Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Patiniana I‑1 (1701), note 19.
Note [19]

Cet article du Patiniana figure dans le manuscrit de Vienne (page 9).

En mars 1621, accusé de prévarication, Francis Bacon (v. note [21], lettre 352) avait été lourdement condamné et déchu de toutes ses fonctions. Les Letters of Sr Francis Bacon, Baron of Verulam, Viscount St. Alban, and Lord High Chancellor of England. Wrtitten during the Reign or King James the First… [Lettres de Sir Francis Bacon, baron de Verulam, vicomte de Saint-Alban et grand chancelier d’Angleterre. Écrites pendant le règne du roi Jacques ier (1603-1625, v. note [17], lettre 287)] (Londres, Benjamin Tooke, 1702, in‑4o) contiennent celle qu’il a écrite au roi le 30 juillet 1624, pour implorer sa mansuétude (lettre cxlvi, pages 297‑298) :

Most Gracious and Dread Sovereign,

Before I make my Petition of your Majesty, I make my Prayers to God above, Pectore ab imo, that if I have held anything for dear, as your Majesty’s Service ; nay, your Heart’s ease, and your Honour’s, I may be repulsed with a denial. But if that hath been the Principal with me, that God, who knoweth my heart, would move you Majesty’s Royal heart to take compassion of me and to grant my desire.

I prostrate my self at your Majesty’s Feet ; I, your Ancient Servant, now Sixty four years ild in Age, and three Years five Months old in Misery. Il desire not from your Majesty, Means, nor Place, nor Imployment, but only after so long a time of Expiation, au compleat and total remission of the Sentence of the Upper House, to the end that blot of Ignominy may be removed from me, and from my Memory with Posterity ; that I die not a condemned Man, but may be to your Majesty, as I am to God, Nova Creatura. Your Majesty hath Pardoned the like to Sir John Bennet, between whose case an mine, (not being Partial to my self, but speaking out of the General Opinion) there was as much difference, I will not say as between Black and White, but as between Black and Grey, or Ash-coloured ; Look therefore down, Dear Sovereign, upon me also in pity. I know your Majesty’s Heart is inscrutable for Goodness ; and my Lord of Buckingham was wont to tell me, you were the best Natured Man in the World ; and it’s God’s property, that those he hath loved, he loveth to the end. Let your Majesty’s Grace, in this my desire, stream down upon me, and let it be out of the Fountain and Spring head, and ex mero Motu, that living or dying, the Print of the Goodness of King James may be in my heart, and his Praises in my mouth. This my most humble request granted, may make me live a year or two happily ; and denied, will kill me quickly. But yet the last thing that will die in me, will be the heart and affection of

Your Majesty’s most humble, and true devoted Servant,

Fr. St. Alban.

[Très gracieux et redouté Souverain,

Avant d’exposer ma demande à Votre Majesté, j’adresse à Dieu très-haut, du tréfonds de mon cœur, cette prière : si autre chose m’a été aussi cher que le service de Votre Majesté, sans parler du bien de Son cœur et de Son honneur, alors qu’à sa guise, Elle m’oppose un refus ; mais si telle a été ma principale préoccupation, que Dieu veuille émouvoir le cœur de Votre Royale Majesté, afin qu’Elle me prenne en pitié et satisfasse mon désir.

Je me prosterne aux pieds de Votre Majesté, moi qui fus jadis Son serviteur, et qui ai atteint ma soixante-quatrième année d’âge, et mes troisième année et cinquième mois de misère. Je ne désire pas que Votre Majesté m’accorde de l’argent, une terre ou une charge ; mais seulement, après cette si longue période d’expiation, une complète et totale amnistie de la sentence prononcée par la Haute Chambre, afin que cette tache d’infamie soit lavée de ma personne, et de la mémoire qu’en gardera la postérité ; et que je meure non pas en réprouvé, mais en créature nouvelle, comme je le suis pour Dieu, et peut-être aussi pour Votre Majesté. Elle a ainsi pardonné à Sir John Bennet, dont le cas (sans me fonder sur ma propre partialité, mais sur l’opinion générale) était fort différent du mien, comme sont, dirai-je, non pas le noir et le blanc, mais le noir et le gris, ou le cendré. {a} Que Mon très cher Souverain veuille abaisser sur moi un regard de pitié. Je sais que le cœur de Votre Majesté est d’une bonté sans fond : Milord Buckingham {b} avait coutume de me dire que Vous étiez le mieux disposé des hommes au monde ; et c’est un privilège divin que d’aimer jusqu’à la fin ceux qu’on a un jour aimés. Pour satisfaire mon souhait, puisse la grâce de Votre Majesté ruisseler sur moi, en jaillissant spontanément comme d’une fontaine ou d’une source, de sorte que, jusqu’à ma mort, la bonté du Roi Jacques m’inonde le cœur, et Sa louange m’emplisse la bouche ! Si ma très humble requête est satisfaite, je pourrai vivre heureux pendant encore un an ou deux ; mais si elle est rejetée, j’en périrai promptement. Pourtant, la dernière chose qui mourra en moi sera le cœur affectueux du

très humble et sincèrement dévoué serviteur de Votre Majesté,

Fr. Saint-Alban]. {c}


  1. Note de l’éditeur, traduite de l’anglais :

    « En 1621, le Parlement avait accusé, convaincu et condamné Sir John Bennet, juge de la Prerogative Court, {i} pour avoir exigé des pots-de-vin et commis plusieurs indélicatesses dans l’exercice de sa charge. »

    1. La Prerogative Court exerçait à Londres à peu près les mêmes fonctions judiciaires (cour d’appel) que le Parlement à Paris (dont les fonctions législatives étaient bien mois étendues que celles du Parliament britannique, v. note [11], lettre 95).

  2. George i Villiers, v. note [21], lettre 403.

  3. Depuis sa condamnation en 1621, Bacon avait exercé comme simple avocat au barreau de Londres. Le roi Jacques mourut le 27 mars 1625. En mai suivant, deux mois après que Charles ier lui eut succédé, Bacon fut amnistié ; une charge de juge à la Court of Common-Pleas [Cour des plaids-communs] lui fut attribuée, et il l’occupa jusqu’à sa mort, survenue le 9 avril 1626 (Introduction des Letters, pages xix‑xx).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Patiniana I‑1 (1701), note 19.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=8196&cln=19

(Consulté le 28/03/2024)

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