L. 713.  >
À André Falconet,
le 21 septembre 1661

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 21 septembre 1661

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0713

(Consulté le 28/03/2024)

 

Monsieur, [a][1]

Le médecin espagnol Thomas Puellez, [2] que la nouvelle reine [3] avait amené avec elle d’Espagne, est mort à Fontainebleau. [4] Il aimait mon second fils Carolus [5] d’une manière à lui procurer quelque bonne fortune, mais il est demi-stoïque et c’est tout dire. [1] Il y en a plusieurs sur les rangs qui recherchent la place du défunt : Guénault, [6] des Fougerais, [7] Brayer [8] et Rainssant [9] courent après ; Piètre [10] le mérite encore mieux qu’aucun par son érudition, mais il est encore malade et n’est pas hors de danger. Celui qui ne désire rien est encore plus heureux, comme sont tous ceux qui n’ont point d’ambition. La cour est une mauvaise hôtellerie pour un homme de probité. Vallot [11] est malade de fièvre, rhumatisme [12] et érysipèle. [13] On dit aussi que c’est de regret de ce que le roi [14] lui a reproché qu’il était espion et pensionnaire du sieur Fouquet. [15] Il y en aura bien qui courront ce bénéfice s’il vient à vaquer. Je ne sais ce que peuvent être devenus MM. Pecquet [16] et de Belleval, [17] mais voilà leur marmite renversée par la disgrâce de M. Fouquet. [2] Jamais Pecquet ne l’a traité, il n’était là que pour les laquais ; croyez-moi, c’est un homme qui ne sait pas grand’chose. [3] M. Fouquet est toujours dans le château d’Angers, [18] malade d’une fièvre quarte. [19] Avant sa prison, il avait pris du quinquina [20] et avait été saigné de la salvatelle [21] par le conseil de Vallot, et néanmoins il n’en est pas guéri. [4] Les jésuites sont bien fâchés de sa perte, il était leur grand patron. Ils ont tiré de lui plus de 600 000 livres depuis peu d’années, vous savez comme ces bons pères aiment fort le bien public et le bien de leur prochain. Mais à propos de quinquina, il ne fait point ici de miracle : quand le corps est bien déchargé par la saignée [22] et les purgatifs[23] il peut par sa chaleur résoudre ou absorber le reliquat de la matière morbifique ; à moins que cela, il ne fait qu’échauffer. Ceux mêmes à qui il a fait cesser la fièvre n’en ont pas été tout à fait guéris, car elle est revenue, quoiqu’ils eussent été bien purgés. L’opiniâtreté et la durée de ces fièvres quartes viennent de la disposition mauvaise et presque carcinomateuse de la rate, [24] qui occupe sa propre substance. [5] Je n’ai jamais donné du quinquina, j’en ai vu qui, pour s’y être trop fiés, sont devenus hydropiques. [25] Je ne voudrais point purger dans le fort de la fièvre quarte, il me semble que ce serait trop hasarder ; mais je purge souvent à la fin de l’accès avec beaucoup de succès ; même dans la grande chaleur, je leur fais quelquefois avaler quatre grands verres de tisane [26] laxative de trois gros de séné ; [27] cela fait bien ouvrir le ventre et emmène une partie de la cause conjointe, et empêche l’importunité des grandes sueurs dont ils se plaignent souvent. Pour ce qui est de saigner au commencement de l’accès, je ne le fais jamais, il y a de l’imprudence et de la témérité à le faire. Je suis, etc.

De Paris, ce 21e de septembre 1661.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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