À Charles Spon, le 26 janvier 1655, note 1.
Note [1]

Le pape aurait eu le droit de désigner lui-même le successeur de Retz à l’archevêché de Paris si le cardinal était venu à mourir à Rome. Il souffrait encore en effet de sa blessure à l’épaule gauche survenue lors de son évasion de Nantes en août précédent. Le roi lui avait remis le bonnet, ou barrette cardinalice, à Compiègne le 11 septembre 1652, mais il devait encore recevoir le chapeau des mains du pape.

Dans ses Mémoires (pages 1162-1163), Retz mêle le récit de sa blessure à celui des bonnes grâces que lui faisait le pape Innocent x, tout proche de sa mort, en tenant consistoire exprès pour lui donner le chapeau :

« “ Et comme, me dit-il, {a} vostro protettore di quattro barocchi {b} (il n’appelait jamais autrement le cardinal d’Este) {c} est tout propre à faire quelque impertinence en cette occasion, il le faut amuser et lui faire croire que vous ne viendrez pas au consistoire. ” Cela me fut aisé, parce que j’étais, dans la vérité, très mal de mon épaule et si mal que Nicolo, le plus fameux chirurgien de Rome, disait que si l’on n’y travaillait en diligence, je courais fortune de tomber dans des accidents encore plus fâcheux. Je me mis au lit sous ce prétexte au retour de chez le pape. Il fit courir je ne sais quel bruit touchant ce consistoire, qui aida à tromper les Français. Ils y allèrent tous bonnement et ils furent fort étonnés quand ils m’y virent entrer avec les maîtres des cérémonies et en état de recevoir le chapeau. MM. les cardinaux d’Este et des Ursins sortirent, et le cardinal Bichi demeura. L’on ne peut s’imaginer l’effet que ces sortes de pièces font en faveur de ceux qui les jouent bien, dans un pays où il est moins permis de passer pour dupe qu’en lieu du monde. La disposition où le pape était pour moi, laquelle allait jusqu’au point de penser à m’adopter pour neveu, et l’indisposition qu’il avait cruelle contre M. le cardinal Mazarin, eussent apparemment donné, dans peu, d’autres scènes, s’il ne fût tombé malade trois jours après, de la maladie dont il mourut au bout de cinq semaines ; de sorte que tout ce que je pus faire avant le conclave fut de me faire traiter de ma blessure. Nicolo me démit l’épaule pour la seconde fois, pour me la remettre. Il me fit des douleurs inconcevables et il ne réussit pas à son opération. »


  1. C’est le pape qui parle.

  2. « votre protecteur de quatre sous ».

  3. Protecteur de France à Rome (v. note [12], lettre 387).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 26 janvier 1655, note 1.

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(Consulté le 25/04/2024)

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