nouvelle du P. Caussin, [7] jésuite, duquel on commence ici un beau traité en deux volumes in‑fo sous ce titre, De Domo et Regno Dei[2] Mais d’autant que nos libraires sont fort lents à bien faire, je vous promets que si devant la fin de cet ouvrage il se présente ici quelque chose qui soit digne de vous, je vous l’enverrai aussitôt. Et en attendant, agréez que je me dise votre débiteur, comme j’avoue que par mon impuissance je le serai toute ma vie. J’ai fait délivrer à la fille et héritière du bon C. Hofmann, [8] il y a plus de trois mois, dont même j’ai la quittance, la somme de 150 livres pour un manuscrit pathologique qu’elle m’envoie et qui est en chemin. Il ne tiendra pas à moi qu’il ne soit mis sous la presse aussitôt que je l’aurai reçu, mais plutôt à nos libraires qui ne font guère ici. Je ne l’ai acheté qu’afin de le donner au public et d’en faire un bon livre cum physiologicis[3] que j’ai céans. Vous ne sauriez manquer de croire que vous en aurez aussi des premiers. Les Antiquités de la ville de Marseille [9] viendront quand il plaira à Dieu, [4] comme aussi la paix de Provence [10] que je souhaite fort pour tant de gens qui sont ruinés par la folie de nos ministres et par la rage du comte d’Alais. [11] Je suis bien aise que l’indice du livre de M. Riolan [12] vous plaise et à vous dire vrai, aussi l’ai-je fait avec grand contentement, et plusieurs de deçà m’ont témoigné le même sentiment que vous en avez, et entre autres l’auteur même, qui en a été ravi. Je vous prie aussi de corriger en la page 48 de cet index, au 3e article de Simon Pietrus[13] qui a été un autre Hippocrate et qui a passé Galien [14] de bien loin, et d’y mettre 593 au lieu de 893. [5] M. Riolan est fort mordant naturellement, ne vous étonnez point s’il traite mal et rudement ceux qui par ci-devant ne l’ont pas épargné, sauf à eux de se défendre. M. Walæus, [15] médecin de Leyde, [16] est mort, il ne lui répondra pas, M. Riolan en est tout dolent. [6][17] Tous les chapitres de M. Riolan sont assez bien étoffés et quiconque le voudra lire n’y perdra guère son temps, surtout en l’histoire des parties. [7] Optimo maximo viro P. Gassendo Nestoreos annos exopto[8][18]

On a sauvé depuis peu du gibet un homme à Montargis, [19] comme l’imprimeur à Paris. [9][20] Votre épileptique [21] habebat aliquid idiopathicum in cerebro [10][22] qui lui a causé la mort ; je pense que c’était quelque abcès. [23] Multa tegit sacro involucro Natura[11] ce dit Augurellus [24] en parlant du mystère de sa Chrysopée, et non pas Lucrèce [25] comme tant de gens le citent. Je vous prie de me faire la faveur de m’envoyer six lignes écrites de votre main sur un morceau de papier, qui contienne une inscription pour mettre au-devant du premier tome de votre beau présent, [1] où se lisent votre nom et le mien, le mois et l’an, afin que mes enfants se souviennent à l’avenir de l’honnête homme à la bonté et libéralité duquel j’ai l’obligeance d’un si beau et si agréable présent. Votre inscription me fera encore aimer le livre davantage, si cela se peut faire que je l’aime plus que je ne fais. Et en l’attendant, je vous baise les mains de tout mon cœur avec protestation que je serai toute ma vie votre, etc.

De Paris, ce 6e d’août 1649.

On parle ici du retour du roi, [26] mais il n’y a encore rien de certain, saltem non credo : [12] les courtisans et les partisans nous menacent encore sourdement ; mais si cela arrive, nous nous défendrons mieux que jamais et empêcherons une autre fois que l’on ne nous trompe. Nous avons encore M. de Beaufort, [27] que l’on appelle ici le roi des frondeurs, la race desquelles n’est pas encore morte.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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