À Charles Spon, le 17 octobre 1667, note 17.
Note [17]

Considérations politiques (v. supra note [5]), pages 153‑155 :

« La France donc ayant été réunie de la sorte par Clovis et, un peu après, beaucoup augmentée par Charlemagne, elle se conserva longtemps en un état assez florissant jusqu’à ce que les Anglais, sortant de leur nid, ils y apportèrent la guerre, et la continuèrent si obstinément qu’en étant presque devenus maîtres, il fut nécessaire sous Charles vii d’avoir recours à quelque coup d’État pour les en chasser. Ce fut donc à celui de Jeanne la Pucelle, lequel est avoué pour tel par Juste Lipse en ses Politiques et par quelques autres historiens étrangers, mais particulièrement par deux des nôtres, savoir Du Bellay Langey en son Art militaire et par Du Haillan en son Histoire, pour ne citer ici beaucoup d’autres écrivains de moindre considération. {a} Or ce coup d’État ayant si heureusement réussi que chacun sait et la Pucelle n’ayant été brûlée qu’en effigie, nos affaires commencèrent un peu après à s’empirer, tant par les guerres précédentes que par celles qui vinrent ensuite, et la France devint comme ces corps cachectiques et malsains qui ne respirent que par industrie, et ne se soutiennent que par la vertu des remèdes : car elle ne s’est depuis ce temps-là maintenue que par les stratagèmes pratiqués par Louis xi, François ier, Charles ix et par ceux qui leur ont succédé. »


  1. Vinfra notes [18] et [19] pour les sources citées par Naudé.

Selon les témoins oculaires, Jeanne d’Arc fut pourtant bel et bien brûlée à Rouen le 30 mai 1431 (Colette Beaune, page 163) :

« Jeanne se retrouva devant la troisième estrade où le bûcher avait été construit beaucoup plus haut que d’habitude pour qu’elle fût bien en vue. Trop haut, dit plus tard le bourreau, qui avait pourtant réussi à la lier au poteau. Il n’avait pas pu l’étrangler, comme on faisait d’habitude, pour lui épargner la souffrance. Ou n’avait-il pas osé, de peur d’être lynché ? Jeanne sentit le feu et cria plusieurs fois Jésus ! dans les flammes. Puis elle laissa tomber sa tête, tuée à la fois par la fumée et par la chaleur. Le bourreau écarta les fagots pour que chacun pût voir le corps déshabillé par le feu. C’était bien cette femme, elle était bien morte. Il rajouta de la paille et ralluma le feu qui brûla durant plusieurs heures. Le corps se consuma, les membres racornis se replièrent contre la poitrine. Puis le crâne et la cavité abdominale explosèrent sous la pression de la vapeur accumulée. Esquilles et morceaux d’os furent projetés sur les spectateurs en contrebas, tandis qu’une affreuse odeur de chair brûlée se répandait sur la place. Quand le bûcher s’éteignit, il restait encore une partie des entrailles et le cœur de Jeanne intacts, les organes humides brûlant moins bien. {a} Le bourreau dut ajouter de l’huile et de la poix, et allumer le feu une troisième fois. »


  1. Allégation improbable, voire ridicule, qui n’en a pas moins laissé des traces dans les chroniques : v. note [76] du Faux Patiniana II‑7.

Les « mythographes survivalistes » s’acharnent encore à prétendre qu’une autre condamnée fut mise à la place de Jeanne sur le bûcher. V. note [5], lettre 980, pour l’opinion catégorique d’Étienne Pasquier contre ces inventions.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 17 octobre 1667, note 17.

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(Consulté le 24/04/2024)

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