À Charles Spon, le 22 décembre 1651, note 11.
Note [11]

Jean Martin, baron de Laubardemont (vers 1590-22 mai 1653), successivement président des Enquêtes au parlement de Bordeaux, premier président de la Cour des aides de Guyenne, intendant de la généralité de Touraine, Anjou et Maine (1632), avait obtenu de Richelieu le titre de conseiller d’État pour devenir l’instrument docile du cardinal. Il avait présidé aux procès d’Urbain Grandier (1633, v. note [1], lettre 18), et de Cinq-Mars et de Thou (1642). Depuis la mort de Richelieu, Laubardemont était tombé dans l’obscurité, chargé de l’exécration de ses contemporains (G.D.U. xixe s.).

Tallemant des Réaux (Historiettes, tome i, pages 296‑297) :

« Le ministre de Loudun, {a} comme on le défiait de mettre ses doigts dans la bouche des religieuses comme les prêtres y mettaient ceux dont ils tiennent l’hostie, répondit “ qu’il n’avait nulle familiarité avec le diable et qu’il ne se voulait point jouer à lui ”. Un diable s’était vanté d’enlever le ministre dans sa chaire sur la tour de Loudun ; il n’en fit rien. Cependant, cette badinerie, ou plutôt ce désir de vengeance des capucins, fut cause que Grandier fut brûlé tout vif car Laubardemont, qui était bon courtisan, le sacrifia au crédit du P. Joseph. Ce Grandier avait été galant et avait fait quelques ennemis dans la ville qui lui nuisirent. Le diable dit une fois : “ M. de Laubardemont est cocu. ” Et Laubardemont (un maître des requêtes) à son ordinaire {b} mit le soir : “ Ce que j’atteste être vrai ”, et signa. Enfin insensiblement, cela se dissipa à mesure que le monde se désabusait. »


  1. Urbain Grandier.

  2. Journal.

Dictionnaire de la conversation et de la lecture (Paris, Belin-Mandar, 1837, tome xxxiv, page 398) :

« Parvenu à un grade éminent dans la haute administration, il substitua à son nom de famille, Martin, celui de Laubardemont, {a} qu’il a rendu si fameux par le rôle infâme qu’il a joué dans les procès d’Urbain Grandier, de Cinq-Mars et de François-Auguste de Thou. […] La mort de Richelieu le fit rentrer dans l’obscurité d’où jamais il n’aurait dû sortir. Il mourut tranquillement dans son lit, disent tous les biographes ; mais s’il a pu échapper au supplice des remords, il a dû sentir s’appesantir sur lui la main de la justice divine. Il fut frappé dans un autre lui-même, dans son fils, sur lequel il avait fondé toutes ses espérances d’orgueil et d’avenir. Le fils d’un père aussi corrompu ne pouvait être vertueux. Élevé à l’école du crime et de la plus inique immoralité, le jeune Laubardemont fut ce que l’avait fait l’exemple de son père. Il se précipita dans tous les genres de désordres et de crimes. Il suivit une carrière aussi coupable, mais plus dangereuse. Il fut tué en 1651 au milieu d’une bande de voleurs à laquelle il s’était associé. »


  1. Seigneurie sise à Sablons, 16 kilomètres au nord de Libourne.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 22 décembre 1651, note 11.

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(Consulté le 19/04/2024)

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