À Hugues II de Salins, le 14 septembre 1657, note 10.
Note [10]

« Dans la passion hystérique, l’utérus est mis en mouvement dans l’emplacement qui lui est propre, mais sans en sortir ; voyez Riolan dans l’Anthropographie. »

La passion (strangulation, ou suffocation) hystérique était le « sentiment de suffocation ou d’étranglement qui est un des caractères de l’hystérie [v. note [14], lettre 97] » (Nysten).

Blancardus (tome 1, page 463) :

Hysterica Passio, dicitur et Suffocatio hypochondriaca, uterina, uteri ascensus etc. est motus convulsivus, in quo respiratio valde læsa et imminuta est, cum sensu ac si fauces nod stringeretur, vel bolus ab inferioribus in eas insurgeret, hisce accedit Anxietas, et quasi animi deliquium, sæpe cum lapsu corporis in terram, absque tamen convulsivis motibus artuum, nisi Epilepsia quoque adfuerit. Jam viri perinde ac fæminæ hos morbo, ses hæ frequenter, illi rarissime laborant : hæ de murmure ventris, de globo ascendente et in latere subsistente, aut in fauces evolante conqueruntur. Porro Paroxysmus gravior est vel levior, nonnunquam habet periodes suas ; cum solvitur paroxysmus, lassitudo, pallor aut æstus in facie cum rubore genarum, capitis, artuumque dolor, languor virium, cordis palpitatio, pigritia, ructus, suspiria, anhelatio, ciborum fastidium, nausea, etc. accidere solent. In paroxysmo sæpe vociferantur, aut, ranarum instar coaxant, vel rident, vel lachrymantur. Denique paroxysmum antecedunt Oscitatio, Pandiculatio, Imbecillitas, Tristitia, Terror, Ira, Amor, Odor rerum suavium, a quibus momento citius sæpe excitatur hoc malum, uti a fætidis lenitur.

[La Passion hystérique, qu’on appelle aussi Suffocation hypocondriaque ou utérine, remontée de matrice, etc., {a} est un mouvement convulsif où la respiration est profondément altérée et diminuée, avec l’impression que la gorge est serrée par un nœud ou qu’une boule y est montée depuis les parties inférieures, d’où provient une angoisse, et comme une absence de sens, souvent avec une chute du corps au sol ; mais toutefois, sans mouvements convulsifs des membres si une épilepsie ne s’y associe pas. La maladie frappe de la même manière les hommes et les femmes, mais elle est très rare chez eux et fréquente chez elles : elles se plaignent d’un rugissement du ventre, d’une boule ascendante, qui s’arrête dans le flanc ou monte jusqu’à la gorge. Le paroxysme qui survient ensuite est plus ou moins violent ; parfois il évolue par vagues successives. Tandis que le paroxysme se résout, il est habituel d’observer une lassitude, une pâleur ou, au contraire, un échauffement du visage, avec rougeur des joues, de la tête, une douleur des membres, une langueur des forces, une palpitation du cœur, {b} une lassitude, des rots, des soupirs, une gêne respiratoire, un dégoût de la nourriture, des nausées, etc. Souvent, durant le paroxysme, elles poussent des cris ou coassent comme des grenouilles, rient ou pleurent. Bâillement, besoin de s’allonger, faiblesse, tristesse, frayeur, colère, pusion amoureuse, perception d’odeurs agréables précèdent le paroxysme et sont autant de prodromes annonçant l’imminence de ce mal, bien que les odeurs fétides l’atténuent].


  1. Les dénominations françaises, données en fin d’article sont : « vapeurs, suffocation de la matrice, affection hystérique ».

  2. V. note [5] de l’Observation viii de Guy Patin et Charles Guillemeau.

Guy Patin renvoyait ici à la page 184 du chapitre xxxv (Partium genitalium mulieris Enarratio [Description des parties génitales de la femme]), livre ii des Opera anatomica vetera… de Jean ii Riolan : {a}

Cum igitur Uterus sit in suo situ firmiter alligatus, non est verisimile in præfocationibus hystericis ad Umbilicum ascendere. Crederem potius motum illum oberrantis et convoluti corporis, quod hystericæ mulieres sentiunt circa Umbilicalem regionem, proficisci non ab Utero ad eas partes elato, sed a  Testibus, et Tuba Uteri. Quum enim Testes sint penduli, et corpus Tubæ fistulosum, laxum et vagum, simul volutari possunt per Hypogastrium, et tracta ad Umbilicum vique assurgere, cum semine putri trugescunt, cuius orgasmo et impetu, huc et illuc violenter agitantur. Nam Uterus etiam vi magna superne tractus, vix supra Os sacrum efferri potest : quippe præter quatuor ligamenta quibus firmiter adstringitur, etiam recto Intestino, et pudendis partibus externis adnascitur et cohæret. Quas quidem partes, nempe pudendum et podicem dolorifice retrahi et convelli opporteret, si ad Umbilicum usque Uterus ascenderet.

