Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 6 manuscrit, note 11.
Note [11]

« Sur Postel, voyez de Thou. »

Jacques-Auguste i de Thou a évoqué la mémoire de Guillaume Postel, dans son Histoire universelle (livre lxxiv règne de Henri iii, année 1581, Thou fr, volume 8, pages 565‑566) :

« Guillaume Postel, [est] né de parents obscurs dans un village de Normandie nommé Barenton. {a} Il s’appliqua d’abord à la philosophie et aux mathématiques ; s’étant mis ensuite à voyager, il apprit plusieurs langues, et surtout les langues orientales. Il composa divers ouvrages d’un goût étranger, qu’il publia en Italie, en Allemagne, et même en France. Enfin, étant à Venise et y ayant lié une amitié étroite avec une vieille fille, {b} il tomba dans une erreur également extravagante et détestable, soutenant que la réparation des femmes n’était pas encore achevée. {c} De retour à Paris, il enseigna cette erreur dans les leçons publiques qu’il donnait ; mais sur la dénonciation des théologiens, les magistrats l’interdirent de sa chaire. La démangeaison de donner des leçons publiques l’engagea à se rétracter en 1564 par un livre qu’il adressa à la reine mère ; {d} mais on peut dire qu’au lieu d’y avouer ses erreurs, il ne chercha qu’à les pallier par des interprétations forcées, et par des sens fanatiques qu’il y donne ; et lorsqu’il recommença à donner des leçons de mathématiques suivant la permission qu’il en avait obtenue, il y glissa encore ses principes ; ce qui le fit absolument interdire pour l’avenir, et on l’enferma au prieuré de Saint-Martin à Paris, où il mourut le sept de septembre, âgé de près de cent ans, {e} ayant toujours gardé sa virginité, à ce qu’il disait ; et c’était à cette vertu qu’il attribuait la santé robuste dont il avait joui toute sa vie. » {f}


  1. Barenton, près d’Avranches, est une petite commune de l’actuel département de la Manche, au sud-ouest du Cotentin.

  2. Professeur royal de mathématiques, Postel était féru de sciences occultes et de mysticisme ésotérique ; fondateur de la « cabale chrétienne », il s’était farci la tête des rêveries qu’il avait puisées auprès d’une devineresse, qu’il appelait la Mère Johanna, dont il s’était entiché à Venise, la tenant pour une réincarnation du Christ ; le texte latin original la qualifie bien de virginis vetulæ [vieille fille] (édition de Paris, 1614, page 91).

  3. Traduction fidèle du latin, de feminei sexus salutari reparatione non dum consumata [de la salvatrice réparation du sexe féminin qui n’a pas encore été menée à bout] : ce qui veut dire que « la corruption de l’Ève vieille » continue à corrompre et à damner l’humanité (selon les propres termes de Postel).

  4. Postel n’a rien publié entre 1563 et 1571. Un mémoire de l’abbé Sallier {i} (page 809), établit que ce texte n’a jamais été imprimé :

    « La Bibliothèque du roi […] conserve plusieurs, {ii} parmi lesquels j’en ai trouvé un entre autres qui m’a paru mériter attention. Ce manuscrit ignoré jusqu’ici est de la main même de Postel, et signé de lui ; le titre est ainsi conçu : Les Rétractations de Guillaume Postel, touchant les propos de la Mère Jeanne, autrement dite Vierge vénétiane, ainsi qu’il a exposé au souverain Sénat, à Venise, à Rome, à Paris. {iii} Guillaume Postel adresse ses Rétractations à Catherine de Médicis, et l’épître dédicatoire est datée de 1564. La célébrité de l’écrivain dont il s’agit ici, la suite des faits qu’il raconte avec sincérité, l’aveu qu’il fait de ses erreurs et l’exposition de ses sentiments m’ont paru exiger que l’on fît connaître ce nouvel ouvrage de Guillaume Postel. »

    1. Éclaircissement sur l’histoire de Guillaume Postel, dans les Mémoires de littérature, tirés des registres de l’Académie des inscriptions et belles-lettres (tome quinzième, années 1738-1740, Paris, Imprimerie royale, 1743, in‑4o de 816 pages).

    2. Manuscrits de Postel.

    3. Ce manuscrit (auquel de Thou, comme président du Parlement nommé en 1562, avait pu avoir accès) est consultable en ligne sur Gallica. Le titre ne surnomme pas la Mère Jeanne « Vierge vénétiane » [vénitienne ?], mais « vénéfiane » [magicienne, du latin venefica]. La dédicace à la reine est signée « Le moindre serviteur des serviteurs de Dieu en votre peuple très chrétien unis, Guillaume Postel ».
  5. En latin, centenario proximus : lourde exagération car les biographies modernes font mourir Postel à l’âge de 71 ans (1510-1581).

    V. note [20] des Affaires de l’Université en 1650-1651 pour le prieuré clunisien de Saint-Martin-des-Champs à Paris.

  6. Ce texte corrobore et enrichit ce qui est dit sur la vie de Postel et sur ses extravagances mystiques dans la note [45] du Naudæana 4.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 6 manuscrit, note 11.

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(Consulté le 28/03/2024)

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