À Claude II Belin, le 27 octobre 1634, note 1.
Note [1]

Loudun (Vienne) est située aux confins de l’Anjou, du Poitou et du Maine. Elle appartenait à la duché-pairie de Richelieu.

Urbain Grandier (Rovère près de Sablé 1590-Loudun 1634), curé de Saint-Pierre à Loudun et chanoine de Sainte-Croix dans la même ville, détonnait par la liberté de ses idées religieuses et de ses mœurs. Condamné une première fois, en 1630, à l’interdiction pour empiètement sur l’autorité épiscopale, il avait obtenu son absolution et commis la faute de rentrer triomphalement à Loudun, ce qui avait porté au comble l’irritation et la haine.

On n’attendit plus dès lors qu’une occasion pour le perdre : on se souvint qu’en 1626, il avait demandé la place de directeur d’un couvent d’ursulines et s’était vu préférer un de ses adversaires ; on ne manqua pas alors de l’accuser d’intentions coupables à propos de la recherche de cette direction spirituelle. Quelques années plus tard, le bruit s’étant répandu que les ursulines étaient possédées du démon et qu’elles accusaient Grandier de les avoir ensorcelées, le curé porta une plainte en calomnie ; l’affaire fut momentanément étouffée, grâce à l’intervention d’Escoubleau de Sourdis, archevêque de Bordeaux (v. note [5], lettre 29).

Quelque temps après, le conseiller d’État Laubardemont, créature de Richelieu, étant venu à Loudun pour y exécuter les ordonnances royales concernant la démolition des forteresses de l’intérieur du royaume, prit un intérêt d’autant plus grand à cette affaire étrange que la supérieure du couvent (possédée elle-même) était sa parente. Il en rendit compte à Louis xiii et à Richelieu et en obtint une commission qui lui donnait les pouvoirs les plus étendus. Grandier avait été arrêté le 16 décembre 1633 et transféré à Angers ; on n’avait trouvé chez lui que le manuscrit d’un ouvrage contre le célibat des prêtres. Laubardemont poussa l’instruction avec haine et partialité. Les ursulines, livrées à toutes les folies démoniaques, interrogées, exorcisées, conjurées, continuèrent à accuser le curé de Saint-Pierre de les avoir ensorcelées au moyen d’une branche de laurier jetée dans le couvent. De nombreux témoins l’accusèrent à leur tour de sacrilège, d’orgueil, et surtout d’impudicité.

Après sept mois de procédure, une commission de douze juges, présidée par Laubardemont, le reconnut coupable de magie, maléfice et possession, et le condamna à être brûlé vif, sentence qui fut exécutée le jour même (18 août 1634) ; mais les religieuses de Loudun restèrent possédées pendant longtemps encore et il fallut une multitude d’exorcismes pour les délivrer du démon (G.D.U. xixe s.).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Claude II Belin, le 27 octobre 1634, note 1.

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(Consulté le 28/03/2024)

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