Præterea dubitari potest, An Uterus sponte aut vi ad Hepar assurgat ? Si sponte, non potest motu proprio eo ferri : si superne vi quadam rapiatur, necessum est partibus superioribus adesse convulsionem, non Utero, qui tum a supernis partibus attrahitur ratione nervorum : tumque Cerebrum ipsum convulsionem parietur : Nam raro convulsiones adsunt in hystericis affectibus. Eleganter Valesius, comment. ad particulam illam lib. 7. Epidem. plurimas Uteri affectiones status faciunt, signum sunt ructus et strepitus circa ventrem et lumborum tumores et dolores circa renes, et coxas. Probat etiam Uterum non moveri sua sede, neque aberrare in hypogatrio : propterea dum flatu vasa spermatica, locorum muliebrium venæ et arteriæ hypogastricæ turgescunt et distenduntur, vapor seu flatulentus spiritus per venam causam sensum convulsionis inferet Hepati, permetque diaphragma : si ulterius feratur, et ascendat ad pulmones, præfocationem pariet, et fauces strangulabit, si Thymus Venæ cavæ subiectus intumuerit : si Iugulares effundatur, collum intumescet, et attonitæ reddentur feminæ.

[Puisque donc la matrice est fermement attachée en sa place, il y a fort peu d’apparence qu’au cours des suffocations hystériques elle monte jusqu’au nombril. Et je croirais volontiers que les mouvements que les femmes hystériques ressentent autour du nombril ne sont pas des secousses de la matrice elle-même, mais des ovaires et de la trompe : ceux-là sont suspendus, et celle-ci creuse en sa partie intérieure, abaissée et flotte de tous côtés sans attache ; ils pourront donc fort aisément être diversement agités de toutes parts dans le fond du ventre, ou même monter jusqu’au nombril lorsqu’ils sont pleins de semence corrompue, dont la poussée les jette çà et là avec violence. De fait, quelque vigueur qu’on mette à la tirer, la matrice ne passe presque jamais le haut de l’os sacrum, car quatre ligaments la tiennent fermement en place, ainsi que le boyau droit et tout le reste des parties honteuses. {b} Et il faudrait que les parties que sont l’anus et la vulve eussent à souffrir de violentes tractions si la matrice était poussée jusqu’à l’ombilic.

En allant plus loin, on peut se demander si la matrice est capable de monter d’elle-même vers le foie, ou d’y être attirée par quelque autre force. Si elle y va d’elle-même, ce n’est pas de son propre mouvement ; si quelque activité des nerfs l’y attire, il faut que les parties supérieures de l’abdomen, et non pas elle-même, soient en un état de convulsion qui devrait se propager jusque dans le cerveau ; mais cela n’arrive presque jamais car les convulsions sont extrêmement rares dans les affections hystériques. En son commentaire sur le passage du livre vii des Épidémies où il est dit que les vents suscitent beaucoup de maux dans la matrice, et s’y font connaître autant par des rots importuns et des rugissements continuels du ventre que par des gonflements des lombes, et des douleurs des reins et des cuisses, Vallesius {c} a fort bien montré que la matrice ne change pas de place et qu’il est donc faux qu’elle flotte çà et là dans le fond du ventre. C’est pourquoi, lorsque les veines et artères des parties des femmes viennent à se remplir de vents, il en émane aussitôt des fumées qui s’emparent de la veine cave et, de là, vont gagner le foie à qui elles donnent des atteintes de convulsion, en le contraignent à presser le diaphragme. Quand elles passent outre, elles montent jusque dans le poumon, causant des suffocations ; et au pire, elles étranglent misérablement les malades lorsqu’elles remplissent le thymus, qui est attaché à la veine cave. {d} Si elles se saisissent des veines jugulaires, alors le cou enfle et les femmes en deviennent étourdies]. {e}


  1. « Ouvrages anatomiques anciens… » de Riolan, avec la réédition de son Anthropographie, Paris, 1649, v. note [25], lettre 146.

  2. Le rectum, le plancher pelvien et ses deux orifices ; l’utérus est attaché aux parois du bassin par les deux ligaments larges et les deux ligaments ronds.

  3. V. notes [6], lettre 245, et [17], lettre 280, pour les commentaires de Franciscus Vallesius (Francisco Valles) sur les Épidémies d’Hippocrate.

  4. Le thymus est une glande située à la base du cou, sous la thyroïde, et qui descend dans le haut du médiastin (milieu de la cavité thoracique), devant la jonction des troncs veineux qui forment la veine cave supérieure. On ignorait alors tout de son rôle dans le développement de l’immunité au cours de l’enfance, suivi de son involution à l’âge adulte.

  5. Ma traduction s’est inspirée de celle qu’a donnée Pierre Constant (Paris, 1629, v. note [8], lettre 307 ; pages 425‑426), que j’ai simplifiée et modernisée.

On n’imagine plus aujourd’hui de tels remuements des organes dans la cavité abdominale, mais le syndrome d’hystérie y a longtemps été rattaché, sur l’autorité d’Hippocrate : les doutes de Riolan et de Vallesius étaient parfaitement fondés. V. note [2] du Traité de la Conservation de santé, chapitre viii , pour l’avis de Galien sur l’hystérie et des détails complémentaires sur sa pathologie.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Hugues II de Salins, le 14 septembre 1657, note 10.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0490&cln=10

(Consulté le 28/03/2024)

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