À André Falconet, le 10 décembre 1661, note 12.
Note [12]

Monseigneur le dauphin, Louis de France, premier enfant de Louis xiv et de Marie-Thérèse d’Autriche, était né à Fontainebleau le 1er novembre 1661, « fête de tous les saints, à cinq minutes avant midi » (Mme de Motteville, Mémoires, page 522‑523) :

« La reine, dans son accouchement, fut fort malade et en péril de sa vie. Tant qu’elle fut dans ses grands maux, le roi parut si affligé et si sensiblement pénétré de douleur qu’il ne laissa nul lieu de douter que l’amour qu’il avait pour elle ne fût plus avant dans son cœur que tous les autres. Il alla à cinq heures du matin se confesser et communier, et après avoir imploré la protection divine, il se donna entièrement au soin d’assister celle qui, en souffrant son mal, lui donnait à tous moments des marques de tendresse ; si bien que ce précieux enfant, venant au monde, fut par lui-même non seulement un double lien qui devait réunir davantage ces deux royales personnes dont il tenait la vie ; mais en naissant, il devait être encore alors, par la douleur et la joie qu’il leur causa, une marque infaillible de leur amitié. […]

La reine mère vit alors ses désirs accomplis et connaissant son bonheur, elle dit tout haut, le soir du jour que la reine était accouchée, que Dieu lui avait fait toutes les grâces qu’elle lui avait demandées et qu’elle n’avait plus rien à désirer que son salut. »

On sent dans cette relation l’émoi inquiet provoqué par les amours de Louis xiv avec Mlle de La Vallière (v. note [12], lettre 735). Le roi et la reine, venus de Chartres, étaient arrivés à Paris le 10 décembre : c’est ce qui m’a résolu à retarder de quatre jours la date de la présente lettre (6 décembre dans les précédentes éditions).

Mort en 1711, quatre ans avant Louis xiv, Louis fut dauphin pendant toute son existence. Quand naquit son premier fils, en 1682, il prit le nom de Grand Dauphin, tandis que son aîné, le duc de Bourgogne, prenait celui de Petit Dauphin. À la cour, Louis xiv décida que l’on appellerait son fils Monseigneur ; Saint-Simon (Mémoires, tome iii, page 437) :

« Jamais dauphin, jusqu’au fils de Louis xiv, n’avait été appelé Monseigneur en parlant de lui tout court, ni même en lui parlant. On écrivait bien Monseigneur le dauphin ; mais on disait Monsieur le dauphin, et Monsieur aussi, en lui parlant ; pareillement aux autres fils de France, à plus forte raison au-dessous. Le roi, par badinage, se mit à l’appeler Monseigneur ; je ne répondrais pas que le badinage ne fût un essai pour ne pas faire sérieusement ce qui se pouvait introduire sans y paraître, et pour une distinction sur le nom singulier de Monsieur. Le nom de dauphin le distinguait du reste, et son rang, si supérieur à Monsieur, {a} qui lui donnait la chemise et lui présentait la serviette. Quoi qu’il en soit, le roi continua ; peu à peu la cour l’imita et bientôt après, non seulement on ne lui dit plus que Monseigneur parlant à lui, mais même parlant de lui, et le nom de dauphin disparut pour faire place à celui de Monseigneur tout court. »


  1. Son oncle, Philippe d’Orléans.

Louis xv, qui régna de 1715 à 1774, était petit-fils de Monseigneur.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 10 décembre 1661, note 12.

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(Consulté le 20/04/2024)

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