À Charles Spon, le 5 décembre 1656, note 17.
Note [17]

« un praticien très expérimenté. »

La dynastie des Colot, bien que n’étant issue ni des médecins de la Faculté ni des chirurgiens de Saint-Côme, est indissolublement liée à la grande histoire de la lithotomie (extraction chirurgicale des calculs de la vessie, v. note [11], lettre 33) en France.

  • Le premier à y briller fut Germain Colot, au xve s., sous le règne de Louis xi (1461-1483, v. note [19], lettre 312) : avant lui, ceux qui souffraient de la pierre se mettaient entre les mains d’aventuriers ou faisaient venir à grands frais des lithotomistes italiens, les seuls alors capables d’opérer avec dextérité. Colot examina soigneusement leur manière de faire puis s’exécuta pour la première fois avec plein succès sur la personne d’un archer criminel de Bagnolet, dont le roi avait accepté de commuer la peine de mort en peine d’opération ; l’archer échappa au gibet et l’opération (sans doute un haut appareil) qui le délivra de ses maux fut la seule punition de son crime.

  • Au xvie s. Laurent Colot, probable descendant de Germain, s’acquit une immense réputation dans la taille de la pierre au grand appareil qu’il avait apprise des Italiens. Vers 1550, Henri ii attacha Laurent Colot à sa cour en qualité de chirurgien ordinaire, avec la charge d’« opérateur de sa Maison pour la taille ». Son petit-fils, Philippe i Colot continua cette charge sous Henri iv ; seul alors capable d’opérer au grand appareil, il transmit son savoir à deux élèves.

  • Le premier fut Restitut Girault, qu’il maria à sa fille aînée et à qui il demanda d’initier son fils Philippe ii Colot (vers 1593-Luçon 1656), dont Guy Patin annonçait ici la mort (et qui était donc le beau-frère et non pas le cousin de Girault) ; ce qu’accomplit scrupuleusement Girault en formant une société de lithotomistes avec Philippe ii Colot et avec son propre fils, Jacques Girault.

  • L’autre élève de Philippe i Colot fut Séverin Pineau, chirurgien ordinaire du roi, auquel il fit épouser Geneviève Colot, sa cousine. Quand mourut Philippe i, âgé seulement de 42 ans, Henri iv chargea Pineau, qui n’avait pas d’enfant, de former dix jeunes chirurgiens au grand appareil afin d’en faire bénéficier tout le royaume. Ce projet n’aboutit pas et le secret de l’opération resta celui de Philippe ii et des Girault, père et fils.

  • Ceux-là formèrent François Colot, le fils de Philippe ii, et décidèrent généreusement que leur société irait tailler gratuitement les pauvres des hôpitaux, à la Charité et à l’Hôtel-Dieu ; et « ce fut, écrit François Colot, dans ces deux maisons où les chirurgiens, qui y gagnaient la maîtrise, s’instruisirent en nous surprenant ; ils firent secrètement quelques ouvertures aux planchers entre les deux solives directement au-dessus de la chaise où on plaçait les malades pour y être taillés » ; de sorte que la taille au haut appareil cessa définitivement d’être un secret et que le vœu de Henri iv put s’accomplir avec quelque cinquante années de retard.

  • Philippe ii Colot fut le dernier titulaire de la charge d’opérateur royal de la taille ; « il avait pourtant de son vivant obtenu pour moi la survivance de cette charge sans qu’il m’en dût rien coûter, non plus qu’à mes pères ; mais M. Vallot, qui pour lors était premier médecin de Sa Majesté [Louis xiv], soit par négligence, ou par quelque raison que je ne veux pas pénétrer, me fit perdre cette charge ; il apporta tant de délai, soit pour me faire prêter le serment accoutumé, soit pour signer mes lettres, que mon père étant décédé, il ne me parla plus de la charge que pour me la vendre ; je ne voulus pas l’acheter, croyant que je ternirais mon nom si je mettais à prix d’argent une charge qui n’avait été créée que pour récompenser mes ancêtres. Je préférai donc le parti de travailler à me rendre digne de succéder à la réputation de mes pères sans envier un avantage qui devenait le prix de l’ambition ou de l’intérêt. »

  • François fut le seul de tous les Colot à rédiger un ouvrage (publié peu après sa mort) sur le haut appareil qui fit la gloire et la fortune de sa famille :

    Traité de l’Opération de la Taille, avec des Observations sur la Formation de la Pierre, et les Suppressions d’Urine. Ouvrage posthume de M. Fr. Colot. Auquel on a adjoint un Discours sur la Méthode de Franco, {a} et sur celle de Monsieur Rau. {b}


    1. Le nom de Pierre Franco (v. note [61], lettre 183) précède celui de Johannes Jacobus (1668-1719), médecin allemand qui a inventé une technique salutaire de cystotomie dont il a à tout jamais gardé le secret.

    2. Paris, Jacques Vincent, 1727, in‑12 de 322 pages, précédées d’une préface de 96 pages. La bographie établi par Éloy m’a fourni les passages entre guillemets de la présente note.

    Dans ses lettres, Guy Patin a plusieurs fois parlé de François Colot avec grande estime en disant être fort son ami.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 5 décembre 1656, note 17.

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(Consulté le 20/04/2024)

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