Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 7 manuscrit, note 14.
Note [14]

« Sur Claudien, voyez la Theologia naturalis de Raynaud, page 910 ; {a} voyez les témoignages de divers auteurs dans le Claudianus de Barthius, et Barthius lui-même dans ses Adversaria. » {b}


  1. V. note [2], lettre 648, pour la « Théologie naturelle » (Lyon, 1622) du R.P. Théophile Raynaud (v. note [8], lettre 71).

    La page 910 appartient au chapitre intitulé Hostes providentiæ [Les ennemis de la providence], article iv, Obstruitur os loquentium iniqua [Est fermée la bouche de ceux qui profèrent des insanités], question ii, distinction viii. Raynaud y condamne les écrivains athées, tout particulièrement Épicure, Lucrèce et Claudien, mais pour ce dernier, à la page suivante (911, fin du § 150) :

    Et in eandem classem refertur Claudianus a Pico l. de provid. parte 2. c. 17 propter illa eius verba :

    Sæpe mihi dubiam traxit sententia mentem,
    Curarent superi terras, etc.

    Quod si ille vere ex animi sententia scripsit, nec tantum a exprimendum Euripidis dictum, cessat dubitatio quænam fuerit eius religio. Constatque eum non modo inter Paganos quibus eum accensuit Aug. 5. Civit. c. 16 et quidem pervicassimos ut addit Oros. 7. histor. c. 65. (male repugnantibus nonnullis qui eum Christianum esse crediderunt, propter quædam de Christo carmina Claudiano Mamerto Viennensi Presbytero tribuenda ;) sed inter providentiæ hostes, et de Atheismo suspectos esse numerandum.

    [Et Picus range Claudien dans la même catégorie, au chapitre 17, 2e partie du livre de la Providence, {i} en raison des paroles qu’il a proférées :

    Sæpe mihi dubiam traxit sententia mentem,
    Curarent superi terras, etc.
     {ii}

    S’il a écrit cela en toute sincérité, et pas seulement pour reprendre le propos d’Euripide, {iii} il ne subsiste aucun doute sur sa religion : il est clair qu’il faut le compter non seulement parmi les païens, comme a fait Augustin, au 5e livre, chapitre 16 de la Cité de Dieu, et même des plus opiniâtes, comme a ajouté Orosius au 7e de ses Histoires, chapitre 65 {iv} (ce à qu’ont mal contredit les auteurs qui l’ont cru chrétien, en se référant à ses poèmes sur le Christ, qui doivent être attribués à Claudianus Mamertus, prêtre viennois), {v} mais aussi parmi les ennemis de la providence et les gens suspects d’athéisme].

    1. Jean Pic de la Mirandole (v. note [53] du Naudæana 2), De Providentia Dei contra Philosophastros [Sur la Providence de Dieu, contre les philosophâtres] (loc. cit. pages F iii ro de l’édition de Strasbourg, Ioannes Grüninger, 1509), chapitre intitulé :

      Duas colligi male philosophantium opiniones : non minus inter sese quam cum providentia pugnantes : alteram causarum omnium ordinis necessarii, Alteram ipsarum causarum concursus temerarii.

      [J’ai recueilli deux opinions des mauvais philosophes : ils ne combattent pas moins contre eux-mêmes que contre la providence, à la fois sur toutes les causes de son ordonnancement nécessaire, et sur les convergences accidentelles des dites causes].

      Outre Claudien, Pic s’attaque à Athénagoras (philosophe chrétien du iie s.), qui a imité ses deux vers.

    2. Claudien, Invectives contre Rufin, trois premiers vers du livre i, dont Raynaud a éludé la suite, an nullus inesset Rector, et incerto fluerent mortalia casu, pour aboutir à cette profession sceptique :

      « Jai souvent eu l’esprit partagé entre deux opinions : si les dieux veillent sur les terres, ou si les mortels n’ont pas de guide et sont le jouet du hasard. »

    3. Euripide (v. note [16], lettre 0290), L’Athénien :

      « Jamais homme qui croit que les dieux existent conformément aux lois n’a de plein gré commis un acte impie ou proféré une parole criminelle ; il n’a pu le faire que souffrant de l’une des trois choses suivantes : soit, comme je l’ai dit, l’idée qu’ils n’existent pas ; soit, en second lieu, qu’ils existent, mais n’ont aucun souci des humains ; soit enfin qu’ils sont faciles à fléchir et se laissent retourner par des prières et des sacrifices. »

      Cité par Maria Michela Sassi, L’art subtil d’Euripide de critiquer les dieux sur la scène (Philosophie antique, 18, 2018, pages 169‑191).

    4. Ces deux références à saint Augustin et à Paulus Orosius sont détaillées dans la note [13] supra.

    5. Claudien Mamert, théologien chrétien du ve s., natif de Vienne en Dauphiné, dont le nom identique prête à une douteuse confusion avec le poète Claudien.
  2. V. note [45] du Grotiana 2 pour le Claudien (Hanau, 1612) de Caspar von Barth (Barthius, v. note [6], lettre 610). Dans les pièces liminaires les De Claudiano Testimonia veterum auctorum, et nonnullorum ex recentibus [Témoignages des auteurs anciens et de quelques modernes sur Claudius Claudianus] couvrent huit pages. On y lit, parmi quantité d’autres, ceux d’Augustin d’Hippone et d’Orose, commentés dans la note [13] supra.

    J’y ajoute ce bref avis de Jules-César Scaliger, qui n’était pas un critique indulgent ; il est tiré du livre vi (bas de la 2e colonne, page 321) de ses Poetices [Poétiques] (v. notes [5], lettre 407) :

    Maximus Poeta Claudianus, solo argumento igniobliore oppressus, addit de ingenio, quantum deest materiæ. Felix in eo calor, cultus non invisus, temperamentum iudicium, dictio candida, numeri non adfectati, acute dicta multa sine ambitione.

    [Quant au génie, l’immense poète Claudien, qu’on a accablé sur le seul argument de sa basse extraction, a comblé tout ce qui lui manquait en la matière. Chez lui se trouvent une heureuse chaleur, une élégance qui n’est pas odieuse, une modération des jugements, un discours brillant, une scansion sans afféterie, quantité de choses énoncées avec acuité et sans faste].

    L’index des 60 livres d’Adversariorum commnetariorum [Commentaires critiques] de Barth (Francfort, 1624) renvoie à 14 pages éparpillées dans l’ouvrage. Mon attention s’est portée sur celle qui est intitulée Claudianus utrum Christianus [Claudien a-t-il été chrétien ?] : le chapitre vii du livre i (colonnes 13‑16) est entièrement consacré à cette question ; y est défendue l’idée que seule une interprétation tendancieuse des vers de Claudien autorise à nier son paganisme, mais sans tenir compte du fait qu’il écrivait essentiellement pour flatter des empereurs qui, eux, étaient vraiment chrétiens.


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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 7 manuscrit, note 14.

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(Consulté le 18/04/2024)

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