À Charles Spon, le 9 juin 1654, note 13.
Note [13]

Exaspéré par la lenteur des négociations entre la France et le Protectorat, le baron de Baas (v. note [14], lettre 340), émissaire de Mazarin auprès de l’ambassadeur Antoine de Bordeaux, avait, au début de mai, prêté une oreille favorable à Théodore Naudin (v. note [6], lettre 349), médecin français qui voulait s’immiscer dans une conspiration contre Cromwell ; mais l’affaire fut découverte et les coupables arrêtés (v. note [9], lettre 357).

François de Guizot (Histoire de la République d’Angleterre et de Cromwell, 1854, volume 2, pages 406-413) a transcrit, sur ce sujet, une lettre de M. de Bordeaux à M. de Brienne (de Londres, le 25 juin 1654) :

« Il sera sans doute, Monsieur, venu à votre connaissance que depuis deux mois un nommé Naudin, médecin français, avait été trouver M. de Baas et s’était offert de gagner quelques officiers de l’armée, même quelque place, et fomenter une division dans cet État si la France voulait appuyer ce dessein, présupposant que nous ne devions pas rejeter des propositions si avantageuses puisque ce régime était entièrement porté à préférer l’amitié de l’Espagne à celle de la France. Quoique cette ouverture fût faite dans un temps auquel toutes nos instances pour l’accommodement ne produisaient aucun effet, néanmoins ledit sieur de Baas ne se voulut point engager sur ce qu’il ne croyait pas que la cour eût intention d’entrer dans de semblables entreprises tant qu’elle verrait jour à l’accommodement. Ledit Naudin ne laissa pas de temps en temps de le revenir voir, croyant sans doute que Sa Majesté lui enverrait de nouveaux ordres. Ce commerce a continué sans ma participation jusqu’au jour que ledit Naudin a été fait prisonnier. Il ne fut pas sitôt interrogé que de plusieurs endroits l’on m’avertit que nous étions soupçonnés d’avoir part à la conjuration. Même, un de nos commissaires me le fit savoir et désigna ledit sieur de Baas en me déchargeant de ce soupçon, < ce > que je considérai comme un prétexte dont l’on se voulait servir pour retarder notre négociation. Je ne laissai pas néanmoins de faire toutes diligences pour effacer cette défiance, principalement après avoir appris dudit sieur de Baas tout ce qui s’était passé et le peu de fondement qu’elle avait. Elles n’empêchèrent pas que M. le Protecteur ne le mandât, il y a quinze jours, pour l’interroger, dont quelques-uns de son Conseil le détournèrent ; et quoique depuis, ce soupçon parût être dissipé, néanmoins, soit que, comme l’on m’assure, il ait été renouvelé par des lettres de France, ou que l’on fasse présentement moins difficulté d’éclater, mondit sieur le Protecteur le renvoya chercher lundi après dîner et, en présence de sept de son Conseil, lui fit des reproches de ce qu’il avait trempé dans une conjuration contre sa personne et contre cet État, lui lut la déposition de Naudin et le pressa d’y répondre. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 9 juin 1654, note 13.

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(Consulté le 29/03/2024)

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