L. 643.  >
À Claude II Belin,
le 12 octobre 1660

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Claude II Belin, le 12 octobre 1660

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0643

(Consulté le 28/03/2024)

 

De Paris, ce mardi 12e d’octobre 1660.

Monsieur, [a][1]

Je vous remercie de la vôtre et suis bien aise qu’ayez reçu la Vie de Galien faite par le P. Labbe. [2] C’est un bon homme tant qu’un jésuite le peut être. Totus est in libris[1] je lui en ai prêté deux cents en ma vie qui n’étaient pas en leur bibliothèque. [3][4] Il est tout bon israélite, [5] non inveni tantam fidem in Israel[2][6] Virgile, [7] qui était un grand platonicien, [8] admittebat animam mundi quæ regebat omnia :

Spiritus intus alit, totamque infusa per artus
Mens agitat molem et magno se corpore miscet
[3]

Depuis que les platoniciens ont perdu leur crédit, les financiers ont cru que l’âme du monde était de l’argent, qui remue tout et parfait tout. Les jésuites [9] sont venus depuis, inter quos pragmatici callidiores agnoverunt spiritum quemdam Loyoloticum, qui sese per omnia inserit atque insinuat[4] En l’an 1605, quand Barclay [10] composa son Euphormion, cet esprit avait passé la mer et remuait l’Angleterre, indeque exorta est Conspiratio sulphurea. Tunc ubique regnabat Acignius[5][11] mais trois de ses suppôts y furent pendus, Greban, Oldcorne et Garnet, [6][12][13][14] qui était un méchant garnement. Ensuite, le P. Cotton [15] lui fit avoir du crédit en France, [7] qui n’y a traîné que d’une aile jusqu’à la minorité de Louis xiii ; [8] et même, ils ne firent pas si bien leurs affaires qu’ils pensaient sous Marie de Médicis, [16] sinon au mauvais traitement qu’ils firent au pauvre P. Barnes, [17] bénédictin[18] qu’ils firent étouffer en Flandres, [19] où Dieu permit depuis que la même dame y mourût, dans un cabaret, l’an 1642, non sans divers et plusieurs regrets. [9] Après la mort de Louis xiii, ils se sont un peu fait valoir davantage par le moyen du pape (au moulin duquel ils font venir de l’eau) et de la bulle [20] qu’ils ont obtenue contre les jansénistes. [10][21] Le Mazarin ne les aime point, néanmoins ils ne laissent pas de gagner quelque chose quelquefois, quoniam habent Dominum cancellarium faventem[11][22] Ces pères passefins sont fort bons ménagers, ils font profit de tout. Gardez< -vous > bien que leur cheval, qui n’est point tout à fait de bois, n’attrape et ne surprenne votre Troie. [12][23] Je ne sais rien de nouveau de ce Rabelais [24] de Hollande, mais je suis bien aise qu’il soit réimprimé ; dès qu’il y en aura ici, j’en demanderai un à M. Vander Linden. [13][25] Je n’ai encore rien reçu de M. Bartholin. [26] M. de Launoy [27] a achevé la seconde édition de sa Madeleine [28] pour prouver qu’elle n’est jamais venue en Provence, comme, de fait, elle n’y vint jamais. L’édition de toutes ses œuvres in‑fo viendra quelque jour, il a plusieurs traités tout prêts qui n’ont jamais vu le jour. [14] Les vers de mon Carolus [29] n’étaient point achevés d’imprimer quand monsieur votre fils est parti d’ici. [15]

Son Éminence se porte mieux de sa goutte. [30][31] Le roi d’Angleterre [32] demande que la reine sa mère [33] retourne à Londres. Le comte de Soissons [34] partira bientôt pour y aller faire son ambassade extraordinaire. Le pauvre Scarron, [35] le patron des vers burlesques, est ici mort, il était tout estropié des gouttes [36] et des débauches. Son père était conseiller de la Grand’Chambre, que l’on nommait Scarron l’Apôtre. [16][37] Nous avons ici de nouveau la Réponse de feu M. de Saumaise à Milton in‑4o imprimée à Dijon, opus posthumum[17] J’attends de Genève Theses Sedanenses en deux tomes in‑4o, que j’ai bien envie de voir, et de Lyon, le S. Georgius Cappadox du P. Théophile Raynaud. [38] Il y a aussi une Histoire de France latine du P. de Bussières, [39] jésuite, en trois volumes in‑12, on l’attend ici le mois prochain ; et les deux tomes du Paulus Zacchias, Quæstiones medico-legales ; [40] et l’Histoire de Savoie, en deux volumes in‑fo par M. de Guichenon. [41] Vale, et me ama.

Tuus ex animo, Guido Patin[18]


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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