L. latine 210.  >
À Johannes Antonides Vander Linden,
le 19 septembre 1662

Codes couleur
Citer cette lettre
Imprimer cette lettre
Imprimer cette lettre avec ses notes

×
  [1] [2] Appel de note
  [a] [b] Sources de la lettre
  [1] [2] Entrée d'index
  Gouverneur Entrée de glossaire
×
Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johannes Antonides Vander Linden, le 19 septembre 1662

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=1243

(Consulté le 20/04/2024)

 

[Ms BIU Santé no 2007, fo 114 vo | LAT | IMG]

Au très distingué M. Johannes Antonides Vander Linden, professeur de médecine à Leyde.

Très distingué Monsieur, [a][1]

J’ai reçu la vôtre, datée du 5e d’août. Je me réjouis profondément que vous soyez en vie et vous portiez bien, et que votre Hippocrate avance, quoique lentement ; Dieu aidant, il s’achèvera enfin. L’Arétée in‑4o de notre ami Petit progresse doucement. [1][2][3][4] Vous en recevrez les premières feuilles dans un paquet que je vous enverrai prochainement par le fils de M. Vorst, [5][6] avec le livre de Fulvio Orsini, de Familiis Romanis et Numismatis, dont mon fils Charles a procuré une nouvelle édition. [2][7][8] Il y a ajouté beaucoup en examinant les monnaies qu’il a en sa possession ou qu’il a vues en divers endroits ; principalement chez le roi très-chrétien, lequel a ordonné que, pour faire son livre, toutes ses monnaies d’or et d’argent lui soient montrées. [9] Il vous envoie un exemplaire de cette nouvelle édition ; je voudrais que vous la receviez avec bienveillance en attendant que nous ayons des choses meilleures et plus précieuses à vous offrir, en récompense de tant de présents dont votre générosité nous a déjà comblés. Rangez donc en votre bibliothèque ce livre de mon fils Charles, dont la bonne disposition, les études, les travaux et les veilles me font beaucoup espérer ; surtout parce qu’il est un excellent fils, très amoureux des livres et des études, et qu’il est aimé de notre roi, et lui est même très cher. M. Bigot est parti d’ici pour Rouen ; [10] delà il s’en ira en Angleterre, avant de revenir vers nous en passant par votre Hollande et par les Pays-Bas espagnols. J’ai maintenant une autre raison de penser que vous n’avez rien à espérer de la Bibliothèque royale : [11] c’est le départ de M. Colbert, [12] abbé et docteur de Sorbonne, [13] directeur et garde de ladite Bibliothèque, qui a été nommé évêque de Luçon. [14] Voici trois mois qu’il s’en est allé dans son diocèse, mais il y a été frappé d’une très grave maladie ; il s’en est trouvé si mal que son frère, intendant des finances royales qui fut jadis secrétaire du cardinal Mazarin, [15][16] a appelé plusieurs médecins de Paris. Pour le soigner, ils seraient donc partis en hâte par la poste à cheval vers cette ville, qui est à plus de cent lieues de Paris ; ce que beaucoup des nôtres ont refusé, au nombre desquels je fus. [17] On en a enfin trouvé un seul qui est monté à cheval et a entrepris ce très pénible voyage pour aller soigner l’évêque, dont nul ne sait encore s’il va guérir et s’en reviendra bientôt à Paris. J’en déduis simplement que vous attendrez en vain quelque manuscrit que ce soit de la Bibliothèque royale. [3] Le tribunal judiciaire, entièrement composé d’hommes choisis, que le roi a établi et qu’on appelle ici la Chambre de justice, demeure en fonction. [18] C’est là que seront examinées les affaires des partisans et du prince des voleurs en personne, Nicolas Fouquet, jadis surintendant des finances. [4][19] On parle aussi beaucoup ici du différend qui s’est récemment élevé entre le roi et le pape ; [20] notre roi a ordonné que le nonce ou ambassadeur qui est chez nous sorte de son royaume, [21] et il a aussitôt obéi. Une guerre contre ce Jupiter capitolin ferait plaisir à beaucoup de gens, et plusieurs augurent mal de l’issue qu’elle aura pour lui. [5][22] Ses affaires fleuriront pourtant toujours ou du moins ne seront-elles pas misérablement anéanties, pourvu que ne s’éteigne pas pour lui le feu du purgatoire, [23] d’où tant de bonnes choses s’écoulent dans sa marmite, par l’excessive crédulité des grands de ce monde. Je salue MM. les très distingués Vorst, Stevartus, [24] Gronovius, [25] Rompf, [26] et nos autres amis.

De Paris, ce mercredi 19e de septembre 1662.

Votre Guy Patin de tout cœur.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
Licence Creative Commons "Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron." est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale 4.0 International.
Une réalisation
de la BIU Santé