À Charles Spon, le 22 décembre 1651, note 1.
Note [1]

Le 20 décembre, le Parlement s’était assemblé en présence de Son Altesse Royale, Gaston d’Orléans, pour prendre connaissance d’une lettre adressée par Mazarin au duc d’Elbeuf, alors en Picardie, pour lui annoncer son intention de rentrer en France accompagné de troupes allemandes qu’il avait mises à son service. Le duc d’Orléans avait répondu au cardinal qu’il lui déconseillait un tel acte, et adressé la lettre et sa réponse au Parlement.

Journal de la Fronde (volume i, fo 526 ro et vo, 20 décembre 1651) :

« Ce qui se passa de remarquable pendant la délibération fut le discours que Son Altesse Royale fit, lequel fut admiré de toute la Compagnie, à laquelle elle {a} représenta en fort beaux termes les devoirs des rois envers leurs sujets, le danger et inconvénient qu’il y avait de mettre la conduite de l’État entre les mains des favoris, contre lesquels elle déclama fort ; et ajouta que quoiqu’elle eût des sentiments très sincères pour le service du roi et plus d’intérêt qu’un favori à la conservation de l’État, néanmoins, le roi ne devait pas lui en confier à elle-même l’administration entière. Elle parla ensuite des pratiques qui s’étaient faites par les gouverneurs des frontières pour le retour du cardinal Mazarin, de l’argent qu’on lui avait envoyé pour faire des levées à cette fin ; blâma fort le maréchal d’Hocquincourt d’avoir des pensées si basses que d’obéir à un proscrit et d’avoir eu intelligence avec le gouverneur de Cambrai pour acheter des chevaux en Flandres pour le cardinal ; et fit remarquer que c’était une chose bien étrange que la cour permît toutes choses à ce cardinal, qui est avec les ennemis de l’État, et que néanmoins on eût déclaré M. le Prince criminel de lèse-majesté pour avoir traité avec eux, quoiqu’il eût tort en cela. Enfin, après avoir remontré qu’il était constant que le cardinal Mazarin avait un dessein formé d’entrer, elle dit qu’il serait à propos d’ajouter aux conclusions de Messieurs les Gens du roi quelque moyen plus fort de l’empêcher ; et fut d’avis non de mettre sa tête à prix, ne voulant pas introduire une si pernicieuse coutume en France, mais bien d’ordonner une somme de 50 000 écus pour ceux qui pourraient se saisir de sa personne et l’emmener dans la Conciergerie ; et cette somme se pourra prendre sur les revenus de ses bénéfices, préférablement à ses créanciers. On fit grand bruit des commissions qu’on lui avait envoyées {b} pour faire les levées et de celles de généralissime ; mais le premier président déclara qu’il n’en avait scellé aucune et témoigna, aussi bien que le maréchal de L’Hospital, qu’il n’était pas d’avis de ce retour. M. de Machaut, le président de Novion et quelques autres parlèrent fort contre M. le coadjuteur, et attribuèrent les causes des désordres à l’ambition qu’il a pour la dignité {c} qu’il recherche ; mais parce qu’ils ne le nommèrent point, il ne leur fit point de réponse afin de ne se point commettre avec eux ; et M. de Chisay-Bitaut, au contraire, parla fort en faveur de ce prélat et défendit très bien sa cause. Il y en eut 40 qui furent d’avis de mettre sa tête à prix {d} puisqu’il y en avait des exemples, mais l’opinion de Messieurs les Gens du roi fut la plus forte. »


  1. S.A.R., Gaston d’Orléans.

  2. Au cardinal.

  3. De principal ministre.

  4. Celle de Mazarin.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 22 décembre 1651, note 1.

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(Consulté le 25/04/2024)

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