À Charles Spon, le 10 novembre 1651, note 10.
Note [10]

Charles de Sainte-Maure, marquis puis duc de Montausier (1610-1690), était fils de Léon de Sainte-Maure, baron de Montausier, et de Marguerite de Chateaubriant. Simple cadet, il était entré au service sous le nom de marquis de Salles, s’était distingué en Italie, surtout à la prise de Casal, puis en Lorraine où il avait obtenu le grade de maréchal de camp au siège de Brisach (1636).

Son frère aîné, Hector de Montausier, ayant été tué en 1635 à Bormio (Lombardie), le cadet avait hérité de son nom, de sa fortune et qui plus est, de sa fiancée, la belle Julie d’Angennes. Pour pouvoir se marier, il avait dû soupirer longtemps et abjurer le protestantisme. Il venait d’être nommé gouverneur de la Saintonge et de l’Angoumois lorsque survint la Fronde. Il suivit le parti de la cour, quoique tous ses amis fussent des frondeurs et qu’il eût lui-même à se plaindre de Mazarin. Montausier paralysa la sédition dans son gouvernement et ayant rejoint le comte d’Harcourt, coopéra avec lui à la pacification du Midi. Il reprit Saintes, délogea les Espagnols de Talmont, fut blessé grièvement au combat de Montançais (1652) et revenu à Paris à la fin de la guerre civile, se dédommagea des fatigues et des périls de la lutte par le commerce des beaux esprits.

Fort assidu à la cour, il fut nommé chevalier des Ordres du roi (1662), gouverneur de Normandie après la mort du duc de Longueville ; il fit aux côtés de Louis xiv, qui le créa duc et pair, la campagne de Franche-Comté et eut le courage de rentrer dans son gouvernement quoique la peste y fît de cruels ravages. En 1668, le roi résolut de lui confier l’éducation du dauphin alors âgé de sept ans (v. note [3], lettre 945).

Montausier passa ses dernières années à la cour, chargé d’honneurs et toujours entouré de la plus grande considération, malgré ses allures de misanthrope et d’homme bourru. La mort de sa femme et celle de ses meilleurs amis, Chapelain et Conrart, l’enfoncèrent davantage encore dans cette humeur morose qui fut le trait distinctif de son caractère. On lui dit que Molière, dans son Misanthrope (v. note [2], lettre 861), l’avait peint dans Alceste ; il alla voir la comédie, quoiqu’il goûtât peu la jeune génération, et fut enchanté ; il s’écria : « Plût à Dieu que je fusse Alceste ! » (G.D.U. xixe s.).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 10 novembre 1651, note 10.

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(Consulté le 24/04/2024)

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