L. 999.  >
À André Falconet,
le 14 janvier 1671

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 14 janvier 1671

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(Consulté le 24/04/2024)

 

Monsieur, [a][1]

Je vous envoyai hier une page de nos nouvelles avec deux de mes thèses [2][3] dont vous en ferez part d’une, s’il vous plaît, à M. S., notre bon ami. [1] Nous avons ici Monsieur son fils, [4] qui est un jeune homme très sage, multorum mores hominum qui vidit et urbes[2][5] On fait voir ici au sot peuple de Paris le cadavre de M. l’archevêque, [6][7] qui y court comme au feu, ou comme s’il y avait des pardons à gagner d’avoir vu le visage fort bouffi d’un archevêque mort pour avoir pris trois fois du vin émétique. [3][8][9] Le roi [10] a donné sa place à M. de Champvallon, [4][11] archevêque de Rouen. Pour M. le cardinal de Bouillon, [12] qui a toutes les belles qualités requises en un honnête homme, on dit qu’il est assez riche et de plus, jeune prince, cardinal, neveu de M. de Turenne. [13] Avec tout ce qu’il lui viendra, il peut devenir grand aumônier de France et archevêque de quelque bon revenu, et obtenir aussi quelques bonnes et belles abbayes qui fassent bouillir la marmite en vertu du saint et sacré feu du purgatoire. [14] Les huguenots [15] disent que Léon x[16] qui mourut l’an 1521, disait ordinairement avec une exclamation admirative : Ô combien nous a fait de biens cette fable de purgatoire ! Mais n’en pleurez point, s’il vous plaît, il n’est peut-être pas vrai qu’il l’ait dit de la sorte, c’est peut-être quelque charité que ces méchants huguenots lui prêtent, eux qui ont toujours haï les papes.

Le 5e de janvier veille des Rois, la conférence ordinaire fut tenue chez M. le premier président[17] Ce fut M. Pellisson [18] qui y parla de l’Histoire et des historiens, sans faire le procès à aucun d’eux en particulier, ce que j’eusse pourtant bien souhaité. M. le premier président, qui est fort savant, y parla aussi environ demi-heure. Enfin, nous nous levâmes pour aller crier Le roi boit ! [5] chacun chez soi. Mais avant que de nous séparer, j’y saluai deux savants jésuites qui me parlèrent de vous, savoir le P. Bertet [19] et le P. Ménestrier. [20] L’un d’eux me dit que vous lui aviez montré quelques-unes de mes lettres, ce qui me fit rougir, vu qu’elles ne sont écrites que très familièrement, car j’y mets tout ce qui me vient en pensée, sans choisir ou affecter des termes. C’est pourquoi je vous prie de m’épargner une autrefois. [21]

Nous avons perdu depuis un mois l’ancien [22] de notre Faculté, M. Pierre de Beaurains, [23] âgé de 80 ans. Il n’y en a plus que six devant moi, à la fin il faudra partir ; sat diu si sat bene[6] Il y a trois semaines qu’un homme, qui a été valet de pied de M. le Prince, [24] donna dans l’hôtel de Condé à Mme la Princesse, [25] qu’il trouva à son avantage, [7] un coup d’épée qui n’est pas mortel. On croit qu’il avait envie de la voler, mais il se sauva et n’est pas pris. Tous les diables ne vont pas en enfer ni tous les fous dans les Petites-Maisons ; [26] il y a bien des gens las de vivre sur la terre. Enfin, il est pris et s’appelle Duval, [27] il lui demandait de l’argent qu’il prétendait lui être dû. Son procès est sur le bureau, on parle ici de cette affaire à l’oreille et fort diversement. [8] Vale.

De Paris, ce 14e de janvier 1671.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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