Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-4, note 17.
Note [17]

La substance de cet article est empruntée à la :

Suite de l’Espion dans les cours des princes chrétiens, ou Lettres et mémoires d’un envoyé secret de la Porte dans les cours d’Europe, où l’on voit les découvertes qu’il a faites dans toutes les cours où il s’est trouvé, avec une Dissertation curieuse de leurs forces, politique et religion. Par ***. {a} Tome quatrième {b}

Il résume un passage de la lettre xvi, à Cara Halli, médecin du Grand Seigneur (1655), Histoire de Helal, médecin arabe. D’Avicenne, et de Thabet Eben Abrahim (pages 70‑71) :

« J’ai lu dans un certain manuscrit, écrit par Ibrahim, fils d’Helal, célèbre médecin à Radgat, {c} ce mémoire de son père. “ Un jour, dit-il, mon père avait donné une médecine à l’empereur Tuzun, {d} pour laquelle on lui fit présent d’une veste royale et de cinq mille piastres ; et par ordre de l’empereur, il fut porté dans les rues avec magnificence. Je remarquai qu’il fut pensif au milieu de tous ces honneurs et que son esprit ne fut pas en bonne assiette, dans un temps où je croyais qu’il avait tous les sujets du monde d’être joyeux. Cela m’obligea de lui dire : ‘ D’où vient, mon père, que vous êtes triste dans un temps où tout le monde vous croit joyeux ? ’ Il répondit : ‘ Mon fils, celui qui m’a fait ces honneurs est un fou, qui fait les choses sans raison et à contretemps. Ainsi je ne puis avoir de joie des faveurs qu’il m’a faites mal à propos, sachant que j’en suis redevable à mon ignorance, et nullement à son jugement. Je lui ai donné une potion cathartique {e} qui a fait en lui un effet si violent qu’elle lui a écorché les boyaux et fait sortir le sang ; de sorte que j’ai été contraint de prendre une autre route pour guérir ce mal et pour arrêter la violence de ce flux de sang. Cependant, comme il est ignorant, il a cru qu’une si grande évacuation de sang l’avait guéri, et c’est pour cela qu’il m’a fait faire tous ces honneurs. Mais ce qui m’afflige est que je crains que la même ignorance ne lui fasse faire à quelque heure une faute toute contraire, et qu’il ne vienne à s’imaginer sans fondement que je lui ai fait un outrage, et que dans cette ridicule prévention, il ne me fasse mourir. ’ ” »


  1. Giovanni Paolo (Jean-Paul) Marana (1642-1693), noble aventurier génois mêlé à de multiples intrigues politiques européennes, est l’auteur de L’Espion du Grand Seigneur…, volumineux roman épistolaire, dont la première édition en français a paru en 1686 (Paris, Claude Barbin, 3 volumes in‑12o), où son auteur s’en déclarait seulement traducteur de l’arabe en italien. Elle a été suivie de plusieurs rééditions avec variantes du titre et prolongations du récit. Ce roman connut un beau succès et inspira les Lettres persanes de Montesquieu (1721). Guy Patin n’a pas pu connaître le récit de Marana.

  2. Cologne, Erasmus Kenkus, 1697, in‑12 de 349 pages.

  3. Radgat est une variante orthographique de Bagdad. Cette anecdote est tout ce que j’ai trouvé à lire sur Helal, médecin de cette ville qui servait le califat au xe s.

  4. Abul Wafa Tuzun (déformé en Tusau par L’Esprit de Guy Patin) est un militaire turc de la fin du xe s. qui devint le général en chef et « l’émir des émirs » du califat abbasside de Bagdad.

  5. V. note [13], lettre 386.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-4, note 17.

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(Consulté le 28/03/2024)

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