Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Patiniana I‑1 (1701), note 18.
Note [18]

« Le cardinal d’Ailly et Cardan, dans son horoscope du Christ, ont écrit la même chose. D’autres ont dit qu’il avait la mine et le regard sévères et moroses ; il ne pouvait donc être beau. »

V. supra note [17] pour l’horoscope du Christ imaginé par Cardan. François i de La Mothe Le Vayer (v. note [14], lettre 172) a développé tout cela dans deux passages de ses œuvres.

  1. Petits traités en forme de Lettres écrites à diverses personnes studieuses (Paris, 1648, v. note [16], lettre 172), lettre xv, De la Beauté (pages 176‑177) :

    « Aussi Cardan, se fondant sur de semblables passages, a bien osé rendre des raisons astronomiques d’une vieillesse si avancée et d’un visage si austère, si desséché et si plein de taches qu’on le prend pour un lépreux dans le même lieu d’Isaïe que nous venons de citer : putavimus eum quasi Leprosum. {a} Car, encore que cela reçoive une explication figurée, j’aime mieux appuyer les présuppositions de Cardan d’une véritable prophétie que d’un faux texte de Josèphe, qui n’a jamais nommé, comme il l’assure Iesum lentiginosum. Au dire de Cardan, Saturne et Vénus, dans l’ascendant de cette précieuse Nativité, causèrent toutes ces disgrâces ; comme il {b} se trouve, dans d’autres parties de son thème, ce qui donnait à la géniture (pour user des termes de l’art) une santé si ferme et une beauté de corps si considérable. En cela, ce judiciaire {c} ne semble pas être d’accord avec Tertullien, {d} ni avec lui-même, qui n’a fait que suivre le cardinal Pierre de Alliaco, le Calabrais Tiberius Russilianus, {e} et quelques autres encore plus anciens dans une si hardie entreprise, où il fait voir, écrit au Ciel, tout ce qui touche la vie de Jésus-Christ, hormis, dit-il, sa naissance d’une Vierge. »


    1. « nous le regardions comme un lépreux » (Isaïe, v. supra note [17]).

    2. « bien qu’il » : La Mothe Le Vayer voulait montrer les inextricables contradictions auxquelles aboutissent tous les horoscopes.

    3. Astrologue.

    4. V. supra note [16].

    5. Pierre d’Ailly (Petrus de Alliaco, Compiègne 1351-Avignon 1420), cardinal nommé en 1411 par l’antipape jean xxiii, théologien, philosophe et astrologue, a écrit un très grand nombre d’ouvrages.

      Tiberius Russilianius est un obscur astrologue italien du xvie s., autrement nommé Tiberio Russiliano Sesto Calabrese.


  2. De l’Instruction de Monseigneur le Dauphin [le futur Louis xiv], à Monseigneur l’Éminentissime cardinal duc de Richelieu (Paris, Sébastien Cramoisy, 1640, in‑4o), là où il est question des horoscopes des astrologues (pages 295‑296) :

    « Si les Gémeaux, disent-ils, ascendants avec Mercure et Saturne dans le signe du Verseau, remplissent la neuvième maison, il est impossible qu’il ne naisse un prophète. Et Mars bien placé dans la même neuvième maison du Ciel, donne le pouvoir de chasser les démons du corps des possédés. C’est pourquoi ils ont bien osé faire l’horoscope de notre Seigneur, où Jérôme Colombe trouve que toutes ses vertus sont visibles ; {a} Cardan, que son genre de mort y est tout écrit, dans une mauvaise position de Mars ; et le rabbin Bechay, qui ne s’accorde ici nullement avec Cardan, que tout est plein de merveilles dans cette admirable géniture ; tant ce que nous avons déjà observé est véritable qu’ils font dire à leurs aphorismes ce que bon leur semble. Le juif Abraham se fondait aussi sur cette belle philosophie quand il prédisait la naissance du Messie en mil quatre cent soixante et quatre, assurant que puisque cette année aurait la même face du Ciel qui se trouva lorsque Moïse tira d’Égypte le peuple d’Israël, on verrait sans doute le Messie qui lui doit succéder, et qui n’était pas encore venu, selon sa créance. Albumasar {b} avait déjà assuré que la religion chrétienne finirait quatre ans devant, à savoir en mil quatre cent soixante. »


    1. Dans les Œuvres de La Mothe Le Vayer (Paris, 1662, v. note [26], lettre 557), tome premier page 127, « ils ont bien osé » est remplacé par : « Tiberius Russilianus et le cardinal d’Ailly, dit Petrus de Alliaco, après Albert le Grand, ont bien osé ».

    2. Je n’ai pas identifié Jérôme (Hiérosme) Colombe.

    3. Albumasar est le nom occidental d’Abou Mashar al-Balkhî, philosophe et astronome persan du ixe s. C’est « l’Arabe » mentionné à la fin de cet article du Patiniana ; Bayle le cite (avec d’autres comme Albert le Grand et Roger Bacon au xiiie s., ou Gabriel Naudé au xviie s.) dans la note Q de son article sur Cardan, qui commente ce propos : « On l’a blâmé justement de l’audace qu’il avait eue de faire l’horoscope de Jésus-Christ. »

Irénée, deuxième évêque de Lyon au iie s., saint, Père et Docteur (en 2022) de l’Église, est auteur d’un traité Adversus Hæreses [Contre les Hérésies]. Il est réputé avoir écrit que le Christ était laid (sur le témoignage de saint Polycarpe qui le tenait directement de l’apôtre Jean), mais je n’ai pas trouvé la référence exacte de cette citation.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Patiniana I‑1 (1701), note 18.

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(Consulté le 25/04/2024)

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